Recommandations sur l'application du principe de l'égalité des rémunérations des femmes et des hommes

2008/2012(INL)

La commission des droits de la femme et de l'égalité des genres a adopté le rapport d’initiative de Mme Edit  BAUER (PPE-DE, SK) contenant des recommandations adressées à la Commission sur l'application du principe d'égalité de rémunération entre les hommes et les femmes.

Le rapport rappelle tout d’abord que, dans l'Union européenne, les femmes gagnent en moyenne 15% de moins que les hommes – et jusqu'à 25% de moins dans le secteur privé. Pour gagner autant qu’un homme en un an, une femme doit donc travailler jusqu’au 22 février de l’année suivante (soit 418 jours de calendrier). Ceci montre la persistance de l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes, nonobstant l’adoption d’un important corpus législatif depuis 30 ans.

C’est pour contrer cet important déséquilibre que les députés ont a adopté le présent rapport d’initiative afin de proposer une série de mesures concrètes, adressées à la Commission sous forme de « recommandations » et destinées à lutter significativement contre l’écart de rémunérations entre les hommes et les femmes dans l’Union européenne.

Comme première mesure phare, les députés réclament une proposition législative visant à réviser la législation existante sur l'application du principe d'égalité de rémunération entre les hommes et les femmes et suivant les recommandations détaillées à l’annexe du rapport. Cette proposition devrait être soumise au Parlement avant le 31 décembre 2009 et être fondée sur l'article 141 du traité CE. Les députés estiment en effet qu’il est essentiel d'améliorer et d’anticiper la mise en œuvre des dispositions de la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil sur la mise en œuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail en veillant à ce que les États membres, les partenaires sociaux et les organismes de parité s’emploient à mettre réellement en œuvre les mesures destinées à faire appliquer le principe d’égalité de rémunération.

Outre la présentation d’un nouveau cadre législatif, les députés demandent à la Commission de soumettre au Parlement une analyse précisant les actes juridiques qui constitueraient, sur le plan de l’Union et/ou sur le plan national, des instruments appropriés pour réduire les écarts de salaire.

Plus symboliquement, les députés demandent l'organisation d’une Journée européenne de l'égalité salariale qui devrait contribuer à améliorer la prise de conscience des inégalités salariales existantes et inciter l'ensemble des acteurs concernés à prendre de nouvelles initiatives pour éliminer ces disparités.

Pour mesurer les progrès accomplis, les députés suggèrent également la mise en place par les organisations syndicales et patronales d’un instrument objectif d'évaluation du travail afin de réduire efficacement les écarts de rémunérations entre hommes et femmes.

Détail des recommandations proposées : concrètement, les mesures demandées par les députés pour lutter contre les écarts de rémunérations dans le cadre de la révision de la directive 2006/54/CE peuvent se résumer comme suit :

  1. Recommandation 1: définitions : les députés demandent que l’on définisse de manière plus détaillée certains concepts. Ils suggèrent en particulier que l'écart de rémunération soit moins lié aux différences de salaire horaire brut et que la définition existante intègre des variables telles que celles d’une discrimination de rémunération directe mais aussi indirecte. L’égalité de rémunération devrait également s’étendre aux pensions.
  2. Recommandation 2: analyse de la situation et transparence des résultats : les députés souhaitent une plus grande conscientisation des écarts de salaires par les chefs d’entreprise et par les États membres. Il faut donc améliorer le niveau d’information, améliorer les statistiques sur les niveaux de rémunération des femmes dans les professions où elles sont traditionnellement représentées et mettre en place des audits obligatoires de rémunération pour toutes les entreprises de plus de 20 salariés.
  3. Recommandation 3: évaluation du travail et classification des fonctions : pour les députés, les femmes devraient bénéficier d’une formation sur les niveaux de salaires en fonction de la classification des fonctions, au moment de négocier leur salaire. Les États membres sont appelés à introduire des classifications des fonctions qui respectent le principe d'égalité entre les femmes et les hommes afin de permettre aux employeurs et aux salariés, d'identifier les éventuelles discriminations de rémunération basées sur une définition tendancieuse de la grille des salaires. Les États membres devraient également réaliser une évaluation fondée sur le classement du personnel, l'organisation du travail, l'expérience professionnelle et la productivité, à partir de laquelle sera établie une grille d'évaluation déterminant le niveau de rémunération.
  4. Recommandation 4: organismes pour l'égalité de traitement : les députés estiment que les organismes pour l'égalité de traitement devraient jouer un rôle déterminant en matière de réduction de l'écart de rémunération. Ces organismes devraient avoir le pouvoir de surveiller, de faire rapport et si possible de faire observer la législation. C’est pourquoi, ils demandent la révision de la directive 2006/54/CE afin de renforcer leur mandat.
  5. Recommandation 5: dialogue social : une meilleure surveillance des accords collectifs, des grilles de salaires et des mécanismes de classification des fonctions (notamment pour les travailleurs à temps partiel et les travailleurs atypiques) s’impose. Ces mesures de surveillance doivent couvrir tant les conditions de travail primaires que les conditions secondaires et les régimes professionnels de sécurité sociale (congés, retraite, véhicules de fonction, dispositifs de garde des enfants, horaires de travail, etc.).
  6. Recommandation 6 : prévention des discriminations : les députés demandent que l’on ajoute à l'article 26 de la directive 2006/54/CE, relatif à la prévention des discriminations, des dispositions spécifiques concernant la prévention des discriminations en matière salariale afin que les États membres et les partenaires sociaux arrêtent des actions en matière de formation et de classification des fonctions. Parmi les mesures de prévention de la discrimination, les députés suggèrent l'insertion dans les contrats publics d'une clause établissant le respect de l'égalité des genres en matière de rémunérations par les entreprises, et l'attribution à ces dernières d'un label spécifique ("certificat de qualité en matière d'égalité des genres et des salaires") leur permettant par exemple de mieux accéder à certains financements ou certains marchés publics.
  7. Recommandation 7: intégration de la dimension de genre : les députés demandent également l’ajout à l'article 29 de la directive 2006/54/CE, d’indications précises concernant le principe de l'égalité de traitement en matière salariale, visant à combler les écarts de rémunération entre hommes et femmes. Pour ce faire, la Commission devrait fournir des outils concrets d'évaluation des écarts de salaires grâce à des rapports établis dans les États membres, la création d'une banque de données sur les classements professionnels, la collecte et la diffusion des résultats des expériences menées en matière de réforme de l'organisation du travail ou encore la définition de lignes directrices destinées à contrôler les écarts de salaires.
  8. Recommandation 8: sanctions : les députés exigent le respect plein et entier du principe d'égalité de rémunération pour un travail de même valeur tel que déjà prévu par la directive. Or, ce principe n’est pas entièrement respecté dans les faits. Ils demandent dès lors que les sanctions qui figurent déjà dans la directive soient renforcées et que de nouvelles mesures soient envisagées telles que par exemple l’intégration d’un principe de versement d'un dédommagement à une victime d’une discrimination salariale, la création d’un dispositif d’amendes administratives à faire appliquer par les inspecteurs du travail ou par des organismes publics de respect de l'égalité de traitement, la possibilité d’exclure une entreprise qui n’appliquerait pas le principe d’égalité de rémunération de toutes subventions publiques ou de la possibilité de participer à des appels d’offres publics et la publication de l'identité des contrevenants.
  9. Recommandation 9: rationalisation de la réglementation : les députés remarquent que généralement la pénalité salariale est souvent liée au travail à temps partiel. Cette situation requiert une évaluation et une éventuelle révision de la directive du Conseil 97/81/CE concernant l’accord-cadre sur le travail à temps partiel conclu par l’UNICE, le CEEP et la CES.