En adoptant le rapport de M. Claudio FAVA (PSE, IT), la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures a modifié la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil prévoyant des sanctions à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.
Les principaux amendements adoptés commission (en 1ère lecture de la procédure de codécision) sont le fruit d’un compromis négocié avec le Conseil et peuvent se résumer comme suit :
Objectifs de la directive : tout en regrettant l’étroitesse du champ d’application de la directive (qui conformément à sa base juridique -article 63, paragraphe 3, point b), du traité CE- ne couvre pas les mesures se rapportant aux ressortissants de pays tiers qui résident légalement dans l'UE mais qui peuvent également être victimes de conditions de travail abusives), les députés ont clarifié le cadre proposé afin de délimiter les objectifs de la directive : celle-ci vise à interdire l'emploi de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier afin de lutter contre l'immigration illégale. Elle ne s'applique donc pas aux ressortissants de pays tiers qui se trouvent en séjour régulier dans les États membres (qu'ils soient ou non autorisés à travailler sur leur territoire) ou même aux ressortissants des États membres qui sont entrés dans l'UE depuis 2004 et 2007 et qui font toujours l'objet de dispositions transitoires (ce qui limite leur libre accès au marché du travail d'un certain nombre des États membres de l'UE-15). Elle vise exclusivement à interdire l'emploi de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier et à imposer, dans ce contexte, des peines minimales communes à l'encontre des employeurs des États membres qui enfreignent cette interdiction.
Obligations des employeurs : des dispositions ont été introduites pour simplifier les obligations imposées aux employeurs en matière d’information relative aux périodes d’emploi des ressortissants de pays tiers qu’ils emploient. La procédure d’information pourra ainsi être simplifiée lorsque l'employeur est une personne physique et qu'il emploie une personne à des fins privées.
Sanctions financières : outre les sanctions déjà prévues, les employeurs en infraction pourraient être tenus de payer des contributions aux frais de retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Il est toutefois proposé que les États membres puissent réduire la portée des sanctions financières lorsqu’il s’agit de personnes physiques employant un ressortissant de pays tiers en séjour illégal à des fins privées et à condition que ses conditions de travail ne sont particulièrement abusives.
Paiement des arriérés par les employeurs : des dispositions nouvelles ont été introduites pour prévoir, entre autre, que l'employeur en infraction puisse être tenu de verser aux ressortissants de pays tiers, tout salaire impayé correspondant au travail effectué ainsi que toutes cotisations sociales et impôts dus. Si le niveau de rémunération ne peut pas être déterminé, il devrait être présumé au moins égal au salaire minimum de l’État membre concerné durant une période de 3 mois, ou conforme aux conventions collectives ou pratiques applicables dans le secteur professionnel pertinent.
Autres mesures : en cas de situation particulièrement grave, les États membres pourraient en outre prévoir que les employeurs soient exclus du bénéfice de certaines subventions publiques, marchés publics ou de fonds communautaires gérés par les États membres pendant une période de 5 ans. Les États membres peuvent également décider qu'une liste d'employeurs reconnus coupables d'infractions pénales soit rendue publique.
Sous-traitance : si l'employeur est un sous-traitant, les États membres devront s’assurer qu’il soit redevable, en lieu et place de l'employeur, des sanctions requises.
Circonstances aggravantes : pour garantir la pleine efficacité de l'interdiction générale, des sanctions plus dissuasives devront être prévues dans des cas particulièrement graves, tels que les infractions répétées de manière persistante, l'emploi illégal d'un nombre important de ressortissants de pays tiers, des conditions de travail particulièrement abusives (lorsque l'employeur sait que le travailleur est victime de la traite d'êtres humains) et notamment lorsque l'emploi illégal concerne un mineur.
Facilitation des plaintes : des dispositions sont prévues pour permettre aux ressortissants de pays tiers employés illégalement de porter plainte à l'encontre de leurs employeurs, directement ou par l'intermédiaire de tiers désignés par les États membres (un syndicat ou une association). Pour favoriser la dénonciation de conditions de travail particulièrement graves (y compris l’emploi de mineurs), il est également prévu que les États membres puissent accorder aux ressortissants de pays tiers qui collaborent avec les autorités compétentes, et au cas par cas, des permis de séjour temporaires, selon des modalités comparables à celles qui existent déjà pour les ressortissants de pays tiers qui répondent aux conditions de la directive 2004/81/CE.
Inspections : pour réduire autant que possible les écarts d'exécution dans la mise en œuvre de la directive, les États membres devront veiller à ce que des inspections efficaces soient effectuées sur leur territoire respectif, et communiquer à la Commission des données annuelles sur les inspections qu'ils effectuent. Les secteurs inspectés seront notamment ceux qui, après une analyse des risques, concentrent le plus d'emplois illégaux.
Dispositions plus favorables : la directive visant à prévoir des normes minimales, les États membres demeurent libres d'adopter ou de maintenir des sanctions, des mesures et des obligations pour les employeurs, plus sévères.
Rapports : après 3 ans, la Commission sera tenue de faire rapport sur la mise en œuvre de la directive, et ensuite tous les 3 ans. Ces rapports devront être transmis au Parlement européen et inclure, le cas échéant, des propositions de modification des principales dispositions de la directive.
Transposition : la directive devrait être transposée dans un délai de 2 ans après son entrée en vigueur.