Instruction européenne en matière pénale. Initiative Belgique, Bulgarie, Estonie, Espagne, Autriche, Slovénie et Suède

2010/0817(COD)

Les ministres ont continué d'œuvrer à la création d'une décision d'enquête européenne en matière pénale en gardant à l'esprit l'objectif consistant à utiliser la reconnaissance mutuelle comme base pour permettre à un État membre de l'UE d'exécuter des mesures d'enquête à la demande d'un autre État membre.

Sur la base d'un document de travail, les ministres ont débattu essentiellement les cinq questions suivantes:

  • le champ d'application de la proposition;
  • les autorités compétentes des États d'émission et d'exécution;
  • les motifs de non-reconnaissance ou de non-exécution fondés sur les catégories de mesures;
  • la question de la proportionnalité; et
  • la question des coûts.

Champ d'application de la proposition : dès les discussions préalables, les délégations ont largement soutenu l'idée de mettre en place un système juridique unique d'obtention de preuves au sein de l'UE. La plupart des délégations sont convenues qu'un tel champ d'application général ne devrait cependant pas s'étendre aux formes d'entraide judiciaire qui ne sont pas directement liées à l'obtention de preuves et que la coopération policière devrait également rester en dehors du champ d'application de cet instrument. En outre, il conviendrait que la liste des exceptions au champ d'application général soit aussi circonscrite que possible. Si l'exclusion des équipes communes d'enquête, qui jouissent d'un régime particulier dans l'UE, a été de manière générale approuvée d'emblée, un examen supplémentaire a été jugé nécessaire en ce qui concerne l'inclusion de formes spécifiques d'interception de télécommunications. Les délégations ont dans l'ensemble soutenu l'inclusion dans le champ d'application de la directive de toutes les formes d'interception bien qu’avec certaines nuances. Des discussions supplémentaires seront nécessaires pour connaître les procédures pour lesquelles une décision d'enquête européenne pourra être émise. L'approche proposée par la présidence était de concentrer dans un premier temps les discussions sur les procédures pénales et d'évaluer seulement dans un deuxième temps si les solutions convenues pourraient être étendues à certains types particuliers de procédures autres que pénales.

L'orientation qui se dégage de ces travaux repose sur les éléments suivants:

  • le nouvel instrument devrait couvrir toutes les mesures d'enquête visant à l'obtention de preuves, la seule exception étant les équipes communes d'enquête, qui jouissent d'un régime particulier dans l'UE ;
  • les discussions devraient se concentrer dans un premier temps sur les procédures pénales et évaluer seulement dans un deuxième temps si les solutions convenues pourraient être étendues à certains types particuliers de procédures autres que pénales.

Autorités compétentes :

a) Autorités d'émission : plusieurs délégations se sont déclarées opposées à la disposition introduisant l'obligation de reconnaître une décision d'enquête européenne émise par une autorité autre qu'un juge, un procureur ou un magistrat instructeur. D'autres ont au contraire insisté sur le fait que les mesures relevant de la directive pouvaient être décidées par des autorités non judiciaires, par exemple des enquêteurs de la police, en vertu de leur droit national et que ces autorités devaient donc être en mesure d'émettre une décision d'enquête européenne. En vue de traiter cette question, et compte tenu de la base juridique retenue pour cette proposition, la présidence a présenté une proposition de compromis reposant sur l'introduction d'une procédure

de validation obligatoire visant à s'assurer, lorsqu'une décision d'enquête européenne est émise par une autorité compétente autre qu'un juge, un procureur ou un magistrat instructeur, que les conditions d'émission de la décision d'enquête européenne sont respectées. Cette orientation a reçu un appui général de la part des délégations.

b) Autorités d'exécution : les délégations se sont mises d'accord sur la nécessité de laisser le soin à l'État d'exécution de décider quelle serait l'autorité compétente pour exécuter une décision d'enquête européenne.

L'orientation qui se dégage de ces travaux repose sur les éléments suivants:

  • le nouvel instrument ne devrait s'appliquer qu'aux décisions d'enquête européenne émises ou validées par un juge, un procureur ou un magistrat instructeur;
  • la désignation des autorités compétentes pour exécuter une décision d'enquête européenne devrait relever de la compétence des États membres.

Motifs de non-reconnaissance ou de non-exécution fondés sur les catégories de mesures : la plupart des délégations sont convenues que, même si l'évolution de l'entraide judiciaire vers la reconnaissance mutuelle n'entraînera pas la pleine automaticité de l'exécution des décisions, les motifs de refus devraient être uniquement spécifiques, et qu'il conviendrait d'éviter un large motif de refus, rédigé en termes généraux, tel qu'il existe dans le régime actuel d'entraide judiciaire. Les délégations ont souligné que l'efficacité de l'instrument dépendra, entre autres éléments, de cette approche et qu'il convient par conséquent de veiller à ce qu'il n'y ait pas de retour en arrière par rapport aux instruments actuels. Les modalités de l'exécution continueront néanmoins à être régies par le droit national de l'État d'exécution. Certains motifs de refus fondés, par exemple, sur l'existence d'une immunité ou d'un privilège ou d'intérêts essentiels pour la sécurité nationale, devraient être applicables quelle que soit la mesure concernée. La plupart des délégations ont également approuvé l'approche proposée par la présidence établissant une distinction entre les catégories de mesures d'enquête, sur la base de leur caractère coercitif ou intrusif, afin de préciser les motifs de refus supplémentaires qui leur seraient applicables.

Les principes ci-après, mis en avant lors des discussions au niveau du Conseil, précisent l'orientation:

  • il ne devrait pas y avoir de retour en arrière par rapport à l'acquis (instruments relatifs à l'entraide judiciaire et à la reconnaissance mutuelle), en ce qui concerne l'existence de la mesure dans le droit national et la possibilité de contrôle de la double incrimination;
  • la coopération actuelle devrait être encore améliorée;
  • cette nouvelle approche ne devrait pas ajouter de la complexité pour les praticiens.

Sur cette base, la présidence a présenté une proposition concernant les motifs de refus fondée sur des distinctions tant génériques que spécifiques entre les mesures et entre les motifs de refus correspondants. L'orientation qui se dégage des discussions comporte les éléments suivants:

  • ne devraient être prévus que des motifs de refus spécifiques;
  • pour opérer la distinction entre les catégories de mesures d'enquête, la solution est à rechercher sur la base de l'approche en trois volets proposée par la présidence.

Proportionnalité : les principes suivants ont reçu l'appui de la plupart des délégations:

  • la proportionnalité devrait être systématiquement contrôlée par l'autorité d'émission;
  • l'autorité d'exécution devrait pouvoir opter pour une mesure moins intrusive que celle indiquée dans la décision d'enquête européenne si elle permet d'obtenir un résultat similaire;
  • la proportionnalité ne devrait pas constituer un motif général de refus que l'autorité d'exécution pourrait invoquer pour tous les types de mesure;
  • la communication directe entre l'autorité d'émission et l'autorité d'exécution devrait jouer un rôle important.

La présidence a proposé aux délégations une approche selon laquelle, outre le contrôle de la proportionnalité effectué par l'autorité d'émission au moment où est prise la décision d'enquête européenne, l'autorité d'exécution aurait la possibilité de consulter l'autorité d'émission sur la pertinence de l'exécution d'une décision d'enquête européenne lorsqu'elle aurait des raisons de penser que, en l'espèce, la mesure d'enquête concerne une infraction mineure. La disposition proposée par la présidence insiste sur l'importance de la communication entre les autorités compétentes des États d'émission et d'exécution pour évaluer la possibilité, dans un tel cas, de retirer la décision d'enquête européenne. Cette nouvelle disposition a reçu un appui général de la part des délégations.

Coûts : au cours du débat d'orientation mené lors de la session du Conseil JAI du 9 novembre 2010, le Conseil est convenu que des coûts disproportionnés ou un manque de ressources dans l'État d'exécution ne devraient pas constituer un motif de refus pour l'autorité d'exécution. En vue de poursuivre la réflexion sur d'autres solutions possibles, la présidence a proposé une solution prévoyant la possibilité que, dans des circonstances exceptionnelles, l'exécution de la mesure d'enquête soit soumise à la condition que les coûts soient supportés (ou partagés) par l'État d'émission. Dans ce cas, l'autorité d'émission aurait la possibilité de retirer la décision d'enquête européenne. Les délégations ont marqué leur accord général avec cette approche. Toutefois, certaines préoccupations ont été soulevées concernant l'effet de la solution proposée lorsque les consultations entre les autorités d'émission et d'exécution ne permettent pas d'aboutir à un accord sur les coûts ou au retrait de la décision d'enquête européenne. D'autres clarifications ont été jugées nécessaires et les discussions devront se poursuivre sur ce point particulier.