En adoptant le rapport
d’initiative de Mme Roberta ANGELILLI (UEN, IT) sur la mise en place
d’une stratégie européenne pour les droits de l'enfant, la commission des
libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures demande que la
défense des droits des enfants soient au cœur de toutes les politiques et
actions extérieures de l’Union et réaffirme son rejet contre toute forme de
violence à leur égard. Les parlementaires se sont prononcés pour un large
éventail de mesures destinées à renforcer et à compléter la stratégie
proposée par la Commission. Ils demandent en particulier la création d’une
ligne budgétaire spécifique relative aux droits des enfants permettant de
financer les travaux de mise en œuvre de la stratégie ou des projets tels
qu’un système européen d'alerte rapide pour lutter contre les
"enlèvements d'enfants".
Une stratégie fondée sur 4
piliers: la stratégie devrait se fonder sur les 4 principes fondamentaux
inscrits dans la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant,
laquelle devrait être plus largement respectée : 1) la protection contre
toutes les formes de discrimination, 2) l’intérêt supérieur de l'enfant, 3) le
droit à la vie et au développement, 4) le droit d'exprimer une opinion qui
soit prise en considération sur toute question intéressant les enfants. Les
députés estiment en particulier que la stratégie devrait « reconnaître
le rôle important de la famille en tant qu'institution de base de la société
pour la survie, la protection et le développement de l'enfant ».
Toutefois, telle que proposée
par la Commission, la stratégie s’avère insuffisante pour protéger pleinement
les droits des enfants. C’est pourquoi, les députés suggèrent un paquet
global de mesures qui peuvent se résumer comme suit :
- lutter fermement contre la
violence faite aux enfants : les députés demandent
l’interdiction pure et simple de toute forme de violence à l’égard
des enfants ; ils réclament à cet effet un instrument communautaire destiné
à interdire la violence contre les mineurs, les abus sexuels, les
châtiments humiliants et les pratiques traditionnelles néfastes (telles
que les mutilations génitales ou les mariages forcés). Les députés
condamnent toutes les formes de violence physiques, psychologiques et
sexuelles, la torture, l'exploitation, la prise en otage, la traite ou
la vente d'enfants ou de leurs organes, mais aussi les violences
domestiques, la pédopornographie, la prostitution enfantine, la
pédophilie ou les mariages forcés. Outre le renforcement de l’arsenal
législatif, les députés demandent que la stratégie inclue des actions de
prévention contre la violence. S’ils se félicitent de l'initiative prise
par la Commission pour mettre en service dans toute l'Union un numéro de
téléphone pour l'assistance aux enfants, les députés exigent que ce
numéro soit gratuit et disponible 24 heures sur 24. Il faut en outre que
les États membres informent les enfants de leurs droits par des mesures efficaces
d’information ;
- lutter contre l’exploitation
sexuelle des enfants : les députés réaffirment que celle-ci
devait être considérée comme un « viol » au regard des
sanctions applicables. L’ensemble des institutions et les États membres
devraient s'engager plus fermement dans la lutte contre l'exploitation
sexuelle des enfants, la traite des enfants et la pédophilie en prenant
toutes les mesures nécessaires pour réaliser l'harmonisation des
législations nationales sur la base des principes minimaux communs. Les
députés demandent également que l’on érige au rang de
« crime », l'achat de rapports sexuels avec un mineur. Á cet
égard, ils se réjouissent de l’initiative prise par la Commission de
prévoir l'exclusion du système de paiement en ligne (ou le blocage par
d'autres moyens), des sites qui vendent du matériel pédopornographique
par voie électronique;
- « enfants en
danger » : les parlementaires proposent que l'UE définisse
comme '"enfant en danger" tout enfant victime d'une situation
sociale mettant en danger son intégrité mentale ou physique, et/ou l’exposant
à un risque de délinquance. Ils demandent de multiples initiatives
(campagnes d'information, échange de meilleures pratiques, etc.) pour
éviter la spirale les mettant "en danger", en y incluant des
mesures de prévention de la délinquance juvénile, comme notamment des mesures
de lutte contre la vente d’alcool et de drogue. Ils demandent en outre
que tous les États membres considèrent qu’un enfant témoin de violence
domestique soient considérés comme victime d'un crime;
- lutter contre les contenus
« nocifs » : les députés demandent la création d'une
réglementation adéquate et proportionnée, en dialogue avec les médias
(télévisions, secteur de la publicité, presse, jeux vidéo, secteur de la
téléphonie mobile et Internet) en vue d'interdire la transmission
d'images et de contenus nocifs (y compris le phénomène du harcèlement
électronique) ainsi que la commercialisation de jeux vidéos violents. Ils
soulignent à cet égard le phénomène croissant de l'échange d'images
pornographiques ou relatives à des abus sexuels faisant intervenir des
enfants via les MMS. Ils demandent également le blocage systématique de
tous les sites illégaux ayant trait à des sévices sexuels sur les
enfants. En ce qui concerne la télévision, les députés suggèrent le
renforcement des mécanismes de contrôle sur le contenu des programmes de
télévision dans les créneaux horaires où l’audience infantile est la
plus élevée ;
- délinquance
juvénile : vers une stratégie globale ? : pour les
députés, la délinquance juvénile, en pleine explosion, demande une réponse
globale non seulement au niveau national mais aussi au plan
communautaire. Ils estiment qu’il est indispensable de mettre sur pied
un programme communautaire combinant des mesures axées sur i) la
prévention, ii) l'intégration sociale des jeunes délinquants, iii) l'intervention
judiciaire et extrajudiciaire. La Commission est également appelée à élaborer
un vaste plan de prévention contre la criminalité juvénile, prévoyant
des mesures de lutte contre le harcèlement à l’école et le phénomène de
gangs de jeunes. En matière judiciaire, les députés demandent que les États
membres favorisent autant que possible des peines de substitution à
l'incarcération ;
- lutter contre la pauvreté
enfantine et l’exclusion sociale : rappelant qu'à l'intérieur
de l'Union, 19% des enfants vivent sous le seuil de pauvreté, les
députés appellent à la mise en place d’une véritable stratégie de lutte
contre la pauvreté des familles. Les mesures doivent aller de la lutte
contre la malnutrition à la prévention des maladies mais porter
également sur la lutte contre la maltraitance souvent liée à la
situation sociale et/ou juridique des parents. L’Union devrait notamment
se fixer comme objectif de « ne pas avoir d'enfants sans domicile
ou d'enfants de la rue sur son territoire » ;
- lutter contre le travail
des enfants : les députés estiment qu'il est indispensable que
les enfants qui sont en âge légal de travailler soient rémunérés sur le
principe "à travail égal, salaire égal". Ils condamnent avec
la plus grande fermeté toutes les formes de travail des enfants
apparenté à de l'esclavage et à de la servitude pour dettes, ainsi que
tous les travaux qui sont préjudiciables à leur santé et à leur sécurité ;
- vers un instrument
communautaire en matière d’adoption : parmi les mesures les
plus innovantes, les députés demandent la création d’un instrument
communautaire en matière d'adoption destiné à améliorer la qualité dans
les services d’information, la préparation pour les adoptions
internationales, le traitement des dossiers de demande d’adoption
internationale et les services post-adoption. Pour les députés,
l'adoption devrait pouvoir intervenir dans le pays de la nationalité de
l'enfant ou via l'adoption internationale, en faisant en sorte que le
placement en institution n’intervienne que comme solution temporaire ;
- mieux protéger les enfants
de migrants et les « mineurs non accompagnés » : les
députés estiment qu'une attention particulière devrait être portée à la
situation des enfants réfugiés, demandeurs d'asile et migrants, afin qu’ils
puissent faire valoir leurs droits comme tout autre enfant et quel que
soit le statut légal de leurs parents. Les mineurs non accompagnés
devraient notamment faire l’objet d’une attention particulière car ils
sont souvent victimes d’exploitation par la criminalité organisée (or,
ils représentent quelque 5% des demandeurs d'asile en Europe).
Par ailleurs, les députés
réclament des mesures destinées à améliorer la formation et l’éducation des
enfants, notamment pour les filles ainsi que des mesures pour mieux assurer
la garde des jeunes enfants dans les États membres. Des mesures sont
également réclamées pour protéger les enfants soldats ou victimes de la
guerre. Par ailleurs, les députés demandent la possibilité d'introduire, dans
tous les accords internationaux conclus entre la Communauté et des pays
tiers, une clause spécifique, juridiquement contraignante, sur le respect des
droits de l'enfant tels que définis au niveau international.
Enfin, les députés réclament
des mesures très spécifiques pour que tout enfant soit enregistré à sa
naissance dans la mesure où cela constitue, selon eux, un droit juridique
fondamental comme celui de recevoir une nationalité ou une identité à la
naissance.