Cadre de gouvernance d'entreprise pour les sociétés européennes

2011/2181(INI)

OBJECTIF : lancer une consultation publique sur les moyens d'améliorer la gouvernance des entreprises européennes (Livre vert de la Commission).

CONTEXTE : la gouvernance d’entreprise est définie comme le système de direction et de contrôle des entreprises  et comme un ensemble de relations entre la direction de l’entreprise, son conseil d’administration, ses actionnaires et ses autres parties prenantes. Le cadre régissant la gouvernance d’entreprise des sociétés cotées dans l’Union européenne est une combinaison de dispositions législatives contraignantes et de mesures non contraignantes («soft law»), comprenant notamment des recommandations et des codes de gouvernance d’entreprise. Si les codes de gouvernance d’entreprise sont adoptés au niveau national, la directive 2006/46/CE encourage leur application en prévoyant que les sociétés cotées doivent préciser dans leur déclaration sur le gouvernement d’entreprise à quel code elles sont soumises et doivent rendre compte de l’application de ce code selon le principe «appliquer ou expliquer» («comply or explain»).

La gouvernance d’entreprise et la responsabilité sociale des entreprises sont essentielles à la confiance des citoyens dans le marché unique. Des entreprises bien gérées et durables contribuent à la compétitivité des entreprises européennes ainsi qu’aux objectifs ambitieux définis en matière de croissance dans la stratégie Europe 2020. Dans sa communication intitulée «Vers un Acte pour le marché unique», la Commission souligne qu’il est primordial que les entreprises européennes fassent preuve de la plus grande responsabilité, tant vis-à-vis de leurs employés et de leurs actionnaires qu’à l’égard de la société en général. Dans leur communiqué du 5 septembre 2009, les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales du G20 ont souligné que des mesures devraient être prises pour assurer une croissance durable et construire un système financier international plus robuste.

Le Livre vert sur le gouvernement d’entreprise dans les établissements financiers et les politiques de rémunération, adopté en juin 2010, avait déjà permis de mettre le doigt sur des aspects essentiels, par exemple sur le fait que l’implication des actionnaires est importante pour les entreprises en général, et non pas seulement pour les établissements financiers.

CONTENU : le présent Livre vert a pour objet d’évaluer l’efficacité du cadre régissant actuellement la gouvernance des entreprises européennes. Il analyse trois sujets qui jouent un rôle essentiel dans une bonne gouvernance d’entreprise:

1) le conseil d’administration : pour pouvoir contester des décisions de gestion, il faut des conseils d’administration efficaces et hautement performants, c’est-à-dire comprenant des membres non exécutifs qui possèdent la diversité de vues, de compétences et d’expérience professionnelle nécessaire. Ces membres doivent également être disposés à investir suffisamment de temps dans les travaux du conseil d’administration. Le rôle du président est particulièrement important, tout comme le sont les responsabilités du conseil d’administration en matière de gestion des risques.

Le Livre vert se penche sur les moyens d'assurer le bon fonctionnement des conseils d'administration et la diversité de leurs membres, en promouvant par exemple la mixité hommes-femmes ou la coexistence de nationalités, de compétences et de parcours professionnels différents. Il se penche aussi sur la gestion des risques et sur la rémunération des administrateurs. Á cet égard, il demande si la publication d’informations sur les politiques de rémunération ou le vote des actionnaires sur la politique de rémunération et le rapport de rémunération devraient être obligatoires.

2) les actionnaires : le cadre régissant la gouvernance d’entreprise part de l’hypothèse que les actionnaires s’impliquent dans l’entreprise et veillent à ce que la direction rende compte de ses résultats. Or, le désintérêt relatif des actionnaires pour la surveillance des instances dirigeantes des établissements financiers a contribué à déresponsabiliser ces dernières et a peut-être favorisé une prise de risques excessive au sein de ces établissements. Il apparaît que la plupart des actionnaires restent passifs et ne s’intéressent souvent qu’aux seuls bénéfices à court terme. Le Livre vert s’interroge sur la possibilité d’encourager un plus grand nombre d’actionnaires à s’intéresser à l’obtention de résultats sur la durée et aux performances de long terme, ainsi que sur la manière de les inciter à être plus actifs sur les questions touchant à la gouvernance d’entreprise.

En outre, d’autres questions se posent en fonction de la structure d’actionnariat, comme celle de la protection des actionnaires minoritaires. La question se pose également de savoir si des règles de l’UE sont nécessaires pour renforcer la publication et la gestion des conflits d’intérêts. Il s'agit aussi de déterminer s'il y a lieu d'instaurer un mécanisme permettant aux émetteurs d'identifier leurs actionnaires, et s'il est nécessaire d'améliorer le cadre de la coopération entre actionnaires.

3) Approche «appliquer ou expliquer» : selon cette approche, une société choisissant de déroger aux recommandations d’un code de gouvernance d’entreprise doit fournir des explications détaillées, spécifiques et concrètes justifiant ce choix. La généralisation de l’approche «comply or explain» dans l’UE s’est heurtée à des difficultés Une étude récente a mis en évidence des lacunes importantes dans l’application pratique de ce principe, qui nuisent à l’efficacité du cadre de la gouvernance d’entreprise dans l’Union européenne et limitent l’utilité du système. Certains ajustements semblent dès lors nécessaires pour améliorer l’application des codes de gouvernance d’entreprise. Les solutions retenues ne devront pas modifier les fondements de l’approche mais contribuer à son bon fonctionnement en améliorant la qualité informative des rapports. Ces solutions ne préjugent cependant pas de la nécessité éventuelle de renforcer certaines exigences au niveau de l’UE en les incluant dans des mesures législatives plutôt que dans des recommandations.

Deux questions préliminaires doivent aussi retenir l’attention :

  • Les règles européennes en matière de gouvernance d’entreprise s’appliquent aux sociétés cotées (c’est-à-dire aux sociétés qui émettent des actions admises à la négociation sur un marché réglementé). D’une manière générale, elles n’opèrent pas de distinction selon la taille ou le type de société.  La question est donc de savoir si l’UE devrait opter pour une approche différenciée et comment tenir compte au mieux des possibles difficultés de mise en œuvre de certaines pratiques de gouvernance par les sociétés de tous types et de toutes tailles
  • Une bonne gouvernance d’entreprise peut aussi importer aux détenteurs de parts de sociétés non cotées. Or, si certains aspects de la gouvernance d’entreprise sont déjà couverts par les dispositions du droit des sociétés applicables aux sociétés privées, beaucoup d’autres ne le sont pas. La question est donc de savoir si une action de l’UE concernant la gouvernance d’entreprise dans les sociétés non cotées est nécessaire.

Les contributions des parties intéressées doivent parvenir à la Commission pour le 22 juillet 2011 au plus tard. Sur la base des réponses qu’elle aura reçues, la Commission prendra une décision sur la voie à suivre. Toute proposition législative ou non législative future sera accompagnée d’une analyse d’impact approfondie, qui tiendra compte de la nécessité de ne pas imposer des contraintes administratives trop lourdes aux sociétés.