Renforcement d'Eurojust. Initiative Belgique, République tchèque, Estonie, Espagne, France, Italie, Luxembourg, Pays Bas, Autriche, Pologne, Portugal, Slovénie, Slovaquie, Suède

2008/0804(CNS)

OBJECTIF : prévoir un nouveau cadre juridique destiné à renforcer EUROJUST.

ACTE LÉGISLATIF : Décision 2009/426/JAI du Conseil sur le renforcement d’EUROJUST et modifiant la décision 2002/187/JAI instituant EUROJUST afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité.

CONTEXTE : EUROJUST a été instituée par la décision 2002/187/JAI (voir CNS/2000/0817) en tant qu'organe de l'Union européenne doté de la personnalité juridique, afin de promouvoir et d'améliorer la coordination et la coopération entre les autorités judiciaires compétentes des États membres. Après plus de 5 années de fonctionnement, cet organe a fait l’objet d’une évaluation. Il ressort ainsi de l’expérience acquise par EUROJUST, que son efficacité opérationnelle devrait être renforcée en faisant notamment en sorte que le statut de ses membres nationaux fasse l'objet d'un rapprochement.

CONTENU : en vue de renforcer les tâches et missions d’EUROJUST, la décision prévoit, sur initiative de la Belgique, de la République tchèque, de l’Estonie, de l’Espagne, de la France, de l’Italie, du Luxembourg, des Pays-Bas, de l’Autriche, de la Pologne, du Portugal, de la Slovénie, de la Slovaquie et de la Suède,  les éléments suivants :

Composition d’EUROJUST : pour permettre à EUROJUST de devenir plus opérationnel, la décision rapproche le statut de ses membres nationaux. Chaque État membre détachera comme auparavant un membre national auprès d’EUROJUST qui pourra avoir la qualité de procureur, de juge ou d’officier de police ayant des prérogatives équivalentes. Ces derniers devront jouir de pouvoirs leur permettant d’accomplir leurs tâches. La décision envisage ainsi une base commune de pouvoirs dont disposera chaque membre national agissant dans le respect du droit national dont il originaire. Certains de ces pouvoirs seront conférés pour les cas d’urgence (où il ne sera pas possible aux membres d’identifier ou de contacter l’autorité nationale compétente en temps voulu). Ces pouvoirs auront un caractère exceptionnel.

Les membres nationaux seront tenus de fixer leur lieu de travail habituel au siège d’EUROJUST. Ils seront nommés pour 4 ans au moins (mandat renouvelable) et jouiront d’un accès étendu aux informations suivantes contenues dans les registres nationaux des États membres dont ils sont originaires : i) casiers judiciaires; ii) registres des personnes arrêtées; iii) registres d’enquêtes; iv) registres d’ADN; v) autres registres de l’État membre d’origine, si nécessaire. Ils pourront également accéder, en tant que de besoin, à de nombreuses autres informations mais de manière plus limitée conformément aux éléments prévus à la présente décision (voir ci-après).

Dispositif permanent de coordination : pour pouvoir s’acquitter de sa mission dans les cas d’urgence, EUROJUST devra mettre en place un dispositif permanent de coordination (DPC) capable de recevoir et de traiter à tout moment les demandes qui lui sont adressées. La coordination permanente doit pouvoir être jointe, par l’intermédiaire d’un point de contact unique du DPC à EUROJUST, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Le dispositif s’appuie sur un représentant (représentant du DPC) par État membre, qui peut être soit le membre national, son adjoint, soit un assistant habilité à remplacer le membre national. Le représentant DPC doit pouvoir intervenir 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.

La décision fixe en outre les dispositions applicables en cas de conflits de compétence et de difficultés ou refus récurrents concernant l’exécution de demandes de coopération judiciaire entre États membres et de décisions dans ce domaine, relatives notamment à des instruments donnant effet au principe de reconnaissance mutuelle.

Système national de coordination EUROJUST : la décision prévoit qu’avant le 4 juin 2011, il conviendra de mettre en place des systèmes nationaux de coordination EUROJUST dans les États membres afin de coordonner les travaux effectués par les correspondants nationaux d’EUROJUST, le correspondant national d’EUROJUST en matière de terrorisme, le correspondant national du Réseau judiciaire européen et jusqu’à trois autres points de contact du Réseau judiciaire européen, ainsi que des représentants du réseau des équipes communes d’enquête et des réseaux pour les crimes de guerre, le recouvrement des avoirs et la corruption.

Le système national de coordination EUROJUST devra veiller à ce que le système de gestion des dossiers reçoive des informations relatives à l’État membre concerné d’une manière efficace et fiable. Toutefois, ce système ne devra pas être responsable de la transmission proprement dite des informations à EUROJUST. Les États membres devront décider du meilleur canal à utiliser pour la transmission des informations à EUROJUST.

Échange des données : les autorités compétentes des États membres pourront échanger avec EUROJUST toute information nécessaire à l’accomplissement des tâches prévues, conformément aux règles de protection des données. Il s’agit en particulier des données relatives à : i) la mise en place d’une équipe commune d’enquête ; ii) la traite des êtres humains; iii) l’exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie; iv) le trafic de drogue; v) le trafic d’armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions; vi) la corruption; vii) la fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes; viii) la contrefaçon de l’euro; ix) le blanchiment de capitaux; x) les attaques visant les systèmes d’information; xi) tout autre éléments factuels indiquant qu’une organisation criminelle est impliquée ou que le dossier pourrait avoir une dimension ou une incidence transfrontalière grave au niveau de l’Union européenne.

Des dispositions sont également prévues pour fixer le cadre général applicable à l’échange de ce type de données incluant le cadre juridique pour : i) l’accès à l’index et aux fichiers de travail d’EUROJUST ; ii) l’accès à certaines données à caractère personnel.

Types de données à caractère personnel auxquelles EUROJUST pourra accéder : EUROJUST sera autorisée à traiter certaines données à caractère personnel concernant des personnes qui, dans le cadre du droit national des États membres concernés, sont soupçonnées d’avoir commis ou d’avoir participé à une infraction pénale relevant de la compétence d’EUROJUST ou qui ont été condamnées pour une telle infraction.

Comme l’avait envisagé le Parlement européen, la liste de ces données à caractère personnel inclura : i) les numéros de téléphone, ii) les adresses électroniques, iii) les données relatives à l’immatriculation des véhicules, iv) les profils ADN issus de la partie non codante de l’ADN, v) les photographies et les empreintes digitales. Cette liste devra également inclure des données relatives au trafic et des données de localisation, ainsi que les données connexes nécessaires pour identifier l’abonné ou l’utilisateur d’un service de communications électroniques accessible au public. Elle ne devra toutefois pas comporter de données révélant le contenu de la communication.

Á noter par ailleurs que la décision ne prévoit pas qu’EUROJUST procède à la comparaison automatisée de profils ADN ou des empreintes digitales. Des dispositions sont également prévues pour permettre à EUROJUST de prolonger les délais de conservation de certaines données à caractère personnel afin d’atteindre ses objectifs. Une telle prolongation ne devra toutefois intervenir que lorsqu’il existe un besoin réel et spécifique à la réalisation des tâches incombant à EUROJUST.

La décision fixe en outre de manière claire et limitée, les obligations incombant à la gestion des données par les autorités nationales.

Coopération avec le Réseau judiciaire européen et d’autres réseaux de l’UE en matière de coopération pénale : EUROJUST maintiendra avec le Réseau judiciaire européen des relations privilégiées, fondées sur la consultation et la complémentarité. La décision clarifie dans ce contexte les rôles respectifs d’EUROJUST et du Réseau judiciaire européen ainsi que leurs relations mutuelles, tout en maintenant la spécificité de ce dernier.

Magistrats de liaison détachés auprès d’États tiers : des dispositions sont prévues pour envisager la possibilité pour EUROJUST de détacher des magistrats de liaison auprès d’États tiers dans le but d’atteindre des objectifs similaires à ceux définis pour les magistrats de liaison détachés par les États membres au titre de l’action commune 96/277/JAI du Conseil concernant un cadre d’échange de magistrats de liaison visant à l’amélioration de la coopération judiciaire entre les États membres de l’UE. Des dispositions sont notamment prévues pour règlementer les demandes de coopération judiciaire adressées à des États tiers et émanant de ces derniers

Gestion interne : des nouvelles dispositions sont ajoutées pour mieux apparenter EUROJUST aux autres agences communautaires de même nature, notamment en matière de paiement des salaires de ses agents, d’obligation de rendre des comptes et d’information au Parlement européen.

Communication de la liste des membres : les États membres devront notifier à EUROJUST et au Conseil de la désignation de leurs membres nationaux, des adjoints et des assistants qu’ils nomment. Le Conseil devra conserver une liste actualisée de ces personnes et la mettre à dispositions des États membres et de la Commission.

Évaluation : avant le 4 juin 2014, puis tous les 5 ans, EUROJUST devra commander une évaluation externe indépendante sur la mise en œuvre de la présente décision ainsi que des activités exercées par EUROJUST. Chaque rapport devra évaluer l’action d’EUROJUST en termes de réalisation des objectifs visés à décision, ainsi que son efficacité globale. Le rapport d’évaluation sera transmis au Parlement européen, au Conseil et à la Commission, et devra être rendu public.

TRANSPOSITION : 04.06.2011 au plus tard. La Commission devra examiner à intervalles réguliers la mise en œuvre par les États membres de la décision 2002/187/JAI et soumettre un rapport à ce sujet au Parlement européen et au Conseil, accompagné le cas échéant des propositions d’amélioration de la coopération judiciaire et du fonctionnement d’EUROJUST (notamment en matière de lutte contre le terrorisme).

PRISE D’EFFET : 04.06.2009.