Politiques extérieures de l'UE en faveur de la démocratisation

2011/2032(INI)

La commission des affaires étrangères a adopté le rapport d’initiative de Véronique DE KEYSER (S&D, BE) sur les politiques extérieures de l'UE en faveur de la démocratisation.

Rappelant le caractère essentiel de la défense de la démocratie en tant que valeur universelle, les députés estiment que seules les démocraties peuvent fonctionner en tant que fondement d'un partenariat structurel équilibré entre des pays tiers et l'UE.

Dans ce contexte, ils appellent à la redéfinition de la politique de l’UE en la matière.

La nécessité d'un changement de paradigme : les députés estiment que le rôle de l'Union européenne en tant que "pouvoir non violent" (soft power) dans le système international ne peut être consolidé que si la protection des droits de l'homme constitue une vraie priorité dans sa politique à l'égard des pays tiers. Ils rappellent également qu'une condition essentielle à une politique étrangère cohérente de l'Union est de toujours exercer aussi au sein de l'Union et dans les États membres, une politique exemplaire en matière de respect des droits de l'homme et de démocratie, tant au présent qu'à l'avenir. Toutefois, et vu des difficultés en Afrique du Nord et au Moyen Orient, les députés considèrent que la question de la justice sociale et de la lutte contre les inégalités doit devenir un objectif essentiel de la politique extérieure de l'Union, puisqu'elle constitue un élément indispensable à la construction d'une société pacifique, prospère et démocratique. C’est pourquoi, ils demandent un changement de paradigme axé sur une véritable consolidation de la démocratie fondée sur un développement endogène, durable, général au profit des populations et sur le respect de l'État de droit et des droits de l'homme et des libertés élémentaires. Á ce titre, l'UE doit accompagner la mise en place d'un environnement favorable au développement d'une société démocratique.

Pour réussir, un processus de démocratisation doit impérativement contribuer à mettre le pays concerné sur la voie du développement social et économique, afin de faire en sorte que les droits fondamentaux de la population, notamment le droit à l'éducation, à la santé et à l'emploi, soient respectés.

La priorité doit ainsi aller à :

  • l'utilisation renforcée, concrète et énergique des instruments de l'Union ;
  • des politiques cohérentes tendant à décourager les violations des droits de l'homme, telles que la réduction des enveloppes financières allouées aux gouvernements ne respectant pas la démocratie et les droits de l'homme ;
  • un renforcement de la politique commerciale commune dans le sens du développement durable, de l'élimination de la pauvreté et de la protection des droits de l'homme;
  • la ratification du statut de Rome de la Cour pénale internationale;
  • l’intégration, dans tous les accords de libre échange, de clauses juridiquement contraignantes en matière sociale, environnementale et de respect des droits de l'Homme, avec comme base minimale la liste des conventions contenues dans le règlement SPG+;
  • l’association du Parlement européen à tous les stades relatifs à la conclusion, à l'application et à la suspension d'accords internationaux avec des pays tiers ;
  • une analyse détaillée des possibilités de réforme dans les pays tiers basée sur des échanges de vues réguliers avec toutes les composantes démocratiques d'un pays afin qu'il soit basé sur la confiance et la connaissance réciproques;
  • une politique de sanctions appropriées, proportionnées et "intelligentes" contre les principales autorités du régime n’appliquant pas les principes démocratiques, tout en assurant un soutien aux populations et à la société civile.

Les députés recommandent notamment que l'Union européenne, dans le cas des partenariats les plus difficiles, n’isolent ces pays mais conduisent des relations avec eux sur la base d'une conditionnalité pertinente et efficace qui serve de réelle incitation aux réformes démocratiques. Cette approche devrait notamment être appliquée dans les politiques de partenariat et de voisinage. Pour ces pays, les députés réclament en particulier une approche différenciée mais intimant aux pays concernés l’application de mêmes exigences en matière de droits de l'homme et de démocratie car l’application d’une distinction entre des "normes minimales" applicables aux pays les plus difficiles et des normes ambitieuses pour les pays les plus avancés serait peu crédible.

Approfondir la dimension politique : les députés réclament une approche globale cohérente fondée sur des stratégies ciblées en matière de développement, de droits de l'homme, de bonne gouvernance, d'inclusion sociale, de promotion des femmes et des minorités, de tolérance religieuse.

Ils soutiennent en particulier toutes les initiatives suivantes :

  • la promotion de la participation des femmes à la prise de décision à tous les niveaux ;
  • l’intégration de la variable droits de l'homme dans l'ensemble des activités de l'Union en matière de relations extérieures ;
  • le soutien apolitique à l'aide humanitaire fournie au cours du processus de démocratisation;
  • le soutien systématique aux parlements nouvellement élus de façon démocratique ;
  • le renforcement du dialogue avec un éventail d'acteurs locaux aussi large que possible;
  • le renforcement du rôle et de l’impact des partis politiques démocratiques et légitimes, des mouvements sociaux et de la presse libre ;
  • le soutien à la société civile et des parlements des pays tiers dans la surveillance démocratique du budget et dans la gestion du processus de bonne gouvernance;
  • de nouvelles stratégies cohérences en faveur des droits de l'homme associant pleinement le Parlement et la définition de documents de stratégie par pays pointant des objectifs à atteindre en termes de démocratisation ;
  • l’association des femmes à la prévention et à la résolution des conflits;
  • une approche globale stratégique, hiérarchisée et à long terme qui garantisse la place de l'égalité des genres au cœur de l'ensemble des politiques, programmes, projets et activités communautaires encouragés au niveau de l'UE;
  • la création d'une direction des droits de l'homme et de la démocratie au sein du SEAE;
  • des programmes régionaux de protection des personnes les plus vulnérables, en particulier des enfants, des femmes et des personnes âgées;
  • le renforcement des missions d'observation électorale;
  • un renforcement du contrôle et de l'obligation de rendre des comptes au sujet des violations des droits de l'homme, de la mauvaise gouvernance et de la corruption;
  • le renforcement de l’instrument européen IEDDH lors de la prochaine révision des instruments financiers, avec des moyens accrus.

Soutenir la société civile : les députés demandent par ailleurs un soutien renforcé aux organisations locales et régionales qui participent à la consolidation de la démocratie en créant des espaces de dialogue et d'échange de bonnes pratiques avec l'Union. Ils proposent à cet effet l'élaboration d'une politique plus ouverte et plus dynamique de soutien à la société civile, qui encourage la démocratisation et la participation citoyenne.

Des mesures sont également proposées pour renforcer les capacités de la société civile, grâce à : i) l'éducation et à des actions de sensibilisation, ii) un appui en direction des mouvements sociaux non extrémistes et des médias indépendants ainsi que des partis politiques, iii) le renforcement du rôle joué par les ONG via l’augmentation des fonds qui leur sont attribuées.

Les députés demandent enfin un soutien pour les médiateurs, les organismes publics et les ONG œuvrant dans les pays du partenariat oriental.