Égalité entre les femmes et les hommes dans l'Union européenne — 2010

2010/2138(INI)

Le Parlement européen a adopté par 366 voix pour, 200 voix contre et 32 abstentions une résolution sur l'égalité entre les femmes et les hommes dans l'UE – 2010.

Le Parlement rappelle tout d’abord que de nombreuses inégalités séparent encore les hommes et les femmes au nombre desquelles figurent les disparités salariales qui représentent toujours en moyenne 18% dans l’UE, et dépassent les 25% dans certains pays. Il met également en avant le fait que le poids des responsabilités domestiques des femmes est plusieurs fois supérieur à celui des hommes et que cette situation n'est évaluée d'aucune façon. Il attire en outre l’attention sur le fait que, selon les estimations, 20 à 25% des femmes en Europe souffrent de violences physiques durant leur vie. Face à ces constats, il en appelle à de nouvelles mesures de lutte contre les inégalités.

Les femmes toujours plus touchées que les hommes par la crise : le Parlement rappelle que les secteurs touchés par la crise ont d'abord été des secteurs majoritairement masculins, mais que la crise s'est étendue à d'autres secteurs où la mixité est plus importante, augmentant ainsi le taux de chômage chez les femmes. Il remarque que malgré la volonté affichée des États membres et de la Commission de créer des conditions égales pour les hommes et les femmes, aucun succès durable n'a été enregistré à ce jour :

  • les femmes sont toujours plus nombreuses que les hommes à être affectées par la pauvreté, le chômage et les emplois précaires en cas de perte d'emploi ;
  • le risque de ne pas être réengagé est plus élevé pour les femmes que pour les hommes ;
  • les projets de relance économique portent principalement sur les emplois où les hommes sont majoritaires ;
  • les femmes sont surreprésentéesparmi les personnes confrontées à la pauvreté.

Pour le Parlement, la crise économique et financière doit être envisagée comme une occasion de faire des propositions nouvelles et innovantes en matière de taux d'emploi des femmes, de niveaux de rémunération, de temps de travail et d'occupation des postes à responsabilité.

Renforcer les mesures d’inclusion des femmes : le Parlement insiste pour que soient fixés des objectifs en matière d'inclusion des femmes dans des activités ou des secteurs ou, pour les niveaux auxquels elles étaient précédemment exclues et sous-représentées. Il invite notamment les États membres à veiller à ce que les politiques visant à réaliser les objectifs de la stratégie Europe-2020 en matière de pauvreté et d'inclusion sociale bénéficient aux femmes en fonction du pourcentage qu'elles représentent parmi les personnes en situation de pauvreté.

Renforcer la place des femmes sur le marché de l’emploi : le Parlement souligne que, selon certaines études, si les taux d'emploi, d'emploi à temps partiel et de productivité des femmes étaient similaires à ceux des hommes, le PIB augmenterait de 30% dans l’UE. L'égalité entre les hommes et les femmes a donc un effet positif indéniable sur la croissance économique. C’est la raison pour laquelle il préconise une série de mesures pour favoriser l’emploi des femmes :

  • renforcer les filières riches en potentiel d’emplois nouveaux (écologie, environnement et nouvelles technologies) ;
  • lutter pour l'éradication de la pauvreté, grâce à la révision des politiques macro-économiques, monétaires, sociales et de l'emploi des États membres ;
  • concevoir des stratégies qui favorisent une répartition juste des revenus, garantissent des revenus minimums, des salaires et des réformes dignes, créent plus d'emplois féminins de qualité assortis de droits, garantissent l'accès à des services publics de qualité, améliorent la protection sociale et les services de proximité, notamment les crèches, garderies, … 

Il souligne dans ce contexte, que du fait des évolutions de la démographie, il s’avère urgent d'activer le potentiel des femmes et d'accroître leur taux d'activité afin d'assurer l'emploi à 75% de la population de 20 à 64 ans comme le prévoit la stratégie Europe-2020. Le Parlement observe par ailleurs que les taux d'emploi des femmes sont plus bas dans les zones rurales et que les personnes vivant dans ces zones sont ainsi pénalisées par l'absence de possibilités d'emploi de qualité. Ainsi, un grand nombre de femmes ne travaillent pas sur le marché du travail officiel et ne sont ainsi pas inscrites en tant que chômeuses, ce qui leur pose des problèmes financiers et juridiques dans l'exercice du droit au congé maternité ou du congé maladie et l'acquisition de droits à pension.

D’une manière générale, le Parlement européen en appelle à des propositions contraignantes de la part de la Commission plutôt qu’à des stratégies et déclarations politiques non contraignantes.

Lutter de manière résolue contre la disparité salariale : parmi les mesures contre lesquelles il convient de lutter avec force, le Parlement évoque l’écart de salaire entre les hommes et les femmes. Á titre indicatif, le Parlement rappelle que plus de 50 ans après l'intégration dans les traités communautaires du principe d'égalité de rémunération pour un travail de même valeur, une citoyenne de l'Union doit, en moyenne, travailler 418 jours pour gagner autant qu'un homme en une année. Il est ainsi particulièrement déçu du manque de débat en la matière et appelle la Commission à réagir sans tarder. Il invite les États membres à éviter que le marché du travail ne soit segmenté en fonction des sexes et à lutter contre la surreprésentation des femmes dans les activités à faible rémunération. Plusieurs mesures sont également proposées :

  • revoir la directive en vigueur, en élaborant des plans sectoriels par étapes, avec des objectifs précis, consistant par exemple à ramener la fracture salariale à 0,5% d'ici 2020 ;
  • s’attaquer aux inégalités dans la part du travail non rémunéré des femmes et des hommes et élaborer des plans pour l'égalité dans les entreprises et les autres lieux de travail ;
  • mettre en place des mesures visant à remédier au paradoxe actuel selon lequel les femmes, bien qu'ayant un niveau d'éducation supérieur, sont toujours moins bien rémunérées ;
  • appliquer le principe de la parité entre hommes et femmes aux systèmes nationaux de pension, tant en ce qui concerne l'âge que le montant ;
  • mettre convenablement en œuvre la législation "à travail égal, salaire égal" et faire en sorte que la Commission applique des sanctions aux États membres manquant à leurs obligations ;
  • lancer une campagne à l'échelle européenne sur cette question.

Concilier vie familiale et vie professionnelle : une fois encore, le Parlement demande des propositions concrètes en vue de concilier la vie professionnelle et la vie privée, notamment dans le domaine de l'assistance aux personnes dépendantes et la gardes des enfants. Il est indispensable que la Commission veille à ce que les différentes législations européennes relatives à la conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée soient correctement transposées par les États membres et que des mesures positives soient prises afin de faciliter le retour à l'emploi des femmes après une période consacrée à la famille (éducation des enfants et/ou prise en charge d'un parent malade ou handicapé). Au passage, le Parlement constate que les emplois à temps partiel peuvent avoir des répercussions personnelles négatives. Parallèlement, les États membres sont invités à encourager la mise en place ou le renforcement des structures d'accueil pour les enfants, les personnes âgées ou dépendantes en les rendant abordables, de qualité, avec des horaires compatibles avec les journées de travail à temps plein. De manière générale, le Parlement souligne que la famille est le fondement de la société et est indissociablement liée à la transmission de valeurs et à la coexistence dans un esprit solidaire. Il convient donc de mettre en place des horaires de travail flexibles et du télétravail, de développer les structures de garde d'enfants et la professionnalisation des soins aux personnes âgées à domicile pour permettre une plus grande participation des femmes au marché du travail, à l'éducation et à la formation. Le Parlement regrette notamment l'absence de systèmes de congé adéquats et de régimes de travail flexibles pour les deux parents ainsi que la lenteur de l’évolution des mentalités dans ce domaine.

Renforcer la présence des femmes dans les postes à responsabilité : le Parlement estime qu’il faut redoubler d'efforts au niveau européen afin d'augmenter la représentation féminine dans les toutes sphères: dans les institutions européennes, dans les grandes entreprises et dans l’administration publique. Il se dit ainsi favorable à l’utilisation de quotas, car ces derniers ont des effets bénéfiques pour lutter contre les inégalités. Il rappelle que seules 3% des grandes entreprises ont une femme à la tête de leur organe de décision suprême et souligne à cet égard l'exemple de la Norvège, qui applique avec succès depuis 2003 une politique de quotas visant à établir une parité dans les conseils d'administration des entreprises, exemple suivi d'ores et déjà par l'Espagne et la France. Il appelle les États membres à adopter des mesures, en particulier par voie législative, pour fixer des objectifs contraignants dans ce domaine.

Lutter contre les stéréotypes : le Parlement observe que bon nombre d’inégalités sont le fruit de stéréotypes tenaces contre lesquels il convient de lutter en réalisant notamment des campagnes de sensibilisation dans les écoles, les centres de travail et les médias ou en neutralisant la question du genre dans certaines métiers ou activités professionnelles. Il attire également l’attention sur le rôle de la langue dans la persistance des stéréotypes. Il invite les États membres à mettre en place, tout au long de la scolarité, des programmes d'enseignement, d'information et de sensibilisation, afin de promouvoir les valeurs d’égalité entre les hommes et les femmes.

Lutter contre la violence faite aux femmes : le Parlement rappelle que la violence contre les femmes constitue un obstacle majeur à la réalisation de l'égalité entre les femmes et les hommes. Il est donc urgent que la Commission entame l'élaboration d'une proposition de directive globale sur la prévention et la lutte contre toutes les formes de violence à l'égard des femmes, qu'elles soient physiques, sexuelles ou psychologiques, notamment la traite des femmes. Il demande instamment aux États membres de prendre des mesures visant à assurer l'accès à des services d'aide chargés d'éviter les violences et salue la création de l'Ordre de protection européen et la directive contre la traite des êtres humains et appelle à l’entrée en vigueur rapide de cette dernière. Une fois encore, le Parlement demande le lancement d’une Année européenne contre la violence envers les femmes, la réalisation d’un sondage pour mesurer la portée réelle du problème en Europe ainsi qu’une meilleure formation des personnels policiers, judiciaires et sociaux, y compris sur les violences psychologiques ou physiques, graves et rares, telles que le vitriolage.

Enfin, le Parlement en appelle à de nouvelles mesures dans les domaines suivants :

  • une plus grande adéquation des pensions des femmes, parce que celles-ci interrompent plus souvent leur carrière que les hommes pour s'occuper des enfants et de membres de leur famille malades ou âgés ;
  • un renforcement des actions destinées à faire participer les femmes à la formation professionnelle dans le cadre de l'éducation tout au long de la vie ;
  • la pleine reconnaissance des droits de la femme dans le secteur agricole ;
  • le soutien à l'emploi des "femmes enceintes ou des mères assumant des charges familiales non partagées" ;
  • une attention particulière aux groupes de femmes vulnérables: les femmes handicapées, âgées, migrantes, lesbiennes, bisexuelles ou transgenre, ou appartenant à des minorités dont les Roms, ainsi que les mères isolées, etc. ;
  • le renforcement des aides aux soins de santé reproductive et génésique (en rappelant le droit à la contraception et à l'avortement pour toutes les femmes);
  • l’amélioration des systèmes de coopération et de participation des organisations féminines et de la société civile en général aux processus d'intégration de la dimension hommes-femmes ;
  • l'intégration de la dimension du genre dans l’élaboration des budgets européen et nationaux.