En adoptant à l’unanimité le
rapport d’initiative de Mme Véronique MATHIEU (PPE-DE, FR) sur le
contrôle budgétaire des fonds de l'UE en Afghanistan, la commission du
contrôle budgétaire rappelle qu’au cours des différentes conférences
internationales, l'Union européenne et la communauté internationale se sont
engagées à accorder à l'Afghanistan, une aide d'un montant supérieur à 8 milliards
EUR dont la part de l’Union se monte (entre 2002 et 2007) à 1,4 milliards EUR
(dont 174 Mios EUR au titre de l'aide humanitaire). Cette aide se décompose en
aides directes (970 Mios EUR ou 70% de l'aide communautaire) ou indirectes
distribuées par le canal des ONG européennes ou par les Nations unies (13%
des fonds) et la Banque mondiale (17% des fonds).
Bilan de l'utilisation des
fonds européens : faisant le point sur les secteurs prioritaires de
l’aide octroyée à l’Afghanistan, les députés indiquent qu’il existe, grosso
modo, 2 sources principales de difficultés rencontrées pour la distribution
de l'aide internationale: 1) la faible capacité d'absorption du pays
sur les plans économique et administratif ; 2) le manque de
coordination entre les donateurs et les autorités afghanes. Pour les
députés, le manque de coordination est principalement lié à la carence des
structures gouvernementales locales et à l'absence d'une véritable stratégie
gouvernementale. En outre, la multiplicité des donateurs et leur volonté
d'affirmer leur visibilité ont largement contribué à des stratégies
nationales isolées, voire dans certains cas à des doubles emplois dommageables.
C’est ce manque de coordination, favorisant la corruption, qui a contribué à
pénaliser la reconstruction du pays jusqu’ici.
Les parlementaires déplorent également
la piètre qualité de la gestion des fonds par l'administration centrale
afghane. Il est donc temps d’adapter l'aide de l'UE en conséquence, notamment
pour la phase future de l’aide (2010-2013). De son côté, le gouvernement
afghan doit faire de la mise en place d'un État de droit et de la lutte
contre la corruption et le trafic de drogues une de ses priorités politiques
majeures, sans quoi, aucun progrès durable ne pourra être mis en œuvre en
Afghanistan.
Les députés mettent toutefois en
évidence les secteurs où les progrès ont été les plus sensibles : soins
de santé, éducation et infrastructures (routières notamment). La mortalité
infantile a également drastiquement diminué (de 22% en 2001 à 12,9% en 2006)
et les premiers signes de développement se font jour en matière d'éducation
et d'égalité des genres.
Renforcer les contrôles :
pour s’assurer que l’aide européenne arrive à bon port, les députés appellent
la Commission à utiliser au mieux l’arsenal juridique dont elle dispose pour
défendre les intérêts financiers de l'Union en Afghanistan. Ils rappellent que
la Cour des comptes européenne peut aussi effectuer des contrôles, de même
que toutes les agences des Nations unies et la Banque mondiale. Les députés souhaitent notamment que les Nations unies et les autres
organisations internationales gérant les fonds de l'UE, coopèrent avec la Cour des comptes et l'Office européen de lutte antifraude (OLAF), ainsi qu'avec l'Unité
d'inspection commune des Nations unies pour assainir l’octroi des fonds. Les
députés mettent également l'accent sur la nécessité d'améliorer la
coordination des dons entre les donateurs en Afghanistan et en appellent à
des mesures draconiennes pour améliorer l'efficacité du soutien apporté par
l'UE et augmenter sa visibilité.
Les députés font ensuite une
série de recommandations pour améliorer la qualité et l’efficacité de l’aide.
Les principales recommandations peuvent se résumer comme suit :
- en matière de coordination
et de visibilité de l'aide internationale: les députés exigent que l’on
résolve le problème de manque de coordination de l'aide financière à
l'Afghanistan, et ce, à tous les niveaux (aide des États membres et aide
de l’UE). La Commission est appelée à élaborer une stratégie impliquant
les donateurs et les autorités afghanes, dans ce domaine, stratégie à incluant
des mesures d’harmonisation des procédures d’octroi. Les députés
demandent également des mesures destinées à renforcer l’efficacité de l’aide.
Entre autres mesures, les députés demandent la clarification des
modalités de gestion des aides directes au budget afghan, notamment par
un renforcement du contrôle parlementaire sur ce type d’aide ainsi que l’augmentation
de la transparence des fonds octroyés. Les députés demandent en outre une
évaluation de l’ensemble des opérations de coopération de la Communauté
en Afghanistan ainsi qu’une meilleure visibilité des actions de l'Union,
tant localement que vis-à-vis des citoyens européens. Les députés
soulignent, par ailleurs, l’urgente nécessité d’octroyer des ressources
financières suffisantes à des actions en faveur de l'égalité entre les
sexes ;
- au niveau des secteurs
prioritaires de l'aide : les députés souhaitent que l’accent soit
prioritairement mis sur les problèmes affectant la vie quotidienne, la
santé, la sécurité et l'accès aux services publics et l'éducation de
base des afghans. Il s’agit de se concentrer sur la réforme du système
de justice pénale, notamment la police et le pouvoir judiciaire, en
garantissant le respect des droits de l'homme, des droits des femmes et
des enfants, sur la lutte contre la pauvreté, le développement rural et
le règlement du problème majeur de la production d'opium. Des efforts
devraient également être faits pour renforcer les capacités locales. Par
ailleurs, les députés souhaitent que l’on renforce le contrôle
budgétaire des fonds octroyés au titre de la mission de police en Afghanistan
(EUPOL Afghanistan). Ils attirent en outre l’attention sur le
développement de l'agriculture en vue de prévenir une possible crise
humanitaire ainsi que sur la nécessité de lutter contre la toxicomanie
(notamment, celles des femmes).
- en matière de contrôle des
fonds de l'Union: une fois de plus, les députés exigent un net
renforcement des contrôles sur la gestion de l'aide financière de
l'Union. Ils demandent à la Commission de fournir au Parlement européen
un rapport annuel en la matière. Ils demandent que tant la Commission que
l'OLAF restent mobilisées pour contrôler la destination des aides et diligentes
des enquêtes sur place, si nécessaire. Les députés s’inquiètent par
ailleurs du sort des humanitaires largement exposés à des risques d’attentat.
Sur place, la détérioration de la sécurité entraîne de graves
difficultés pour le personnel de la délégation de la Commission à Kaboul
notamment et augmente les coûts de gestion des projets soutenus par la Commission. C’ est pourquoi, les députés demandent à la Commission de renforcer les
effectifs de cette délégation, compte tenu du contexte prévalant en
Afghanistan et d’augmenter les financements liés à la sécurité des
coopérants ;
- au niveau de l'assistance
au développement de la capacité de l'administration afghane : les
députés souhaitent que des efforts plus résolus soient mis en œuvre pour
renforcer les institutions afghanes et lutter contre la corruption. Pour
les députés, il est essentiel de renforcer les programmes de bonne
gouvernance et de formation du personnel de l'administration et de la
police. Les députés insistent pour que la communauté internationale
obtienne du gouvernement afghan une plus grande transparence dans
l'allocation des ressources aux provinces et aux autorités locales. Ils demandent
également une plus grande implication des organisations locales et des acteurs
non étatiques à la mise en œuvre des actions ainsi qu’un rapprochement des
délégations interparlementaires du Parlement européen et des deux
chambres du parlement afghan (la Wolesi Jirga et la Meshrano Jirga) en vue de favoriser la bonne gouvernance parlementaire. Les députés insistent enfin
sur le développement de partis politiques, de la société civile et des
médias en Afghanistan. Ils mettent notamment l’accent sur la nécessité
de prévoir un budget électoral spécifique dans la perspective de
prochaines élections dans ce pays. Globalement, les députés en appellent
à un net accroissement des moyens dévolus à la lutte contre le trafic de
stupéfiants et à l'abandon définitif de la culture du pavot, comme ils l’ont
déjà souligné dans d’autres résolutions parallèles.