Le Parlement européen a adopté
par 520 voix pour, 68 voix contre et 36 abstentions une décision qui vise à octroyer
la décharge à la Commission sur l'exécution du budget de l’Union européenne
pour l'exercice 2008 ainsi qu’aux directeurs des agences exécutives
"Éducation, audiovisuel et culture" et "Compétitivité et
l'innovation", "Santé et consommateurs" et « Réseau
transeuropéen de transport » sur l'exécution de leur budget respectif
pour l'exercice 2008.
La décision d’octroyer la
décharge vaut également clôture des comptes pour le budget général de l’Union
et le budget des agences concernées.
Parallèlement, le Parlement a
adopté par 550 voix pour, 48 contre et 39 abstentions, une résolution
contenant les observations qui font partie intégrante de la décision de
décharge.
Parmi les préoccupations
majeures évoquées par le Parlement, les députés soulèvent les problèmes
cumulés issus de l’ancienne Commission, à savoir: i) des marges d'erreurs
élevées et continues dans les paiements, ii) des lenteurs dans le
recouvrement des impayés, iii) des reports d'un niveau étonnamment élevé.
Satisfait de l’approche
collégiale de la nouvelle Commission qui promet des actions dans les domaines
des déclarations d'assurance des États membres, en matière de risque d'erreur
acceptable, de simplification et de transparence, et de gestion des fonds
fiduciaires, le Parlement attend également des actions dans le domaine des
corrections et des recouvrements, ainsi qu’en matière de systèmes de contrôle
interne. Globalement, le Parlement estime que les erreurs observées dans les
dépenses affectent la réalisation des objectifs de la législation de l'Union.
Il considère que finalement les améliorations restent faibles depuis
que la Commission a mis en œuvre son Plan d’action (on observe toujours un
taux d'erreur de plus de 5% dans les groupes de politiques représentant 31%
du budget et un taux entre 2% et 5% représentant 22% du budget). C’est
pourquoi, il demande un nouveau programme à partir de 2010, prévoyant une
réduction significative des marges d'erreur afin de garantir que 20%
supplémentaires du budget se classent dans la catégorie "verte"
de la Cour des Comptes d'ici 2014 (donc avec un taux d’erreur négligeable),
notamment en matière de cohésion ou de paiements. Pour le Parlement, il
devient fondamental d’optimiser les dépenses de l'UE et d’obtenir une DAS
positive.
Une série de recommandations
horizontales sont également proposées par les députés, lesquelles peuvent
se résumer comme suit :
Déclaration d’assurance -
DAS: le Parlement se félicite de l'opinion positive de la Cour des comptes concernant la fiabilité des comptes annuels mais déplore que les capitaux
propres de l’Union présentent un solde négatif de 51,4 milliards EUR. D’une
manière générale, le Parlement regrette que la DAS demeure sous réserve (donc négative) dans des domaines de dépenses extrêmement importants tels
que le "développement rural", les "actions
structurelles", le secteur "recherche, énergie et transports",
les "actions extérieures" au niveau des organismes chargés de la
mise en œuvre, et l’"élargissement". S’il reconnaît les efforts
considérables menés par la Commission depuis la mise en œuvre de son Plan
d'action, certaines zones du budget appellent à de nouvelles actions
résolues.
- informations et cadre de la DAS : considérant la pratique de la DAS comme un élément déterminant pour améliorer
la façon dont les fonds européens sont dépensés, le Parlement estime qu'une
seule évaluation annuelle globale ne reflète pas la structure complexe
des finances de l'Union européenne. En outre, le fait d'avoir une
évaluation annuelle systématiquement négative depuis 15 ans a forcément
des répercussions négatives sur l'opinion qu'ont les citoyens de
l’Union ;
- révision des traités:
réforme de la DAS : constatant que le Parlement avait
maintenant un rôle accru dans la procédure de révision des traités
depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, notamment en matière
de déclaration d'assurance, le Parlement appelle à une réflexion
d’ensemble sur la faisabilité de déclarations d'assurance distinctes
à l'avenir, par secteur/domaine politique et par programme pluriannuel ;
- gestion budgétaire :
un RAL considérable : le Parlement s'inquiète de ce que les
engagements budgétaires restant à liquider (le « RAL »),
principalement dans le cadre de programmes pluriannuels, aient augmenté
de 16,4 milliards EUR (11,8%) en 2008, pour atteindre 155 milliards
EUR en raison de retards dans la phase de démarrage des nouveaux
programmes. Le RAL concerne prioritairement la cohésion, c’est la raison
pour laquelle, le Parlement demande un aperçu du soutien budgétaire
concédé par pays et par fonds pour les années 2005 à 2009 ;
- recouvrements :
bien que les recouvrements se soient améliorés, le Parlement constate la
mauvaise qualité globale des informations fournies sur les mécanismes de
correction appliqués au niveau des États membres. Il estime que les
recouvrements doivent être de 100% pour les fonds payés à tort et
appelle la Commission à améliorer l'efficacité des systèmes de
recouvrement pluriannuels. Il réitère son point de vue selon lequel un
classement annuel des États membres pour chaque fonds européen est
nécessaire, en précisant le taux d'erreur pour chacun ;
- suspension des paiements :
le Parlement soutient pleinement la Commission dans l'application de la
législation en matière de suspension des paiements et met en avant
l'exemple de la Grèce pour laquelle des corrections financières
significatives semblent avoir entraîné de meilleures performances dans
certains domaines. Pour le Parlement, la suspension des paiements, en
tant que moyen de pression, contribue à accroître l'engagement des États
membres à utiliser correctement les fonds de l'UE reçus ;
- résumés annuels :
le Parlement estime que la pratique des résumés annuels des États
membres, extrêmement précieuse sur le plan de la transparence et du
contrôle national des fonds, devrait être renforcée lors de la prochaine
révision du règlement financier. Il souhaite que la Commission rende
compte de la qualité de ces résumés, qu'elle identifie les problèmes
communs, les solutions possibles et les meilleures pratiques et qu’elle
envisage une analyse comparative des résumés pour la fin de 2010 ;
- déclarations nationales de
gestion : le Parlement félicite le Danemark, les Pays-Bas, la Suède et le Royaume-Uni d’avoir pris volontairement l'initiative de rédiger des déclarations
de gestion nationales. Pour le Parlement, cette pratique devrait être
généralisée et le principe de déclarations de gestion nationales devrait
devenir obligatoire pour tous les États membres. Le Parlement note au
passage les manipulations de statistiques financières et de fraude
fiscale en Grèce et attire l'attention sur les répercussions financières
considérables que cela a entraînées pour ce pays.
Système de contrôle interne
de la Commission : en ce qui concerne la question du contrôle, le
Parlement s’exprime comme suit :
- Plan d'action pour un
cadre de contrôle intégré : le Parlement s’inquiète de
constater que nonobstant les améliorations progressives constatées dans
les DAS depuis 2003, l'évaluation de la Cour des comptes ne parvient pas encore à déterminer si le Plan d'action a eu une incidence mesurable ou non sur
les systèmes de contrôle et de surveillance. Des efforts sont donc
encore nécessaires dans ce domaine ;
- équilibre entre dépenses
opérationnelles et coût du système de contrôle : le Parlement
invite la Commission à réaliser une évaluation plus approfondie et
exhaustive des ressources consacrées aux systèmes de contrôle dans
certains domaines du budget et d’évaluer quelles futures améliorations
peuvent être réalisées et à quel coût pour progresser sur la question du
risque d'erreur tolérable;
- risque d'erreur tolérable :
le Parlement estime qu’il est urgent de clarifier la notion de
« risque d’erreur tolérable ». Globalement, la Commission doit
mieux mettre en balance les ressources dont elle dispose pour chaque
politique déterminée et la part des ressources qu'elle emploie pour les
contrôler. Elle doit également mettre le doigt sur les «domaines
particulièrement sensibles» ou le risque d'atteinte à l'image est élevé,
l’objectif étant d'adopter une approche qualitative des taux d'erreur
(plutôt qu'une approche économique) ;
- débat interinstitutionnel
sur la procédure de décharge : le Parlement demande à la
Commission d'organiser un débat interinstitutionnel au plus haut niveau,
en y associant les États membres, sur le système actuel de la procédure
de décharge en vue d’envisager sa révision.
Responsabilité politique et
administrative à la Commission :
- transparence et éthique :
insistant une nouvelle fois sur l’importance des rapports annuels
d’activité des directions générales de la Commission, le Parlement
insiste plus généralement sur la transparence des méthodes de contrôle
mais aussisur les destinataires des financements de l'UE. Il
suggère que l’on informe le public de la composition des groupes de
travail et des experts qui contrôlent les dépenses et que l’on mette en
place un registre public des ONG qui reçoivent des fonds de l'UE. Il
insiste tout particulièrement sur la révision de l'actuel code de
conduite des membres de la Commission afin de remédier aux
insuffisances suivantes: a) absence de définition de l'expression
"conflit d'intérêts", b) absence d'indication des mesures à
prendre en cas de conflit d'intérêts, c) manque de clarté en ce qui
concerne l'acceptation de cadeaux et de l'hospitalité, et d) absence de
tout organe désigné pour examiner les plaintes et dispenser le Président
de la tâche (éventuelle) d'autoévaluation. Il souhaite que la Commission
lance le processus de consultation du Parlement sur la révision de ce
code d'ici à août 2010. Ce code introduirait en outre des normes
éthiques fondamentales, ainsi que des principes directeurs que les
membres de la Commission seraient tenus de respecter. La Plénière insiste tout particulièrement sur la nécessité pour tous les membres du personnel
d’être formés et dûment informés de tous les droits et obligations
découlant du statut des fonctionnaires ;
- gouvernance et réforme
administrative : le Parlement invite la Commission à soumettre
un tableau des effectifs introduisant une réduction de 3% des dépenses
de personnel dans le domaine administratif, comme la Commission Barroso II s’y est engagée. Il souhaite en outre que la Commission scinde le
pouvoir hiérarchique entre personnes qui comptabilisent et celles qui
ont la capacité de transférer les fonds en application des règles
habituelles de sécurité en matière de contrôle interne ;
- OLAF : le
Parlement se félicite enfin des efforts déployés par la nouvelle
Commission pour débloquer les discussions au Conseil portant sur la
réforme de l'OLAF et rappelle que cet organisme doit demeurer au sein de
la Commission tout en conservant son indépendance.
Questions
sectorielles : la cohésion en question : la Plénière est également largement revenue sur les questions sectorielles touchant à la mise en
œuvre du budget de l’Union européenne (dépenses par rubriques budgétaires).
L’ensemble des recommandations évoquées en commission au fond ont été
confirmées (se reporter au résumé du 23 mars 2010). La Plénière a principalement insisté sur les erreurs touchant à la politique de cohésion.
Le Parlement note que le système de sanctions à l'égard des États
membres qui présentent des taux d'erreur élevés et qui reçoivent une part
importante des fonds semble inefficace puisque ces États ne restituent
que de 3% à 5% du total des crédits.Dans ce contexte, le Parlement se demande si le
coût de maintenance des systèmes de contrôle n’excèderait pas ce pourcentage,
ce qui en fait une mesure d'incitation négative. Une fois encore, le
Parlement demande la simplification des règles proposées par la Commission et
l'introduction de contrôles plus efficaces au niveau national et au niveau de
l'UE, pour permettre la mise en œuvre effective des Fonds structurels et du
Fonds de cohésion.
Sur la question des corrections
financières, le Parlement déplore le peu d’effets dissuasif global des
mesures mises en œuvre.
Constatant enfin l'inquiétude
exprimée par la Cour des comptes quant aux difficultés rencontrées pour
offrir, au travers d'un simple rapport annuel, une photographie définitive et
immuable de la réalité changeante et progressive du budget de la cohésion,
la Plénière demande à la Commission de proposer une solution destinée à
lutter contre le décalage existant entre le cadre budgétaire pluriannuel et
le système de contrôle annuel. Une telle proposition serait également utile
pour garantir un contrôle plus efficace de grands projets européens, tel que Galileo.