Problème du profilage, notamment sur la base de l'origine ethnique ou de la race, dans les opérations de contre-terrorisme, de maintien de l'ordre, de contrôle de l'immigration, des services des douanes et de contrôle aux frontières

2008/2020(INI)

En adoptant le rapport d’initiative de Mme Sarah LUDFORD (ADLE, RU), la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures propose que le Parlement adresse au Conseil une série de recommandations sur le problème du profilage, notamment sur la base de l'origine ethnique ou de la race, dans les opérations de contre-terrorisme, de maintien de l'ordre, de contrôle de l'immigration, des services des douanes et de contrôle aux frontières. Pour rappel, le profilage est une technique de recherche, que permettent les nouvelles technologies, fréquemment utilisée dans le secteur commercial, mais qui est aussi utilisée de plus en plus fréquemment pour faire appliquer la loi, pour identifier et prévenir les infractions, ainsi que dans le cadre du contrôle des frontières.

Sachant que les gouvernements des États membres font de plus en plus appel aux nouvelles technologies, en utilisant des programmes et des systèmes qui impliquent l'obtention, l'utilisation, la conservation ou l'échange d'informations sur les individus, de manière à pouvoir lutter contre le terrorisme ou faire face à d'autres menaces dans le cadre de la lutte contre la criminalité, et que la technique du profilage est de plus en plus utilisée dans ce contexte, les députés suggèrent l’adoption au niveau européen d’une définition claire du profilage, tenant compte de l'objectif précis à atteindre.

C’est dans ce contexte que les députés de la commission parlementaires font les recommandations suivantes :

  • tout traitement de données personnelles à des fins de maintien de l'ordre et de lutte contre le terrorisme devrait s'inscrire dans un dispositif juridique publié et imposant des limites d'utilisation qui soient claires, spécifiques et contraignantes et soumises au contrôle minutieux et effectif d'organismes indépendants chargés de la protection des données, avec sanctions sévères à l’appui en cas de violation des mesures envisagées (pour les députés, le stockage de données en masse à des fins préventives semble disproportionné par rapport aux besoins essentiels de la lutte contre le terrorisme);
  • il conviendrait de créer un cadre juridique définissant clairement en quoi doit consister le profilage, qu'il s'agisse de la "fouille" automatique des données informatisées ou de toute autre technique, en vue de définir des règles claires quant à la légitimité de son utilisation et de fixer des limites ; des garanties sont également réclamées en matière de protection des données concernant les individus ;
  • la collecte et la conservation de données personnelles et l'utilisation de techniques de profilage concernant des personnes qui ne sont pas soupçonnées d'un délit précis devraient être soumises à un contrôle particulièrement sévère des critères de "nécessité" et de "proportionnalité";
  • une distinction nette devrait être opérée entre les données factuelles, les données provenant du renseignement et les données relatives à différentes catégories de sujets;
  • il conviendrait de n'autoriser l'accès aux fichiers de police et des services de renseignement qu'au cas par cas, pour des finalités précises et sous contrôle des autorités judiciaires des États membres;
  • les dispositions législatives restrictives concernant le profilage ne devraient toutefois pas empêcher l'accès légitime aux bases de données dans le cadre de ces enquêtes ciblées;
  • il conviendrait de fixer une limite à la durée de conservation des données à caractère personnel;
  • la mise en place d'un haut niveau de protection des données personnelles n'exclut pas, selon les députés, la production de données statistiques anonymes comportant des variables concernant l'appartenance ethnique, la "race", la religion et l'origine nationale qui sont nécessaires pour identifier toute discrimination dans les mesures de maintien de l'ordre;
  • il conviendrait d'interdire la collecte de données à caractère personnel sur la seule base de l'origine raciale, de l'appartenance ethnique, des convictions religieuses, de l'orientation ou du comportement sexuels, des opinions politiques ou de l'appartenance à des mouvements ou organisations précis qui ne sont pas interdits par la loi, et d'établir les garanties nécessaires pour assurer la protection et des procédures de recours contre l'utilisation discriminatoire des instruments de maintien de l'ordre;
  • il conviendrait de mettre en place, par la voie législative, des garanties fortes permettant d'assurer un contrôle judiciaire et parlementaire approprié des activités des services de police et de renseignement, y compris de leurs activités contre le terrorisme;
  • les procédures de réparation devraient être réelles et accessibles (les personnes visées par les données devant disposer d'informations claires sur les procédures à suivre);
  • il conviendrait d'établir un ensemble de critères permettant d'évaluer l'efficacité, la légitimité et la compatibilité avec les valeurs de l'UE de toutes les opérations de profilage (le cas échéant, les députés suggèrent  l’instauration de règles contraignantes permettant d'éviter toute atteinte aux droits fondamentaux en cas de profilage) ;
  • le Conseil devrait commander une étude conduite sous la responsabilité de la Commission portant sur l'application effective et potentielle des techniques de profilage, leur efficacité en termes d'identification des suspects et leur compatibilité avec les exigences relatives aux libertés civiles, aux droits de l'homme et à la vie privée ; pour leur part, les États membres devraient être invités à fournir des chiffres sur leurs opérations de recherche et d'arrestation et autres interventions résultant du profilage.