Le Parlement européen a adopté par 561 voix pour, 24 voix contre et 34 abstentions, une résolution législative approuvant, sous réserve d’amendements, la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant établissement d'une facilité de réponse rapide à la flambée des prix alimentaires dans les pays en développement.
Le rapport avait été déposé en vue de son examen en séance plénière par M. Gay MITCHELL (PPE-DE, IE), au nom de la commission du développement.
Globalement, le Parlement soutient la proposition de la Commission mais réaffirme sa volonté de dûment financer cet instrument, en ne compromettant pas le financement des autres priorités budgétaires de l’UE. La résolution législative précise dans ce contexte que le montant de référence figurant dans la proposition législative n'est pas, tel quel, compatible avec le plafond de la rubrique 4 du cadre financier pluriannuel, sans un ajustement du plafond des perspectives financières. Un accord sur le financement de la facilité a donc été nécessaire entre les deux branches de l’autorité budgétaire, et a été obtenu au terme de la concertation budgétaire intervenue le 21 novembre 2008.
Sur le fond de la proposition, le Parlement a adopté, en 1ère lecture de la procédure de codécision, de nombreux amendements qui sont le fruit d’un accord entre le Parlement européen et le Conseil.
Les principaux amendements peuvent se résumer comme suit :
Financement de la facilité: le montant total de référence financière pour la mise en œuvre du règlement est fixé à 1 milliard EUR au cours de la période 2008-2010 et sera financé via un mécanisme complexe. Pour éviter d’utiliser les fonds excédentaires de la rubrique 2 du budget de l’Union, comme l’avait proposé la Commission dans sa proposition initiale, le Parlement et le Conseil se sont mis d’accord le 21 novembre 2008 au cours de la réunion de concertation budgétaire, pour financer la facilité via 3 sources différentes : la mobilisation de l'instrument de flexibilité, l’extension de la réserve pour l'aide d'urgence et le redéploiement des fonds au sein de la rubrique 4 du budget "relations extérieures" (sur ce point, se reporter à la procédure budgétaire 2009, projet de budget amendé du Conseil, voir BUD/2008/2026).
Champ d’application : l’objectif majeur de la facilité sera de permettre à la Communauté de financer des mesures destinées à soutenir une réponse rapide et directe à la volatilité des prix alimentaires dans les pays en développement, principalement au cours d'une période située à mi-chemin entre l'aide d'urgence et la coopération au développement à moyen et à long terme. L'aide devra être gérée de manière à accroître l'offre de denrées alimentaires en faveur des populations locales. Chaque fois que cela sera possible, les programmes d'action seront élaborés en concertation avec les organisations de la société civile qui seront associées à la mise en œuvre des projets financés. Afin d'optimiser l'utilité et les effets du règlement, les ressources devront être concentrées sur une liste limitée de pays cibles hautement prioritaires, retenus sur base de critères définis à l'annexe, et en coordination avec d'autres bailleurs de fonds et d'autres partenaires du développement comme les agences spécialisées des Nations unies. La Plénière n’a donc pas suivi sur ce point la ligne de sa commission au fond qui avait identifié une liste de 35 pays prioritaires.
Objectifs prioritaires : l’objectif de la facilité est de contribuer à la sécurité alimentaire des pays en développement, en fonction de leurs propres besoins et de leurs propres plans. Dans ce contexte, les objectifs prioritaires de la facilité sont revus de telle sorte qu’elle vise à : a) encourager une réaction positive, sous la forme d'un accroissement de l'offre, du secteur agricole des pays et régions cibles; b) atténuer les effets négatifs de la volatilité des prix alimentaires sur les populations locales, c) renforcer les capacités de production et la gouvernance du secteur agricole afin d'améliorer la pérennité des interventions. Dans l’ensemble, les mesures envisagées devront être cohérentes et coordonnées avec les instruments de la politique de développement de l’Union (ICD, Accord de Cotonou,…).
Mise en œuvre : tout en prenant en compte la situation qui prévaut dans les pays-cibles, les mesures de soutien seraient essentiellement les suivantes: i) mesures destinées à améliorer l'accès aux intrants et services agricoles (engrais, semences,…) en accordant une attention particulière aux infrastructures locales ; ii) mesures de type "filet de sécurité", visant à préserver ou à améliorer la capacité de production agricole et à satisfaire les besoins en aliments de base des populations les plus vulnérables, y compris les enfants ; iii) mesures mises en œuvre à petite échelle et visant à accroître la production en fonction des besoins des pays (microcrédit, investissement, équipement, infrastructures, stockage) ainsi que formation professionnelle et soutien aux catégories professionnelles du secteur agricole. L’ensemble de ces mesures devront être mises en œuvre en conformité avec la déclaration sur l'efficacité de l'aide (Déclaration de Paris de 2005) et avec le programme d'action adopté par le forum d’Accra sur l'efficacité de l'aide. La mise en œuvre sera axée sur les petites et moyennes exploitations d'agriculture familiale et vivrière, en particulier celles gérées par des femmes, et sur les populations pauvres les plus touchées par la crise alimentaire, en évitant toute forme de distorsion de la production et des marchés locaux. L’appui administratif aux mesures envisagées pourra être pris en charge financièrement à hauteur de 2% du montant total de financement de la facilité.
Éligibilité : l’ensemble des dispositions relatives aux conditions d’éligibilité ont été revues afin d’étendre la liste des entités pouvant bénéficier d'un financement aux pays et régions partenaires ainsi que leurs institutions, aux municipalités, provinces, départements et régions des pays partenaires, aux organismes mixtes institués par ces pays ou leurs régions, aux organisations internationales (type Nations unies, institutions financières internationales, etc.), aux institutions et organes de la Communauté, aux agences de l'Union ainsi qu’à tout organisme pouvant répondre aux critères définis dans le règlement (CE) n° 1905/2006 (ICD). Il est précisé qu’un juste équilibre devra être observé dans la répartition des ressources octroyées par cet instrument (sans préciser de montant limite ou de pourcentage à respecter entre entités).
Types de financements : la liste des types de financement communautaire a également été revue, notamment pour y inclure un appui budgétaire aux pays partenaires, en particulier un appui budgétaire sectoriel, lorsque la gestion des dépenses publiques de l'État le permet, ou encore des contributions directes versées à des organisations internationales ou régionales. La BEI pourrait également recevoir des fonds via la présente facilité pour qu’elle puisse octroyer à son tour des prêts ou capitaux à risques.
Comitologie : la procédure de comitologie a été revue de telle sorte que les décisions de financement soient décidées via la procédure du comité de gestion. Une déclaration conjointe du Parlement, du Conseil et de la Commission, annexée au règlement, prévoit que la procédure de prise de décision pour l'adoption des mesures de mise en œuvre soit aussi simple et rapide que possible durant la période allant jusqu'au 30 avril 2009 et décrit les modalités techniques à appliquer pour informer le Parlement. Á compter du 1er mai 2009, l'aide sera mise en œuvre conformément à un « Plan général relatif à l'utilisation de la facilité » incluant la liste des pays cibles visés par le règlement et la répartition des ressources entre entités éligibles. Ce Plan devra être soumis au Parlement européen, conformément à la procédure de gestion.
Cohérence et complémentarité : des dispositions ont été introduites pour souligner une mise en œuvre cohérente et complémentaire de cet instrument avec toutes mesures appropriées en matière de développement. Á court terme, les mesures doivent viser à aider les populations les plus directement et les plus gravement touchées par la flambée ou la volatilité des prix alimentaires ; à moyen terme, les mesures doivent être de nature structurelle et viser à empêcher que la crise alimentaire actuelle ne se reproduise.
Contrôle des aides : les mesures de contrôle prévues ont été renforcées de la telle sorte que la Cour des comptes puisse effectuer des audits sur place pour vérifier la légalité des contrats conclus et de la mise en œuvre des aides.
Évaluation : la Commission devra assurer le suivi des actions mises en œuvre, éventuellement par le biais d'évaluations externes indépendantes, afin de s'assurer que les objectifs ont été atteints et que la Commission puisse être en mesure d'améliorer les futures actions de coopération au développement pertinentes. Les propositions faites par le Parlement ou le Conseil concernant ces évaluations devront être prises en compte et le Parlement devra être informé des rapports d'évaluation rédigés.
Rapport : la Commission devra présenter un rapport de mise en œuvre au Parlement européen et au Conseil pour le 31 décembre 2012 au plus tard. En décembre 2009, la Commission devra également présenter au Parlement et au Conseil un rapport intermédiaire sur les mesures prises.
Annexe : l’annexe de la proposition a été revue afin de fixer des critères indicatifs à appliquer pour sélectionner les pays cibles et allouer les ressources financières. Les critères à prendre en compte seront ceux du niveau global de pauvreté et des besoins réels des populations ainsi que l’évolution des prix des denrées alimentaires et ses conséquences socio-économiques potentielles sur la population (dépendance à l'égard des importations de denrées alimentaires, vulnérabilité sociale et stabilité politique, effets macroéconomiques de l'évolution des prix,…), etc. Les dotations financières devront également tenir compte de la taille de la population du pays ciblé.