Le Parlement européen a adopté par 506 voix pour, 44 voix contre et 44 abstentions, une résolution déposée par sa commission des affaires étrangères sur le rapport 2010 concernant l'ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM).
Les députés rappellent tout d’abord qu'en 2005, le Conseil européen a accordé le statut de candidat à l'ARYM mais que, malgré les progrès importants accomplis depuis lors par ce pays, le Conseil n'a toujours pas fixé de date pour l'ouverture des négociations. Ils soulignent au passage que les problèmes bilatéraux ne devraient pas constituer un obstacle au processus d'adhésion, ni servir à bloquer ce processus, même s'il convient de les régler avant l'adhésion. Se ralliant à l'évaluation faite par la Commission dans son rapport de suivi 2010 sur l’ARYM (COM(2010)0660), les députés appellent celle-ci à engager les négociations comme le Parlement l'avait demandé dans ses résolutions antérieures.
Évolution de la situation politique : le Parlement prend acte des récents événements politiques ayant mené aux élections anticipées et invite tous les partis politiques à jouer un rôle actif et constructif dans le processus de préparation des élections. Il insiste pour que tous les problèmes bilatéraux soient résolus dans un esprit de bon voisinage et dans l’intérêt de l'UE, sachant que ces questions en suspens constituent un frein au processus d'adhésion. Les députés sont notamment inquiets de la montée des tensions interethniques suscitée par la construction de la forteresse de Kale à Skopje et appellent les responsables politiques et religieux à agir de façon responsable en s'abstenant de toute initiative susceptible d'aggraver les tensions interethniques. Ils soulignent que la montée de l'esprit isolationniste pourrait s'imposer et se présenter comme une option de remplacement en l'absence de perspective européenne concrète. Le Parlement invite le gouvernement de ce pays à favoriser au contraire la mise en place d'un dialogue global entre les communautés ethniques et à éviter les actes et les initiatives visant à renforcer l'identité nationale au détriment des autres communautés. Ils regrettent au passage que l'action de médiation menée par les Nations unies en vue de régler le différend sur la dénomination du pays n'ait pas donné de résultats concrets.
Démocratie, état de droit et droits de l'homme : le Parlement invite les partis d'opposition à mettre fin à leur boycott du parlement national et à renouer le dialogue politique dans le cadre des institutions. L'opposition doit notamment instaurer avec le gouvernement du pays un dialogue ouvert sur l'ensemble des enjeux auxquels le pays doit faire face. Les députés rappellent que des médias libres et indépendants sont un préalable indispensable à la mise en place d'une démocratie stable. Or, le pays connaît un net recul de la liberté des médias, c’est pourquoi, le Parlement invite les journalistes à maintenir un haut degré de professionnalisme dans leur travail, à se soustraire aux influences politiques et à créer des associations professionnelles de journalistes. En ce qui concerne, la réforme du système judiciaire, le Parlement demande que de nouveaux efforts soient consentis dans la réforme de la justice, afin d'en garantir le professionnalisme et l'indépendance vis-à-vis des pressions politiques. Les députés se disent notamment préoccupés par le rôle permanent exercé par le ministère de la justice au sein du Conseil supérieur de la magistrature. En ce qui concerne la lutte contre la corruption, les députés encouragent les autorités à continuer de mettre en œuvre la législation en la matière et à renforcer l'indépendance, l'efficacité et les moyens de la justice. Ils soulignent l'urgence que revêt l'application effective et impartiale de la législation anti-corruption, en particulier en ce qui concerne le financement des partis politiques et les conflits d'intérêts. Ils insistent sur la nécessité de rendre le système judiciaire prévisible et de lui assurer la confiance de la population. En ce qui concerne la question de l’utilisation des fonds européens, les députés demandent que le prochain rapport de la Commission s’attarde sur les effets et les résultats obtenus grâce à l'attribution de fonds européens dans le cadre de la réforme de la justice et de la lutte contre la corruption. Ils demandent également à la Commission de lui fournir une évaluation plus détaillée de l'efficacité des mesures de lutte contre la corruption en matière de marchés publics et de fraude. Le Parlement demande en outre que l’on évalue les progrès accomplis dans la réforme de l'administration publique et se félicite de l'augmentation des recrutements du personnel issu de communautés minoritaires. Il demande cependant le renforcement des mesures prises dans le domaine pénitentiaire (surpopulation carcérale) et dans le domaine de l’éducation. Des efforts sont notamment nécessaires pour renforcer l'intégration ethnique de toutes les communautés du pays. Le Parlement évoque en particulier la question des Roms, qui restent confrontés à des conditions de vie déplorables et continuent de faire l'objet de discriminations dans l'accès au marché de l'emploi, aux soins et aux services sociaux. Des mesures sont également nécessaires pour lutter contre la discrimination (notamment la discrimination liée à l'orientation sexuelle). Des efforts sont également attendus en faveur des droits des femmes et de l'égalité des chances. D’autres questions sont abordées comme les diffamations dont ont été victimes les membres des organisations civiles, le renforcement du droit du travail ou encore la protection du patrimoine culturel (y compris le patrimoine bulgare laissé à l’abandon).
Évolutions socioéconomiques : le Parlement constate la persistance d'un taux de chômage très élevé, en particulier chez les jeunes. Des mesures plus efficaces sont dès lors nécessaires pour renforcer les investissements publics axés sur les politiques de l'emploi. Le Parlement demande à cet effet une augmentation de l'aide accordée dans ce sens au titre de l'instrument de préadhésion (IAP). Les députés constatent l'amélioration du climat des affaires même si le niveau des investissements directs étrangers reste faible. Parallèlement, le Parlement se félicite de la mise en œuvre de l'accord de stabilisation et d'association avec l'Union européenne et de la suppression des tarifs douaniers permettant au pays de se préparer à résister à la concurrence accrue qu'il devra affronter une fois entré dans l'UE. Le Parlement souligne également la nécessité d'appliquer les principes de la bonne gouvernance dans le domaine des dépenses budgétaires en renforçant le libre accès aux informations publiques. Il demande en outre la mise en place d’un réseau de transports publics efficace et fiable, tant au sein du pays qu'au niveau de la région (en particulier la liaison ferroviaire Sofia/Skopje/Tirana). Dans la foulée, ils appellent les autorités de l’ARYM et de la Bulgarie à rouvrir la voie transfrontalière pour les piétons et les cyclistes entre Staro Konjarevo et Gabrene. Des mesures spécifiques sont réclamées dans les domaines de la qualité de l'eau, de la gestion des déchets et de la protection de la nature. Á cet égard, le Parlement appelle une nouvelle fois à assurer une surveillance efficace de la qualité et du niveau des eaux des lacs frontaliers d'Ohrid, Prespa et Dojran, et de celles du Vardar. Le Parlement s’inquiète également de la pollution des sols dans la ville de Veles et invite la Commission à déterminer si les crédits de l'IAP pourraient être utilisés à cet effet.
Questions régionales : si le Parlement félicite le pays pour le rôle permanent qu'il joue en faveur de la stabilisation dans la région et sa décision de supprimer l'obligation de posséder un passeport international pour les citoyens voyageant entre l’ARYM et la Serbie, il regrette vivement que le différend avec la Grèce sur la question de la dénomination du pays continue de bloquer sa progression sur la voie de l'adhésion à l'Union. Il invite les gouvernements de Grèce et d’ARYM à se garder de tout geste et de toute action ou déclaration polémique susceptible d'avoir des effets négatifs et de peser sur les relations de bon voisinage. Constatant l'intensification du dialogue entre les deux Premiers ministres pour parvenir à un compromis sur cette question, le Parlement demande la conclusion rapide d'un accord sur la question de la dénomination du pays sachant que le maintien du statu quo pourrait mettre à mal non seulement la stabilité du pays et de la région, mais aussi la crédibilité de la politique d'élargissement.
Le Parlement demande également :