Le Parlement européen a adopté par 319 voix pour, 271 voix contre et 44 abstentions une résolution sur la cohérence des politiques européennes pour le développement et "l'aide publique au développement plus" (APD-plus).
Le Parlement se félicite en premier lieu de l'engagement accru dont font preuve la Commission, le Conseil et les États membres en matière de cohérence des politiques au service du développement (CPD).
Rappelant que l'Union a élaboré un concept de cohérence des politiques pour le développement en vue de renforcer les synergies, le Parlement constate que les incohérences manifestes apparaissent dans des domaines tels que le commerce, l'agriculture, la pêche, le climat, le droit de la propriété intellectuelle, les migrations, les finances, les armes et les matières premières. Or, l’engagement de l’Union dans la CPD peut se traduire par une réduction de la pauvreté. Il soutient dès lors les initiatives engagées dans ce domaine ainsi que l’engagement du Parlement européen en la matière.
Le Parlement rappelle que l'Union européenne est de loin le premier pourvoyeur d'aide au monde (l'aide de l'Union s'élevait à 49 milliards EUR en 2008, soit 0,40% du RNB) et que les volumes d'aide devraient augmenter, pour atteindre 69 milliards EUR en 2010, de manière à se conformer à l'engagement collectif de 0,56% du RNB de l'Union pris lors du sommet du G8 à Gleneagles en 2005. Cela débloquerait quelque 20 milliards EUR supplémentaires au profit des objectifs de développement. Il rappelle également l’adoption, en octobre 2007, de la stratégie de l'Union européenne relative à l'aide au commerce, en vertu de laquelle l'Union s'est engagée à porter son assistance en faveur du commerce à 2 milliards EUR par an au plus tard en 2010 (1 milliard EUR de la part de la Communauté et 1 milliard EUR de la part des États membres). Il demande toutefois que la stratégie d'aide au commerce profite à tous les pays en développement et pas seulement à ceux qui sont en faveur d'une plus grande libéralisation de leurs marchés.
Le Parlement se félicite du programme de travail sur la PCD 2010-2013, qui servira de ligne directrice aux institutions européennes et aux États membres. Il insiste sur la nécessité de tenir compte des aspects pertinents de la cohérence des politiques pour le développement dans le cadre des accords commerciaux bilatéraux et régionaux ainsi que dans les accords commerciaux multilatéraux.
Plusieurs mesures sont demandées pour renforcer la cohérence des politiques, notamment pour rendre les investissements opérés par l'intermédiaire des paradis fiscaux moins attractifs, mais aussi dans le domaine de la pêche, de l’agriculture ou en matière fiscale en vue de renforcer la gouvernance et dissuader les pratiques qui encouragent l'évasion et la fraude fiscales. La Parlement demande en particulier l'inclusion du Fonds européen de développement (FED), qui constitue le principal instrument de financement de la coopération au développement européenne, dans le cadre de la CPD et réitère une fois encore lson plein soutien à la budgétisation complète du FED.
Dans le domaine de la pêche, le Parlement invite la Commission et les États membres à fournir une évaluation globale des accords de pêche avec les pays tiers pour que la politique extérieure de l'Union dans le domaine de la pêche soit entièrement cohérente avec sa politique de développement. Celle-ci doit également garantir une pêche durable dans les eaux des pays en développement, ce qui renforcera la sécurité des aliments et l'emploi local dans le secteur. Il rappelle au passage que l'accès de l'UE aux stocks de poissons des pays tiers ne doit en aucun cas constituer une condition de l'aide au développement accordée à ces pays.
Dans le secteur agricole, le Parlement estime que la décision récente de l'Union de rétablir les subventions à l'exportation pour le lait en poudre et les autres produits laitiers, décision qui soutient dans l'ensemble le secteur agro-alimentaire en Europe au détriment des fermiers pauvres des pays en développement, constitue une violation flagrante des principes essentiels de la cohérence des politiques pour le développement. Il invite le Conseil et la Commission à annuler immédiatement cette décision. Il souligne au passage que les subventions de l'Union aux exportations de produits agricoles européens ont un effet désastreux sur la sécurité alimentaire et le développement d'un secteur agricole viable dans les pays en développement et appelle à la suppression totale des subventions à l'exportation.
En matière de migration, leParlement demande à la Commission et aux pays ACP de poursuivre leur dialogue sur les migrations afin de renforcer le principe de migration circulaire et sa facilitation par l'octroi de visas circulaires. Il souligne que le respect des droits de l’homme et le traitement équitable des ressortissants des États ACP sont gravement compromis par des accords bilatéraux de réadmission, conclus avec des pays de transit dans un contexte d’externalisation de la gestion des flux migratoires par l’Europe qui ne garantissent pas le respect des droits des migrants et peuvent conduire à des réadmissions "en cascade" qui mettent en danger la sécurité et la vie de ces derniers.
Le Parlement insiste sur le fait que la décision du Conseil visant à se concentrer, pour l'exercice 2009, sur cinq grands domaines en ce qui concerne la CPD ne doit pas mettre fin au suivi des 12 domaines d'action traditionnels - commerce, environnement, changement climatique, sécurité, agriculture, accords de pêche bilatéraux, politiques sociales (emploi), migration, recherche/innovation, technologies de l'information, transport et énergie. Il appelle la Commission à créer des mécanismes pour incorporer de nouveaux domaines d'action qui ne sont pas couverts de manière satisfaisante par les 12 existants, comme celui des matières premières.
En ce qui concerne l’APD, le Parlement rappelle les engagements internationaux impératifs de l’Union en matière d'APD/RNB de 0,7% d'ici à 2015, qui doivent être exclusivement consacrés à l'éradication de la pauvreté. Il est toutefois préoccupé par le fait que le concept "APD-plus" pourrait affaiblir la contribution de l'APD européenne à la lutte contre la pauvreté et regrette que les transferts couverts par le concept d'APD-plus ne soient assortis d'aucune obligation juridique en matière de lutte contre la pauvreté et de contribution à la réalisation des objectifs du Millénaire. Il rappelle également que l'APD doit rester la clé de voûte de la politique européenne de coopération au développement, destinée à éradiquer la pauvreté. Par conséquent, si des sources de financement innovantes en matière de développement sont largement encouragées, elles doivent venir s'ajouter à l'APD et être utilisées dans le cadre d'une démarche en faveur des personnes pauvres et ne peuvent en aucun cas remplacer cette aide.
Parallèlement, le Parlement indique que si la réalisation des engagements en matière d'APD est impérative, elle reste insuffisante pour remédier à l'urgence du développement. Il réitère dès lors son appel à des sources de financement supplémentaires innovantes en matière de développement, comme une taxe sur les transactions financières internationales destinée à générer des ressources supplémentaires, afin de surmonter les pires conséquences de la crise et de maintenir le cap en vue de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).
Le Parlement insiste également pour que la Commission utilise des critères de référence systématiques et clairs et des indicateurs régulièrement mis à jour afin de mesurer la CPD, tels que les indicateurs de développement durable. Les pays en développement devraient également créer des indicateurs pour la CPD spécifiques à chaque pays, compatibles avec les indicateurs globaux de l'UE.
La Commission est également appelée à :
Enfin, le Parlement invite la Commission à confier au commissaire chargé du développement la responsabilité exclusive pour les dotations des pays, les documents de stratégie nationaux, régionaux et thématiques, les programmes indicatifs nationaux et pluriannuels, les programmes d'action annuels et la mise en œuvre de l'aide dans tous les pays en développement, en étroite collaboration avec la Haute représentante et le commissaire chargé de l'aide humanitaire, afin d'éviter les approches incohérentes au sein du Collège des commissaires au sein de la Commission et du Conseil.