OBJECTIF: établir les
conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins
d'un emploi saisonnier.
ACTE PROPOSÉ : Directive du
Parlement européen et du Conseil
CONTEXTE : les économies de
l'UE sont confrontées à un besoin structurel de main-d'œuvre saisonnière que
les travailleurs des États membres devraient être de moins en moins en mesure
de satisfaire. Le besoin structurel de travailleurs peu qualifiés devrait
continuer à augmenter et il devrait être de plus en plus difficile de couvrir
ces besoins en recourant à des travailleurs ressortissants des États membres,
principalement en raison du peu d'attrait que les emplois saisonniers
présentent pour eux.
Il apparaît par ailleurs que
certains travailleurs saisonniers originaires de pays tiers sont exploités et
soumis à des conditions de travail ne répondant pas aux normes. Enfin, les
secteurs de l'économie qui sont caractérisés par une forte présence de
travailleurs saisonniers – notamment l'agriculture, l'horticulture et le
tourisme – sont régulièrement cités comme étant les plus susceptibles
d'employer des ressortissants de pays tiers en séjour illégal.
C’est la raison pour laquelle
la Commission présente une proposition de directive qui s'inscrit dans le
cadre des efforts déployés par l'UE pour élaborer une politique globale en
matière de migrations. Elle fait suite à la communication de la Commission
sur le «Programme
d'action relatif à l'immigration légale» et au Pacte européen sur
l'immigration et l'asile adopté par le Conseil européen en octobre 2008. La
proposition s’insère enfin dans le programme
de Stockholm adopté par le Conseil en décembre 2009.
ANALYSE D’IMPACT : les options
suivantes ont été envisagées.
- Option 1 : Statu
quo : l'évolution en cours dans les États membres et au
niveau de l'UE se poursuivrait dans le cadre juridique existant. Les
employeurs seraient soumis à différentes obligations résultant de la directive
2009/52/CE sur les sanctions à l'encontre des employeurs. L'effet de
cette option serait limité.
- Option 2 - Directive
relative aux conditions d'entrée et de séjour des travailleurs
saisonniers et à leurs droits : des règles communes
seraient établies, comprenant la définition du travail saisonnier, les
critères d'admission, la durée maximale de séjour en tant que
travailleur saisonnier, et des dispositions en matière d'égalité de
traitement avec les travailleurs saisonniers ressortissants de l'UE.
Cette option faciliterait l'établissement d'un cadre juridique commun
applicable à tous les employeurs de l'UE et contribuerait à prévenir
l'exploitation. Les travailleurs saisonniers resteraient toutefois
confrontés à des procédures d'entrée divergentes et complexes.
- Option 3 - Directive
établissant des procédures d'admission communes : en
complément de l'option 2, un permis unique de séjour et de travail
destiné aux travailleurs saisonniers ressortissants de pays tiers serait
émis dans le cadre d'une procédure unique. Des dispositions seraient
prévues en vue de faciliter la réadmission d'un travailleur saisonnier
les saisons suivantes. Les procédures d'embauche seraient plus efficaces
et les employeurs de l'UE disposeraient d'une main-d'œuvre plus prévisible.
- Option 4 - Directive
instaurant des mesures visant à assurer un retour effectif :
ces mesures comporteraient une limitation de la durée du séjour ainsi
qu'une obligation explicite de retour à la fin de la période. Le
dépassement par les travailleurs saisonniers de la durée de séjour
autorisée serait empêché dans une certaine mesure. Les effets sur le
fonctionnement du marché du travail de l'UE seraient négligeables. Les
travailleurs saisonniers resteraient néanmoins confrontés à des
procédures d'entrée divergentes et complexes.
- Option 5 -
Communication, coordination et coopération entre les États membres :
aucune nouvelle législation ne serait introduite, mais des activités
complémentaires et de soutien seraient organisées en vue de rapprocher
les pratiques des États membres. Les effets seraient limités puisque les
mesures ne seraient pas contraignantes.
L'option privilégiée est une combinaison
des options 2, 3 et 4. Des critères d'admission communs, alliés à des
procédures d'entrée simplifiées, et la perspective d'une réadmission la
saison suivante (options 2 et 3) permettront une admission suffisamment
souple pour fournir au marché du travail de l'UE les ressources nécessaires.
Des éléments de l'option 4 devraient assurer le retour des travailleurs saisonniers
dans leur pays et donc empêcher le dépassement des délais autorisés.
BASE JURIDIQUE : article 79,
par. 2, points a) et b) du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne
(TFUE).
CONTENU : la proposition
prévoit une procédure d'admission accélérée pour les travailleurs
saisonniers ressortissants de pays tiers, fondée sur une définition et
des critères communs, notamment l'existence d'un contrat de travail ou d'une
offre d'emploi ferme indiquant un salaire égal ou supérieur au niveau
minimum. Les travailleurs saisonniers se verraient délivrer un permis de
séjour leur permettant de travailler durant une période maximale par année
civile.
Les principales dispositions du
régime peuvent se résumer comme suit :
Chapitre I :
Dispositions générales :
- Objet : la
proposition vise à instaurer une procédure spéciale pour l'entrée et le
séjour des ressortissants de pays tiers qui demandent à séjourner dans
l'UE afin d'y occuper un emploi saisonnier.
- Champ d’application :
les dispositions de la proposition s'appliquent uniquement aux
ressortissants de pays tiers résidant en dehors du territoire des États
membres. Aucune disposition ne concerne les demandes d'emploi
saisonnier de travailleurs résidant dans un État membre. La proposition
ne s'applique pas non plus aux ressortissants de pays tiers détachés par
des entreprises établies dans un État membre dans le cadre d'une
prestation de services conformément à la
directive 96/71/CE.
- Définition : la
proposition définit la notion de « travail saisonnier » en la
distinguant de celle de travail permanent et régulier, notamment en
faisant appel à la notion de besoin accru de main-d'œuvre en raison d'un
événement ou d'une succession d’événements, tels que la période de
plantation ou de récolte en agriculture, ou la période des vacances …
Les États membres peuvent déterminer les secteurs spécifiques de
l'économie qui satisfont aux critères susmentionnés en matière de
travail saisonnier.
- Conditions plus favorables :
la proposition permet aux États membres d'accorder des conditions plus
favorables uniquement en ce qui concerne certaines dispositions
spécifiques relatives aux garanties procédurales et au niveau des droits
conférés aux travailleurs saisonniers, ainsi qu'en ce qui concerne les
dispositions relatives à l'hébergement et au dépôt des plaintes.
Chapitre II: Conditions
d'admission :
Critères d’admission :
la proposition définit les critères auxquels un travailleur saisonnier
ressortissant de pays tiers et son employeur doivent satisfaire. L'admission
étant fonction de la demande, il est obligatoire de présenter un contrat
de travail ou une offre d'emploi ferme. Le contrat de travail ou l'offre
d'emploi ferme devra indiquer un niveau de rémunération afin que les
autorités compétentes puissent déterminer si la rémunération proposée est
comparable à celle qui est payée pour l'activité correspondante dans l'État
membre concerné.
Le contrat de travail doit
également préciser le nombre d'heures de travail hebdomadaire ou mensuel.
Cette exigence vise à:
- assurer que les employeurs
fassent appel aux travailleurs saisonniers ressortissants de pays tiers
uniquement en cas de besoin économique réel (capacités d'emploi
suffisantes);
- garantir un certain niveau
fixe de rémunération aux travailleurs saisonniers et, le cas échéant,
d'autres conditions de travail pertinentes telles que des assurances;
- permettre un contrôle
efficace par les autorités compétentes avant l'admission.
La demande doit également
comporter la preuve que le travailleur saisonnier bénéficiera d'un
hébergement approprié.
Motifs de refus : des
dispositions énoncent les motifs de refus obligatoires et facultatifs, ainsi
que les motifs de retrait et de non-renouvellement, en particulier le
non-respect des critères d'admission, l'existence de quotas et la possibilité
pour les États membres de procéder à un examen du marché de l'emploi. Le
principe de la préférence communautaire est rappelé (notamment vis-à-vis des
ressortissants des États membres ayant adhérés en 2004 et 2007).
Chapitre III: Procédure et
calendrier
- Accès à l’information :
les États membres devront veiller à ce que les travailleurs saisonniers
potentiels, ressortissants de pays tiers, et leurs employeurs aient
accès aux informations pertinentes sur les conditions d'entrée et de
séjour, y compris les droits conférés aux travailleurs saisonniers et
aux informations sur tous les justificatifs nécessaires à la demande.
- Autorité compétente pour
la délivrance des permis : les États membres devront désigner
une autorité compétente chargée de recevoir les demandes et de délivrer
les permis.
- Procédure unique :
la demande d'autorisation de séjour et de travail en tant que saisonnier
doit être introduite dans le cadre d'une procédure de demande unique.
Les États membres devront préciser si les demandes doivent être
introduites par le ressortissant de pays tiers ou son employeur.
- Permis de travail
saisonnier : les ressortissants de pays tiers pour lesquels une
décision positive a été prise doivent recevoir un permis de travail de
travailleur saisonnier. Ce permis doit porter la mention «travailleur
saisonnier» et doit permettre tant le séjour que l'exercice du travail
saisonnier spécifique autorisé, sans qu'un permis supplémentaire,
notamment un permis de travail, ne soit nécessaire. En conséquence, pour
les séjours d'une durée inférieure à 3 mois, les États membres sont
tenus de délivrer un visa qui donne également au travailleur saisonnier
le droit d'exercer l'activité professionnelle pour laquelle il a été
admis.
- Durée du séjour :
la durée maximale de séjour est fixée à six mois par année civile.
Cette limitation stricte de la durée de séjour devrait contribuer à
garantir que les travailleurs ressortissants de pays tiers admis sont
effectivement affectés à un travail qui est véritablement saisonnier, et
non à un travail régulier. Une disposition prévoit expressément que,
pendant la durée maximale de séjour, une prolongation du contrat
ou un changement d'employeur dans le cadre d'un travail saisonnier est
possible.
- Permis pluri-saisonniers :
des dispositions sont prévues pour promouvoir la migration circulaire
des travailleurs saisonniers (à savoir leur déplacement entre un pays
tiers et l'UE en vue de séjourner et travailler temporairement dans
cette dernière). Ce type de migration est susceptible de bénéficier au
pays d'origine, à l'État membre d'accueil et au travailleur saisonnier
lui même. À cette fin, les États membres ont la possibilité de soit
délivrer des permis pluri-saisonniers, soit appliquer une procédure
simplifiée. Les permis pluri-saisonniers couvrent jusqu'à trois
saisons et conviennent donc aux secteurs dans lesquels les besoins
du marché du travail restent stables pendant un certain temps.
- Sanctions : un
ressortissant de pays tiers qui n'a pas respecté les obligations liées à
un précédent séjour en tant que travailleur saisonnier doit être exclu
de l'admission en tant que travailleur saisonnier pendant une ou
plusieurs années. Un employeur qui n'a pas rempli les obligations
résultant du contrat de travail doit être soumis à des sanctions et se
voir refuser la possibilité d'engager des travailleurs saisonniers
pendant au moins un an.
- Procédure accélérée et
garanties procédurales : une procédure accélérée (30 jours) est
prévue pour l'examen des demandes. Les garanties procédurales
incluent la possibilité de recours juridique à l'encontre d'une décision
rejetant une demande, ainsi que l'obligation, pour les autorités, de
fournir les motifs d'une telle décision.
- Hébergement : les
États membres doivent exiger des employeurs de travailleurs saisonniers
qu'ils prouvent que le travailleur saisonnier disposera d'un hébergement
lui assurant des conditions de vie décentes. Ceci couvre les cas dans
lesquels l'employeur est tenu de fournir l'hébergement et les cas dans
lesquels l'hébergement doit être fourni par un tiers.
Chapitre IV: Droits :
- Droits attachés au permis
de travail saisonnier : le permis de travail saisonnier donne à
son titulaire le droit d'entrer et de séjourner sur le territoire de
l'État membre qui l'a délivré, et d'y exercer l'activité professionnelle
autorisée par le permis. La proposition définit les conditions de
travail, notamment en matière de salaire, de licenciement, de santé et
de sécurité au travail, applicables aux travailleurs saisonniers afin de
garantir une sécurité juridique ;
- Égalité de
traitement : la proposition de directive accorde des droits aux
travailleurs saisonniers ressortissants de pays tiers en déterminant des
domaines dans lesquels l’égalité de traitement avec les travailleurs
nationaux doit être garantie sous la forme d’une exigence minimale,
sans préjudice du droit des États membres d’adopter ou de conserver des
dispositions plus favorables (en conséquence, l'égalité de traitement
s'applique en matière de liberté d'association et d’adhésion à une
organisation de représentation des travailleurs). L'égalité de
traitement s'applique également en matière de sécurité sociale et
recouvre les prestations visées au règlement (CE) n° 883/2004 sur la
coordination des systèmes de sécurité sociale (y compris droits à
pension).
- Plaintes : afin
de garantir l'application effective de la directive, des dispositifs
permettant le dépôt de plaintes doivent être mis en place. Ces
dispositifs doivent être accessibles non seulement aux travailleurs
saisonniers ressortissants de pays tiers mais aussi à des tiers
désignés.
Chapitre V :
Statistiques et obligations de rapport : un chapitre de la
proposition fixe les obligations des États membres en ce qui concerne le
partage des données statistiques pertinentes et des informations recueillies
dans le cadre de la transposition de la directive. Il définit également les
obligations de rapport de la Commission.
INCIDENCE BUDGÉTAIRE : la
proposition n'a pas d'incidence sur le budget de l'UE.