Rapport sur la politique de concurrence 2008

2009/2173(INI)

OBJECTIF : présentation du Rapport annuel de la Commission sur la politique de concurrence 2008.

CONTENU : la première partie de ce rapport donne un aperçu des moyens utilisés pour renforcer l'élaboration et l'application des instruments de la politique de concurrence, à savoir les règles relatives aux ententes, aux concentrations et aux aides d'État. La deuxième partie examine comment ces instruments, et d'autres encore, ont été utilisés dans certains secteurs (énergie et environnement ; services financiers ; communications électroniques ; technologies de l’information ; médias ; transports ; industrie pharmaceutique ; industrie alimentaire ; services postaux). La troisième partie présente les activités menées au cours de l'année précédente en ce qui concerne les consommateurs.  La quatrième partie est consacrée à la coopération au sein du réseau européen de la concurrence (REC) et avec les juridictions nationales, tandis que la cinquième partie traite des activités internationales. La sixième partie, enfin, présente la collaboration interinstitutionnelle.

1) Les ententes et les consommateurs : cette année, le rapport annuel compte, pour la première fois, un chapitre traitant d'un sujet considéré comme particulièrement important dans le domaine de la politique de concurrence: «les ententes et les consommateurs». Les ententes comptent parmi les infractions au droit de la concurrence les plus graves. La répression des ententes est donc essentielle si l'on veut garantir aux consommateurs finals d’un marché de produits ou de services donné un régime de concurrence qui fonctionne correctement.

Des affaires telles que l’entente sur le marché des bananes montrent qu'une entente peut avoir un impact direct sur les consommateurs finals qui achètent ou utilisent un produit ou un service. De même, sur les marchés où les consommateurs directs sont des clients industriels, les consommateurs bénéficient en fin de compte de la répression des ententes. Dans l'affaire relative au verre automobile, par exemple, le produit en cause était les vitres de voitures, que les consommateurs achètent en tant qu’éléments de leur véhicule ou en vue de réparations.

Dans ce contexte, le rapport rappelle que :

  • lorsque la Commission interdit des agissements anticoncurrentiels et inflige des amendes à des entreprises parties à des ententes, son objectif final n’est pas de punir celles ci pour des agissements antérieurs, mais bien, avant tout, de dissuader chacune d’entre elles de continuer à agir de la sorte ou de se comporter de façon anticoncurrentielle ;
  • la Commission n’intervient pas dans l’octroi d’un dédommagement aux consommateurs dans des cas individuels. Des actions en dommages et intérêts fondées sur des décisions de la Commission peuvent être introduites auprès des juridictions nationales ;
  • par sa politique d'imposition d'amendes, la Commission encourage une culture du respect du droit de la concurrence au niveau du groupe d'entreprises dans son ensemble ;
  • enfin, la Commission inflige des amendes plus élevées aux récidivistes.

La Commission dispose de plusieurs moyens pour découvrir les ententes: soit elle analyse un marché à la recherche de preuves d'agissements anticoncurrentiels, soit elle obtient de tels éléments auprès de diverses sources. Ces preuves peuvent émaner directement des consommateurs ou d'autres clients des entreprises impliquées. Mais elles peuvent également provenir de personnes liées à une entreprise, voire des membres de l'entente eux mêmes, en application du programme de clémence. Conformément au programme de clémence de 2006, la première entreprise à fournir des preuves peut bénéficier d'une immunité d'amendes totale. Cet avantage constitue une incitation particulièrement forte à rompre le «code du silence» des ententes.

Le rapport note qu’en 2008, la Commission a poursuivi ses efforts importants en matière de lutte contre les ententes, infligeant des amendes à 34 entreprises  dans sept affaires pour un montant total de 2,271 milliards EUR. L'amende la plus élevée jamais infligée dans le domaine des ententes (1,383 milliard EUR) a été imposée dans le cadre de l'affaire relative au verre automobile.

En 2008, les services de la Commission ont également procédé à une estimation globale du préjudice causé à l'économie par les ententes. Ils ont examiné 18 ententes ayant donné lieu à une décision entre 2005 et 2007, la taille des marchés en cause, la durée des ententes, de même que des hypothèses particulièrement prudentes en ce qui concerne les majorations de prix qui auraient été appliquées. En supposant que les prix soient majorés de 5 à 15%, le préjudice causé par ces 18 ententes représente 4 à 11 milliards d'EUR environ. La moyenne de ces majorations - 10% - fournit une estimation prudente du préjudice causé aux consommateurs, soit 7,6 milliards d’EUR, même si ce chiffre est probablement très en deçà de la réalité.

En outre, ce chiffre ne tient pas compte des avantages découlant des décisions d'interdiction et de l'imposition d'amendes en termes de dissuasion ou d'incitation au respect de la législation. Une application stricte des règles relatives aux ententes décourage des ententes qui, autrement, se seraient constituées.

Le nombre de notifications d'ententes s'est maintenu à un niveau record en 2008, avec 347 opérations au total notifiées à la Commission, soit le troisième chiffre le plus haut enregistré à ce jour. La Commission a adopté 340 décisions finales au total au cours de l'année, dont 307 opérations autorisées sans conditions au cours de la première phase, 118 opérations autorisées sans conditions dans le cadre de la procédure normale et 189 autorisées en vertu de la procédure simplifiée. Une autorisation conditionnelle a été accordée dans 19 cas au cours de la première phase. La Commission a ouvert 10 procédures de seconde phase.

En ce qui concerne les abus de position dominante, la Commission, après avoir adressé une communication des griefs dans l'affaire Microsoft en mars 2007, a, le 27 février, arrêté une décision concluant que Microsoft ne s'était pas conformée à l'obligation lui incombant de fournir des informations complètes et exactes sur l'interopérabilité, dans des conditions raisonnables et non discriminatoires. Une astreinte d'un montant définitif de 899 millions EUR a été infligée à l'intéressée. Microsoft est la première entreprise de l'histoire de la politique de concurrence européenne à se voir infliger des astreintes pour non respect d'une décision antérieure de la Commission.

2) En raison de la conjoncture financière et économique particulièrement difficile qu'a connue l'Europe en 2008 et de l’incidence de cette situation sur la rentabilité des entreprises européennes, une attention particulière est accordée, dans le rapport de cette année, à l'appréciation des mesures de sauvetage et de restructuration par la Commission. Le Parlement européen a également formulé une demande en ce sens dans sa résolution sur les rapports annuels relatifs à la politique de concurrence pour les années 2006 et 2007.

Dans le contexte de la crise financière, la Commission a :

  • publié un premier document d'orientation sur l'application des règles en matière d'aides d'État aux mesures prises en rapport avec les institutions financières , qui s'appuie de façon exceptionnelle sur l'article 87, paragraphe 3, point b), du traité CE, lequel autorise les aides d'État destinées à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre ;
  • complété et précisé ces orientations par une nouvelle communication sur les modalités de recapitalisation des banques par les États membres dans le contexte de la crise financière actuelle, de façon à garantir un financement suffisant au reste de l'économie et à stabiliser les marchés financiers tout en évitant des distorsions de concurrence excessives ;
  • adopté un nouveau cadre temporaire, qui offre aux États membres des possibilités supplémentaires pour faire face aux effets du resserrement du crédit sur l’économie réelle. Toutes les mesures ont une durée limitée, soit jusqu'à la fin de 2010; la Commission examinera toutefois, à la lumière des rapports des États membres, s'il convient de les proroger au delà de ces dates en cas de poursuite de la crise.

En ce qui concerne la mise en œuvre du plan d'action dans le domaine des aides d'État, la Commission a adopté :

  • un règlement général d'exemption par catégorie (RGEC), qui prévoit une approbation automatique de différentes mesures d'aide  et permet de la sorte aux États membres d'accorder ces aides sans les notifier au préalable à la Commission, pour autant que toutes les conditions énoncées dans ledit règlement soient satisfaites ;
  • dans le contexte du paquet de mesures dans le domaine du changement climatique, de nouvelles lignes directrices concernant les aides d'État à la protection de l'environnement, qui introduisent une appréciation standard pour les mesures d'importance mineure et une appréciation détaillée pour les cas susceptibles de mener à de graves distorsions de concurrence ;
  • prorogé de trois ans, soit jusqu'au 31 décembre 2011, l'encadrement des aides d'État à la construction navale ;
  • publié une nouvelle communication sur les aides d'État sous forme de garanties, qui établit des méthodes claires et transparentes de calcul de l'élément d'aide d'une garantie et prévoit des règles simplifiées pour les PME, notamment des primes exemptées prédéfinies et des taux de prime uniques pour les garanties de faible montant.

Des consultations publiques ont par ailleurs été lancées en ce qui concerne :

  • l'application de nouvelles règles aux services publics de radiodiffusion ;
  • la prorogation éventuelle, jusqu'en 2012, de la communication sur le cinéma (dont l'adoption est prévue pour janvier 2009) ;
  • les documents d'orientation sur l'appréciation approfondie des aides régionales en faveur de grands projets d'investissement et sur les critères d'analyse de la compatibilité des aides à la formation et des aides en faveur des travailleurs défavorisés et handicapés dans le cas d’aides d'État devant faire l'objet d'une notification individuelle ;
  • un projet de code de bonnes pratiques pour la conduite des procédures de contrôle des aides d'État et le projet de communication relative à une procédure simplifiée de traitement de certains types d'aides d'État. Ces deux documents visent à garantir des procédures en matière d'aides d'État plus transparentes, prévisibles et efficaces, conformément au plan d'action dans le domaine des aides d'État. L'adoption de ces projets est prévue pour le premier semestre 2009 ;
  • un projet de communication concernant la mise en œuvre de la législation en matière d’aides d’État par les juridictions nationales.

3)Récupération des aides d’État : en 2008, la Commission a poursuivi ses efforts en vue de l'amélioration de la mise en œuvre et du contrôle des décisions en matière d'aides d'État, cherchant à garantir, en application de la communication sur la récupération des aides adoptée en 2007, une exécution plus efficace et immédiate des décisions de recouvrement.

Les informations communiquées par les États membres concernés montrent que des avancées certaines ont été réalisées au cours de cette période en matière de recouvrement, ce qu'attestent également les montants d'aide recouvrés. Sur les 10,3 milliards EUR d’aides illégales et incompatibles devant être récupérées en application de décisions adoptées depuis 2000, quelque 9,3 milliards EUR (soit 90,7% du montant total) avaient été effectivement récupérés fin 2008. En outre, 2,5 milliards EUR d'intérêts ont été récupérés.

Comme elle l'avait annoncé dans son plan d'action dans le domaine des aides d'État, la Commission a continué de se montrer ferme à l’égard des États membres qui n'exécutent pas efficacement les décisions de récupération dont ils sont les destinataires.

En 2008, la Commission a autorisé 88 régimes notifiés en application de l’encadrement communautaire des aides d'État à la recherche, au développement et à l’innovation de 2006.

Dans le domaine du financement du capital-investissement en faveur des PME, la Commission a autorisé 18 régimes en application des lignes directrices sur le capital investissement.

En outre, une décision importante a été adoptée dans plusieurs projets de recherche et de développement individuels dans le secteur aéronautique ayant bénéficié d’une aide des autorités italiennes dans les années 1990. Elle exige le remboursement immédiat des prêts consentis en faveur de la plupart de ces projets, majorés d’intérêts de retard pour certains. Les bénéficiaires ont remboursé près de 350 millions EUR dans le délai de deux mois imparti par la décision.

4)Activités concernant les consommateurs : la Commission place les préoccupations des consommateurs au centre de ses activités concernant la concurrence et considère qu'il est essentiel que l'objectif principal de la politique de concurrence soit l'optimisation du bien-être des consommateurs. Une unité chargée des relations avec les consommateurs a été créée en 2008 au sein de la DG Concurrence.

Les consommateurs et leurs représentants ont désormais la possibilité de transmettre aux services de la Commission des informations utiles tant à une meilleure compréhension des marchés qu'à la détection d'éventuels dysfonctionnements du marché. Ils sont également les mieux placés pour rendre directement compte de la façon dont ils perçoivent l'incidence d'une action particulière.

5)Coopération interinstitutionnelle : en 2008, la Commission a poursuivi sa coopération avec les autres institutions communautaires conformément aux accords ou protocoles conclus avec ces institutions. En 2008, le Parlement européen a adopté une résolution ou un rapport sur les sujets suivants: enquête sectorielle sur les marchés de la banque de détail, accord conclu entre le gouvernement de la république de Corée et la Communauté européenne concernant la coopération sur les activités anticoncurrentielles et le livre blanc sur les actions en dommages et intérêts.

Les rapports annuels sur la politique de concurrence 2006 et 2007 ont aussi été discutés en commission au cours de l'année 2008 et devraient être adoptés en 2009. La Commission a également participé aux discussions qui se sont tenues au Parlement sur d'autres sujets liés, comme l'utilisation des aides d'État en réponse à la crise financière et économique actuelle.