La commission des droits de la
femme et de l'égalité des genres a adopté le rapport d’initiative de Mme Edit
BAUER (PPE-DE, SK) contenant des recommandations adressées à la
Commission sur l'application du principe d'égalité de rémunération entre les
hommes et les femmes.
Le rapport rappelle tout
d’abord que, dans l'Union européenne, les femmes gagnent en moyenne 15% de
moins que les hommes – et jusqu'à 25% de moins dans le secteur privé. Pour
gagner autant qu’un homme en un an, une femme doit donc travailler jusqu’au
22 février de l’année suivante (soit 418 jours de calendrier). Ceci montre la
persistance de l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes,
nonobstant l’adoption d’un important corpus législatif depuis 30 ans.
C’est pour contrer cet
important déséquilibre que les députés ont a adopté le présent rapport
d’initiative afin de proposer une série de mesures concrètes, adressées à la
Commission sous forme de « recommandations » et destinées à lutter
significativement contre l’écart de rémunérations entre les hommes et les
femmes dans l’Union européenne.
Comme première mesure phare,
les députés réclament une proposition législative visant à réviser la
législation existante sur l'application du principe d'égalité de rémunération
entre les hommes et les femmes et suivant les recommandations détaillées à
l’annexe du rapport. Cette proposition devrait être soumise au Parlement
avant le 31 décembre 2009 et être fondée sur l'article 141 du traité
CE. Les députés estiment en effet qu’il est essentiel d'améliorer et
d’anticiper la mise en œuvre des dispositions de la directive
2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil sur la mise en œuvre du
principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes
et femmes en matière d'emploi et de travail en veillant à ce que les États
membres, les partenaires sociaux et les organismes de parité s’emploient à
mettre réellement en œuvre les mesures destinées à faire appliquer le
principe d’égalité de rémunération.
Outre la présentation d’un
nouveau cadre législatif, les députés demandent à la Commission de soumettre
au Parlement une analyse précisant les actes juridiques qui
constitueraient, sur le plan de l’Union et/ou sur le plan national, des
instruments appropriés pour réduire les écarts de salaire.
Plus symboliquement, les
députés demandent l'organisation d’une Journée européenne de l'égalité
salariale qui devrait contribuer à améliorer la prise de conscience des
inégalités salariales existantes et inciter l'ensemble des acteurs concernés
à prendre de nouvelles initiatives pour éliminer ces disparités.
Pour mesurer les progrès
accomplis, les députés suggèrent également la mise en place par les
organisations syndicales et patronales d’un instrument objectif d'évaluation
du travail afin de réduire efficacement les écarts de rémunérations entre
hommes et femmes.
Détail des recommandations
proposées : concrètement, les mesures demandées par les députés pour
lutter contre les écarts de rémunérations dans le cadre de la révision de la
directive 2006/54/CE peuvent se résumer comme suit :
- Recommandation 1:
définitions : les députés demandent que l’on définisse de
manière plus détaillée certains concepts. Ils suggèrent en particulier
que l'écart de rémunération soit moins lié aux différences de salaire
horaire brut et que la définition existante intègre des variables telles
que celles d’une discrimination de rémunération directe mais aussi
indirecte. L’égalité de rémunération devrait également s’étendre aux
pensions.
- Recommandation 2: analyse
de la situation et transparence des résultats : les députés
souhaitent une plus grande conscientisation des écarts de salaires par
les chefs d’entreprise et par les États membres. Il faut donc améliorer
le niveau d’information, améliorer les statistiques sur les niveaux de
rémunération des femmes dans les professions où elles sont
traditionnellement représentées et mettre en place des audits
obligatoires de rémunération pour toutes les entreprises de plus de 20
salariés.
- Recommandation 3:
évaluation du travail et classification des fonctions : pour
les députés, les femmes devraient bénéficier d’une formation sur les
niveaux de salaires en fonction de la classification des fonctions, au
moment de négocier leur salaire. Les États membres sont appelés à
introduire des classifications des fonctions qui respectent le principe
d'égalité entre les femmes et les hommes afin de permettre aux
employeurs et aux salariés, d'identifier les éventuelles discriminations
de rémunération basées sur une définition tendancieuse de la grille des
salaires. Les États membres devraient également réaliser une évaluation
fondée sur le classement du personnel, l'organisation du travail,
l'expérience professionnelle et la productivité, à partir de laquelle
sera établie une grille d'évaluation déterminant le niveau de rémunération.
- Recommandation 4:
organismes pour l'égalité de traitement : les députés estiment
que les organismes pour l'égalité de traitement devraient jouer un rôle
déterminant en matière de réduction de l'écart de rémunération. Ces
organismes devraient avoir le pouvoir de surveiller, de faire rapport et
si possible de faire observer la législation. C’est pourquoi, ils
demandent la révision de la directive 2006/54/CE afin de renforcer leur
mandat.
- Recommandation 5: dialogue
social : une meilleure surveillance des accords collectifs, des
grilles de salaires et des mécanismes de classification des fonctions
(notamment pour les travailleurs à temps partiel et les travailleurs
atypiques) s’impose. Ces mesures de surveillance doivent couvrir tant
les conditions de travail primaires que les conditions secondaires et
les régimes professionnels de sécurité sociale (congés, retraite,
véhicules de fonction, dispositifs de garde des enfants, horaires de
travail, etc.).
- Recommandation 6 :
prévention des discriminations : les députés demandent que l’on
ajoute à l'article 26 de la directive 2006/54/CE, relatif à la
prévention des discriminations, des dispositions spécifiques concernant
la prévention des discriminations en matière salariale afin que les
États membres et les partenaires sociaux arrêtent des actions en matière
de formation et de classification des fonctions. Parmi les mesures de
prévention de la discrimination, les députés suggèrent l'insertion dans
les contrats publics d'une clause établissant le respect de l'égalité
des genres en matière de rémunérations par les entreprises, et
l'attribution à ces dernières d'un label spécifique
("certificat de qualité en matière d'égalité des genres et des
salaires") leur permettant par exemple de mieux accéder à certains
financements ou certains marchés publics.
- Recommandation 7:
intégration de la dimension de genre : les députés demandent
également l’ajout à l'article 29 de la directive 2006/54/CE,
d’indications précises concernant le principe de l'égalité de traitement
en matière salariale, visant à combler les écarts de rémunération entre
hommes et femmes. Pour ce faire, la Commission devrait fournir des
outils concrets d'évaluation des écarts de salaires grâce à des rapports
établis dans les États membres, la création d'une banque de données sur
les classements professionnels, la collecte et la diffusion des
résultats des expériences menées en matière de réforme de l'organisation
du travail ou encore la définition de lignes directrices destinées à
contrôler les écarts de salaires.
- Recommandation 8:
sanctions : les députés exigent le respect plein et entier du
principe d'égalité de rémunération pour un travail de même valeur tel
que déjà prévu par la directive. Or, ce principe n’est pas entièrement
respecté dans les faits. Ils demandent dès lors que les sanctions qui
figurent déjà dans la directive soient renforcées et que de nouvelles
mesures soient envisagées telles que par exemple l’intégration d’un
principe de versement d'un dédommagement à une victime d’une
discrimination salariale, la création d’un dispositif d’amendes
administratives à faire appliquer par les inspecteurs du travail ou par
des organismes publics de respect de l'égalité de traitement, la
possibilité d’exclure une entreprise qui n’appliquerait pas le principe
d’égalité de rémunération de toutes subventions publiques ou de la
possibilité de participer à des appels d’offres publics et la
publication de l'identité des contrevenants.
- Recommandation 9:
rationalisation de la réglementation : les députés remarquent que
généralement la pénalité salariale est souvent liée au travail à temps
partiel. Cette situation requiert une évaluation et une éventuelle
révision de la directive du Conseil 97/81/CE concernant l’accord-cadre
sur le travail à temps partiel conclu par l’UNICE, le CEEP et la CES.