Politique chinoise et ses effets sur l'Afrique

2007/2255(INI)

La commission du développement a adopté un rapport d’initiative de Mme Ana Maria GOMES (PSE, PT) sur la politique de la Chine et ses effets sur l'Afrique.

Les députés se félicitent du fait que la Chine soit disposée à fournir une coopération concrète et pragmatique à des pays africains. Ils déplorent toutefois la coopération de la Chine avec des régimes répressifs d'Afrique et soulignent que la coopération devrait être soumise à des conditions politiques et que les droits de l'homme et les normes environnementales devraient jouer un rôle plus important. L'Union européenne est invitée à définir une stratégie cohérente pour répondre aux nouveaux défis suscités par de nouveaux donateurs en Afrique, tels que la Chine, notamment grâce à une approche coordonnée des différents États membres et des institutions de l'UE.

Développement durable : le rapport appelle à promouvoir un dialogue entre l'Afrique, l'UE et la Chine afin d'explorer des voies concrètes de coopération au développement et de renforcer les partenariats, sans créer des créneaux d'action distincts. Les députés proposent que l'UE, l'Union africaine et la Chine constituent un organe consultatif permanent destiné à assurer la cohérence et le bon fonctionnement des diverses actions de coopération. Ils demandent également à l'UE, à la Chine et à l'Afrique de définir un cadre général pour la réalisation de projets opérationnels concrets concernant des défis communs tels que l'adaptation au changement climatique, les énergies renouvelables, l'agriculture, l'eau ou les questions sanitaires.

Les députés demandent à l’UE d’inciter la Chine à : i) s'assurer que les conditions financières accompagnant les subventions et les prêts internationaux n'entraveront pas le développement durable; ii)  participer au développement du marché du travail local en Afrique au lieu de faire appel à des milliers de travailleurs chinois; iii) faire usage de son savoir-faire en matière de santé pour soutenir des initiatives visant à améliorer les systèmes de santé publique en Afrique ; iv) contribuer à trouver des réponses aux défis que pose la situation démographique en Afrique.

Énergie et ressources naturelles : les députés souhaitent  une coopération active en matière de politique énergétique entre l'Afrique et l'Union européenne. Ils demandent à l'UE de promouvoir la transparence des revenus générés par les ressources naturelles ainsi que le principe de « prêt responsable » auprès de tous les donateurs. Les conventions internationales sur l'exploration et l'extraction des ressources énergétiques devraient prévoir des dispositions relatives à la transparence des accords de licence et des conditions contractuelles qui déterminent les recettes fiscales des gouvernements, ainsi qu'une clause relative à l'investissement d'un certain pourcentage des bénéfices dans le développement de la communauté locale.

Commerce, investissements et infrastructures : le rapport souligne que les exportations chinoises de produits à destination de l'Afrique ne doivent pas entraver le développement des secteurs d'activité africains ou détruire leur compétitivité.

La commission du développement invite l'UE, tout comme la Chine, à donner à l'Afrique le moyen de se sortir de l'impasse dans laquelle elle se trouve concernant les produits de base et à l'encourager à se transformer pour qu'elle devienne une région qui transforme ces produits et développe des services. Les députés invitent  l'UE à encourager les États membres et les nouveaux donateurs, tels que la Chine, à : i) diversifier leurs activités commerciales et d'investissement ; ii) transférer des technologies aux Africains, iii) renforcer les règles internationales de commerce équitable ; iii) étendre l'accès des produits africains au marché mondial ; iv) réduire les droits de douane imposés sur les produits transformés en provenance d'Afrique, v) promouvoir le développement du secteur privé et son accès aux financements ; vi) promouvoir la facilitation du commerce;  vii) encourager l'intégration régionale en Afrique ; viii)  à faciliter les flux d'envois de fonds des résidents africains.

Les députés recommandent à la Commission d'insister, dans le cadre des négociations en cours avec la Chine, sur un nouveau chapitre commercial de l'accord de partenariat et de coopération, sur l'utilisation de termes contraignants en ce qui concerne les normes essentielles du travail de l'OIT, sur la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, sur des mesures de lutte contre le dumping social et environnemental, sur les recommandations de l'OIT en matière de travail décent et sur le respect des obligations découlant des conventions internationales sur les droits de l'homme.

Environnement : constatant l'impact écologique de la présence chinoise en Afrique, les députés invitent la Chine à agir en tant que défenseur responsable de l'environnement, aussi bien en Chine qu'en Afrique. Ils appellent l'UE à encourager les organismes de crédits à l'exportation chinois, y compris la banque Exim Bank, à évaluer systématiquement l'incidence sur l'environnement des projets d'infrastructures en Afrique, tels que les barrages, les routes et les mines.

Le rapport demande également à l'UE de renforcer le dialogue avec l'Afrique et la Chine et d'élaborer des approches communes pour combattre, au niveau mondial, les problèmes environnementaux tels que la déforestation, la désertification, la diminution ou la disparition de la biodiversité et de la fertilité des sols, ainsi que la pollution de l'eau et de l'air.

Bonne gouvernance et droits de l'homme : le rapport souligne que les investissements libres de toute condition réalisés par la Chine dans les pays africains soumis à la mauvaise gouvernance de régimes oppressifs contribuent à perpétuer les violations des droits de l'homme et ne font que retarder les progrès démocratiques et entraver la reconnaissance d'une bonne gouvernance.

Les députés invitent les autorités chinoises à respecter les principes de démocratie et de bonne gestion des affaires publiques et les droits de l'homme dans leurs relations avec l'Afrique. De son côté, l’UE devrait agir en accord avec ses propres valeurs, principes et engagements au titre de l'accord de Cotonou dans le cadre de ses relations avec les gouvernements africains qui entravent la démocratie et violent les droits de l'homme, en leur refusant le contrôle des aides, du soutien financier ou des investissements.

Paix et sécurité : les députés appellent l'UE et la Chine à suspendre tout accord commercial dans le secteur des armes avec les gouvernements qui sont coupables de violations de droits de l'homme et qui sont engagés dans des conflits ou en passe de faire la guerre, tels que les gouvernements du Kenya, du Zimbabwe, du Soudan, du Tchad, de la République démocratique du Congo, de l'Éthiopie, de l'Érythrée et de la Somalie. La Chine devrait également renforcer la transparence de son régime national de contrôle des exportations d'armes, en notifiant ses exportations au registre des Nations unies sur les exportations d'armes conventionnelles, souligne le rapport.

De son côté, l'UE devrait maintenir son embargo sur les ventes d'armes à la Chine aussi longtemps que cette dernière continuera de fournir des armes à des forces et des groupes armés dans des pays, souvent africains, qui alimentent et perpétuent des conflits et commettent des violations graves des droits de l'homme.

Le rapport demande enfin à l'UE d'encourager la Chine à continuer d'accroître sa participation aux missions de maintien de la paix de l'ONU et de l'Union africaine (UE) en Afrique, en envoyant le cas échéant des troupes de combat.

Les députés souhaitent engager un dialogue avec le Congrès national du peuple chinois, le Parlement panafricain et les parlements nationaux africains en vue d'encourager le développement durable et de renforcer leurs capacités de contrôle sur les exécutifs.