Le Parlement européen a adopté par 256 voix pour, 19 voix contre et 129 abstentions, une résolution sur l'inclusion active des personnes exclues du marché du travail.
La résolution se félicite de ce que la Commission ait basé sa recommandation 2008/867/CE sur la recommandation 92/441/CEE qui reconnaît le droit fondamental des individus à disposer de ressources et d'une aide suffisantes pour pouvoir vivre dignement et qui définit des principes communs pour la mise en œuvre de ce droit. Globalement, le Parlement approuve les principes communs et les orientations pratiques de la recommandation 2008/867/CE ainsi que les 3 piliers qu’elle comporte à savoir: i) complément de ressources adéquat, ii) des marchés du travail favorisant l'insertion ; iii) accès à des services de qualité.
Il indique toutefois que toute stratégie d'inclusion active devrait reposer sur les principes suivants:
Reconnaissant avec le Conseil que la mise en œuvre de la recommandation 92/441/CEE devrait être améliorée, le Parlement estime que l'aide sociale devrait fournir un revenu minimum approprié permettant une vie digne, au moins à un niveau supérieur à celui défini comme exposant les personnes à un risque de pauvreté.
Sur les autres grands points de la résolution, le Parlement s’exprime comme suit :
- Assurer un complément de ressources adéquat : le Parlement invite les États membres à mettre en œuvre un complément de ressources adéquat, de manière à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, sur base des recommandations 92/441/CEE et 2008/867/CE, et susceptible d'être maintenu à long terme. Il demande en particulier au Conseil de convenir d'un objectif européen en matière de régimes de revenus minimum et de systèmes de revenu de remplacement, financés par les cotisations, fournissant un soutien au revenu au moins égal à 60% du revenu national moyen égalisé. Il souhaite notamment qu’un calendrier soit fixé pour atteindre cet objectif.
Sachant que parfois les conditions régissant le droit aux prestations et les systèmes de protection sociale ou les taux d’imposition dissuadent les personnes de reprendre un emploi rémunéré, le Parlement estime qu’il y aurait lieu de mettre en place des systèmes destinés à soutenir les individus dans des périodes de transition au lieu de les pénaliser ou de les décourager, ou de leur supprimer l'aide trop rapidement lorsqu'ils reprennent une activité. Il faut également prévoir des prestations d'aide sociale pour les personnes vulnérables mais capables de travailler.
- Salaire minimum : le Parlement suggère que les États membres examinent activement une politique de salaire minimum afin de s'attaquer au problème du nombre croissant de "travailleurs pauvres" et de faire du travail une perspective viable pour les personnes les plus éloignées du marché du travail. Il demande en particulier aux États membres d'adopter des mesures pour combattre le travail au noir.
- Politiques d’inclusion active : des initiatives « sur mesure » : les politiques d'inclusion active devraient obéir aux règles suivantes : i) être compatibles avec une approche de la formation tout au long de la vie ; ii) être « sur mesure », ciblées et orientées vers les besoins (notamment en combinant revenu minimum, inclusion au sein du marché du travail et services sociaux) ; iii) être basées sur une approche intégrée et participative; iv) respecter les conditions préalables nécessaires pour permettre une participation sans créer une situation mettant en danger un revenu minimum.
Dans ce contexte, le Parlement invite la Commission à envisager des investissements et des actions préventives pour favoriser l'inclusion sociale. Pour leur part, les États membres devraient fournir des prestations complémentaires ciblées pour les catégories défavorisées (comme les personnes souffrant d'un handicap ou de maladies chroniques, les parents isolés ou encore les familles nombreuses) qui couvriraient des frais supplémentaires liés à un soutien personnalisé, à l'utilisation d'infrastructures spécifiques, aux soins médicaux et à l'aide sociale, en fixant notamment les médicaments à un prix abordable.
- Des retraites décentes : le Parlement plaide pour des retraites décentes. Il est fermement convaincu que le maintien d'un âge obligatoire de départ à la retraite fonctionne comme un obstacle à l'inclusion active et oblige de nombreuses personnes qui pourraient continuer de travailler à quitter inutilement le marché du travail.
- Déscolarisation : favoriser la prévention : le Parlement estime qu’une action préventive est essentielle pour identifier dès le début les enfants et les jeunes qui sont le plus menacés, bien avant qu'ils n'abandonnent l'école et leur formation. Un large dialogue entre toutes les parties prenantes ainsi qu'un soutien de l'action préventive et des services sociaux pour améliorer les chances des enfants et des jeunes adultes vulnérables constituent, pour le Parlement, des facteurs indispensables à la réussite des politiques d'inclusion.
- Des services sociaux accessibles : le Parlement demande aux États membres d'agir davantage pour traiter les problèmes liés aux activités d'aide à la personne, notamment le droit de choisir librement d'apporter cette aide à la personne et les conditions de son exercice. Réitérant son soutien à l'accès universel à des services sociaux abordables et de qualité, le Parlement estime que ces services devraient inclure un logement stable et abordable, des transports publics accessibles, la fourniture d'une formation professionnelle de base et de soins de santé, ainsi que l'accès à l'énergie et à d'autres services en réseau à des prix abordables. Il faut ainsi garantir l’obligation de service universel en ce qui concerne les services d'intérêt général. Parmi ceux-ci figurent les services de gardes d’enfants à un prix abordable et des services de prise en charge des personnes dépendantes. Le Parlement encourage également les États membres à envisager la mise en place de tarifs sociaux par défaut pour les groupes vulnérables –par exemple dans les domaines de l'énergie et des transports publics–, ainsi que des possibilités d'accès au microcrédit ou d’accès gratuit aux soins de santé et à l'enseignement pour les personnes en grande difficulté financière. Globalement, le Parlement appelle la Commission à examiner sans délai tous les moyens possibles permettant de clarifier le contexte juridique dans lequel fonctionnent les services sociaux d'intérêt général et à doter ces derniers d'un cadre juridique servant de référence.
- Des services adaptés aux personnes handicapées : le Parlement invite les États membres à apporter aux personnes handicapées le soutien supplémentaire nécessaire, à la fois dans leur emploi lorsqu'elles en ont un et pour qu'elles puissent avoir accès au marché du travail. Il invite les États membres qui ne l'ont pas encore fait à ratifier à la fois la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées et son protocole facultatif.
- Favoriser l’éducation et la formation : le Parlement invite la Commission et les États membres à mobiliser des ressources adéquates pour faciliter l'accès aux programmes de formation tout au long de la vie. Il invite dès lors les États membres à étendre la législation sur l'enseignement public en vue d'éliminer toutes les barrières à l'éducation, en garantissant une éducation intégrée et un accès à tous. Il évoque en particulier la nécessité de prévoir des formations ciblées plutôt que des mesures standardisées et qui tiennent compte des besoins des personnes les plus éloignées du marché du travail (ex. : personnes handicapées). Il recommande dès lors plus de corrélation entre systèmes éducatifs et marché du travail. La formation devrait également veiller à ce que les individus prennent conscience de leurs droits et de leurs obligations au travail, y compris une bonne préparation en termes de santé et de sécurité.
Parmi les autres actions clés de l’inclusion active, le Parlement évoque des actions pour lutter contre la violence domestique et la maltraitance des enfants et des personnes âgées, le renforcement de toutes les actions destinées à favoriser l'égalité des genres et la lutte contre les discriminations.
Le Parlement souhaite également que l’on améliore le financement d’approches plus imaginatives en matière d’inclusion sociale en recourant aux Fonds structurels (FSE).
- Un marché du travail plus favorable à l’insertion sociale : le Parlement attire l'attention sur la nécessité de créer un marché du travail favorisant l'insertion sociale et offrant des conditions de travail décentes aux travailleurs. Conscient que la courbe démographique aura un impact certain dans les années à venir sur le marché du travail (le rapport entre actifs et inactifs sera en 2030 de 2 pour 1), le Parlement demande que l’on conçoive des politiques d'inclusion active aptes à garantir que les activités d'aide à la personne (qui obligent de nombreuses personnes à se retirer du marché du travail en raison de leurs responsabilités en matière d'aide) ne pénalisent pas ces personnes des années plus tard. Il demande également la mise en place d’un marché du travail compétitif qui encourage l'établissement de systèmes publics et privés de protection sociale, à un prix raisonnable. Il invite en outre les États membres à utiliser des outils et instruments qui améliorent l’emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail (incitations financières, avantages fiscaux,…).
Le Parlement rappelle également le rôle moteur de la puissance publique comme pourvoyeur d’emplois. Les autorités locales et régionales sont tout à la fois employeurs, promoteurs de développement économique et d'emploi, et prestataires de services publics. Ces dernières devraient dès lors coopérer pour conseiller les personnes défavorisées et les orienter vers les lieux où elles peuvent recevoir une aide pour entrer sur le marché de l'emploi.
- Favoriser l’insertion des demandeurs d’asile : pour combattre les obstacles à l'inclusion auxquels sont confrontés les demandeurs d'asile, le Parlement demande aux États membres d'agir pour mettre un terme à la dépendance des demandeurs d'asile à l'égard des allocations, en les autorisant par exemple à travailler. Il appelle également les États membres à préserver des politiques d'asile fondées sur les droits de l'homme et à lutter contre le trafic d’êtres humains. Plus globalement, le Parlement appelle la Commission et les États membres à refuser le flou trompeur entretenu en ce qui concerne les limites entre migration économique et demande d'asile, ainsi que celui qui existe entre migration économique et demande d'asile, d'une part, et immigration illégale, d'autre part.
- Réduire la pauvreté : une fois encore, le Parlement demande à la Commission et au Conseil de réduire la pauvreté (et notamment celle des enfants) de 50% d'ici à 2012 et de mettre un terme au problème des sans-abris – qui frappe de la même façon les enfants, les jeunes et les adultes –, à l'horizon 2015. Il réclame également l'instauration d'un revenu minimum (octroyé sous forme de pensions), le renforcement de la qualité des soins de santé (pour réduire la mortalité infantile, améliorer l'état de santé et l'espérance de vie).
- Feuille de route : le Parlement demande enfin l’établissement d’une feuille de route sur la mise en œuvre des stratégies d'inclusion active basées sur la participation de la société civile et des autres parties prenantes, précisant les délais à respecter ainsi que des objectifs qualitatifs et quantitatifs réalistes à atteindre. Cette feuille de route devrait notamment être mise en œuvre et contrôlée par la méthode ouverte de coordination (MOC).
Á noter qu’une proposition de résolution alternative proposée par le groupe PPE-DE a été repoussée en Plénière.