Livre vert: protection diplomatique et consulaire du citoyen de l'Union dans les pays tiers

2007/2196(INI)

OBJECTIF : proposer un Livre vert sur la protection diplomatique et consulaire des citoyens de l'Union dans les pays tiers.

CONTEXTE : conformément à l'article 20 du traité instituant la Communauté européenne (TCE), si un citoyen de l’Union se trouve dans un pays tiers où son propre État membre ne dispose pas d'une ambassade ou d'un poste consulaire, il peut bénéficier d'une protection de la part des autorités de tout autre État membre représenté sur place, aux mêmes conditions que celles que cet État applique à ses propres nationaux. Toutefois, les États membres ne disposent pas tous d'une représentation permanente et accessible dans chacun des pays tiers. Actuellement, il n'y a que 3 pays où les États membres sont tous représentés: la Chine, la Russ ie et les USA, et sur 167 pays tiers, on compte 107 pays dans lesquels 10 États membres seulement sont représentés. Cette situation s'est manifestée lors du tsunami de 2004, où la majorité des États membres ne disposaient pas d’une représentation dans les différents pays victimes de la catastrophe avec des conséquences catastrophiques pour les victimes et leurs familles.

Pour répondre aux objectifs de l’article 20 du TCE, la Communauté dispose de la décision 95/553/CE qui prévoit une batterie d’interventions possibles des États membres, dans certains cas (ex. : arrestation ou détention d’un citoyen d’un État membre autre que celui de l’ambassade ou du consulat, intervention en cas d’accident ou de maladie grave; intervention en cas d'acte de violence subie par un citoyen ; aide au citoyen en détresse ou rapatriement). Cette décision prévoit également des procédures liées aux avances pécuniaires aux citoyens en difficulté. Cette liste d’interventions n’est toutefois ni exhaustive, ni suffisante. C’est pourquoi, un groupe de travail chargé de la coopération consulaire (le "COCON") a été créé par le Conseil pour définir des lignes directrices sur la protection des citoyens européens dans les pays tiers allant plus loin que ce qui existe déjà.

Le présent Livre vert entend, dans ce contexte, soumettre des pistes de réflexion afin de définir des possibilités de renforcement du droit à la protection diplomatique et consulaire communautaire, en se fondant sur les apports et les résultats d’un large débat public avec le Parlement européen et le Conseil, ainsi qu'avec toutes les parties intéressées, dont les citoyens européens eux-mêmes.

Les contributions au présent Livre vert sont attendues pour 31/03/2007, par courrier électronique, à l'adresse suivante: JLS-DIPLOCONSUL-PROTECTION@ec.europa.eu et seront diffusées sur le site de la Commission Your Voice in Europe.Ce dialogue se clôturera par l'organisation d'une audition avec la participation de toutes les parties intéressées.

CONTENU : les principales pistes suggérées par la Commission portent sur les points suivants :

1)      améliorer l’information du citoyen ;

2)      étendre la protection du citoyen européen dans un pays tiers ;

3)      établir des structures et prévoir des ressources adéquates ;

4)      demander le consentement des pays tiers concernés.

1. Améliorer l’information des citoyens : la Commission estime que les institutions et les États membres devraient assurer l'information périodique des citoyens et des milieux professionnels impliqués dans le transport des personnes. Les actions suggérées sont les suivantes :

·        diffusion de brochures, y compris dans les milieux professionnels impliqués comme les agences de voyages ;

·        information sur le site "Europa" et sur le site internet des délégations de la Commission dans les pays tiers ;

·        placement d'affiches dans les aéroports, les ports, les gares ou tout autre lieu approprié ;

·        promotion des services d'information aux citoyens comme le service d’appels téléphoniques et courriels 24H/24 d’EUROPE DIRECT (00800 6 7 8 9 10 11), permettant aux citoyens de poser des questions en matière de protection consulaire et diplomatique dans les pays tiers.

L’information doit également porter sur la représentation des États membres dans les pays tiers eux-mêmes : en l'absence d'une ambassade et d'un consulat de son pays, le citoyen doit disposer d'une information sur les ambassades et les consulats des autres États membres dans le pays tiers de destination. La Commission estime qu'elle pourrait être chargée d’une telle action d'information avec l'aide des États membres. Á cette fin, ceux-ci pourraient être invités à fournir à la Commission une liste à jour de toutes leurs ambassades et consulats dans les pays tiers, avec les coordonnées nécessaires.

D’autres actions sont envisagées comme :

  • l'utilisation du passeport comme mode d'information en prévoyant que tous les passeports contiennent la reproduction de l'article 20 CE ;
  • la diffusion d’avis aux voyageurs : dans le but d'éviter aux citoyens de partir vers un pays tiers présentant des risques pour leur sécurité et leur santé, les États membres devraient émettre des avis coordonnés à l'intention des citoyens de l’Union ;
  • la publication de toute mesure de mise en œuvre de l'article 20 CE (ex. : en publiant au JO, les lignes directrices du COCON).

2. Étendre la protection des citoyens : la Commission estime que les divergences entre divers aspects de la protection mériteraient d'être étudiées à long terme en vue d'examiner les possibilités d'offrir aux citoyens une protection similaire indépendamment de leur nationalité. Dans l'immédiat, les pistes suivantes devraient être explorées:

  1. protection des citoyens européens travaillant et résidant dans les pays tiers : l’idée serait d’inclure dans tous les accords bilatéraux des États membres avec les pays tiers, des dispositions protégeant les citoyens de l'Union travaillant et résidant dans ces pays, afin de donner pleine application à la décision 88/384/CEE ;
  2. protection des membres de la famille du citoyen de l'Union n'ayant pas la nationalité d'un État membre : le besoin de protection conjointe des citoyens et des membres de leur famille n'ayant pas la citoyenneté de l'UE s'est manifesté dans le conflit du Liban en juillet 2006, lors des procédures d'évacuation et de rapatriement par Chypre de membres de la famille des citoyens dont l'État membre n'était pas représenté. Il convient de mettre un terme aux difficultés considérables que rencontrent les citoyens et leur famille en pareille situation et d’étendre la protection consulaire aux membres de la famille du citoyen de l'Union, ayant la nationalité d'un pays tiers, par les moyens appropriés (modification de la décision 95/553/CE ou proposition de la Commission sur la base de l'article 22 CE) ;
  3. identification et le rapatriement des dépouilles : les conséquences du tsunami ont montré l'ampleur du problème lié à l'identification et au rapatriement des dépouilles. Les familles des victimes ont dû faire face à la complexité des procédures et aux coûts du rapatriement. C’est pourquoi, la Commission suggère qu’à court terme on prévoit : i) la modification de la décision 95/553/CE afin d'y inclure l'identification et le rapatriement des dépouilles ; ii) que les États membres qui ne l’ont pas encore faits, adhèrent à Convention du Conseil de l'Europe du 26 octobre 1973 sur le transfert des corps des personnes décédées. Á plus long terme, la Commission propose : i) la simplification des procédures de rapatriement des dépouilles ; ii) la création d'un système européen de compensation pour rembourser les pays qui prennent en charge les frais de rapatriement ; iii) l’encouragement à la recherche et au développement d'outils d'analyse de l'ADN ainsi qu'à la spécialisation dans l’identification des victimes de laboratoires européens ;
  4. simplification des procédures d'avances pécuniaires : la décision 95/553/CE montre la complexité de la procédure de remboursement des frais et des avances payés au citoyen en difficulté. Le demandeur doit obtenir une autorisation par son propre État de nationalité et signer un document de promesse de remboursement; l'État de nationalité rembourse tous les frais à la demande de l'État qui a prêté assistance; le citoyen rembourse son propre État. Les ressortissants de certains États membres peuvent être invités à laisser leur passeport à titre de garantie à l'État qui prête assistance. Cette situation n’est pas satisfaisante, c’est pourquoi, la Commission préconise que les dossiers soient traités de manière centralisée au sein des « bureaux communs » dans le pays tiers, en simplifiant les passages administratifs décrits dans la décision 95/553/CE.

3. Structures et ressources : plusieurs pistes sont proposées dont :

  • la création de bureaux communs : la demande de protection ne devrait pas poser de problème spécifique lorsqu'il s'agit de porter remède à des situations individuelles, comme la perte de documents. Cependant, la situation peut être différente dans les cas collectifs provoqués par des cataclysmes, pandémies, actes de terrorisme ou conflits militaires. Une réponse à ce genre de situations pourrait être la création de bureaux communs, proposition soutenue par le Parlement européen. En fonction des pays et de la présence des représentations des États membres, ces bureaux pourraient être logés dans les différentes représentations ou ambassades nationales ou dans une seule, ou partageraient la délégation de la Commission selon des modalités à définir. Dans tous les cas, les agents consulaires exerceraient, sous l’autorité de leur État, leurs fonctions dans des bureaux communs. Dans un 1er temps, 4 zones seraient désignées à titre expérimental : les Caraïbes, les Balkans, l’Océan Indien et l’Afrique de l’Ouest. Pour l'exercice des fonctions, les États membres pourraient établir et publier à l'attention des citoyens, des règles établissant un système de suppléance et de partage de la charge et pour faciliter les tâches des bureaux communs, des campagnes d'information pourraient être organisées invitant les citoyens à s'enregistrer sur une base volontaire, facilitant ainsi les actions éventuelles de secours. En ce qui concerne enfin, la question des visas, la Commission a déjà proposé des mesures pour renforcer la coopération consulaire locale (proposition pour l'établissement de centres communs de réception des demandes de visa, afin de faciliter l'introduction de la biométrie et d'étendre le champ d'application de la représentation ; proposition de règlement établissant un Code des visas révisant et regroupant l'ensemble des dispositions relatives aux procédures de délivrance des visas). Á long terme, il conviendrait d'examiner la convergence des tâches des bureaux communs sous l'angle de la protection consulaire (ex. : exercice par les bureaux communs des fonctions consulaires, telles que l'émission des visas ou la légalisation des documents) ;
  • formation des fonctionnaires des États membres : pour assurer une formation performante, notamment du personnel des "bureaux communs", la Commission pourrait organiser des activités de formation commune pour les fonctionnaires des États membres et des institutions communautaires. Ces cours porteraient sur le contrôles aux frontières externes de l'UE, le rapatriement des dépouilles ou sur le droit à la protection diplomatique et consulaire.

4. Consentement des autorités des pays tiers : un principe général de droit international est que la protection d'un citoyen d'un État par un autre État est conditionnée par le consentement du pays tiers. L'article 20 CE prévoit l'obligation pour les États membres d'engager les négociations internationales requises à cet effet. Chaque État membre est donc censé entamer des négociations bilatérales avec les pays tiers. Mais, il serait aussi possible que, dans les accords mixtes conclus par la Communauté et ses États membres, une clause-standard de consentement à la protection diplomatique et consulaire communautaire soit négociée. En vertu d'une telle clause, les pays tiers accepteraient que les citoyens de l'Union puissent être assistés par tout État membre représenté sur place. Á plus long terme, il pourrait être envisagé d’examiner la possibilité d'assurer le consentement des États tiers pour que l'Union puisse exercer un devoir de protection, via les délégations de la Commission, dans des cas liés aux compétences communautaires.