Deuxième analyse stratégique de la politique énergétique

2008/2239(INI)

Le Parlement européen a adopté par 406 voix pour, 168 voix contre et 187 abstentions, une résolution appelant à considérer la deuxième analyse stratégique de la politique énergétique comme une base pour la mise en œuvre d’une politique européenne de l’énergie et l’élaboration d’un plan d’action ambitieux pour 2010-2012.

Les députés ont souligné que toute politique énergétique européenne doit poursuivre, de manière indissociable, trois objectifs principaux et d'importance égale, à savoir la sécurité d’approvisionnement et la solidarité entre les États membres, la lutte contre le changement climatique incluant un engagement fort de l’Union en faveur de ses propres objectifs et de leur réalisation, et la compétitivité. Dans ce contexte, ils invitent l’Union européenne et les États membres à devenir l’économie présentant le meilleur rendement énergétique afin de contribuer activement à la réalisation de l’objectif climatique de 2° C et à réduire de réduire d'au moins 80% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050.

Le Parlement se dit fermement convaincu que la réduction de la consommation d'énergie est la priorité absolue pour parvenir aux objectifs de développement durable, d'innovation, de création d'emplois et de compétitivité. Il appelle la Commission et les États membres à rendre l'objectif d'une économie d'énergie de 20% d'ici 2020 juridiquement contraignant pour les États membres et à proposer et à mettre en œuvre des mesures cohérentes pour assurer la réalisation de cet objectif. Il invite par ailleurs l'Union et les États membres à se fixer pour objectifs d'augmenter leur efficacité énergétique de 35% et d'augmenter à 60% la part des énergies renouvelables d'ici à 2050. La Commission est pour sa part encouragée à soutenir tous les investissements prévus dans de nouvelles infrastructures d’importation de l’énergie et dans les technologies des énergies renouvelables.

Politique européenne de l'énergie : au regard des risques croissants que court l'Union en termes de sécurité énergétique, le Parlement invite les États membres à parler d'une seule voix et souhaite que la Commission propose d'élaborer une politique européenne de l'énergie, dans le respect des compétences et des responsabilités respectives de l'Union et des États membres. Selon les députés, une politique européenne dans le domaine de l'énergie devrait se fonder sur un mix énergétique équilibré, basé sur le recours aux énergies non carbonées et aux énergies fossiles les moins émettrices ainsi que sur de nouvelles technologies permettant de réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre des énergies fossiles solides. Les députés soutiennent le plan d'action de l'Union en matière de sécurité et de solidarité énergétique et pensent que les États membres devraient élaborer des stratégies nationales pour s'attaquer au problème de la pauvreté énergétique sur leur territoire.

Promotion des infrastructures : la résolution note un retard très important dans la réalisation des réseaux prioritaires et d'intérêt européen du transport de l'énergie et invite par conséquent les autorités nationales de réglementation à prendre toutes les mesures possibles afin d'accélérer les investissements.

Le Parlement soutient les projets de diversification des voies et sources d’approvisionnement, particulièrement le développement d’un corridor gazier du sud comprenant les projets Nabucco, le gazoduc Turquie-Grèce-Italie (TGI) et South Stream. Il souligne la nécessité de collaborer avec les pays concernés, notamment dans la région de la mer Caspienne et considère particulièrement important qu’à long terme, lorsque les conditions politiques le permettront, la production d’autres pays de la région, comme l’Ouzbékistan et l’Iran, puisse représenter une autre source d’approvisionnement importante pour l’Union européenne. La résolution souligne également l'importance du développement des interconnexions gazières et électriques traversant l'Europe centrale et du Sud-est selon un axe nord-sud, en rappelant que les réseaux de la région de la mer Baltique devraient être développés et intégrés au réseau de l'Europe occidentale.

Les députés souhaitent un renforcement des relations et des partenariats avec les grands fournisseurs d'énergie, les pays de transit et les pays consommateurs. Ils appellent à la conclusion d'un accord tripartite entre l'Union, la Russie et l'Ukraine sur le transit du gaz de la Russie vers l'Union, afin de garantir la sécurité des approvisionnements pour les prochaines années. Ils estiment en outre qu’une capacité suffisante en gaz naturel liquéfié (GNL) composée d’infrastructures de liquéfaction dans les pays producteurs, de terminaux GNL et de systèmes de regazéification depuis les navires dans l’UE devrait être disponible dans tous les États membres, soit directement soit via d’autres États membres sur la base d’un mécanisme de solidarité.

Marché intérieur de l'énergie : le Parlement appelle la Commission et les États membres à définir, dans la durée, des orientations stratégiques tout en encourageant les acteurs industriels privés à participer à leur mise en œuvre, en équilibre entre mécanismes de marché et régulation. Il souligne l'importance de créer un cadre juridique stable et clair en concluant avant la fin de la législature en 2009 les négociations relatives au paquet législatif sur le marché intérieur de l'énergie.

La résolution demande aux États membres de coopérer pour l'élaboration d'un plan pluriannuel en vue de programmer les investissements nécessaires pour satisfaire les besoins futurs de production d'électricité, et préconise d’envisager un plan pluriannuel indicatif dans le secteur du gaz, afin de faire émerger une vue d'ensemble des besoins d'investissement à l'échelle européenne.

Relations extérieures : le Parlement invite la Commission à favoriser l'inclusion, dans les accords commerciaux, d'association et de partenariat ainsi que de coopération avec les pays producteurs et de transit, de la « clause de sécurité énergétique » qui établirait un code de conduite, interdirait toute perturbation due à des litiges commerciaux et énoncerait les mesures à prendre en cas de perturbation unilatérale ou en cas de modification des termes du contrat ou des conditions d'approvisionnement par l'un des partenaires.

La résolution invite l'Union à collaborer avec les pays de la Méditerranée (notamment d'Afrique du Nord) et avec les pays du Moyen-Orient compte tenu du potentiel important de ces pays en matière de ressources énergétique. Elle approuve également l'intention de négocier un nouvel accord de grande envergure destiné à remplacer l'accord de partenariat et de coopération conclu en 1997 avec la Russie, y compris le chapitre sur l'énergie, qui devrait pleinement respecter les principes du traité sur la charte de l'énergie et ses protocoles de transit. A cet égard, les députés soulignent la nécessité d'inclure l'Ukraine dans le dispositif européen de dialogue permanent avec la Russie en raison du rôle clé que l'Ukraine joue en tant que pays de transit.

La Commission est en outre invitée à envisager une extension du traité instituant la Communauté de l'énergie entre l'Union et le Sud-est de l'Europe à d'autres pays tiers et de créer avec les pays voisins de nouveaux marchés régionaux de l'énergie sur le modèle de la Communauté de l'énergie avec le Sud-est de l'Europe, notamment par exemple la Communauté de l'énergie Europe-Méditerranée.

Mécanismes de réponse aux crises : au vu de la récente crise relative au gaz entre l'Ukraine et la Russie, qui a affecté des pays de l'Union, la résolution  appelle la Commission européenne à proposer, avant la fin de 2009, une révision de la directive 2006/67/CE concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel. Pour les parlementaires, cette révision devrait notamment comprendre des plans d'actions d'urgence efficaces et obligatoires au niveau national et communautaire prévoyant :

  • une déclaration commune en cas de situation d'urgence ;
  • l'affectation des ressources et des infrastructures disponibles entre les pays touchés ;
  • la coordination de la répartition,
  • et le déclenchement des mesures d'urgence dans les pays non touchés ou moins touchés afin d'augmenter les volumes de gaz disponibles dans les pays affectés.

Ressources autochtones et énergie nucléaire : les députés pensent que les énergies renouvelables telles que l'éolien, le biogaz, le solaire, l'hydraulique, la biomasse, la géothermie et les ressources marines, sont les sources potentielles d'énergie les plus importantes de l'Union, qui peuvent contribuer à une stabilisation des prix de l'énergie et à une maîtrise de l'accroissement de la dépendance. L’exploitation des ressources fossiles autochtones, en particulier des gisements de gaz naturel sur terre ou en mer, peut contribuer à améliorer l'indépendance énergétique de l'Europe et doit être développée, lorsque cela est possible.

Le Parlement partage l’analyse de la Commission selon laquelle il est important de maintenir la contribution de l’énergie nucléaire dans le mix énergétique et, à cette fin, de promouvoir la mise en place d’un cadre réglementaire et économique harmonisé facilitant les décisions d’investissement nécessaires. La Commission est dès lors invitée à établir une feuille de route spécifique pour les investissements nucléaires.

Les députés soulignent que l’exploitation de l’énergie nucléaire dans l’Union doit se faire de manière sûre et transparente et au niveau technologique de sécurité le plus élevé possible, notamment pour ce qui est de la gestion des déchets nucléaires. Dans ce contexte, ils insistent sur la nécessité de promouvoir l’adoption par les pays voisins de l’acquis communautaire en matière de sûreté nucléaire chaque fois que la construction d’une nouvelle centrale nucléaire est prévue ou qu’une ancienne centrale est modernisée dans ces pays. Ils  appellent également  la Commission et le Conseil à développer avec l’AIEA des modèles et procédures visant à empêcher que l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire n’entraîne une prolifération des armes nucléaires.