Le Parlement européen a modifié, en 1ère lecture de la procédure de codécision, la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil prévoyant des sanctions à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.
Le vote sur la résolution législative a été reporté à une session ultérieure, conformément à l’article 51, paragraphe 2 du règlement intérieur du Parlement. Dans l’attente de ce vote définitif, les députés se sont prononcés sur les principaux amendements suivants, fruits d’un compromis négocié avec le Conseil :
Objectifs de la directive : le Parlement a clarifié le cadre proposé afin de délimiter les objectifs de la directive : celle-ci vise à interdire l'emploi de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier afin de lutter contre l'immigration illégale. À cette fin, elle fixe des normes minimales communes concernant les sanctions et les mesures applicables dans les États membres à l'encontre des employeurs qui enfreignent cette interdiction.
Définitions : conformément au projet de directive, les "ressortissant d'un pays tiers", doivent être compris comme toute personne n'étant ni un citoyen de l'Union (au sens de l'article 17, par. 1, du traité), ni une personne jouissant du droit communautaire à la libre circulation (telle que définie à l'article 2, point 5, du code frontières Schengen). Le projet de directive comporte également d’autres définitions ayant trait à l’ »emploi », à l’ »employeur », à une « personne morale », à « une agence de travail temporaire », aux « conditions de travail particulièrement abusives » et à la « rémunération de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ».
Obligations des employeurs : des dispositions ont été introduites pour simplifier les obligations imposées aux employeurs en matière d’information. La procédure d’information pourra ainsi être simplifiée lorsque l'employeur est une personne physique et qu'il emploie une personne à des fins privées. Les États membres pourront également prévoir que l'information à délivrer ne soit pas requise lorsque l'employé s'est vu octroyer une autorisation de séjour à long terme conformément à la directive 2003/109/CE sur les résidents de longue durée. Par ailleurs, le compromis précise que les employeurs ne pourront être tenus pour responsables d'un emploi illégal s’ils s’acquittent de ce qui est prévu à la directive en matière de vérification du permis de séjour des ressortissants de pays tiers qu’ils emploient, à moins qu'ils ne sachent pertinemment que le document présenté est un faux.
Sanctions financières : outre les sanctions déjà prévues, les employeurs en infraction pourraient être tenus de payer des contributions aux frais de retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Il est toutefois proposé que les États membres puissent réduire la portée des sanctions financières lorsqu’il s’agit de personnes physiques employant un ressortissant de pays tiers en séjour illégal à des fins privées et à condition que ses conditions de travail ne soient particulièrement abusives.
Paiement des arriérés par les employeurs : des dispositions nouvelles ont été introduites pour prévoir, entre autre, que l'employeur en infraction puisse être tenu de verser aux ressortissants de pays tiers, tout salaire impayé correspondant au travail effectué ainsi que toutes cotisations sociales et impôts dus. Si le niveau de rémunération ne peut pas être déterminé, il devrait être présumé au moins égal au salaire minimum de l’État membre concerné durant une période de 3 mois, ou conforme aux conventions collectives ou pratiques applicables dans le secteur professionnel pertinent. Les ressortissants de pays tiers employés illégalement devront en outre être systématiquement et objectivement informés des droits que leur confèrent la directive avant l'exécution de toute décision de retour.
Autres mesures : en cas de situation particulièrement grave, les États membres pourraient en outre prévoir que les employeurs soient exclus du bénéfice de certaines subventions publiques, marchés publics ou de fonds communautaires gérés par les États membres pendant une période de 5 ans. Les États membres peuvent également décider qu'une liste d'employeurs reconnus coupables d'infractions pénales soit rendue publique.
Sous-traitance : si l'employeur est un sous-traitant, les États membres devront s’assurer qu’il soit redevable, en lieu et place de l'employeur, des sanctions requises, sans préjudice des dispositions de la législation nationale relatives aux droits de contribution ou de recours ou en matière de sécurité sociale.
Circonstances aggravantes : pour garantir la pleine efficacité de l'interdiction générale, des sanctions plus dissuasives devront être prévues dans des cas particulièrement graves, tels que les infractions répétées de manière persistante, l'emploi illégal d'un nombre important de ressortissants de pays tiers, des conditions de travail particulièrement abusives (lorsque l'employeur sait que le travailleur est victime de la traite d'êtres humains) et notamment lorsque l'emploi illégal concerne un mineur.
Facilitation des plaintes : des dispositions sont prévues pour permettre aux ressortissants de pays tiers employés illégalement de porter plainte à l'encontre de leurs employeurs, directement ou par l'intermédiaire de tiers désignés par les États membres (un syndicat ou une association). Pour favoriser la dénonciation de conditions de travail particulièrement graves (y compris l’emploi de mineurs), il est également prévu que les États membres puissent accorder aux ressortissants de pays tiers qui collaborent avec les autorités compétentes, et au cas par cas, des permis de séjour temporaires, selon des modalités comparables à celles qui existent déjà pour les ressortissants de pays tiers qui répondent aux conditions de la directive 2004/81/CE.
Inspections : pour réduire autant que possible les écarts d'exécution dans la mise en œuvre de la directive, les États membres devront veiller à ce que des inspections efficaces soient effectuées sur leur territoire respectif, et communiquer à la Commission des données annuelles sur les inspections qu'ils effectuent. Les secteurs inspectés seront notamment ceux qui, après une analyse des risques, concentrent le plus d'emplois illégaux.
Dispositions plus favorables : la directive visant à prévoir des normes minimales, les États membres demeurent libres d'adopter ou de maintenir des sanctions, des mesures et des obligations pour les employeurs, plus sévères.
Transposition : la directive devrait être transposée dans un délai de 2 ans après son entrée en vigueur.
Á noter qu’à l’issue du vote partiel sur ces amendements, la question a été renvoyée pour examen en commission au fond.