Gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs

2009/0064(COD)

La commission des affaires économiques et monétaires a adopté le rapport de Jean-Paul GAUZES (PPE, FR) sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs et modifiant les directives 2004/39/CE et 2009/.../CE.

La commission parlementaire recommande que la position du Parlement européen adoptée en première lecture suivant la procédure législative ordinaire (l’ex-procédure de codécision), modifie la proposition de la Commission comme suit :

Champ d’application: selon les députés, la directive doit s’appliquer aux gestionnaires établis dans l'Union qui fournissent des services de gestion à un ou plusieurs fonds d’investissement alternatifs indépendamment du fait que le fonds alternatif soit établi dans l'Union ou dans un pays tiers. La directive ne doit pas empêcher les investisseurs de céder des unités ou des parts qu'ils détiennent dans des fonds alternatifs sur le marché des capitaux et ne doit pas leur imposer de restrictions à cet égard. Toute offre ou tout placement de ces unités ou de ces parts à l'initiative du gestionnaire de tels fonds alternatifs devraient être considérés comme une commercialisation par le gestionnaire au sens de la directive.

Les députés suggèrent de supprimer les seuils qui feraient sortir du champ d'application de la directive et d'y substituer un principe de proportionnalité. La directive devrait couvrir les gestionnaires de tous les organismes de placement collectif qui n'ont pas l’obligation d’être agréés en tant qu'OPCVM. Cependant, il est des gestionnaires qui ne devraient pas être obligés de satisfaire à des dispositions inadéquates relativement à certains fonds alternatifs en raison de la nature et des caractéristiques particulières de ces fonds. Enfin, le principe de proportionnalité exige que les gestionnaires qui gèrent certains fonds alternatifs soient soumis uniquement à des dispositions précises de la directive ou à des exigences dûment modifiées au titre de la proportionnalité.

La directive ne devrait pas porter sur les gestionnaires d’investissements non regroupés tels que les fonds de dotation, les fonds souverains d’investissement, les banques centrales ou les établissements de crédit, les institutions de retraite professionnelle ou les institutions gérant exclusivement des fonds de retraite professionnelle.

Agrément des gestionnaires: pour être agréé, le gestionnaire doit disposer d'un minimum de fonds propres sous forme d'actifs liquides ou mobilisables à court terme. Conformément au principe de proportionnalité et compte tenu du large chevauchement entre les conditions d'agrément fixées par la directive 2009/65/CE sur les OPCVM et celles fixées par la présente directive, les gestionnaires agréés en vertu de la directive 2009/65/CE ou de la présente directive doivent l'être également en vertu de l'autre, moyennant uniquement le respect de toute condition supplémentaire nécessaire à cet agrément.

Les exigences de fonds propres doivent donc faire l'objet du même plafond que dans la directive 2009/65/CE. En outre, les fonds propres devraient être investis dans des actifs liquides ou des actifs aisément convertibles en liquidités à court terme et ne devraient pas comporter de positions spéculatives.

Les États membres devront exiger d'un gestionnaire agréé sur son territoire qu'il se conforme en permanence aux conditions de l'agrément initial prévues par la présente directive. Les fonds alternatifs pourront, en fonction de leur forme juridique, être autogérés ou désigner comme gestionnaire un gestionnaire externe. L'agrément à un fonds alternatif autogéré ne pourra être octroyé que si les administrateurs, ou les membres de l'organe de direction, du fonds alternatif possèdent une honorabilité et une expérience suffisantes, eu égard au type d'activités du fonds alternatif.

Commercialisation des fonds et relations avec les pays tiers: une fois agréés, les gestionnaires devraient avoir la faculté de gérer et de commercialiser leurs fonds établis dans l'Union auprès d'investisseurs professionnels sur tout le territoire de l'Union. Un tel passeport européen devrait permettre la commercialisation de tout fonds établi à l'intérieur de l'Union et géré par un gestionnaire agréé dans son État membre d'origine d'être commercialisé, sous réserve d'une simple procédure de notification dans les autres États membres. Les fonds établis dans l'Union bénéficieraient ainsi d'un label européen, distinct d'un label OPCVM.

Le texte amendé prévoit toutefois qu’un gestionnaire établi dans un pays tiers a le droit de fournir des services de gestion sur le territoire d'un État membre dès lors que le pays tiers où le gestionnaire est établi, de même que le gestionnaire et son autorité compétente (accords entre le gestionnaire et l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) ainsi qu'entre l'autorité compétente du gestionnaire et l'AEMF), satisfont à certaines conditions (normes destinées à prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, accord relatif à un échange effectif d'informations à des fins fiscales avec cet État membre, réciprocité de l'accès au marché).

De plus, les gestionnaires agréés dans l'Union ou, dans les conditions susmentionnées, établis dans un pays tiers ont le droit de commercialiser des unités ou des parts d'un fonds alternatif établi dans un pays tiers auprès d'investisseurs professionnels sur le territoire d'un État membre dès lors que le pays tiers où le fonds alternatif est établi, de même que le superviseur du fonds alternatif (accord de coopération entre le superviseur du fonds alternatif et l'autorité compétente de cet État membre), satisfont à certaines conditions (normes destinées à prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, accord relatif à un échange effectif d'informations à des fins fiscales avec cet État membre, réciprocité de l'accès au marché).

Enfin, dans le but de protéger les investisseurs de détail, ces derniers ne devraient pas pouvoir investir dans des structures master-feeder lorsque le master est un AIF localisé dans un pays tiers ni dans des fonds de fonds investis à plus de 30% dans des fonds de pays tiers. Les institutions de l'Union, et en particulier la Commission, devraient néanmoins examiner s'il y a lieu de proposer un cadre spécifique de l'Union pour définir des règles communes relatives à la diffusion de fonds alternatifs auprès d'investisseurs de détail au sein de l'Union.

Le dépositaire: le rapport introduit des précisions quant à la définition du dépositaire, sa localisation, son rôle, ses fonctions, les conditions de délégation de certaines de ses fonctions et sa responsabilité.

Le texte amendé prévoit que lorsqu'un fonds alternatif géré par un gestionnaire agréé est établi dans l'Union, le dépositaire doit avoir son siège statutaire dans l'État membre où le fonds alternatif est établi.

Lorsque le fonds est établi dans un pays tiers, le dépositaire doit être localisé dans l'Union européenne sauf s'il existe un accord de coopération et d'échanges d'informations entre les superviseurs qui permettent de s'assurer que les réglementations sont équivalentes et que la supervision pourra y être exercée dans les conditions requises dans l'Union.

Le rapport souligne qu’afin de faciliter une restitution rapide et efficace des actifs des investisseurs, le dépositaire devrait être responsable à l’égard du gestionnaire, du fonds alternatif et des investisseurs du fonds alternatif collectivement, sauf lorsque les pertes résultent d'un cas de force majeure. La responsabilité du dépositaire ne devrait pas être affectée par son transfert à un tiers agréé. Toutefois, lorsqu'il est empêché par la législation du pays tiers ou par suite d'un événement extérieur imprévisible, le dépositaire doit pouvoir se dégager de sa responsabilité, sous réserve de l’agrément de l'autorité compétente de l'État membre. Ce dégagement de responsabilité ne devrait avoir lieu qu’une seule fois.

La Commission devrait présenter une proposition législative à caractère horizontal, qui précise les responsabilités et les obligations d'un dépositaire et réglemente le droit d'un dépositaire opérant dans un État membre de fournir ses services dans un autre État membre (passeport). Cette proposition devrait remplacer les obligations applicables aux dépositaires énoncées dans la présente directive.

En outre, la Commission devrait veiller à ce que les exigences concernant les dépositaires énoncées dans la présente directive s'appliquent aux dépositaires des OPCVM et réviser à cette fin la directive 2009/65/CE au plus tard avant la date d'entrée en vigueur de la présente directive.

L'évaluateur: le texte amendé prévoit que les gestionnaires doivent veiller à ce que pour chaque fonds alternatif qu’ils gèrent, un évaluateur juridiquement et fonctionnellement indépendant du gestionnaire soit nommé pour établir la valeur des actifs acquis par le fonds alternatif et la valeur des parts et des unités du fonds alternatif. Le gestionnaire doit veiller à ce que les actifs, les parts et les unités du fonds alternatif soient évalués au moins une fois par an.

Pour chaque fonds alternatif, le gestionnaire doit veiller à ce que le principe d'indépendance soit au cœur des procédures adoptées pour l'évaluation des actifs et le calcul de la valeur nette des actifs du fonds.

Les gestionnaires doivent être responsables de la juste évaluation des actifs du fonds alternatif ainsi que du calcul et de la publication de la valeur nette des actifs du fonds alternatif. Il incombera au dépositaire de vérifier les conditions dans lesquelles l'évaluation, le calcul et la publication sont assurés. La responsabilité du gestionnaire ne doit pas être affectée par le fait qu'il a délégué à un tiers l'une quelconque de ses tâches relatives à l'évaluation du fonds. Toutes les évaluations, qu'elles soient effectuées par le gestionnaire ou par un évaluateur externe, devront être soumises à la surveillance et au contrôle du dépositaire du fonds alternatif.

Recours à l'effet de levier: les députés proposent que les États membres d’origine veillent à ce qu'un gestionnaire fixe les taux maximaux de levier applicables à chaque fonds alternatif qu'il gère, compte tenu notamment du type de fonds alternatif ou de sa stratégie.

Chaque autorité compétente devra veiller à ce que les limites du niveau de levier fixées par un gestionnaire soient raisonnables et à ce que le gestionnaire respecte à tout moment les limites du niveau de levier qu'il a fixées. Elle devra transmettre régulièrement à l'AEMF les informations qui lui sont fournies. Au vu de ces informations et compte tenu de l'avis rendu par le CERS, l’AEMF pourra décider que le levier utilisé par un gestionnaire représente un risque élevé pour la stabilité et l'intégrité du système financier et exposer les mesures correctives à prendre (notamment en fixant les limites du niveau de levier auquel ce gestionnaire ou ce groupe de gestionnaires peut recourir). L'AEMF informera immédiatement la Commission et les autorités compétentes concernées de toute décision de cette nature.

Vente à découvert: la vente à découvert est une pratique très répandue sur le marché, dont les gestionnaires et d'autres acteurs font abondamment usage. Bien qu'elle puisse parfois jouer un rôle utile en maintenant la liquidité des marchés, elle les rend également plus volatils et contribue à les déstabiliser. Les députés proposent par conséquent que la vente à découvert s'effectue dans un cadre réglementaire harmonisé, afin que soit réduit son effet déstabilisateur potentiel.

Afin de réglementer les ventes à découvert et d'interdire les ventes à découvert à nu d'actions, y compris les titres donnant accès aux parts d'un émetteur, la Commission devrait adopter des actes délégués définissant les exigences applicables dans certains domaines, comme par exemple la notification obligatoire des positions courtes nettes, y compris les instruments dérivés, par toute personne à l'autorité compétente de l'État membre, du marché le plus pertinent en termes de liquidité et de l'État dans lequel l'émetteur a constitué sa société, lorsque certains seuils de participation sont dépassés, et la diffusion auprès du public de ces notifications lorsque certains autres seuils sont dépassés.

Supervision: le rapport prend en considération la nouvelle architecture européenne de supervision dont les textes sont actuellement en cours d'examen avec pour objectif d'assurer une plus grande stabilité financière et de limiter les risques systémiques. Le CERS (Comité européen du risque systémique) et l'AEMF ont un rôle important à jouer. Dans l'esprit de la nouvelle architecture de surveillance proposée pour l'Union, la présente directive devrait conférer à l'AEMF des compétences directes de surveillance et le pouvoir d'intervenir sur les marchés dans certaines circonstances, de fixer des niveaux de levier dans certaines circonstances et de régler des litiges entre les autorités compétentes.

Exigences de transparence : les gestionnaires devront publier un rapport annuel par exercice pour chaque fonds alternatif qu'ils gèrent. Ce rapport annuel devra être mis à la disposition des investisseurs et des autorités compétentes au plus tard quatre mois après la fin de l'exercice ou, lorsque des informations, telles que l'audit des investissements sous-jacents du fonds alternatif, doivent être demandées à des tiers, six mois au plus tard après la fin de l'exercice. Le rapport annuel devra comprendre, entre autres : les informations communiquées aux investisseurs, dans la mesure où celles-ci ont changé au cours de l'exercice sur lequel porte le rapport ; les montants des rémunérations, subdivisées en rémunérations fixes et en rémunérations variables, versées par le gestionnaire et, le cas échéant, par le fonds alternatif.

Pouvoirs des États membres : les autorités compétentes de l'État membre d'origine du gestionnaire devraient être chargées de veiller à l'adéquation des modalités et de l'organisation du gestionnaire, afin que ce dernier soit en mesure de se conformer aux obligations et aux règles relatives à la constitution et au fonctionnement de tous les fonds alternatifs qu'il gère. Les autorités compétentes de l'État membre où les services de gestion seront fournis seront chargées de veiller au respect, par le gestionnaire, de la réglementation de cet État membre relative à la constitution et au fonctionnement des fonds alternatifs, y compris les dispositions applicables à la commercialisation.

Afin de corriger des infractions éventuelles aux règles relevant de leur responsabilité, les autorités compétentes de l’État membre où les services de gestion seront fournis doivent pouvoir compter sur la coopération de celles de l’État membre d’origine du gestionnaire. Si nécessaire, en dernier ressort et après en avoir informé les autorités compétentes de l'État membre d'origine du gestionnaire, les autorités compétentes de l’État membre où les services de gestion seront fournis pourront prendre directement des mesures à l’égard du gestionnaire.

Rémunération des dirigeants: la déclaration du G20 de Pittsburgh du 25 septembre 2009 a marqué un accord international au sujet de la rémunération des dirigeants des banques et autres institutions financières. Les députés proposent d'appliquer ces principes aux fonds alternatifs.

Afin d'empêcher que des structures de rémunération mal conçues puissent nuire à la qualité de la gestion des risques et à la maîtrise des prises de risques par les individus, les députés entendent imposer aux gestionnaires l'obligation expresse de mettre en place et d'entretenir, pour les catégories du personnel dont les activités professionnelles ont une incidence significative sur leur profil de risque ou sur le profil de risque des fonds alternatifs qu'ils gèrent, des politiques et des pratiques de rémunération compatibles avec une gestion efficace des risques. Parmi ces catégories de personnel devraient au moins figurer les cadres supérieurs, les preneurs de risques et les personnes exerçant une fonction de contrôle.