En adoptant à l’unanimité le rapport d’initiative de Mme Franziska KELLER (Verts/ALE, DE) sur la cohérence des politiques européennes pour le développement et "l'aide publique au développement plus" (APD-plus), la commission du développement se félicite de l'engagement accrus dont font preuve la Commission, le Conseil et les États membres en matière de cohérence des politiques au service du développement (CPD).
Rappelant que l'Union a élaboré un concept de cohérence des politiques pour le développement en vue de renforcer les synergies entre les politiques engagées dans les pays en développement, les députés constatent que les incohérences manifestes apparaissent dans des domaines tels que le commerce, l'agriculture, la pêche, le climat, le droit de la propriété intellectuelle, les migrations, les finances, les armes et les matières premières. Or, l’engagement de l’Union dans la CPD peut se traduire par une réduction de la pauvreté. Ils soutiennent dès lors les initiatives engagées dans ce domaine ainsi que l’engagement du Parlement européen.
Les députés rappellent que l'Union européenne est de loin le premier pourvoyeur d'aide au monde (l'aide de l'Union s'élevait à 49 milliards EUR en 2008, soit 0,40% du RNB) et que les volumes d'aide devraient augmenter, pour atteindre 69 milliards EUR en 2010, de manière à se conformer à l'engagement collectif de 0,56% du RNB de l'Union, pris lors du sommet du G8 à Gleneagles en 2005. Cela débloquerait 20 milliards EUR supplémentaires au profit des objectifs de développement. Les députés rappellent également l’adoption, en octobre 2007, de la stratégie de l'Union européenne relative à l'aide au commerce, en vertu de laquelle l'Union s'est engagée à porter son assistance en faveur du commerce à 2 milliards EUR par an au plus tard en 2010 (1 milliard EUR de la part de la Communauté et 1 milliard EUR de la part des États membres). Les députés demandent toutefois que la stratégie d'aide au commerce profite à tous les pays en développement et pas seulement à ceux qui sont en faveur d'une plus grande libéralisation de leurs marchés.
Globalement, les députés se félicitent du programme de travail sur la PCD 2010-2013, qui servira de ligne directrice aux institutions européennes et aux États membres. Ils mettent notamment l'accent sur la nécessité de tenir compte des aspects pertinents de la cohérence des politiques pour le développement dans le cadre des accords commerciaux bilatéraux et régionaux ainsi que dans les accords commerciaux multilatéraux, ancrés dans le système de l'OMC.
Plusieurs mesures sont demandées pour renforcer la cohérence des politiques, notamment pour rendre les investissements opérés par l'intermédiaire des paradis fiscaux moins attractifs, mais aussi dans le domaine de la pêche, de l’agriculture ou en matière fiscale en vue de renforcer la gouvernance et dissuader les pratiques qui encouragent l'évasion et la fraude fiscales. Ils demandent en particulier l'inclusion du Fonds européen de développement (FED), qui constitue le principal instrument de financement de la coopération au développement européenne, dans le cadre de la CPD et réitère une fois encore leur plein soutien à la budgétisation complète du FED.
Dans le domaine de la pêche, les députés invitent la Commission et les États membres à fournir une évaluation globale des accords de pêche avec les pays tiers pour que la politique extérieure de l'Union dans le domaine de la pêche soit entièrement cohérente avec sa politique de développement. Celle-ci doit également garantir une pêche durable dans les eaux des pays en développement, ce qui renforcera la sécurité des aliments et l'emploi local dans le secteur. Ils rappellent au passage que l'accès de l'UE aux stocks de poissons des pays tiers ne doit en aucun cas constituer une condition de l'aide au développement accordée à ces pays.
Dans le secteur agricole, les députés estiment que la décision récente de l'Union de rétablir les subventions à l'exportation pour le lait en poudre et les autres produits laitiers, décision qui soutient dans l'ensemble le secteur agro-alimentaire en Europe au détriment des fermiers pauvres des pays en développement, constitue une violation flagrante des principes essentiels de la cohérence des politiques pour le développement, et invitent le Conseil et la Commission à annuler immédiatement cette décision. Ils appellent également à la suppression totale des subventions à l'exportation.
Les députés insistent sur le fait que la décision du Conseil visant à se concentrer, pour l'exercice 2009, sur cinq grands domaines en ce qui concerne la CPD ne doit pas mettre fin au suivi des 12 domaines d'action traditionnels - commerce, environnement, changement climatique, sécurité, agriculture, accords de pêche bilatéraux, politiques sociales (emploi), migration, recherche/innovation, technologies de l'information, transport et énergie. Ils appellent la Commission à créer des mécanismes pour incorporer de nouveaux domaines d'action qui ne sont pas couverts de manière satisfaisante par les 12 existants, comme celui des matières premières.
En ce qui concerne l’APD, les députés rappellent les engagements internationaux impératifs de l’Union en matière d'APD/RNB de 0,7% d'ici à 2015, qui doivent être exclusivement consacrés à l'éradication de la pauvreté. Ils se disent toutefois préoccupés par le fait que le concept "APD-plus" pourrait affaiblir la contribution de l'APD européenne à la lutte contre la pauvreté et regrettent que les transferts couverts par le concept d'APD-plus ne soient assortis d'aucune obligation juridique en matière de lutte contre la pauvreté et de contribution à la réalisation des objectifs du Millénaire. Constatant que le flux de capitaux au départ des pays en développement en direction de l'UE provoqué par des politiques incohérentes ne figure pas dans le concept d'APD-plus (et que ce concept ne prend pas en considération les dommages subis par les pays en développement du fait de la concurrence fiscale déloyale), les députés demandent à la Commission de rendre plus claire l'approche préconisée et clarifie le concept "de toute l'Union" et son impact sur la politique de développement européenne. Ils rappellent également que l'APD doit rester la clé de voûte de la politique européenne de coopération au développement, destinée à éradiquer la pauvreté. Par conséquent, si des sources de financement innovantes en matière de développement sont largement encouragées, elles doivent venir s'ajouter à l'APD et être utilisées dans le cadre d'une démarche en faveur des personnes pauvres et ne peuvent en aucun cas remplacer cette aide. Parallèlement, les députés indiquent que si la réalisation des engagements en matière d'APD est impérative, elle reste insuffisante pour remédier à l'urgence du développement. Ils réitèrent dès lors leur appel à des sources de financement supplémentaires innovantes en matière de développement, comme une taxe sur les transactions financières internationales destinée à générer des ressources supplémentaires, afin de surmonter les pires conséquences de la crise et de maintenir le cap en vue de la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement.
Les députés insistent également pour que la Commission utilise des critères de référence systématiques et clairs et des indicateurs régulièrement mis à jour afin de mesurer la CPD, tels que les indicateurs de développement durable. Les pays en développement devraient également créer des indicateurs pour la CPD spécifiques à chaque pays, compatibles avec les indicateurs globaux de l'UE.
La Commission est également appelée à :
Enfin, les députés invitent la Commission à confier au commissaire chargé du développement la responsabilité exclusive pour les dotations des pays, les documents de stratégie nationaux, régionaux et thématiques, les programmes indicatifs nationaux et pluriannuels, les programmes d'action annuels et la mise en œuvre de l'aide dans tous les pays en développement, en étroite collaboration avec la Haute représentante et le commissaire chargé de l'aide humanitaire, afin d'éviter les approches incohérentes au sein du collège et du Conseil.