Accroître l'impact de la politique de développement de l'Union européenne

2011/2047(INI)

Le Parlement européen a adopté par 415 voix pour, 77 voix contre et 66 abstentions une résolution sur l'accroissement de l'impact de la politique de développement de l'Union européenne.

Rappelant que l'éradication de la pauvreté constitue l'objectif principal de la politique de développement de l'Union européenne et l’un des objectifs majeurs des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), le Parlement appelle à des actions plus résolues pour accroître l’impact de la politique de développement européenne.

Il fait à cet effet les principales recommandations suivantes :

Politique de développement à fort impact : le Parlement appelle tout d’abord à nouveau à intégrer le FED dans le budget de l'Union européenne car cela constituerait un progrès important pour une meilleure coordination entre les divers instruments d'aide de l'Union. Il réclame parallèlement des efforts pour renforcer l’efficacité de l’aide à l’horizon 2015. Des efforts doivent notamment être faits pour :

  • mieux évaluer les projets prévus et mis en œuvre,
  • renforcer les principes de gouvernance (lutte contre la corruption, amélioration de la gestion des finances publiques, renforcement de la transparence et défense des droits de l’homme,…),
  • renforcer le développement des capacités car cela améliore les aptitudes des citoyens, des organisations, des gouvernements et des sociétés à concevoir des stratégies de développement durables ;
  • renforcer l'appropriation démocratique (parlements, autorités locales et régionales, autres acteurs concernés) des stratégies de développement,
  • permettre une participation significative des citoyens dans les organisations de la société civile ;
  • renforcer le rôle des autorités locales et régionales et de leurs réseaux (y compris les parlements nationaux des pays bénéficiaires).

Le Parlement souligne que l’objectif de renforcer l’impact de l’aide et sa rentabilité ne devrait pas mener à une politique de développement frileuse qui se concentrerait uniquement sur les pays "faciles".

Il attire l'attention sur le fait que l'éradication de la pauvreté et les besoins doivent rester les critères déterminants de l'attribution de l'aide au développement accordée par l'Union et invite la Commission et les États membres à revoir le champ d’application des instruments de financement et à faire en sorte que les pays les plus pauvres et les plus vulnérables, et les couches les plus démunies de la population, notamment les plus exposées au risque d’exclusion sociale, comme les femmes, les enfants, les personnes âgées et les personnes handicapées, bénéficient des versements de l'aide publique au développement (APD). Le Parlement souligne en outre qu'il est indispensable d'établir une distinction entre les besoins en développement des pays les moins avancés (PMA) et ceux des pays à revenu moyen (pour rappel, 72% des personnes pauvres au niveau mondial vivent dans des pays à revenu moyen).

Parmi les autres éléments permettant de renforcer l’impact de la politique de développement, le Parlement évoque : i) l’élimination des obstacles au développement, tels que le dumping des produits agricoles, la charge illégitime de la dette, les fuites de capitaux et les échanges commerciaux non équitables ; ii) la réaffirmation du principe d’universalité des droits de l’homme et de la non-discrimination ; iii) la lutte contre les inégalités – y compris celles entre les hommes et les femmes ; iv) le respect du principe de différentiation, accordant des récompenses aux pays qui obtiennent de bons résultats et des aides à ceux qui sont les plus désorientés.

Respect des engagements financiers : le Parlement réaffirme sa position selon laquelle il est indispensable de réaliser l'objectif collectif qui consiste à consacrer 0,7% du revenu national brut (RNB) de l'Union à l'aide publique au développement d'ici à 2015. Il invite la Commission et les États membres à trouver de nouvelles sources de financement du développement, par exemple une taxe sur les transactions financières à l'échelle mondiale, des financements issus du secteur privé et des solutions axées sur le marché. Une fois encore, le Parlement insiste sur l’octroi d’une aide ciblée à l'éducation et à la sensibilisation du grand public aux problèmes du développement. Il souligne également la nécessité de fournir l’aide d’une manière prévisible, alignée sur les priorités et plans nationaux et qu’elle offre des mesures d’incitation en vue d'une meilleure transparence et d'une responsabilisation accrue des gouvernements donateurs, des ONG et des États partenaires.

Promotion d'une croissance favorable aux pauvres : pour le Parlement, la croissance n’est qu’un instrument parmi tant d’autres et optimiser la croissance ne revient pas automatiquement à optimiser le développement. L'impact de la croissance sur l'éradication de la pauvreté pourrait être bien plus élevé si les inégalités étaient réduites et si les droits de l’homme étaient respectés. Par conséquent, il se dit favorable à une aide au développement de l'Union orientée vers la croissance via l'adoption de mesures qui se concentrent essentiellement sur les personnes pauvres ou marginalisées par le microcrédit, la microfinance et d’autres solutions fondées sur le marché. Ces mesures devraient toutefois pleinement respecter le principe d’un développement durable.

Le Parlement souligne toutefois les limites d’une stratégie fondée uniquement sur la croissance. Il convient au contraire de renforcer parallèlement les normes sociales et environnementales et de mettre en œuvre des mécanismes de protection sociale. Il souhaite en particulier des mesures qui :

  • assurent la sécurité foncière ;
  • facilitent l’accès des personnes pauvres aux terres, aux marchés, aux crédits et à d’autres services financiers ;
  • renforcent le développement industriel à fort potentiel de transformation des économies nationales ;
  • limitent les émissions de gaz à effet de serre ;
  • renforcement les exportations à grande échelle ;
  • renforcent la propriété intellectuelle ;
  • diversifient les économies des pays en développement et réduisent leur dépendance aux importations ;
  • renforcent la promotion de l’égalité des sexes.

Développement humain : pour parvenir à mettre en place une croissance en faveur des pauvres et atteindre les OMD, il est essentiel de fournir des services sociaux de base. Le Parlement demande donc une nouvelle fois que 20% de l'aide de l'Union dans son ensemble soit consacrée aux services sociaux de base. Il souligne également que l’éducation des filles et la défense de l’égalité des sexes dans l’éducation sont essentielles pour le développement.

D’autres mesures sont nécessaires pour renforcer les systèmes de santé (lutte contre le SIDA, et aide aux soins génésiques, l’aide à la petite enfance et à la jeunesse). Il demande en outre que des efforts soient faits pour mettre en place des systèmes fiscaux équitables, transparents et efficaces afin de générer les recettes nécessaires à la mise en œuvre des stratégies en faveur de la protection sociale et des personnes pauvres.

Participation du secteur privé : le Parlement rappelle que le secteur privé représente 90% de l’emploi dans les pays en développement. Il importe donc de mobiliser les capitaux nationaux et d’encourager les pays bénéficiaires à créer les conditions propices au développement des petites, des moyennes et des micro-entreprises et de supprimer les obstacles à la formalisation, à l’accès aux capitaux et à des crédits abordables.

Dans ce contexte, le Parlement appelle la Commission à :

  • soutenir les entreprises de l’économie sociale,
  • renforcer les investissements publics dans les biens, infrastructures et services publics ;
  • faire obstruction à tout projet contribuant directement ou indirectement à toute forme de fraude ou d'évasion fiscales;
  • favoriser les investisseurs qui soutiennent la stratégie de développement du pays partenaire;
  • renforcer les partenariats public-privé qui impliquent le secteur privé dans le développement ;
  • lutter contre la corruption, aussi bien dans les entreprises et les ONG qu’au sein des gouvernements et des autorités publiques ;
  • renforcer la capacité des bénéficiaires dans le domaine commercial en les aidant à se faire une place sur les marchés régionaux et mondiaux.

Changement climatique, énergie et développement durable : le Parlement rappelle qu’il soutient en priorité les solutions énergétiques durables et renouvelables au niveau local et régional (énergie solaire, éolienne, géothermique et biomasse). Le Parlement réaffirme sa position selon laquelle les pays développés doivent avoir un rôle de chef de file dans la mise en place de l’économie mondiale sobre en carbone, indispensable pour parvenir à réduire les émissions de gaz. Il encourage les États membres à montrer l’exemple dans la réduction des émissions. De manière plus générale, le Parlement demande l’adoption d’une approche globale qui intègre la dimension environnementale dans les projets et programmes de développement, par exemple en améliorant les réglementations relatives au transfert de déchets et à l’exploitation illégale des forêts.

Il demande également à la Commission de s’assurer que l’APD européenne pour l’amélioration de l’accès à l’énergie soutienne le développement économique local, la création d’emplois verts et la réduction de la pauvreté. Rappelant que certaines estimations indiquent que le changement climatique poussera 200 millions de personnes à déménager en raison de la détérioration graduelle des conditions de leurs territoires, le Parlement souligne la nécessité de concentrer la politique de développement de l’Union à l’assistance aux réfugiés et à la diminution de leur nombre en investissant dans les technologies, les ressources humaines et l’aide financière. Toutefois, le Parlement réaffirme que le placement de la problématique du changement climatique au cœur des préoccupations ne saurait remplacer la mise à disposition de nouvelles ressources pour financer les efforts d’atténuation et les besoins d’adaptation au changement climatique des pays en développement.

Sécurité alimentaire et agriculture : une fois encore, le Parlement insiste sur la préservation de la sécurité alimentaire des pays en développement et la promotion d'une production agricole durable, locale, à petite échelle et respectant les critères de l’agriculture biologique.

Il demande en particulier :

  • le soutien à une reconversion vers une agriculture biologique et écologiquement durable,
  • un soutien spécifique aux femmes dans le secteur agricole,
  • un soutien à la lutte contre la spéculation sur le prix des denrées alimentaires,
  • l'adoption de mesures visant à mettre fin à l’accaparement des terres et à assurer les droits de propriété des petits agriculteurs et des paysans indigènes.

Le Parlement rappelle par ailleurs que, pour alimenter la population mondiale qui devrait dépasser, selon les prévisions, les 9 milliards d’habitants en 2050, le rendement agricole devra augmenter de 70% d’ici-là, en utilisant moins de terres, moins d’eau et moins de pesticides. Des mesures immédiates s’imposent donc pour assurer la sécurité alimentaire, non seulement des citoyens de l’Union, mais aussi à l’échelle planétaire. Il propose dès lors une batterie de mesures qui passent par la gestion des ressources naturelles locales, le renforcement de la production et de la transformation, la formation, la structuration des organisations professionnelles, l’établissement d’un filet de sécurité pour les groupes les plus vulnérables, l’éducation en matière de nutrition et la diversification des emplois ruraux en dehors de l’agriculture afin d’augmenter les revenus des familles rurales. Le Parlement s’inquiète en outre des acquisitions actuelles de terres agricoles par des investisseurs étrangers soutenus par les gouvernements, notamment en Afrique, acquisitions qui risquent d’ébranler la sécurité alimentaire locale et de provoquer des conflits sociaux imprévus.

Transparence : enfin, dans le but de renforcer la transparence et l’acceptation par le grand public des projets de développement financés en partie ou entièrement par l’Union ou les États membres, le Parlement appelle à la création d’une base de données électronique donnant des informations sur l’APD.