Mise en oeuvre dans l'UE de la Directive 2003/9/CE sur les conditions d'accueil des demandeurs d'asile et refugiés: visites de la commission LIBE de 2005 à 2008

2008/2235(INI)

Le Parlement européen a adopté par 487 voix pour, 39 voix contre et 45 abstentions, une résolution sur la mise en œuvre dans l'Union européenne de la directive 2003/9/CE sur les conditions d'accueil des demandeurs d'asile et refugiés.

La résolution fait le bilan de 3 ans de mise en œuvre de la directive mais aussi des visites de la commission parlementaire « libertés civiles, justice et affaires intérieures » du Parlement européen (LIBE) dans les États membres -entre 2005 et 2008- pour vérifier la mise en œuvre de la directive.

Remarques générales sur la mise en œuvre de la directive : le Parlement regrette tout d’abord que certaines des visites effectuées aient mis en lumière le fait que les directives existantes en matière d’asile sont mal, voire pas du tout appliquées dans certains États membres. Il demande donc à la Commission de prendre les mesures nécessaires pour assurer la transposition des directives et de faire respecter leur contenu intégral, car les carences constatées en matière d'accueil sont parfois considérables. Dans ce contexte, le Parlement se félicite de la récente proposition de refonte de la directive 2003/9/CE (voir COD/2008/0244) qui devrait permettre d'assurer des normes de traitement plus élevées pour les demandeurs d'asile. Le Parlement exige également que l’on mette en place, en coopération avec le Parlement européen, un système de visite et d'inspection permanent dans les États membres. Il souhaite ainsi que la commission LIBE du Parlement poursuive ses visites dans les États membres afin de garantir le respect du droit communautaire en matière de conditions d'accueil.

Plus de solidarité entre États membres : le Parlement invite les États membres à faire preuve d’une solidarité plus grande avec les pays qui sont le plus confrontés aux défis de l’immigration. Il ne doit pas s’agir d’une solidarité technique et/ou financière mais d’un instrument capable d’alléger la charge sur certains États membres. Dans la foulée, le Parlement demande à la Commission d'étudier la possibilité de proposer un instrument européen de solidarité fondé sur le principe du respect de la volonté des demandeurs d'asile.

Le Parlement fait ensuite un état des lieux de l’application de la directive 2003/9/CE et constate ce qui suit :

  • accueil : le Parlement regrette que la capacité des centres d’hébergement ouverts mis en place par certains États membres soit faible et demande que l'accueil des demandeurs d’asile et des immigrés soit effectué en priorité dans des centres ouverts plutôt que dans des unités fermées. Le Parlement estime également que les conditions d'accueil de base, telles que la nourriture, le logement et les soins de santé d'urgence ne devraient jamais être refusées, dès lors que ce refus pourrait constituer une violation des droits fondamentaux des demandeurs d'asile. Il appelle également les États membres à trouver un juste équilibre entre rapidité des procédures de traitement des demandes et un traitement juste de chaque cas individuel ;
  • accès à l'information et droit à l'interprétation : sachant que les délais sont parfois très courts pour permettre aux réfugiés de déposer un recours et que l’information qui leur est délivrée n’existe parfois que dans une langue qu’ils ne comprennent pas, le Parlement demande que des brochures expliquant tous les droits des demandeurs soient mises à leur disposition, y compris sur Internet. Il s’alarme notamment du fait qu’il manque de nombreux interprètes pour permettre aux demandeurs d’asile de comprendre ce qu’il leur est demandé en entretien. Il encourage donc les États membres à faire appel à l'assistance financière du Fonds européen pour les réfugiés pour améliorer l'accès à l'information et notamment pour augmenter le nombre de langues dans lesquelles les informations sont proposées aux demandeurs ;
  • assistance juridique : le Parlement regrette que l'accès à une assistance juridique gratuite semble restreinte pour les demandeurs d’asile placés en rétention. Cette assistance se limite parfois à une simple liste de noms d’avocats. Il appelle donc les États membres à garantir l'accès à une assistance juridique et/ou une représentation gratuite dans tous les cas même si les demandeurs ne peuvent acquitter les coûts y afférant. Le Parlement souligne également qu’il est particulièrement difficile de trouver une assistance juridique appropriée pour les personnes placées en rétention, étant donné la difficulté de communiquer avec l’extérieur ;
  • rétention : fermer les centres qui ne sont pas aux normes : le Parlement regrette qu'un certain nombre d'États membres aient de plus en plus recours à la rétention. Or, une personne ne doit en aucun cas être placée en rétention pour l'unique raison qu'elle demande une protection internationale, estime le Parlement. Il s’agit là d’une mesure de dernier recours qui doit être proportionnée et appliquée pendant une période aussi brève que possible. Le Parlement s’inquiète en particulier des conditions carcérales dans lesquelles les migrants irréguliers et demandeurs d'asile sont maintenus alors qu'ils n'ont commis aucun crime. Il faut donc qu’au minimum ces personnes soient placées dans des bâtiments distincts avec des conditions d'hygiène acceptables. Le Parlement regrette notamment que l'accès aux soins de santé, et en particulier aux soins psychologiques, est souvent difficile. Il demande en outre que les États membres garantissent un contrôle régulier de ces centres, via la création d'un médiateur national en charge de ces lieux. Globalement, le Parlement demande aux États membres de fermer tous les centres qui ne sont pas aux normes et ce, dans les meilleurs délais;
  • mineurs non accompagnés et familles : une fois encore, le Parlement demande que la rétention des mineurs soit, par principe, interdite, et que le recours à la rétention des mineurs avec leurs parents soit exceptionnelle et ait pour objectif de garantir l'intérêt supérieur de l'enfant. Il rappelle que tous les mineurs ont droit à l'éducation, qu'ils soient dans leur pays d'origine ou non et demande aux États membres de garantir ce droit y compris lorsque le mineur est placé en rétention. Parallèlement, les États membres sont appelés à veiller à ce que les mineurs non accompagnés et les familles soient, même en rétention, logés dans des lieux d'hébergement séparés qui leur garantissent une intimité et une vie de famille appropriées. En ce qui concerne spécifiquement la situation des mineurs non accompagnés, le Parlement demande qu'un gardien légal indépendant soit nommé pour chacun d’entre eux, aussi bien dans les zones d'attente telles que les aéroports et les gares, que sur le territoire des États membres. Il appelle la Commission et les États membres à instaurer l'obligation de rechercher les membres des familles avec l’aide de la Croix Rouge et du Croissant Rouge. Il s’inquiète notamment du fait que certains mineurs non accompagnés disparaissent et appelle les États membres à combattre ce phénomène en mettant par exemple en place des structures permettant de les accueillir et de leur offrir une formation adaptée. Le Parlement demande encore que l’on mette en place un mécanisme harmonisé et fiable d'identification des mineurs non accompagnés et des règles communes concernant les contestations de leur âge. Il rappelle au passage que durant une procédure de contestation d'âge, la personne doit, par précaution, être considérée comme mineure ;
  • personnes vulnérables : le Parlement s’inquiète enfin du sort des personnes vulnérables qui demandent l’asile et demande à la Commission de définir des normes communes obligatoires pour l'identification de ces personnes (victimes de tortures ou de traite des êtres humains, personnes ayant besoin de soins de santé particuliers, femmes enceintes et mineurs). Globalement, ces personnes ne devraient pas être placées en rétention, étant donné que cela a des répercussions importantes sur leur état déjà fragile, estime le Parlement. Il appelle donc les États membres à garantir une assistance spécialisée pour ces personnes, en particulier, une aide psychologique adaptée.