Agriculture de l'Union européenne et commerce international

2010/2110(INI)

La commission de l'agriculture et du développement rural a adopté un rapport d’initiative de Georgios PAPASTAMKOS (PPE, EL) sur l'agriculture de l'Union européenne et le commerce international.

Le rapport note que l'Union est le premier importateur au monde de produits agricoles venant des pays en développement, ses importations dépassant celles cumulées des États-Unis, du Japon, du Canada, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande (71% des importations agricoles totales de l'Union proviennent de pays en développement).

L'Union doit veiller à la présence, dans les accords commerciaux internationaux, d'un équilibre entre libéralisation des marchés et protection des secteurs économiques, des droits des travailleurs et des droits des consommateurs. Les accords commerciaux de l'Union avec les pays tiers doivent préserver les filières européennes en crise (en particulier les filières des fruits et légumes, de l'élevage et des céréales) et ne doivent pas nuire aux petits agriculteurs.

Dans ce contexte, le rapport formule les recommandations suivantes :

1) Cohérence entre politique agricole et politique commerciale communes : les députés estiment que le secteur agricole de l'Union présente une valeur ajoutée manifeste pour l'économie européenne et soulignent la nécessité de garantir la cohérence entre les politiques agricole, commerciale et de développement de l'Union. La politique commerciale extérieure ne doit pas avoir pour effet de compromettre la capacité de l'Union de maintenir un secteur agricole fort et d'assurer la sécurité alimentaire dans un contexte de volatilité accrue des marchés. La Commission est invitée à défendre, dans toutes les enceintes et en particulier au sein de l'OMC, le rôle multifonctionnel de l'agriculture de l'Union et le modèle agroalimentaire européen.

Les députés condamnent l'approche adoptée par la Commission, qui accorde trop souvent des concessions sur l'agriculture en vue d'obtenir pour les produits industriels et les services un meilleur accès au marché dans les pays tiers. Ils invitent la Commission à proposer une approche assurant l'équilibre entre la production intérieure et les importations.

Le rapport souligne que, dans le secteur agricole, la Commission doit mener des évaluations d'impact examinant les particularités de chaque produit de base, qui doivent être rendues publiques avant l'entame des négociations et des propositions de mises à jour de manière à tenir compte des nouvelles positions apparaissant au cours des négociations.

La commission parlementaire estime que les décisions de poursuivre l'ouverture du marché de l'Union aux importations de produits agricoles ne devraient pas être prises sans garantir la possibilité de dédommager les agriculteurs de l'Union pour les pertes subies. Elle maintient que les méthodes de production des pays tiers pour l'exportation vers l'Union doivent offrir aux consommateurs européens les mêmes garanties en termes de santé, de sécurité alimentaire, de bien-être des animaux, de développement durable et de normes sociales minimales que celles attendues des producteurs de l'Union.

S'agissant des importations, les députés demandent un respect strict des règles d'origine et des mécanismes de prévention du commerce triangulaire. Dans le même temps, la Commission est appelée à promouvoir les intérêts agricoles offensifs de l'Union et à faciliter l'accès aux marchés des pays tiers pour les produits européens.

2) Agriculture dans le système multilatéral du commerce international.

Programme de Doha pour le développement (PDD) : les députés estiment que, dans le souci d'assurer la réussite du PDD, l'Union a présenté une offre très généreuse concernant l'agriculture, qui constitue une ultime limite, mais que les autres pays développés et pays en développement avancés n'ont pas fait preuve à ce jour d'un niveau d'ambition équivalent. La Commission est invitée à se conformer strictement au mandat de négociation qui lui a été accordé par le Conseil et qui fixe comme limite de son action la dernière réforme de la PAC, à condition que des concessions équivalentes soient obtenues de la part de ses partenaires commerciaux.

Le rapport déplore l'absence de progrès dans la création d'un registre multilatéral des vins et spiritueux et dans l'extension de la protection des indications géographiques à tous les produits agricoles. Il rappelle que ces éléments constituent une condition sine qua non pour une issue équilibrée des négociations agricoles. Il insiste en outre sur la nécessité de promouvoir davantage aux niveaux multilatéral et bilatéral les principes directeurs de la politique européenne de qualité des produits agricoles.

Les députés rappellent l'engagement pris par les membres de l'OMC lors de la conférence ministérielle de Hong Kong de 2005 en vue de parvenir à l'élimination de toutes les formes de subventions à l'exportation. Ils estiment que la réduction générale des tarifs douaniers devrait dépendre de la possibilité de maintenir la clause spéciale de sauvegarde et d'une flexibilité adéquate dans la formule des réductions tarifaires et la désignation des produits sensibles.

Règlement du différend dans le cadre de l'OMC : les députés prennent acte du fait que l'accord sur le commerce des bananes constitue une étape importante vers la consolidation d'un système commercial multilatéral fondé sur des règles. Ils invitent la Commission à faire en sorte que le règlement du différend sur le « bœuf aux hormones » permette la suspension des sanctions imposées aux produits européens, tout en garantissant que les importations de viande bovine dans l'Union européenne sont conformes aux exigences de l'Union. La Commission est invitée à défendre le régime de l'Union en matière d'autorisation et de commercialisation des OGM contre les attaques lancées au sein de l'OMC.

3) Agriculture dans les relations commerciales plurilatérales, interrégionales et bilatérales : les députés considèrent que la conclusion des négociations multilatérales constitue pour l'Union européenne l'objectif prioritaire à atteindre.

Les accords commerciaux bilatéraux doivent compléter les processus multilatéraux, dans la mesure où ils prévoient le respect de conditions de travail équitables, de règles environnementales communes et de normes de sécurité alimentaire déjà en vigueur dans l'Union européenne. En vue d'éviter de « payer deux fois » - d'abord au niveau bilatéral, ensuite au niveau multilatéral -, le rapport plaide en faveur du  concept de « poche unique », qui établirait un lien entre les concessions faites dans des accords bilatéraux et l'issue finale des négociations de Doha.

Le rapport rappelle que l'accord de libre-échange avec la Corée du Sud a permis la reconnaissance d'un nombre considérable d'indications géographiques. Il demande que de nouveaux efforts soient déployés pour qu'il en soit de même dans les futurs accords commerciaux.

Les députés se déclarent fortement préoccupés par l'accord UE-Maroc, étant donné que certains produits agricoles sont encore soumis à des quotas imposés aux exportations de l'Union européenne. Ils jugent par ailleurs inacceptable que la Commission reprenne les négociations avec le Mercosur sans engager un véritable débat politique avec le Conseil et le Parlement. Ils s’inquiètent des répercussions, sur l'ensemble du secteur agricole de l'Union, d'un éventuel accord d'association avec le Mercosur et jugent nécessaire de pondérer les concessions de façon à protéger les intérêts des agriculteurs européens.

La Commission est invitée à :

  • veiller à ce que les accords commerciaux ne portent pas atteinte au système européen de prix d'entrée des fruits et légumes ;
  • respecter ses engagements pris en faveur du secteur du sucre européen et à mettre fin à des concessions systématiques sur le sucre dans les négociations commerciales bilatérales et multilatérale ;
  • maintenir la transparence, et informer régulièrement le Parlement du déroulement des négociations d'accords commerciaux conclus par l'UE, y compris les accords commerciaux UE-Canada et UE-Ukraine.

Les députés insistent enfin sur l'importance dévolue à une mise en œuvre stricte des règles d'origine préférentielles. Ils demandent un réexamen de toutes les préférences commerciales accordées par l'Union européenne aux pays émergents membres du G20.