Vers une stratégie européenne sur les droits de l'enfant

2007/2093(INI)

En adoptant le rapport d’initiative de Mme Roberta ANGELILLI (UEN, IT) sur la mise en place d’une stratégie européenne pour les droits de l'enfant, la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures demande que la défense des droits des enfants soient au cœur de toutes les politiques et actions extérieures de l’Union et réaffirme son rejet contre toute forme de violence à leur égard. Les parlementaires se sont prononcés pour un large éventail de mesures destinées à renforcer et à compléter la stratégie proposée par la Commission. Ils demandent en particulier la création d’une ligne budgétaire spécifique relative aux droits des enfants permettant de financer les travaux de mise en œuvre de la stratégie ou des projets tels qu’un système européen d'alerte rapide pour lutter contre les "enlèvements d'enfants".

Une stratégie fondée sur 4 piliers: la stratégie devrait se fonder sur les 4 principes fondamentaux inscrits dans la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant, laquelle devrait être plus largement  respectée : 1) la protection contre toutes les formes de discrimination, 2) l’intérêt supérieur de l'enfant, 3) le droit à la vie et au développement, 4) le droit d'exprimer une opinion qui soit prise en considération sur toute question intéressant les enfants. Les députés estiment en particulier que la stratégie devrait « reconnaître le rôle important de la famille en tant qu'institution de base de la société pour la survie, la protection et le développement de l'enfant ».

Toutefois, telle que proposée par la Commission, la stratégie s’avère insuffisante pour protéger pleinement les droits des enfants. C’est pourquoi, les députés suggèrent un paquet global de mesures qui peuvent se résumer comme suit :

  • lutter fermement contre la violence faite aux enfants : les députés demandent l’interdiction pure et simple de toute forme de violence à l’égard des enfants ; ils réclament à cet effet un instrument communautaire destiné à interdire la violence contre les mineurs, les abus sexuels, les châtiments humiliants et les pratiques traditionnelles néfastes (telles que les mutilations génitales ou les mariages forcés). Les députés condamnent toutes les formes de violence physiques, psychologiques et sexuelles, la torture, l'exploitation, la prise en otage, la traite ou la vente d'enfants ou de leurs organes, mais aussi les violences domestiques, la pédopornographie, la prostitution enfantine, la pédophilie ou les mariages forcés. Outre le renforcement de l’arsenal législatif, les députés demandent que la stratégie inclue des actions de prévention contre la violence. S’ils se félicitent de l'initiative prise par la Commission pour mettre en service dans toute l'Union un numéro de téléphone pour l'assistance aux enfants, les députés exigent que ce numéro soit gratuit et disponible 24 heures sur 24. Il faut en outre que les États membres informent les enfants de leurs droits par des mesures efficaces d’information ;
  • lutter contre l’exploitation sexuelle des enfants : les députés réaffirment que celle-ci devait être considérée comme un « viol » au regard des sanctions applicables. L’ensemble des institutions et les États membres devraient s'engager plus fermement dans la lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants, la traite des enfants et la pédophilie en prenant toutes les mesures nécessaires pour réaliser l'harmonisation des législations nationales sur la base des principes minimaux communs. Les députés demandent également que l’on érige au rang de « crime », l'achat de rapports sexuels avec un mineur. Á cet égard, ils se réjouissent de l’initiative prise par la Commission de prévoir l'exclusion du système de paiement en ligne (ou le blocage par d'autres moyens), des sites qui vendent du matériel pédopornographique par voie électronique;
  • « enfants en danger » : les parlementaires proposent que l'UE définisse comme '"enfant en danger" tout enfant victime d'une situation sociale mettant en danger son intégrité mentale ou physique, et/ou l’exposant à un risque de délinquance. Ils demandent de multiples initiatives (campagnes d'information, échange de meilleures pratiques, etc.) pour éviter la spirale les mettant "en danger", en y incluant des mesures de prévention de la délinquance juvénile, comme notamment des mesures de lutte contre la vente d’alcool et de drogue. Ils demandent en outre que tous les États membres considèrent qu’un enfant témoin de violence domestique soient considérés comme victime d'un crime;
  • lutter contre les contenus « nocifs » : les députés demandent la création d'une réglementation adéquate et proportionnée, en dialogue avec les médias (télévisions, secteur de la publicité, presse, jeux vidéo, secteur de la téléphonie mobile et Internet) en vue d'interdire la transmission d'images et de contenus nocifs (y compris le phénomène du harcèlement électronique) ainsi que la commercialisation de jeux vidéos violents. Ils soulignent à cet égard le phénomène croissant de l'échange d'images pornographiques ou relatives à des abus sexuels faisant intervenir des enfants via les MMS. Ils demandent également le blocage systématique de tous les sites illégaux ayant trait à des sévices sexuels sur les enfants. En ce qui concerne la télévision, les députés suggèrent le renforcement des mécanismes de contrôle sur le contenu des programmes de télévision dans les créneaux horaires où l’audience infantile est la plus élevée ;
  • délinquance juvénile : vers une stratégie globale ? : pour les députés, la délinquance juvénile, en pleine explosion, demande une réponse globale non seulement au niveau national mais aussi au plan communautaire. Ils estiment qu’il est indispensable de mettre sur pied un programme communautaire combinant des mesures axées sur i) la prévention, ii) l'intégration sociale des jeunes délinquants, iii) l'intervention judiciaire et extrajudiciaire. La Commission est également appelée à élaborer un vaste plan de prévention contre la criminalité juvénile, prévoyant des mesures de lutte contre le harcèlement à l’école et le phénomène de gangs de jeunes. En matière judiciaire, les députés demandent que les États membres favorisent autant que possible des peines de substitution à l'incarcération ;
  • lutter contre la pauvreté enfantine et l’exclusion sociale : rappelant qu'à l'intérieur de l'Union, 19% des enfants vivent sous le seuil de pauvreté, les députés appellent à la mise en place d’une véritable stratégie de lutte contre la pauvreté des familles. Les mesures doivent aller de la lutte contre la malnutrition à la prévention des maladies mais porter également sur la lutte contre la maltraitance souvent liée à la situation sociale et/ou juridique des parents. L’Union devrait notamment se fixer comme objectif de « ne pas avoir d'enfants sans domicile ou d'enfants de la rue sur son territoire » ;
  • lutter contre le travail des enfants : les députés estiment qu'il est indispensable que les enfants qui sont en âge légal de travailler soient rémunérés sur le principe "à travail égal, salaire égal". Ils condamnent avec la plus grande fermeté toutes les formes de travail des enfants apparenté à de l'esclavage et à de la servitude pour dettes, ainsi que tous les travaux qui sont préjudiciables à leur santé et à leur sécurité ;
  • vers un instrument communautaire en matière d’adoption : parmi les mesures les plus innovantes, les députés demandent la création d’un instrument communautaire en matière d'adoption destiné à améliorer la qualité dans les services d’information, la préparation pour les adoptions internationales, le traitement des dossiers de demande d’adoption internationale et les services post-adoption. Pour les députés, l'adoption devrait pouvoir intervenir dans le pays de la nationalité de l'enfant ou via l'adoption internationale, en faisant en sorte que le placement en institution n’intervienne que comme solution temporaire ;
  • mieux protéger les enfants de migrants et les « mineurs non accompagnés » : les députés estiment qu'une attention particulière devrait être portée à la situation des enfants réfugiés, demandeurs d'asile et migrants, afin qu’ils puissent faire valoir leurs droits comme tout autre enfant et quel que soit le statut légal de leurs parents. Les mineurs non accompagnés devraient notamment faire l’objet d’une attention particulière car ils sont souvent victimes d’exploitation par la criminalité organisée (or, ils représentent quelque 5% des demandeurs d'asile en Europe).

Par ailleurs, les députés réclament des mesures destinées à améliorer la formation et l’éducation des enfants, notamment pour les filles ainsi que des mesures pour mieux assurer la garde des jeunes enfants dans les États membres. Des mesures sont également réclamées pour protéger les enfants soldats ou victimes de la guerre. Par ailleurs, les députés demandent la possibilité d'introduire, dans tous les accords internationaux conclus entre la Communauté et des pays tiers, une clause spécifique, juridiquement contraignante, sur le respect des droits de l'enfant tels que définis au niveau international.

Enfin, les députés réclament des mesures très spécifiques pour que tout enfant soit enregistré à sa naissance dans la mesure où cela constitue, selon eux, un droit juridique fondamental comme celui de recevoir une nationalité ou une identité à la naissance.