Suivi de la Conférence de Monterrey de 2002 sur le financement pour le développement

2008/2050(INI)

En adoptant à l’unanimité le rapport d’initiative de M. Thijs BERMAN (PSE, NL) sur le suivi de la Conférence de Monterrey de 2002, la commission du développement réaffirme l’engagement du Parlement à éradiquer la pauvreté, à promouvoir le développement durable et à réaliser les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), seul moyen de parvenir à la justice sociale et à une qualité de vie meilleure pour le milliard de personnes dans le monde qui vit dans une pauvreté extrême.

Pour les députés, les actions plus immédiates à prendre pour lutter contre les conséquences dramatiques de la flambée des prix des denrées alimentaires dans les pays en développement doivent être prises dans le cadre du consensus de Monterrey (Conférence internationale sur le financement du développement de Monterrey, Mexique, de mars 2002). Ils attendent dès lors une proposition concrète de la Commission sur l'utilisation de fonds d'urgence dans ce cadre.

Globalement, les députés soulignent la nécessité de trouver un juste équilibre entre la nécessité de fournir une aide au développement aux pays partenaires en leur faisant confiance pour gérer au mieux les fonds octroyés tout en contrôlant l’aide octroyée pour éviter qu'elle ne soit utilisée de manière abusive.

Volumes de l'AOD :  les députés relèvent que l'UE est le principal pourvoyeur mondial d'AOD avec près de 60% de l'effort mondial d'aide publique au développement. Ils demandent néanmoins à la Commission de fournir des données claires et transparentes sur la part du budget communautaire dans l'aide au développement fournie par l'UE afin d'évaluer les suites données au consensus de Monterrey par tous les donateurs européens. Une fois de plus, les députés déplorent le manque de visibilité de l’aide européenne et insistent sur la nécessité d'améliorer cette visibilité. Ils rappellent que l’Union a réalisé son objectif AOD obligatoire de 0,39% du PIB avant 2006, mais déplorent la nette diminution de l'aide en 2007 (passée de 47,7 milliards EUR en 2006, soit 0,41% du PIB global de l'UE, à 46,1 milliards d'euros en 2007, soit 0,38% du PIB global). Les États membres sont donc appelés d’urgence à augmenter les volumes d’aide pour réaliser l'objectif auquel ils se sont engagés de 0,56% de leur PIB d'ici 2010. Les députés également insistent pour que cette diminution ne se reproduise plus car si cette tendance ce confirme, l’UE aura octroyé 75 milliards EUR de moins que ce qui avait été promis pour la période 2005-2010. Ils s'inquiètent également du fait que de nombreux États membres aient diminué (parfois drastiquement) leur aide ou qu’ils financent parfois rétroactivement les augmentations de l'aide, générant ainsi pour les pays en développement une perte nette de plus de quelque 17 milliards EUR. Il faut plutôt favoriser la fixation d’échéanciers contraignants, comme le font certains États membres pour atteindre l'objectif des Nations unies de 0,7% d'ici 2015, notamment dans la perspective de la prochaine Conférence internationale sur le financement du développement. Globalement donc, les députés appellent les États membres à augmenter durablement les niveaux d'AOD.

Vitesse, flexibilité, prévisibilité et durabilité des flux financiers : outre l’octroi de l’aide elle-même, les députés estiment que celle-ci doit obéir à un certain nombre de règles pour être réellement efficace : celle-ci doit être fournie dans des délais raisonnables, être flexible de façon à réagir à des situations changeantes comme l'augmentation du prix des denrées alimentaires, mais aussi prévisible afin que les pays partenaires puissent planifier leur développement durable. Il faut en outre que les principes des prêts et du financement responsables soient strictement respectés.

Dette et fuite des capitaux : les députés saluent et appuient les efforts déployés par les pays en développement pour maintenir la viabilité à long terme de la dette et mettre en œuvre l'Initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE). Ils regrettent toutefois que les plans d'allègement de la dette excluent un grand nombre de pays pour lesquels la dette demeure un obstacle au développement. Plus loin, les députés appellent la Commission à aborder la question de la dette "détestable" ou illégitime (c'est-à-dire les dettes dues à des prêts irresponsables, égoïstes, inconsidérés ou inéquitables) en lui demandant d'intervenir pour limiter, à l'occasion de procédures judiciaires, les droits des créanciers commerciaux. Parallèlement, tous les États membres sont appelés à adhérer au cadre de viabilité de la dette et à reconnaître que la responsabilité des prêteurs ne se limite pas au respect du cadre de viabilité, mais également à:

  • prendre en compte la vulnérabilité des pays emprunteurs aux chocs extérieurs,
  • intégrer des exigences de transparence de l'emprunt;
  • assumer une obligation de vigilance afin que les prêts ne contribuent pas à des violations des droits de l'homme ni à accroître la corruption.

Les députés prient donc l'Union de mettre en place avec ses partenaires internationaux, des procédures internationales d'insolvabilité ou d'arbitrage permettant de traiter toute nouvelle crise de la dette de façon efficace et équitable.

La Commission est également critiquée pour son manque d’initiative pour éviter la fuite des capitaux car celle-ci porte lourdement atteinte au développement de structures économiques viables dans les pays en développement. Il faut donc, conformément au Consensus de Monterrey, mettre un terme aux paradis fiscaux dont certains sont situés sur le territoire même de l'Union ou sont étroitement liés à des États membres. Ils rappellent au passage que la fuite des capitaux représente chaque année 1.000 à 1.600 milliards de dollars selon la Banque mondiale, dont la moitié provient des pays en développement. Des mesures s’imposent dès lors tant de la part de la Commission que des États membres pour promouvoir l'extension au niveau mondial du principe d'échange automatique en matière fiscale et pour mettre en place un Code de conduite contre l'évasion fiscale tel que celui en cours d'élaboration au Conseil économique et social des Nations unies (ECOSOC).

Mécanismes de financement novateurs : si les députés se réjouissent des nouveaux mécanismes de financement présentés par les États membres, ils souhaitent que ceux-ci soient simples à mettre en œuvre et efficaces. Ces instruments devraient être en mesure de procurer de nouvelles sources de financement et d’offrir des garanties de crédit. Parallèlement, la Commission est appelée à améliorer le financement des mesures d'adaptation au changement climatique. Ils soulignent notamment que des mécanismes financiers novateurs devraient être mis en place sans délai à cet effet, comme des taxes sur l'aviation et le pétrole ou l'affectation du produit de la mise aux enchères de quotas d'émissions dans le cadre du SCEQE (Système communautaire d'échange de quotas d'émissions). Ils saluent en particulier la proposition de la Commission d'établir un mécanisme mondial de financement de la lutte contre le changement climatique, fondé sur le principe du dégagement anticipé des aides destinées au financement des mesures d'adaptation et d'atténuation dans les pays en développement. Dans l’attente de son entrée en vigueur, ils invitent l’UE à consacrer au moins 25% des recettes escomptées des enchères, dans le cadre du système communautaire d'échange de quotas d'émission, au financement des mesures de lutte contre le changement climatique dans les pays en développement.

Microcrédit : les députés invitent la Commission à ouvrir l'accès au crédit des petits entrepreneurs et des petits agriculteurs afin d'augmenter la production alimentaire et d'apporter une solution durable à la crise alimentaire. De même, la BEI est appelée à mettre en place un fonds de garantie destiné à promouvoir des modèles de microcrédit et de couverture des risques en phase avec les besoins des producteurs locaux de denrées alimentaires dans les pays en développement les plus pauvres.

La réforme des systèmes internationaux : enfin, les députés demandent au Conseil et à la Commission de budgétiser le Fonds européen pour le développement (FED) lors de la révision à mi-parcours 2008/2009, de façon à renforcer sa légitimité démocratique. Regrettant le système actuel de droits de vote au FMI, les députés demandent à la Commission et aux États membres de signifier leur intérêt pour une prise de décision à la double majorité (actionnaires/États) au sein de cette institution financière mondiale. Les États membres sont également appelés à réformer la Banque mondiale.