Agences de notation de crédit: surveillance

2010/0160(COD)

Le Parlement européen a adopté par 611 voix pour, 15 voix contre et 26 abstentions, une résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1060/2009 sur les agences de notation de crédit.

Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire (l’ex-procédure de codécision). Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un compromis négocié entre le Parlement européen et le Conseil.

Les amendements visent essentiellement à apporter des précisions ou des clarifications, notamment concernant les pouvoirs de l'Autorité européenne de surveillance (Autorité européenne des marchés financiers – AEMF) dans ses relations avec les autorités compétentes nationales. Ils modifient la proposition de la Commission comme suit :

Enregistrement et surveillance des agences de notation de crédit : l'AEMF sera exclusivement responsable de l'enregistrement et de la surveillance des agences de notation de crédit dans l'Union. Dans les cas où elle a délégué des tâches spécifiques à des autorités compétentes des États membres, elle restera juridiquement responsable.

L'AEMF aura la compétence exclusive pour conclure des accords de coopération en matière d'échange d'informations avec les autorités compétentes de pays tiers. Dans la mesure où des autorités compétentes participent au processus de prise de décision au sein de l'AEMF ou accomplissent des tâches au nom de l'AEMF, ces autorités seront couvertes par lesdits accords de coopération.

Normes techniques de règlementation : l'AEMF devra soumettre des projets de normes techniques de réglementation concernant les informations que doivent fournir les agences de notation de crédit aux fins de leur demande d'enregistrement. Dans les domaines non couverts par des normes techniques, l'AEMF sera habilitée à émettre et mettre à jour des orientations non contraignantes sur les questions relatives à l'application du règlement (CE) nº 1060/2009.

Demandes d’informations : l'AEMF sera habilitée à demander toutes les informations nécessaires, par simple demande ou par voie de décision, aux agences de notation de crédit, aux personnes qui prennent part à des activités de notation de crédit, aux entités notées et aux tiers liés, aux tierces parties auprès desquelles les agences de notation de crédit ont externalisé des fonctions opérationnelles et aux personnes qui ont un lien étroit et substantiel à un autre titre avec des agences de notation de crédit ou des activités de notation de crédit.

Si l'AEMF sollicite les informations par simple demande, le destinataire de la demande n'est pas tenu de les communiquer mais, dans le cas où il répond volontairement à une demande, les informations fournies ne doivent pas être inexactes ni trompeuses. Ces informations doivent être communiquées sans retard.

Les pouvoirs conférés à l’AEMF ne pourront être employés pour demander la divulgation d'informations ou de documents qui font l'objet du secret professionnel.

Enquêtes générales : l’AEMF pourra mener toutes les enquêtes nécessaires concernant les personnes qui prennent part aux activités de notation de crédit. À cette fin, les agents et autres personnes mandatées par l’AEMF seront habilités, entre autres, à: i) convoquer toute personne et lui demander de fournir oralement ou par écrit des explications sur des faits ou des documents en rapport avec l'objet et le but de l'enquête, et consigner les réponses;  ii) interroger toute personne physique ou morale qui accepte de l'être aux fins de recueillir des informations concernant l'objet d'une enquête.

L'AEMF pourra mener toutes les inspections sur place nécessaires dans les locaux professionnels des personnes morales visées au règlement. Lorsque la bonne conduite et l'efficacité des inspections l'exigent, l'AEMF pourra effectuer une inspection sur place sans préavis. Les agents de l'autorité compétente de l'État membre concerné pourront aussi, sur demande, assister aux inspections sur place.

D'ici le 1er juillet 2014 et dans le cadre de sa surveillance continue, l'AEMF devra mener au moins une enquête sur toutes les agences de notation de crédit relevant de ses compétences en matière de surveillance.

Examen du respect de l'obligation de contrôles a posteriori : dans l'exercice de la surveillance continue des agences de notation de crédit enregistrées au titre du règlement, l'AEMF devra également veiller à ce que les agences de notations se conforment à leur obligation de contrôle a posteriori.

L’AEMF devra procéder également, dans le cadre de cet examen a) à la vérification de l'exécution de contrôles a posteriori par les agences de notation de crédit;  b) à l'analyse des résultats desdits contrôles; et c) à la vérification du fait que les agences de notation de crédit ont bien mis en place des procédures afin de tenir compte des résultats des contrôles a posteriori dans leurs méthodes de notation.

Amendes et astreintes : l’AEMF sera habilitée à infliger des amendes aux agences de notation de crédit lorsqu'elle constate que celles-ci ont enfreint, délibérément ou par négligence, le règlement (CE) nº 1060/2009.

Le texte répartit les infractions en différents groupes auxquels sont attribuées des amendes d'un montant spécifique compris à l’intérieur de certaines fourchettes. Les amendes seront infligées selon le niveau de gravité des infractions. Elles pourront aller jusqu’à 750.000 EUR.

Pour fixer le montant de l'amende correspondant à une infraction spécifique, l’AEMF procèdera en deux temps : i) d'abord la fixation du montant de base de l'amende puis ii) l’ajustement de ce montant en appliquant des coefficients correspondant à des circonstances aggravantes ou atténuantes.

Le montant de base sera établi en prenant en compte le chiffre d'affaires annuel de l'agence de notation de crédit concernée. Le montant de base sera fixé en bas des fourchettes pour les agences de notation de crédit dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 10.000.000 EUR, au milieu pour celles dont le chiffre d'affaires est compris entre 10.000.000 EUR et 50.000.000 EUR, et en haut pour celles qui ont un chiffre d'affaires supérieur à 50.000.000 EUR.

Le montant d'une amende ne devra pas excéder 20% du chiffre d'affaires annuel de l'agence de notation de crédit concernée au titre de l'exercice précédent et, lorsque l'agence de notation de crédit a obtenu, directement ou indirectement, un avantage financier quantifiable grâce à l'infraction, le montant de l'amende devra être au moins égal à l'avantage ainsi obtenu.

Le conseil des autorités de surveillance de l’AEMF, par voie de décision, pourra également infliger des astreintes pour contraindre une agence de notation de crédit à mettre fin à une infraction ou pour contraindre une personne à fournir des informations, à se soumettre à une enquête ou à se soumettre à une inspection sur place.

Le montant des astreintes équivaut à 3% du chiffre d'affaires journalier moyen au titre de l'exercice précédent ou, s'il s'agit de personnes physiques, à 2% du revenu journalier moyen au titre de l'année civile précédente.

Le texte amendé introduit des règles de procédure pour l'adoption de mesures de surveillance et l'imposition d'amendes. Ainsi, lorsqu'elle constate qu'il existe de sérieux indices de l'existence de faits susceptibles de constituer une ou plusieurs des infractions énumérées au règlement, l’AEMF devra désigner, en son sein, un enquêteur indépendant pour ouvrir une enquête. Avant de prendre la décision d'infliger une amende ou des astreintes, l'AEMF devra accorder aux personnes qui font l'objet de la procédure la possibilité d'être entendues.

L'exécution forcée des amendes et astreintes sera régie par les règles de la procédure civile en vigueur dans l'État sur le territoire duquel elle a lieu. Les montants des amendes et astreintes seront affectés au budget général de l'Union européenne.

L'AEMF devra présenter chaque année à la Commission, au Parlement européen et au Conseil un rapport sur les sanctions infligées, notamment les mesures de surveillance, amendes et astreintes.

Transparence et concurrence : le texte amendé souligne que la transparence des informations fournies par l'émetteur d'un instrument financier noté à l'agence de notation de crédit concernée pourrait avoir une importante valeur ajoutée potentielle pour le fonctionnement du marché et la protection des investisseurs.

Pour renforcer la concurrence entre les agences de notation de crédit, contribuer à prévenir les risques de conflits d'intérêts liés au modèle de «l'émetteur-payeur», le Parlement avait demandé que les agences de notation enregistrées ou certifiées puissent obtenir les informations relatives aux instruments financiers que leurs concurrents désignés ont entrepris de noter de façon à être en mesure d'émettre des notations non sollicitées. Cette suggestion n'a pas été retenue à la demande des États membres mais le texte adopté invite la Commission à réfléchir davantage à ces questions et à présenter des propositions législatives en ce sens. La poursuite de ces travaux devrait permettre de définir de nouvelles obligations de transparence de la manière la plus propre à satisfaire l'intérêt général, et la plus cohérente pour la protection des investisseurs.

Actes délégués : lorsqu'elle prépare et élabore des actes délégués, la Commission devra garantir une transmission précoce et continue des informations et des documents pertinents au Parlement européen et au Conseil.

Le Parlement européen et le Conseil disposeront de trois mois à compter de la date de notification pour formuler des objections à l'égard d'un acte délégué. À l'initiative du Parlement européen ou du Conseil, il sera possible de prolonger ce délai de trois mois dans des domaines sensibles. Le Parlement européen et le Conseil pourront également informer les autres institutions qu'ils n'ont pas l'intention de soulever des objections.

Rapport de l'AEMF : d'ici le 31 décembre 2011, l'AEMF devra évaluer ses besoins en personnel et en ressources au regard des pouvoirs et obligations censés découler du règlement et soumettre un rapport au Parlement européen, au Conseil et à la Commission.