Resolution sur le Soudan et la Cour pénale internationale

2008/2580(RSP)

Suite au débat qui s’est tenu le même jour, le Parlement européen a adopté une résolution sur le Soudan et la Cour pénale internationale.

Le texte adopté en Plénière avait été déposé en tant que résolution commune par les groupes PPE-DE, PSE, ALDE, Verts/ALE, UEN et GUE/NGL.

Le Parlement rappelle que la situation sécuritaire au Darfour demeure extrêmement instable et que des accrochages significatifs ont lieu entre mouvements rebelles et forces gouvernementales. Or, des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants sont quotidiennement battus, mis à mort, violés, déplacés, tous victimes du conflit au Darfour.

CPI : le Parlement indique parallèlement que la doctrine des Nations unies est de prévoir une protection pour les victimes lorsque les autorités nationales échouent à protéger leurs populations. Dès 2005, le Conseil de sécurité des Nations unies avait saisi la Cour pénale Internationale (CPI) dont le Soudan est signataire pour mener des investigations en la matière. Le Soudan doit donc coopérer avec la CPI dans ce contexte, ce qui n’est manifestement pas le cas.

Dans la foulée de ses enquêtes, la CPI a délivré deux mandats d'arrêt à l'encontre d'Ahmed Haroun, ancien ministre de l'Intérieur du Soudan, et d'Ali Mohammed Ali Abd-Al-Rahman, également connu sous le nom de "Ali Kosheib", ancien dirigeant des milices janjawid, pour 51 chefs d'accusation de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité. Dans ce contexte, le Parlement condamne fermement les manquements persistants du Soudan à coopérer avec la CPI, à arrêter Ahmed Haroun et Ali Kosheib et à les remettre à la CPI. Il fait toutefois remarquer qu’entre-temps Ahmed Haroun est devenu ministre des Affaires humanitaires et responsable des relations avec la force internationale de maintien de la paix (la MINUAD) et qu'Ali Kosheib a été remis en liberté.

Il demande instamment au gouvernement soudanais de ratifier le statut de la CPI, de se conformer à la résolution 1593(2005) du Conseil de sécurité des Nations unies, de coopérer sans condition avec la CPI et de mener une instruction et des poursuites efficaces en ce qui concerne les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis dans la région du Darfour. Il propose dès lors, une série de mesures de rétorsion à l’échelon européen à l’encontre de ces personnes, comme, notamment:

  • le gel et la saisie de leurs avoirs et l'identification des actifs à l'étranger des entreprises liées au Parti du Congrès national (parti de la majorité gouvernementale, principale voie de financement des milices au Darfour),
  • des mesures interdisant l'accès aux banques de l'Union européenne pour toute transaction financière ou tout paiement effectués par ces personnes, ou pour leur compte, 
  • des mesures faisant obstacle aux affaires et autres relations économiques ou commerciales entre ces personnes, ou toute personne morale ou société qu'elles contrôlent, et les entreprises européennes, en ciblant tout particulièrement les revenus tirés du secteur pétrolier.

Le Parlement demande à tous les pays représentés au Conseil de sécurité des Nations unies de soutenir toute demande de coopération présentée par le procureur de la CPI. Parallèlement, le Parlement invite la Commission et les États membres à veiller à ce que leur aide substantielle au Soudan ne soit pas délivrée par l'intermédiaire du ministre des Affaires humanitaires, Ahmed Haroun, et que cette personne soit immédiatement révoquée. Des pressions doivent également intervenir sur la Chine pour qu' elle se joigne aux efforts internationaux afin de faire cesser ce conflit en cessant notamment de lui livrer des armes.

Respect du cessez-le-feu : sur le front de la situation politique, le Parlement condamne la permanence de ce conflit et des violations récurrentes des accords de paix et de cessez-le-feu à peine signés, sachant que la population civile et l'aide humanitaire sont systématiquement pris pour cibles. Il invite les autorités soudanaises à apporter leur plein appui à la mise en place de la MINUAD et insiste une fois de plus sur le fait qu'il ne saurait y avoir de paix durable sans que justice soit faite pour les crimes graves.

Le gouvernement du Soudan et tous les groupes armés doivent s'abstenir de toute attaque aveugle contre des civils et cesser de recruter des enfants soldats de moins de 18 ans.

Le Parlement appelle en outre le représentant spécial de l'Union européenne pour le Soudan, Pekka Haavisto, à jouer un rôle actif et à utiliser toutes les possibilités d'aborder avec ses interlocuteurs soudanais et autres partenaires la nécessité de procéder immédiatement à l'arrestation et au défèrement d'Ahmed Haroun et d'Ali Kosheib à la CPI.

Enfin, le Parlement prie le gouvernement soudanais de respecter son engagement en faveur d'un moratoire sur les restrictions et les obstacles à l'égard de tous les travailleurs humanitaires.