Marchés dérivés: mesures pour l'avenir

2010/2008(INI)

OBJECTIF: présenter les actions que compte mener la Commission en faveur de marchés de produits dérivés efficaces, sûrs et solides.

CONTEXTE : les produits dérivés sont utiles à l'économie: ils permettent à des agents qui ne sont pas prêts à assumer les risques inhérents à certaines activités économiques de transférer partiellement ou entièrement ces risques vers d'autres agents économiques qui sont prêts à les accepter. Mais ils ont aussi contribué à la crise financière en autorisant des niveaux de levier élevés et en créant des interconnexions entre les acteurs des marchés, un fait qui était passé inaperçu du fait du peu de transparence de marchés où l'essentiel des transactions est réalisé de gré à gré (over-the-counter ou OTC).

Dès le mois de juillet 2009, la Commission a mis en avant quatre outils complémentaires susceptibles de réduire l'incidence négative des marchés OTC de produits dérivés sur la stabilité financière: i) une plus grande normalisation des produits, ii) l'utilisation de référentiels centraux de données, iii) un recours accru à la compensation par des contreparties centrales (Central Counter-party ou CCP) et iv) une utilisation plus générale de systèmes de négociation organisés (voir COM(2009)0332). Ces propositions ont fait l'objet d'une consultation auprès des parties intéressées et d'un débat lors d'une conférence à haut niveau le 25 septembre 2009.

La Commission estime qu'un changement de paradigme est nécessaire. Au point de vue habituel selon lequel les instruments dérivés sont destinés à une utilisation professionnelle ne nécessitant qu'une réglementation légère doit être substituée une approche où la législation permet aux marchés d'établir correctement le prix des risques. Cette approche générale limitera les risques de failles et les possibilités d'arbitrage réglementaire.

CONTENU : la présente communication examine les principales faiblesses de l'organisation actuelle des marchés de produits dérivés, tant en ce qui concerne les marchés OTC que les marchés organisés. Elle décrit les actions que la Commission prévoit de mener en 2010 pour remédier à ces problèmes et répondre ainsi au besoin d'une plus grande stabilité et d'une plus grande transparence sur ces marchés, qui avait été constaté par le rapport de Larosière, les conclusions du Conseil européen de juin 2009 et le G-20. Toutes les propositions législatives feront l'objet d'une analyse d'impact. Elles permettront de faire en sorte que sur les marchés de produits dérivés, la compensation et la négociation, au lieu d'être essentiellement bilatérales et de gré à gré comme aujourd'hui, tendent vers un fonctionnement plus centralisé.

La communication note que les différents segments des marchés d'instruments dérivés présentent des caractéristiques différentes en ce qui concerne le niveau de risque, les modalités de fonctionnement et les acteurs. D'une manière générale, la Commission estime qu'une politique globale portant sur les instruments dérivés est nécessaire pour éviter que les acteurs des marchés n'exploitent des différences entre règles (arbitrage réglementaire). Toutefois, lorsque c'est justifié, les propositions de la Commission devront tenir compte : i) des particularités des catégories d'actifs et de contrats ainsi que des spécificités des acteurs des marchés, en trouvant un juste équilibre entre établissements financiers et non financiers ; ii) des spécificités de certains marchés de matières premières, notamment ceux du gaz et de l'électricité, dont la structure des marchés physiques est particulière.

Les actions à mener poursuivront les objectifs suivants:

Réduire le risque de crédit de la contrepartie : la crise a montré que les acteurs du marché n'établissaient pas correctement le risque de crédit de la contrepartie. La compensation permet de réduire ce risque. La Commission entend renforcer les mécanismes de compensation des produits dérivés, tant centrale que bilatérale : i) en proposant des mesures législatives établissant des normes en matière de sécurité, de régulation et de fonctionnement pour les contreparties centrales, ii) en obligeant à fournir des garanties de meilleure qualité en cas de compensation bilatérale, iii) en relevant sensiblement les exigences de fonds propres pour les contrats dont la compensation est bilatérale par rapport aux contrats compensés par contrepartie centrale et, enfin, iv) en rendant obligatoire la compensation par contrepartie centrale pour les contrats normalisés.

Réduire le risque opérationnel : la Commission estime que les efforts du secteur en faveur d'une réduction des risques opérationnels doivent être renforcés. Elle prévoit donc d'étudier l'opportunité de revoir l'approche du risque opérationnel prévue par la directive sur les exigences de fonds propres afin d'encourager la normalisation des contrats et du traitement électronique. Elle va également fixer des objectifs européens ambitieux, avec des délais stricts, pour la normalisation des clauses juridiques et des processus, tout en veillant à ce que les initiatives internationales tiennent compte des spécificités européennes.

Accroître la transparence: les marchés OTC de produits dérivés ont manifestement manqué de transparence quant aux prix, aux transactions et aux positions. Les autorités réglementaires responsables du risque systémique et des services financiers doivent pouvoir disposer d'une vue d'ensemble complète du marché des produits dérivés. Par conséquent, la déclaration de toutes les transactions auprès de référentiels centraux devrait être rendue obligatoire. La Commission va proposer des mesures législatives régissant les référentiels centraux et instituant de nouvelles obligations de déclaration aux participants au marché. C'est l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) qui devrait être compétente pour l'autorisation et la surveillance des référentiels.

La Commission souhaite également imposer l'obligation de négocier les produits dérivés normalisés sur des bourses ou dans d'autres systèmes de négociation organisés et renforcer la transparence des transactions dans le cadre du réexamen de la directive sur les marchés d'instruments financiers (directive MIF) pour l'ensemble des marchés de produits dérivés, y compris les produits dérivés sur matières premières.

Améliorer l'intégrité des marchés de produits dérivés : le réexamen de la directive sur les abus de marché, en 2010, étendra les dispositions pertinentes pour qu'elles couvrent de manière complète les marchés de produits dérivés. Il est prévu d'élaborer une proposition spécifique pour la surveillance communautaire des marchés au comptant du gaz et de l'électricité garantissant la transparence et l'intégrité du marché. Parallèlement, la Commission doit examiner, d'ici au 31 décembre 2010, si le marché des quotas d'émissions est suffisamment à l'abri des opérations d'initiés ou des manipulations de marché et présenter, si besoin est, des propositions afin de garantir que tel est le cas.

Le réexamen de la directive MIF permettra en outre de mener à leur terme les travaux sur les exemptions dont bénéficient certaines entreprises commerciales qui effectuent des transactions sur des produits dérivés de matières premières.

La Commission va maintenant engager le processus d'élaboration des actes législatifs, notamment par le lancement d'analyses d'impact, afin de soumettre dès 2010 des textes ambitieux réglementant les produits dérivés.