Écart entre les prix à la production et les prix payés par les consommateurs

2008/2175(INI)

Le Parlement européen a adopté par 390 voix pour, 112 voix contre et 71 abstentions une résolution sur les prix des denrées alimentaires en Europe en réponse à la Communication de la Commission européenne sur le même sujet.

La résolution note que l'Europe et les autres régions du monde ont récemment connu une grande volatilité des prix des denrées alimentaires avec parfois de fortes hausses des prix et des effets problématiques pour le secteur agricole.

Des écarts de prix importants ont été constatés en Europe entre les prix payés par les consommateurs et les prix à la production (les prix au consommateur sont, en moyenne, cinq fois supérieur à ceux pratiqués au départ de l'exploitation). Le déséquilibre du pouvoir de négociation entre les producteurs agricoles et le reste de la chaîne d'approvisionnement maintient une forte pression sur les marges des producteurs dans le secteur agricole.

Les députés considèrent, conformément au traité, qu'il est dans l'intérêt public européen de maintenir un niveau de prix à la production et au consommateur approprié, et de garantir une concurrence loyale, notamment en ce qui concerne les produits agricoles et les denrées alimentaires. Compte tenu des nombreux facteurs qui influencent l'écart entre les prix à la production et les prix payés par les consommateurs, les députés réaffirment l'importance des instruments de régulation des marchés, plus que jamais nécessaires dans le contexte actuel.

La Commission est invitée à ouvrir aussi rapidement que possible une enquête sous forme d'étude de la répartition des marges dans la chaîne de production et de distribution, comme le prévoit le budget. Déplorant le démantèlement progressif des mesures communautaires d'intervention sur le marché agricole, les députés estiment que de nouvelles mesures de gestion du marché sont nécessaires afin de garantir une plus grande stabilité des revenus des producteurs et d'offrir un prix acceptable au consommateur.

Dysfonctionnements du marché des denrées alimentaires : les députés se déclarent préoccupés par les pratiques commerciales telles que la revente à perte et souhaitent un renforcement de l'action européenne à l'encontre des offres de prix agressives et d'autres pratiques anticoncurrentielles. Ils s’inquiètent également d'autres situations où la distribution use de sa puissance sur le marché (ex : délais de paiement, frais de référencement, menaces de délistage, etc.) ainsi que du niveau croissant de spéculation sur les produits alimentaires qui s'observe sur les marchés financiers.

Les députés constatent que la communication de la Commission sur les prix des denrées alimentaires en Europe n'aborde pas l'abus de position dominante qui s'observe dans le secteur de la vente au détail et, jusqu'à un certain point, dans celui de la vente en gros. Ils estiment que les pratiques anticoncurrentielles telles que les accords d'exclusivité ou l'obligation de procéder à des ventes liées, constituent un recul important sur le plan de la neutralité concurrentielle dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire.

Rôle de l'Union européenne : le Parlement appuie la décision de la Commission de proposer un système européen efficace de suivi du marché, capable d'enregistrer la tendance des prix et des coûts des intrants pour l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement. Afin de réagir aux déséquilibres du marché, la Commission et les États membres sont invités à :

  • établir un cadre juridique communautaire qui inclue, entre autres mesures, la révision en profondeur de la directive 2000/35/CE et qui favorise des relations équilibrées entre les différents agents de la chaîne alimentaire ;
  • créer une vaste base de données européenne, aisément accessible aux citoyens et comprenant les prix de référence des produits ainsi que des intrants et des informations sur les coûts de l'énergie, les coûts salariaux, les loyers et les prélèvements, à travers toute l'Europe. Ce système électronique pourrait se fonder sur l'Observatoire des prix en France;
  • créer, en coopération avec la FAO, un observatoire international des prix des produits agricoles, des intrants et des denrées alimentaires afin de mieux surveiller ces données à l'échelle internationale;
  • mener une étude sur la transmission des prix et les marges appliquées entre le départ de l'exploitation et le consommateur final ainsi qu'une analyse de la situation et du nombre de supermarchés et de leur chiffre d'affaires ainsi que de leurs coûts pour la logistique et l'énergie;
  • examiner si les critères à respecter pour établir une position dominante sur un marché sont toujours adéquats, compte tenu de l'évolution du marché de détail;
  • établir, tant dans le cadre de la PAC que dans celui d'autres politiques européennes, des mesures tendant à promouvoir les organisations de producteurs par le biais de coopératives ;
  • négocier, au sein de l'OMC, un accord qui donne au secteur agricole une liberté de manœuvre suffisante pour pouvoir continuer à concurrencer les pays tiers;
  • mettre en place un dispositif de stocks et des mesures de crise pour les denrées alimentaires fondamentales au niveau de l'UE;
  • introduire des mécanismes de lutte contre la spéculation sur les produits agricoles;
  • renforcer le contrôle du respect des normes d'hygiène et environnementales européennes en ce qui concerne les denrées alimentaires importées ;
  • rétablir un Service européen de consultance pour la production agroalimentaire orienté vers le conseil aux organisations d'agriculteurs et de producteurs en ce qui concerne la distribution, le commerce de détail et les opportunités pour la production de denrées spécifiques;
  • mettre en place un service téléphonique accessible 24 heures sur 24 pour les consommateurs et les producteurs agricoles, auquel ils peuvent signaler toute situation d'abus et demander des informations sur des produits et des prix comparables collectées dans l'ensemble de l'UE.

Rapprocher le producteur du consommateur : les députés demandent l'introduction de mesures encourageant un contact plus large et plus direct entre producteurs et consommateurs, telles que le programme européen de distribution de fruits à l'école adopté récemment. Ils estiment que la transmission d'une information plus large et plus précise aux consommateurs est primordiale pour instaurer un climat de confiance au sein du système.

Le Parlement demande également que des mesures soient prises pour renforcer le concept « produits locaux » et que les filières biologiques soient davantage encouragées par l'Union et les États membres.