Le Parlement européen a adopté
par 550 voix pour, 5 voix contre et 25 abstentions, une résolution sur le contrôle
budgétaire des fonds de l'UE en Afghanistan.
Le rapport d’initiative avait
été déposé en vue de son examen en séance plénière
par Mme Véronique MATHIEU (PPE-DE, FR), au nom de la commission
du contrôle budgétaire.
Le Parlement rappelle qu’au
cours des différentes conférences internationales, l'Union européenne et la
communauté internationale se sont engagées à accorder à l'Afghanistan, une
aide d'un montant supérieur à 8 milliards EUR dont la part de l’Union se
monte (entre 2002 et 2007) à 1,4 milliards EUR (dont 174 Mios EUR au titre de
l'aide humanitaire). Cette aide se décompose en aides directes (970 Mios EUR
ou 70% de l'aide communautaire) ou indirectes distribuées par le canal des
ONG européennes ou par les Nations unies (13% des fonds) et la Banque
mondiale (17% des fonds).
Bilan de l'utilisation des
fonds européens : faisant le point sur les secteurs prioritaires de
l’aide octroyée à l’Afghanistan, le Parlement indique qu’il existe, grosso
modo, 2 sources principales de difficultés rencontrées pour la distribution
de l'aide internationale: 1) la faible capacité d'absorption du pays
sur les plans économique et administratif ; 2) le manque de
coordination entre les donateurs et les autorités afghanes. Pour le
Parlement, le manque de coordination est principalement lié à la carence des
structures gouvernementales locales et à l'absence d'une véritable stratégie
gouvernementale. En outre, la multiplicité des donateurs et leur volonté
d'affirmer leur visibilité ont largement contribué à des stratégies
nationales isolées, voire dans certains cas à des doubles emplois
dommageables. C’est ce manque de coordination, favorisant la
corruption, qui a contribué à pénaliser la reconstruction du pays jusqu’ici.
Le Parlement déplore également
la piètre qualité de la gestion des fonds par l'administration centrale
afghane. Il est donc primordial que le prochain programme indicatif
pluriannuel 2010-2013 tienne dûment compte des résultats concrets de la lutte
contre la corruption et adapte l'aide de l'Union en conséquence dans ce pays.
De son côté, le gouvernement afghan devrait faire de la mise en place d'un
État de droit et de la lutte contre la corruption et le trafic de
drogues une de ses priorités politiques majeures, sans quoi, aucun progrès
durable ne pourra être mis en œuvre en Afghanistan.
Le Parlement met toutefois en
évidence les secteurs où les progrès ont été les plus sensibles : soins
de santé, éducation et infrastructures (routières notamment). La mortalité
infantile a également drastiquement diminué (de 22% en 2001 à 12,9% en 2006)
et les premiers signes de développement se font jour en matière d'éducation
et d'égalité des genres.
Renforcer les contrôles :
pour s’assurer que l’aide européenne arrive à bon port, le Parlement appelle
la Commission à utiliser au mieux l’arsenal juridique dont elle dispose pour
défendre les intérêts financiers de l'Union en Afghanistan. Il rappelle que
la Cour des comptes européenne peut aussi effectuer des contrôles, de même
que toutes les agences des Nations unies et la Banque mondiale ainsi que
l'Office européen de lutte antifraude (OLAF). Le Parlement met également
l'accent sur la nécessité d'améliorer la coordination des dons entre les
donateurs en Afghanistan et en appelle à des mesures draconiennes pour
améliorer l'efficacité du soutien apporté par l'UE et augmenter sa
visibilité.
Le Parlement fait ensuite une
série de recommandations pour améliorer la qualité et l’efficacité de l’aide.
Ces recommandations peuvent se résumer comme suit :
- en matière de coordination
et de visibilité de l'aide internationale: le Parlement exige que
l’on résolve le problème de manque de coordination de l'aide financière
à l'Afghanistan, et ce, à tous les niveaux (aide des États membres et
aide de l’UE). La Commission est appelée à élaborer une stratégie
impliquant les donateurs et les autorités afghanes. Il demande également
des mesures destinées à renforcer l’efficacité de l’aide. Entre autres
mesures, le Parlement demande la clarification des modalités de gestion
des aides directes au budget afghan par un renforcement du contrôle
parlementaire sur ce type d’aide ainsi que l’augmentation de la
transparence des fonds octroyés. Le Parlement souligne en outre
l’urgente nécessité d’octroyer des ressources financières suffisantes à
des actions en faveur de l'égalité des genres ;
- au niveau des secteurs
prioritaires de l'aide : le Parlement souhaite que l’accent soit
prioritairement mis sur les problèmes affectant la vie quotidienne, la
santé, la sécurité et l'accès aux services publics et l'éducation de
base des afghans. Il s’agit de se concentrer sur la réforme du système
de justice pénale, notamment la police et le pouvoir judiciaire, en
garantissant le respect des droits de l'homme, des droits des femmes et
des enfants, sur la lutte contre la pauvreté, le développement rural et
le règlement du problème majeur de la production d'opium. Des efforts
devraient également être faits pour renforcer les capacités locales. Par
ailleurs, le Parlement souhaite que l’on renforce le contrôle budgétaire
des fonds octroyés au titre de la mission de police en Afghanistan
(EUPOL Afghanistan). Il attire également l’attention sur le
développement de l'agriculture en vue de prévenir une possible crise
humanitaire ainsi que sur la nécessité de lutter contre la toxicomanie
(notamment, celles des femmes) ;
- en matière de protection
des humanitaires: le Parlement s’inquiète du sort des humanitaires
largement exposés à des risques d’attentat. Sur place, la détérioration
de la sécurité entraîne de graves difficultés pour le personnel de la
délégation de la Commission à Kaboul notamment et augmente les coûts de
gestion des projets soutenus par la Commission. C’ est pourquoi, le
Parlement demande à la Commission de renforcer les effectifs de cette
délégation, compte tenu du contexte prévalant en Afghanistan ;
- en matière de bonne
gouvernance : le Parlement souhaite que des efforts plus
résolus soient faits pour renforcer les institutions afghanes. Il semble
en effet essentiel que la Commission poursuive ses programmes de bonne
gouvernance et de formation du personnel de l'administration et de la
police afghanes. Le Parlement insiste encore pour que la communauté
internationale obtienne du gouvernement afghan une plus grande
transparence dans l'allocation des ressources aux provinces et aux
autorités locales. Il demande également une plus grande implication des
organisations locales et des acteurs non étatiques à la mise en œuvre
des actions ainsi qu’un rapprochement des délégations
interparlementaires du Parlement européen et des deux chambres du
parlement afghan (la Wolesi Jirga et la Meshrano Jirga ) pour favoriser
la bonne gouvernance parlementaire. Le Parlement insiste enfin sur le
développement de partis politiques, de la société civile et des médias
en Afghanistan. Il met notamment l’accent sur la nécessité de prévoir un
budget électoral spécifique dans la perspective de prochaines élections
dans ce pays. Globalement, le Parlement en appelle à un net
accroissement des moyens dévolus à la lutte contre le trafic de
stupéfiants et à l'abandon définitif de la culture du pavot, comme il
l’a déjà souligné dans des résolutions antérieures.