En adoptant le rapport de Cristina GUTTIÉREZ-CORTINES (PPE-DE, ES), le Parlement européen a modifié- en 1ère lecture de la procédure de codécision -la proposition de directive définissant un cadre pour la protection des sols et modifiant la directive 2004/35/CE. La résolution législative a été adoptée par 496 voix pour, 161 voix contre et 21 abstentions.
Les députés ont souligné que la directive avait pour objet d’assurer la protection des sols sur la base d'objectifs communs et dans le respect de la législation nationale et communautaire existante, afin d'assurer une utilisation durable des sols pour pouvoir répondre aux besoins écologiques, économiques et sociaux des générations actuelles et futures.
Les principaux amendements adoptés en plénière sont les suivants :
Objectifs : la directive doit avoir pour objectif de définir un cadre pour la protection et l'utilisation durable des sols, sur la base de la nécessité d'empêcher une dégradation des sols, en particulier du fait du changement climatique, d'en atténuer les conséquences et de restaurer ou de réhabiliter les sols dégradés. La réalisation de ces objectifs doit tenir compte des conditions spécifiques des emplacements et prendre en considération le fait que les sols sont, comme l'eau, un bien commun à l'humanité, un écosystème, une ressource non renouvelable et une plateforme pour une série de fonctions écologiques, économiques, sociales et culturelles. La directive doit prévoir des mesures non seulement pour prévenir mais aussi pour limiter toute dégradation grave et évitable des sols provoquée par les activités humaines - tout en tenant compte des causes naturelles - qui compromet la capacité des sols à remplir ces fonctions. Le cas échéant, elle doit prévoir des mesures propres à améliorer les caractéristiques et les fonctions du sol.
Champ d’application : la directive devrait s’appliquer au sol constituant la couche supérieure de l'écorce terrestre, y compris les éléments liquides et les éléments gazeux. Elle ne devrait pas s'appliquer aux terrains pour lesquels ont été arrêtés, avant la date de son entrée en vigueur, des plans d'assainissement ou pour lesquels un assainissement a été mené à bien.
Définitions : l'expression « zone à risque » a été remplacée par l'expression « zone prioritaire nécessitant une protection spéciale». De plus, les députés ont opéré une distinction entre les sites « pollués » (contamination causée par l'homme) et les « sols contaminés par des substances d'origine géogénique » (contamination provenant de sources géogéniques, comme la roche mère et les matières volcaniques). La notion de « site contaminé » a également été introduite : il s’agit d’«un site sur lequel a été confirmée la présence, sur ou dans le sol, de substances dangereuses découlant de l'activité humaine, dans des concentrations telles que les États membres considèrent que le sol représente un risque important pour la santé humaine ou pour l'environnement».
Sols de grande valeur : les députés ont introduit le concept de « sol de grande valeur », à savoir un sol méritant d'être protégé en raison de ses caractéristiques particulières, de ses structures spécifiques, de sa valeur écologique, culturelle et/ou historique remarquable ou de son utilisation. Les États membres qui le souhaitent pourront promouvoir des mesures et politiques visant à mieux sensibiliser le public et à améliorer les connaissances scientifiques concernant ces sols ainsi qu'à protéger, préserver et améliorer leurs caractéristiques et leurs fonctions.
Zones prioritaires : les députés demandent que, dans les 5 années qui suivent la transposition de la directive, les États membres recensent les « zones prioritaires » qui doivent faire l'objet d'une protection spéciale contre l’érosion, la diminution des teneurs en matières organiques, le tassement, la salinisation, les glissements de terrain, les affaissements; la désertification, les effets néfastes du changement climatique sur le sol, l’appauvrissement de la biodiversité du sol et l’acidification. Les députés estiment toutefois que le choix des mesures pour combattre ces facteurs de dégradation des sols doit être laissé aux États membres. Les États membres qui disposent déjà d'une législation nationale spécifique doivent être exemptés de cette obligation.
Utilisation agricole des sols : les députés estiment que chaque État membre, conformément à son climat, aux caractéristiques de ses sols et à son agriculture, de même qu'à ses meilleures pratiques agricoles, peut décider de sa propre politique agricole en rapport avec les sols. La Commission et les États membres sont invités à promouvoir et à exploiter les activités de recherche, en particulier en ce qui concerne les fonctions des différentes cultures en rapport avec le changement climatique et le piégeage du carbone. Les députés demandent également aux États membres : i) d’encourager le choix de cultures et de méthodes de boisement ayant un effet bénéfique sur les matières organiques du sol et sur sa fertilité ; ii) de soutenir des pratiques agricoles qui favorisent la capacité des sols à filtrer et à retenir l'eau, en vue de prévenir le tassement et l'érosion ; iii) d’adopter des normes de qualité pour le compost. La Commission est invitée à présenter, dans un délai de 2 ans à compter de l'entrée en vigueur de la directive, une proposition de directive définissant des normes de qualité pour l'utilisation des biodéchets comme amendement des sols.
Inventaires des sites contaminés : les États membres devront veiller à ce que les sites contaminés sur leur territoire soient recensés. Les députés proposent que dans un délai de 6 ans à compter de la date de transposition, les États membres aient localisé au minimum les sites où se déroulent ou où se sont déroulées dans le passé des activités affectant les sols. Le projet de directive propose la création d'un inventaire national des sites contaminés consultable par le public. Les députés ont adopté un amendement prévoyant la possibilité de créer des inventaires régionaux. Ces inventaires devraient être mis à jour au minimum tous les 7 ans, pour y inclure de nouveaux sites contaminés et exclure ceux qui auront été assainis. Les États membres devront désigner une ou plusieurs autorités compétentes chargées du recensement des sites potentiellement contaminés et des sites contaminés et de la gestion de l'inventaire.
Mise en vente d’un site : selon les députés, les États membres doivent garantir que l'acheteur potentiel d'un site recensé soit informé des activités présentes et passées menées sur le site et qu’il reçoive toutes les informations utiles sur les concentrations de substances dangereuses dans le sol. Les États membres devront également veiller à ce que des recherches et des évaluations pour décider si un site constitue un risque pour la santé publique ou pour l’environnement soient toujours conduites avant la construction d’une nouvelle installation.
Stratégies d’assainissement : les députés demandent que, dans un délai de 7 ans à compter de la transposition, les États membres veillent à ce qu'une stratégie ou des stratégies d'assainissement soient élaborées « au niveau administratif qu'ils jugent approprié ». Ces stratégies devront comporter au minimum les objectifs généraux d’assainissement, une hiérarchisation des priorités, un calendrier pour la mise en œuvre des mesures d'assainissement des sites contaminés ainsi qu’un mécanisme de financement. Les États membres veilleront à ce que les sites contaminés sur leur territoire soient assainis, conformément aux priorités à fixer, ou déjà définies, par les États membres eux-mêmes. Les États membres sont également encouragés à utiliser les meilleures techniques disponibles pour les opérations d'assainissement. Si les moyens nécessaires aux fins d'assainissement ne sont pas techniquement disponibles ou représentent un coût disproportionné par rapport aux avantages environnementaux escomptés, les sites pourront être conditionnés de telle manière qu'ils ne constituent pas un risque significatif pour l'environnement ou la santé publique.
Coordination, échange d’informations : dans un délai de 5 ans à compter de la transposition de la directive, les États membres devront élaborer des codes volontaires de bonnes pratiques concernant la protection des sols. Dans un délai de 3 ans suivant la transposition, la Commission devra faciliter la diffusion et l'échange d'informations sur la législation ou les codes de bonnes pratiques existant déjà dans les États membres en ce qui concerne la protection des fonctions des sols, en ce compris le patrimoine culturel, les parcs naturels et les zones de grande valeur géologique.
Coopération entre les États membres : lorsqu'un État membre se rend compte qu'une quelconque de ses zones prioritaires ou qu'un quelconque de ses sites contaminés est susceptible d'avoir des effets dommageables importants sur la santé humaine ou sur l'environnement dans un autre État membre, l'État membre dans le territoire duquel se situent les zones prioritaires ou les sites contaminés devra en informer l'autre État membre et le consulter au sujet des mesures à prendre pour prévenir ou limiter de pareilles répercussions dommageables.