Droits, soutien et protection des victimes de la criminalité: normes minimales
La Commission a présenté une communication visant à renforcer les droits des victimes dans l'Union européenne, de manière à ce que les victimes bénéficient de la reconnaissance qui leur est due, et à ce que leurs droits soient respectés dans toute l’Europe sans aucune forme de discrimination.
Nécessité de nouvelles mesures en faveur des victimes : dans le but de consolider le domaine de la liberté, la sécurité et la justice, la Commission a identifié comme priorité stratégique, sur la base du programme de Stockholm et de son plan d'action, la nécessité d'agir pour renforcer les droits des victimes de la criminalité et garantir que leur besoin de protection, de soutien et d'accès à la justice soit satisfait.
L'Union européenne a déjà pris des mesures en ce qui concerne les droits des victimes lors des procédures pénales (Décision-cadre 2001/220/JAI relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales; directive 2004/80/CE relative à l'indemnisation des victimes de la criminalité) et la plupart des États membres assurent un certain niveau de protection et de soutien aux victimes. Toutefois, le rôle et les besoins des victimes dans le cadre des procédures pénales ne sont en général toujours pas suffisamment pris en considération, et le niveau de leurs droits continue à diverger significativement d'un pays à l'autre de l'UE.
- Selon Eurostat, quelque 30 millions d'infractions commises contre les personnes ou les biens sont enregistrées chaque année, et de nombreuses autres ne sont jamais déclarés. On peut estimer avec prudence que plus de 75 millions de personnes sont annuellement victime directe de la criminalité.
- Chaque année, de nombreuses personnes sont par ailleurs victime d'accidents de la route. Plus de 1 million d'accidents de la route dans toute l'Union européenne ont provoqué 30.700 décès en 2010. Quelque 31.000 personnes sont tuées chaque année sur les routes, dont 850 enfants de moins de 14 ans, alors que 250.000 autres sont grièvement blessées et 1.200.000 légèrement.
- Les Européens voyagent et déménagent constamment d'un pays à l'autre, et le risque d'être victime est tout aussi élevé lorsque l'on se trouve à l'étranger. Sur une quantité estimée de 1,4 milliard de voyages effectués par les Européens en 2008, environ 90% l'ont été à l'intérieur des frontières de l'Union.
Ces chiffres montrent l'importance qu'il y a à agir en ce qui concerne les droits des victimes d'infractions ou d'accidents de la route, dans leur propre pays ou lorsqu'elles se déplacent à l'étranger ou y résident. Ce problème a une dimension aussi bien transfrontière que nationale, et appelle une action de l'UE.
La question des droits des victimes revêt également une dimension de genre. Le Conseil de l'Europe estime que 20 à 25% des femmes européennes subissent un acte de violence physique au moins une fois au cours de leur vie adulte, 12 à 15% subissent des violences domestiques et plus de 10% sont victimes de violences sexuelles.
Répondre aux besoins des victimes : l'objectif fondamental de l'ensemble législatif présenté par la Commission est de répondre aux besoins des victimes de façon approfondie. Les propositions prennent en compte les besoins des victimes directes de la criminalité, mais aussi des victimes indirectes telles que les membres de la famille qui subissent également les conséquences de l'infraction.
Les principaux aspects à traiter sont les suivants :
- Reconnaissance et traitement respectueux : la dignité humaine des particuliers est un droit fondamental qui se trouve au cœur du concept d'une société équitable et sur lequel repose le traitement approprié des victimes. Les particuliers ayant subi un acte de criminalité s'attendent donc à être reconnus en tant que victime, à voir leurs souffrances prises en compte et à être traitées avec sensibilité et professionnalisme.
- Protection : les victimes peuvent subir des désagréments au cours d'une procédure pénale en raison de la manière dont le système fonctionne. Il est important d'assurer aux victimes une protection tout au long de l'enquête pénale et de la procédure judiciaire. Cette protection est essentielle pour les victimes particulièrement vulnérables, telles que les enfants. Même après un acte criminel, les victimes sont vulnérables par rapport à d'autres atteintes, aux intimidations ou aux représailles de l'auteur des faits. Garantir la mise à disposition de mesures de protection peut être un facteur essentiel de prévention de nouveaux incidents. Enfin, pour protéger les personnes qui exercent leur droit à la libre circulation, la Commission propose pour la première fois la reconnaissance mutuelle des mesures de protection.
- Soutien : un soutien approprié et donné à temps est essentiel pour aider les victimes à surmonter les obstacles émotionnels, pratiques, administratifs et juridiques et à retrouver leur équilibre. En dépit des efforts fournis par certains services existants de soutien aux victimes, une telle assistance n'est actuellement pas toujours facilement accessible.
- Accès à la justice : les informations aux victimes sur leurs droits et sur les données et décisions essentielles constituent un aspect déterminant de la participation à la procédure, et il convient de les communiquer de façon compréhensible pour elles. Les victimes doivent également être en mesure de participer au procès et de suivre le déroulement de leur affaire. En fait, les victimes dans les divers pays de l'UE n'ont pas toujours accès à ces données de base concernant la justice.
- Indemnisation et réparation de la victime : l'indemnisation vise à compenser un dommage financier immédiat et à long terme. Elle peut aussi revêtir la forme d'une reconnaissance au moyen d'un paiement symbolique. La justice réparatrice va au-delà d'une indemnisation purement financière et vise surtout à un rétablissement de la situation de la victime : elle vise à remettre les victimes dans la situation où elles se trouvaient avant l'acte criminel, en leur fournissant, si elles le souhaitent, l'opportunité d'affronter leurs agresseurs de face et pour ces derniers d'assumer la responsabilité de leurs actes.
Réponses de la Commission : la Commission propose la série d'instruments législatifs suivants en réponse à ces besoins et pour faire en sorte que les victimes de la criminalité bénéficient en Europe d'un niveau minimum de droits, de protection et de soutien, et d’accès à la justice et à une réparation. La Commission proposera :
- une directive établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité, destinée à remplacer la décision cadre de 2001. Ce texte garantira que les victimes soient traitées avec respect et que les besoins particuliers des victimes vulnérables soient correctement pris en compte. Il fera également en sorte que les victimes obtiennent le soutien dont elles ont besoin, qu’elles puissent participer aux procédures, qu’elles reçoivent et comprennent les informations pertinentes, et qu’elles bénéficient d’une protection pendant toute la durée de l’enquête pénale et de la procédure juridictionnelle.
- un règlement relatif à la reconnaissance mutuelle des mesures de protection en matière civile, qui contribuera à prévenir les actes de violence et les préjudices qui en résultent, et garantira aux victimes (de la violence domestique, par exemple) qui bénéficient d'une mesure de protection dans un État membre de jouir du même niveau de protection dans les autres États membres lorsqu'elles doivent s'y déplacer ou s'y installer. Une telle protection devrait être accordée à la victime sans que celle-ci n’ait à endurer des procédures supplémentaires. Cet instrument vient compléter la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la décision de protection européenne soumise en septembre 2009 à l’initiative d’un groupe d’États membres et en cours de discussion dans ces deux instances.
Pour ce qui est de l’avenir, l’action de la Commission concernant les droits des victimes consistera, dans une prochaine phase, à :
revoir la directive 2004/80/CE sur l'indemnisation des victimes de la criminalité, ainsi que le règlement «Rome II» (pour traiter de la question du droit applicable aux périodes de prescription dans le cas des accidents de la route transfrontaliers) ;
réaliser de nouvelles études et mener de nouvelles actions, en particulier à l’égard de groupes spécifiques tels que les victimes du terrorisme, de la criminalité organisée et de la violence à caractère sexiste, y compris les mutilations génitales féminines, afin d'améliorer le sort de ces victimes ;
mettre en œuvre une série de mesures d’accompagnement pour garantir que les victimes disposent de droits effectifs, et pas uniquement lorsqu’elles sont partie à une procédure pénale. Cet effort inclura des actions de formation et de renforcement institutionnel, l’échange de bonnes pratiques, un travail de prévention des infractions et de la violence (par la sensibilisation et la fourniture d’informations, par exemple), la collecte de données et des travaux de recherche ;
continuer à apporter un soutien financier, dans le cadre des programmes de financement existants, afin de promouvoir les thèmes intéressant les droits et les besoins des victimes.
L'ensemble de ces efforts aboutira à placer les droits et les besoins des victimes au cœur de l’administration de la justice dans l’Union.