Pesticides: cadre d'action communautaire pour une utilisation durable des pesticides

2006/0132(COD)

En adoptant la recommandation pour la 2ème lecture contenue dans le rapport de Mme Christa KLAß (PPE-DE, DE), la commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire a modifié la position commune du Conseil en vue de l'adoption de la directive du Parlement européen et du Conseil  instaurant un cadre d'action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable.

Les députés ont rétabli bon nombre d’amendements adoptés en 1ère  lecture. Les principaux amendements adoptés en commission sont les suivants :

Base juridique : étant donné que la directive vise à réduire les effets des pesticides sur la santé humaine et l’environnement, elle devrait avoir pour base juridique les articles 152 (4) et 175(1) du Traité CE.

Objectif : la directive doit en premier lieu viser à réduire l’utilisation des pesticides en encourageant la promotion et l'adoption d'alternatives non chimiques aux pesticides.

Mesures fiscales : les États membres doivent avoir le droit d'accorder des subventions ou d'arrêter des mesures fiscales visant à encourager l'utilisation de pesticides moins nocifs, Ils peuvent notamment introduire une taxe sur les pesticides pour tous les produits à l'exception des produits non chimiques ou des produits phytopharmaceutiques à faible risque, tels que visés au règlement relatif à la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques (voir COD/2006/0136).

Principe de précaution : les dispositions de la directive ne doivent pas empêcher les États membres d'appliquer le principe de précaution à la limitation ou à l'interdiction de l'utilisation des pesticides.

Définitions : les députés ont rétabli la définition de l’ « utilisation » proposée par la Commission, à savoir l'ensemble des opérations effectuées en relation avec un pesticide, telles que le stockage, la manipulation, la dilution, le mélange et l'application. Un autre amendement aligne la directive sur l'objectif de « réduction de l'utilisation » et précise que celle-ci n'est pas liée à la réduction de la quantité de pesticides mais plutôt à celle du nombre d'applications aux doses nécessaires pour assurer la protection des cultures.

Plans d'action nationaux : les députés demandent que les plans d'action nationaux en vue de réduire les risques liés à l'utilisation des pesticides soient mis en œuvre dans les meilleurs délais. Les plans d'action nationaux doivent prévoir au moins:

a)      pour les produits autres que les pesticides biologiques et les substances à faible risque, des objectifs de réduction de l'utilisation exprimés par un indice de fréquence de traitement. L'indice de fréquence de traitement sera adapté aux conditions spécifiques de chaque État membre et devra être communiqué sans délai à la Commission, aux fins d'approbation. S'agissant des substances actives très préoccupantes telles que définies dans le règlement (CE) n° 1907/2006 (REACH),  l'objectif de réduction doit être fixé à 50% au moins avant la fin de 2013 sur la base de l'indice de fréquence de traitement calculé pour l'année 2005, à moins que l'État membre ne puisse établir qu'il a déjà atteint un objectif comparable ou plus élevé au cours d'une autre année de référence de la période 1995-2004 ;

b)      s’agissant des pesticides classés comme toxiques ou très toxiques au sens de la directive 1999/45/CE, un objectif de réduction d'utilisation, exprimé en volumes vendus, doit être prévu. Cet objectif doit représenter une réduction pour la fin de 2013 d'au moins 50% par rapport à l'année 2005, à moins que l'État membre ne puisse établir qu'il a déjà atteint un objectif comparable ou plus élevé au cours d'une autre année de référence de la période 1995-2004.

Les plans d’action nationaux devraient tenir compte des incidences sur la santé publique et des incidences sociales des mesures envisagées et des circonstances nationales, régionales et locales ainsi que de toutes les parties intéressées. Ils devraient être réexaminés au moins tous les 3 ans (plutôt que tous les 5 ans). Les informations sur les plans d'action nationaux devraient être disponibles sur internet, sur le site de la Commission européenne.

Formation : tous les utilisateurs professionnels, les distributeurs et les conseillers doivent avoir accès à une formation appropriée, dispensée par des organismes désignés par les autorités compétentes. À cette fin, des exigences minimales, d'application obligatoire dans l'ensemble de la Communauté, doivent être  établies. Les États membres doivent également veiller à ce que les utilisateurs professionnels, les distributeurs et les conseillers aient connaissance de l'existence de produits phytosanitaires illégaux (contrefaçons) et des risques qu'ils présentent et soient correctement formés pour identifier de tels produits.

Vente de pesticides et inspections du matériel : les mesures d'inspection et de contrôle en vigueur doivent être pleinement mises en œuvre pour garantir que les pesticides illégaux (contrefaçons) ne sont pas mis en vente. Le matériel et les accessoires d'application des pesticides utilisés par les professionnels devront faire l'objet d'inspections obligatoires à intervalles réguliers. L'intervalle entre les inspections ne doit pas dépasser 5 ans jusqu'en 2015 (au lieu de 2020) et 3 ans par la suite. Le matériel portatif d'application de pesticides et les pulvérisateurs à dos ne pourront être exemptés d’inspection.

Information et sensibilisation : les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour faciliter des programmes d'information et de sensibilisation et la disponibilité d'informations précises concernant les pesticides pour le grand public, notamment les risques, y compris les dangers et les éventuels effets aigus et chroniques pour la santé humaine, les organismes non cibles et l'environnement associés à leur utilisation, et concernant l'utilisation d'alternatives non chimiques. Les États membres doivent également : i) mettre en place des systèmes obligatoires de collecte d'informations sur les cas d'empoisonnements aigus et chroniques par les pesticides, affectant en particulier les utilisateurs de pesticides, les travailleurs, les résidents et tous les autres groupes pouvant être exposés régulièrement aux pesticides ; ii) mettre en œuvre des programmes de recherche sur des situations spécifiques dans lesquelles un lien a été établi entre des pesticides et des effets sur la santé humaine et l'environnement, y compris des études sur les groupes à haut risque, la biodiversité et les effets de combinaison.

Pour renforcer la comparabilité des informations, la Commission devra élaborer, 3 ans à compter de la date d'entrée en vigueur de la directive, un document d'orientation stratégique sur le contrôle et la surveillance des effets de l'utilisation des pesticides sur la santé humaine et l'environnement.

Pulvérisation aérienne : des dérogations pourront être accordées uniquement si : i) la zone à pulvériser n'est pas située à proximité immédiate de zones publiques ou résidentielles et il n'y a pas d'effets pour la santé des résidents ou des passants; ii) l'aéronef est équipé des meilleurs dispositifs techniques disponibles pour réduire la dérive de la pulvérisation (par exemple des buses limitant la dérive. En cas d'utilisation d'hélicoptères, les rampes de pulvérisation doivent être équipées de gicleurs à injection afin de limiter la dérive. Les autorités compétentes devront être saisies des demandes d'autorisation de pulvérisation aérienne.

La notification devra comporter des informations en ce qui concerne le moment de la pulvérisation, ainsi que les quantités et le type de pesticide utilisé. Les députés estiment que les demandes pour lesquelles aucune réponse relative à la décision prise n'a été reçue dans le délai fixé par les autorités compétentes ne doivent pas être réputées approuvées, comme le prévoit le Conseil. Les autorités compétentes devront conserver un enregistrement des demandes soumises et les tenir à la disposition du public. Les États membres pourront prévoir dans leurs plans d'action nationaux des dispositions relatives à l'information des riverains qui pourraient se trouver exposés à la dérive aérienne.

Protection du milieu aquatique et de l'eau potable : les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour protéger les masses d'eau, en particulier en veillant à ce que soient aménagées, dans les champs longeant les cours d’eau, des zones tampons à l’intérieur desquelles l’application ou l’entreposage de pesticides sont interdits, en particulier pour protéger les zones de captage d’eau potable. Les dimensions des zones tampons seront définies en fonction des risques de pollution et des caractéristiques agricoles et climatiques des zones à protéger.

Dans les zones de sauvegarde pour le captage d'eau potable au sens de la directive 2000/60/CE,  des mesures supplémentaires doivent être prises pour prévenir la contamination de l'eau par des pesticides, mesures comprenant, le cas échéant, un renforcement des restrictions d'utilisation de certains produits à haut risque, le recours accru à des zones tampons, une action spécifique de formation et de sensibilisation des conseillers et des opérateurs, et le respect strict des meilleures pratiques en matière de remplissage, de mélange et d'élimination des pesticides. Les États membres pourront établir les zones exemptes de pesticides qu'ils jugent nécessaires pour préserver les ressources en eau potable. Ces zones pourront couvrir l'intégralité du territoire d'un État membre

Zones sensibles : les députés se prononcent pour une interdiction des pesticides dans toutes les zones utilisées par le grand public ou par des groupes vulnérables de la population, notamment, mais non exclusivement, dans les parcs, les jardins publics, les terrains de sports et de loisirs, les cours de récréation et les terrains de jeux ainsi qu'à proximité d'infrastructures de santé publiques (cliniques, hôpitaux, centres de rééducation, stations thermales, hospices) et dans de vastes zones de non pulvérisation, y compris dans les champs avoisinant ces zones.

Lutte intégrée contre les ravageurs : les États membres devront prendre toutes les mesures nécessaires pour promouvoir une lutte contre les ravageurs à faible apport en pesticides, en privilégiant les méthodes non chimiques pour la protection des végétaux, la lutte contre les ravageurs et la gestion des cultures et pour veiller à ce que les utilisateurs professionnels de pesticides adoptent dans les meilleurs délais des pratiques et des produits présentant le risque le plus faible pour la santé humaine et l'environnement parmi ceux disponibles pour remédier à un même problème de ravageurs.

Échange d'informations et de bonnes pratiques : la Commission devra mettre en place une enceinte pour l'échange d'informations et de bonnes pratiques en matière d'utilisation durable des pesticides et de lutte intégrée contre les ravageurs.