Faire progresser l'agriculture africaine - Proposition pour le développement agricole et la sécurité alimentaire en Afrique

2007/2231(INI)

OBJECTIF : proposer un cadre d’action pour renforcer la coopération entre l’Union européenne et l’Union Africaine (UA) en matière de développement agricole en Afrique.

CONTENU : le présent document trace le cadre et les principes d’un renforcement de la coopération entre l’UE et l’UA en matière de développement agricole en Afrique, en mettant l’accent sur les niveaux régional et continental. La coopération sera fondée sur les orientations stratégiques définies dans le «Consensus européen» et la stratégie de l’UE pour l’Afrique qui insistent sur la nécessité de renforcer l’agriculture et le développement rural pour permettre à l’Afrique d’assurer sa croissance et de lutter contre la pauvreté. Pour contribuer à la croissance, la Communauté a indiqué qu’elle porterait ses efforts sur l’intensification de la production dans des conditions viables à long terme, la compétitivité sur les marchés régionaux et internationaux et la gestion des risques. La coopération s’alignera strictement sur les priorités de l’Afrique en matière agricole et visera à encourager les progrès en vue d’atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).

Impact du secteur agricole sur l’économie africaine : l’agriculture  reste la base économique de la majorité des pauvres en Afrique ; elle représente environ un tiers du PIB de l’Afrique et le gros de l’emploi. L’essentiel de la production agricole provient de petits agriculteurs, parmi lesquels les femmes jouent un rôle de tout premier plan. La production agricole, la distribution et les ventes influent directement sur la sécurité alimentaire et l’état nutritionnel des familles. En outre, la croissance agricole présente un effet multiplicateur élevé. On constate actuellement que l’agriculture redevient un moteur économique important en Afrique (la croissance du secteur agricole est passée de 2,7% en 2002, à 3% en 2003 et jusque 5,3% en 2004). L’évolution favorable des prix d’un certain nombre de produits a contribué à cette tendance, des conditions de production améliorées constituant un facteur de croissance supplémentaire. Des revenus plus importants tirés de l’agriculture ont également pour effet de rendre viable la prestation de services sociaux dans les zones rurales, dont l’utilisation devient abordable. Cependant, pour que la réduction de la pauvreté soit durable, il faudrait que la croissance agricole s’accélère encore, notamment dans les sociétés rurales à faibles revenus. Dans le même temps, l’exploitation intensive des ressources naturelles par les agriculteurs a une incidence décisive (et négative) sur la préservation des écosystèmes et de la biodiversité.

L’agriculture devra donc être soutenue par des politiques publiques pour être viable. En effet, 1) un mauvais fonctionnement du marché risque d’avoir des conséquences négatives pour des groupes socialement et géographiquement marginaux ; 2) il existe des externalités environnementales qui rendent nécessaires une réglementation et une intervention du secteur public pour conserver la durabilité ; 3) l’agriculture fonctionne beaucoup mieux lorsque les fonctions des pouvoirs publics sont assurées de manière plus efficace.

Priorités de l’Afrique en matière agricole : afin de favoriser le développement agricole, l’UA et le NEPAD ont lancé le Programme détaillé pour le développement de l’agriculture en Afrique (PDDAA), tandis que les chefs d’État ont convenu d’augmenter sensiblement la part des budgets nationaux consacrée à l’agriculture et au développement rural. Le PDDAA adopte une perspective continentale, mais repose sur des plans nationaux et régionaux de développement de l’agriculture. Il contient une série de principes et objectifs essentiels visant à : i) orienter les stratégies et les programmes d’investissement des pays; ii) permettre un apprentissage collégial et une évaluation par les pairs à l’échelon régional; iii) faciliter un plus grand alignement et une meilleure harmonisation des activités de développement. Toutefois, le sommet de l’UA de décembre 2006 a appelé à une certaine sélectivité dans la mise en œuvre des engagements du PDDAA, reconnaissant le caractère limité des ressources et des capacités institutionnelles.

Coopération entre l’UE et l’UA en matière de développement agricole : les principaux objectifs de coopération identifiés par l’Union européenne et l’Union africaine sont les suivants :

  • adhérer aux OMD, et plus particulièrement au 1er (réduire l’extrême pauvreté et la faim) et le 7ème (assurer un environnement durable) ;
  • s’aligner sur les priorités africaines, reposant sur les principes et objectifs du PDDAA ;
  • assurer l’harmonisation et l’alignement des donateurs, conformément à la déclaration de Paris ;
  • s’appuyer sur d’autres partenariats et instruments de l’UA et de l’UE, en complétant les initiatives communautaires qui soutiennent directement ou indirectement le développement rural en Afrique et en faisant usage des partenariats existants entre l’Afrique et l’Europe;
  • tirer des enseignements des expériences et bonnes pratiques pertinentes de l’UE, en mettant à profit près de 50 ans de PAC (politique agricole communautaire) ;
  • ne soutenir que les fonctions régionales et continentales qui apportent une valeur ajoutée à des interventions au niveau national ;
  • veiller à la cohérence entre les politiques communautaires de développement et les politiques dans le domaine de l’agriculture, de la pêche, du commerce, de la protection des consommateurs et de l’énergie.

Conformément aux exigences du PDDAA, la coopération portera essentiellement sur le développement des capacités et sur le renforcement institutionnel des organisations régionales et continentales. La coopération favorisera l’adoption par les pouvoirs publics d’un rôle plus stratégique et plus efficace dans l’agriculture, fondé sur les orientations suivantes: fournir un cadre stratégique et réglementaire efficace; créer un environnement favorable; intervenir en cas de mauvais fonctionnement du marché; assurer les services d’intérêt public; mettre en place des filets de sécurité; limiter le recours aux subventions.

Domaines prioritaires de coopération : 7 domaines de coopération seront privilégiés, lesquels définissent un cadre d’assistance à long terme. Du point de vue géographique, l’accent est mis sur l’Afrique subsaharienne où les problèmes agricoles sont les plus préoccupants. Toutefois, la portée continentale est pertinente pour s’aligner sur les initiatives de l’UA et dans la mesure où plusieurs domaines de coopération auront une dimension panafricaine. Les 7 domaines de coopération prioritaires sont les suivants :

1)      agriculture dans les stratégies de développement : le développement agricole devra faire partie intégrante et stratégique du programme de développement aux niveaux national, régional et continental, en reconnaissant que l’agriculture est un secteur essentiel pour la croissance économique et la réduction de la pauvreté ;

2)      gouvernance sectorielle : il s’agira de contribuer au développement des capacités aux niveaux régional et continental, dans le but d’améliorer la gouvernance du secteur agricole à l’échelon national ;

3)      recherche, systèmes de connaissance et diffusion des savoirs : l’objet de ce domaine est d’accroître l’incidence de la recherche agricole et des systèmes de connaissance sur la productivité rurale, la réduction de la pauvreté, la sécurité alimentaire et la gestion durable des ressources naturelles, compte tenu des défis posés par le changement climatique. L’accent sera mis sur les démarches de recherche pluridimensionnelle, les systèmes de production agricole durable et les activités de recherche ayant des conséquences positives pour les populations pauvres en milieu rural ;

4)      facilitation des échanges axée sur l’assurance et l’amélioration de la qualité : il s’agira de renforcer la capacité de l’Afrique à faire fonctionner les marchés pour réduire la pauvreté, en ciblant les marchés régionaux des produits agricoles. Les négociations commerciales en cours (accords de partenariat économique, programme de Doha pour le développement) doivent permettre d’accroître les débouchés commerciaux des pays africains en matière agricole, ce qui nécessite une réponse adaptée de l’offre. La coopération proposée inclut le renforcement de la capacité d’influer sur la définition de normes judicieuses de production et d’échange, de les adopter et de les respecter pour (continuer à) accéder à des marchés rémunérateurs des produits agricoles et garantir aux consommateurs la sécurité des produits ;

5)      gestion des ressources naturelles: sols, pêche, sylviculture : l’objectif est d’appuyer les améliorations apportées aux régimes de gouvernance et de gestion des ressources foncières, halieutiques et forestières qui visent à combiner la viabilité environnementale et la biodiversité avec l’utilisation rentable et la réduction de la pauvreté ;

6)      développement de l’élevage et lutte contre les maladies : l’idée est d’augmenter la viabilité du secteur de l’élevage ainsi que sa contribution à la réduction de la pauvreté et à la croissance, en privilégiant le renforcement des connaissances et des systèmes en matière de lutte contre les maladies animales. La coopération aura pour but de réduire la mortalité animale, d’abaisser le risque de production de l’élevage, d’améliorer la santé publique et la prévention; elle visera également à accroître l’accès aux marchés régionaux et internationaux, à faciliter une utilisation rationnelle des sols et à diminuer les problèmes environnementaux liés à l’élevage ;

7)      gestion des risques : il s’agira de réduire les risques liés au changement climatique, aux catastrophes naturelles et aux chocs des prix, en accordant une attention particulière aux questions d’organisation et aux instruments financiers.

Pour chacun de ces domaines, la communication donne des détails sur le canevas des actions prévues. La coopération combinera une orientation vers la compétitivité, axée sur la productivité et la croissance, en privilégiant la lutte contre la pauvreté et la cohésion sociale. Ces deux aspects impliquent le développement des marchés régionaux des produits agricoles, l’importance de l’intégration régionale et de la facilitation des échanges étant mise en exergue. On favorisera en outre des systèmes de production durable, compte tenu de la nécessité de s’adapter au défi climatique.

Coordination : des initiatives sont prévues pour renforcer la coordination des actions. La coordination de la coopération UE-Afrique en matière de développement agricole comportera 3 dimensions interdépendantes: i) avec les institutions africaines; ii) avec les autres donateurs; iii) à l’intérieur de l’UE. La coordination avec les institutions africaines s’inscrira dans le cadre du PDDAA et sera placée sous l’autorité des organisations continentales et régionales, un rôle central étant réservé à la CUA/au NEPAD. La coordination des donateurs ainsi que l’harmonisation et l’alignement sur le PDDAA sera renforcée par la Plate-forme mondiale des donateurs pour le développement rural (GDPRD), dont font partie la CE et divers États membres. La coordination au sein de l’UE sera accrue par l’institution proposée d’un groupe de travail communautaire sur l’agriculture africaine. Ce groupe de travail améliorera la qualité et la visibilité du financement communautaire du développement agricole en Afrique et renforcera les synergies dans ce domaine.

Suivi et réexamen : les progrès obtenus dans la mise en œuvre du PDDAA et dans la coopération en matière de développement agricole seront soumis à un suivi réalisé principalement par la Plate-forme de partenariat du PDDAA et par le Forum pour le partenariat avec l’Afrique (FPA). La pertinence des orientations politiques et des directions stratégiques de la coopération UE-Afrique en matière de développement agricole sera soumise au même processus de réexamen que le programme global de coopération UE-UA, tel que défini actuellement par la stratégie de l’UE pour l’Afrique.