Mise en oeuvre dans l'UE de la Directive 2003/9/CE sur les conditions d'accueil des demandeurs d'asile et refugiés: visites de la commission LIBE de 2005 à 2008

2008/2235(INI)

En adoptant le rapport d’initiative de Mme Martine ROURE (PSE, FR) sur la mise en œuvre dans l'Union européenne, de la directive 2003/9/CE sur les conditions d'accueil des demandeurs d'asile et refugiés, la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures fait le bilan de 3 ans de mise en œuvre mais aussi de visites de ladite commission parlementaire (LIBE) dans les États membres -entre 2005 et 2008- pour vérifier la mise en œuvre de la directive.

Remarques générales et procédures d'asile : les députés regrettent tout d’abord que certaines des visites effectuées aient mis en lumière le fait que les directives existantes en matière d’asile sont mal, voire pas du tout appliquées dans certains États membres. Ils demandent donc à la Commission de prendre les mesures nécessaires pour assurer la transposition des directives et de faire respecter leur contenu intégral, car les carences constatées en matière d'accueil sont parfois considérables. Dans ce contexte, les députés se félicitent de la récente proposition de refonte de la directive 2003/9/CE (voir COD/2008/0244) qui devrait permettre d'assurer des normes de traitement plus élevées pour les demandeurs d'asile. Les députés exigent également que l’on mette en place, en coopération avec le Parlement européen, un système de visite et d'inspection permanent dans les États membres. Ils souhaitent en outre que la commission LIBE du Parlement poursuive ses visites dans les États membres afin de garantir le respect du droit communautaire en matière de conditions d'accueil et que l’on organise un débat annuel au Parlement sur les résultats de ces visites.

Les députés font ensuite un état des lieux de l’application de la directive et constatent ce qui suit :

  • accueil : les députés regrettent tout particulièrement que la capacité des centres d’hébergement ouverts mis en place par certains États membres soit faible et demandent que l'accueil des demandeurs d’asile et des immigrés soit effectué en priorité dans des centres ouverts plutôt que dans des unités fermées. Les députés estiment également que les conditions d'accueil de base, telles que la nourriture, le logement et les soins de santé d'urgence ne devraient jamais être refusées, dès lors que ce refus pourrait constituer une violation des droits fondamentaux des demandeurs d'asile. Ils appellent également les États membres à trouver un juste équilibre entre rapidité des procédures de traitement des demandes et traitement juste de chaque cas individuel ;
  • accès à l'information et droit à l'interprétation : sachant que les délais sont parfois très courts pour les réfugiés et que l’information qui leur est délivrée, n’existe que dans une langue qu’ils ne comprennent pas, les députés demandent que des brochures expliquant tous les droits des demandeurs soient mises à leur disposition, y compris sur Internet. Les députés s’alarment notamment du fait qu’il manque de nombreux interprètes pour permettre aux demandeurs d’asile de comprendre ce qu’il leur est demandé en entretien. Ils encouragent donc les États membres à faire appel à l'assistance financière du Fonds européen pour les réfugiés, pour améliorer l'accès à l'information et notamment pour augmenter le nombre de langues dans lesquelles les informations sont proposées aux demandeurs ;
  • assistance juridique : les députés regrettent que l'accès à une assistance juridique gratuite semble restreinte pour les demandeurs d’asile placés en rétention. Ils appellent donc les États membres à garantir l'accès à une assistance juridique et/ou une représentation gratuite dans tous les cas même si les demandeurs ne peuvent acquitter les coûts y afférant ;
  • rétention : il s’agit là du principal grief fait aux États membres. Les députés regrettent ainsi qu'un certain nombre d'États membres aient de plus en plus recours à la rétention. Or, pour les députés, une personne ne doit en aucun cas être placée en rétention pour l'unique raison qu'elle demande une protection internationale. Il s’agit, pour eux, d’une mesure de dernier recours, qui doit être proportionnée et appliquée pendant une période aussi brève que possible. Les députés s’inquiètent en particulier des conditions carcérales dans lesquelles les migrants irréguliers et demandeurs d'asile sont maintenus alors qu'ils n'ont commis aucun crime. Il faut donc qu’au minimum ces personnes soient placées dans des bâtiments distincts avec des conditions d'hygiène acceptables. Les députés regrettent notamment que l'accès aux soins de santé, et en particulier aux soins psychologiques, est souvent difficile. Les députés demandent en outre que les États membres publient un rapport annuel sur la situation de leurs centres fermés et qu’ils garantissent un contrôle régulier de ces centres, via la création d'un médiateur national en charge de ces lieux ;
  • mineurs non accompagnés et familles : une fois de plus, les députés demandent que la rétention des mineurs soit, par principe, interdite, et que le recours à la rétention des mineurs avec leurs parents soit exceptionnelle et ait pour objectif de garantir l'intérêt supérieur de l'enfant. Ils rappellent que tous les mineurs ont droit à l'éducation, qu'ils soient dans leur pays d'origine ou non et demandent aux États membres de garantir ce droit y compris lorsque le mineur est placé en rétention. Ils rappellent également que les mineurs ont le droit à bénéficier de loisirs adaptés à leur âge. Parallèlement, les États membres sont appelés à veiller à ce que les mineurs non accompagnés et les familles soient, même en rétention, logés dans des lieux d'hébergement séparés qui leur garantissent une intimité et une vie de famille appropriées. En ce qui concerne spécifiquement la situation des mineurs non accompagnés, les députés demandent qu'un gardien légal indépendant soit nommé pour chacun d’entre eux, aussi bien dans les zones d'attente telles que les aéroports et les gares, que sur le territoire des États membres. Ils appellent la Commission et les États membres à instaurer l'obligation de rechercher les membres des familles avec l’aide de la Croix Rouge et du Croissant Rouge. Les députés s’inquiètent notamment du fait que certains mineurs non accompagnés disparaissent et appellent les États membres à combattre ce phénomène en mettant par exemple en place des structures permettant de les accueillir et de leur offrir une formation adaptée. Les députés demandent encore que l’on mette en place un mécanisme harmonisé et fiable d'identification des mineurs non accompagnés et des règles communes concernant les contestations de leur âge. Ils rappellent au passage que durant une procédure de contestation d'âge, la personne doit, par précaution, être considérée comme mineure ;
  • personnes vulnérables : les députés s’inquiètent du sort des personnes vulnérables qui demandent l’asile et demandent à la Commission de définir des normes communes obligatoires pour l'identification de ces personnes (victimes de tortures ou de traite des êtres humains, personnes ayant besoin de soins de santé particuliers, femmes enceintes et mineurs). Pour les députés, ces personnes ne devraient pas être placées en rétention, étant donné que cela a des répercussions importantes sur leur état déjà fragile. Ils appellent donc les États membres à garantir une assistance spécialisée pour ces personnes, en particulier, une aide psychologique adaptée.

Système de Dublin : les députés se penchent enfin sur le système dit de « Dublin » pris dans son ensemble et déplorent que certains États membres limitent l'accès aux normes d'accueil aux seules personnes relevant du système de Dublin (c’est-à-dire aux candidats réfugiés pour lesquels un État membre a été désigné comme responsable de leur demande d’asile). Ils demandent dès lors à la Commission d'établir clairement les personnes auxquelles s’applique la directive 2003/9/CE afin de garantir que l’ensemble des droits conférés par la directive leur soit applicable.