Résolution sur l'élaboration d'une position commune de l'Union dans la perspective de la conférence des Nations unies sur le développement durable (Rio+20)

2011/2733(RSP)

Á la suite du débat qui a eu lieu en séance le 28 septembre 2011, le Parlement européen a adopté par 449 voix pour, 103 voix contre et 45 abstentions, une résolution, déposée par la commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire, sur l'élaboration d'une position commune de l'Union dans la perspective de la conférence des Nations unies sur le développement durable (Rio+20).

Le Parlement rappelle que malgré les progrès accomplis sur la voie du développement durable depuis le sommet de Rio en 1992 et celui de Johannesbourg en 2002, d'énormes difficultés et des disparités considérables au niveau de la mise en œuvre subsistent, tandis que de nombreux engagements pris par la communauté internationale ne sont pas encore pleinement respectés. Rio+20 est donc une occasion unique pour renforcer l'engagement politique de l'ensemble de la communauté internationale en faveur du développement durable, ainsi que les partenariats entre les pays industrialisés et les pays en développement.

La Commission et le Conseil sont invités à :

  • veiller à ce que l'Union soumette à l'ONU, avant le 1er novembre 2011, une position forte et univoque comme contribution aux négociations ;
  • s'assurer que Rio+20 ne débouche pas sur de simples déclarations d'intention mais se traduise par des actions concrètes et les objectifs chiffrés et mesurables;
  • s'assurer que les participants au sommet Rio+20 s'efforcent d'apporter une solution au déficit de fonds propres persistant et croissant occasionné par le modèle économique actuel aux niveaux national et international.

Les députés considèrent qu’une «économie verte», l’un deux thèmes principaux du sommet, doit s'entendre comme une économie tout entière qui fonctionne dans les limites de la durabilité en matière de biodiversité, de préservation des services écosystémiques, de protection du climat et d'utilisation des ressources naturelles. Ils soulignent que davantage de poids doit être accordé au capital humain, environnemental et naturel et que le développement durable est plus qu'une simple économie verte. Ils demandent l'adoption d'une feuille de route de l'économie verte et soulignent la nécessité de lier la protection de l'environnement et les droits de l'homme.

Gestion des ressources et des richesses naturelles : le Parlement rappelle que la notion d'«économie verte» telle que la propose la Commission n'apportera pas automatiquement la prospérité aux populations pauvres ni ne réalisera les objectifs du Millénaire pour le développement si des économies ne sont pas administrées correctement, les ressources naturelles gérées efficacement et équitablement et l'accès aux circuits de distribution également garanti aux générations présentes et futures. La résolution souligne l'importance d'apprécier les ressources, les richesses naturelles et les services écosystémiques à leur juste valeur, en dissociant les systèmes naturels de la logique commerciale. Les députés appellent à élaborer des méthodes d'évaluation du capital naturel et à les intégrer au niveau des procédures comptables et des processus décisionnels.

Eau : le Parlement souligne que Rio+20 doit réaffirmer son engagement en faveur de la protection des ressources en eau et d'une gestion durable de l'eau en tant que bien public et qu’il doit veiller à une réalisation générale du droit d'accès à l'eau et à son assainissement. Il demande que des mesures spéciales soient prises pour protéger l'eau, qui constitue un élément particulièrement exposé aux répercussions des changements climatiques.

Milieu marin et océans : la résolution insiste sur la nécessité d'améliorer la gouvernance et de renforcer la protection du milieu marin, de la biodiversité marine et des océans. Le Parlement invite le sommet à entamer des négociations en vue d'adopter des instruments juridiques internationaux pour: i) le contrôle de la pollution d'origine tellurique des mers et des océans; ii) la gestion durable et l'évaluation des activités humaines dans les zones qui ne relèvent pas de la juridiction nationale; et iii) la préservation de la biodiversité marine, ainsi que l'introduction et la reconnaissance de zones marines protégées dans les eaux internationales.

Énergie : selon le Parlement, le passage à une économie verte exige de transformer radicalement le secteur énergétique dans le but de promouvoir les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique ainsi qu'un accès universel à l'énergie, même pour les populations pauvres, tout en encourageant l'électrification, en particulier dans les pays les moins avancés. Il appelle à fixer des objectifs et à adopter des mesures à l'échelle mondiale afin d'accroître l'exploitation des énergies renouvelables et de renforcer l'efficacité énergétique dans l'ensemble du monde.

Pour faciliter la transition vers une production d'énergie sans carbone au niveau international, les députés déconseillent toute opération d'exploration et d'extraction en mer dans des zones écologiquement fragiles, telles que la région arctique, et s'opposent à l'extraction de pétrole à partir de sables et schistes bitumeux. Suite à la catastrophe de Fukushima, ils rappellent la nécessité absolue d'assurer, dans l'Union européenne, un niveau optimal de sûreté nucléaire et de promouvoir cette exigence au niveau international.

Agriculture et sécurité alimentaire : soulignant que l'accès à une alimentation suffisante et saine est un droit de l'homme fondamental, le Parlement appelle à une action coordonnée contre les causes profondes de la faim dues à l'homme, et demande que la souveraineté alimentaire des pays en développement soit garantie. La résolution met l’accent sur les points suivants :

  • l’urgence de promouvoir une agriculture biologique, durable et à petite échelle dans la perspective d'une élimination de la pauvreté et la nécessité d’introduire des pratiques d'élevage humaines et durables ;
  • l’adoption de mesures à l'échelle internationale pour assurer une plus grande transparence sur le marché des matières premières et mettre un terme à la spéculation financière qui contribuent à l'extrême volatilité du prix des aliments et aux crises alimentaires mondiales qui s'ensuivent ;
  • la nécessité de mettre un terme aux tendances mondiales en matière d'acquisitions foncières à grande échelle par des entités étrangères dans les pays en développement pour garantir la sécurité alimentaire et protéger les droits des petits exploitants et des communautés indigènes ;
  • l'importance d'utiliser tout le potentiel et de garantir les droits de propriété des petits producteurs et des producteurs nationaux, ainsi que des exploitations familiales, garants de la majeure partie de l'approvisionnement alimentaire mondial.

Forêts : soulignant les dommages environnementaux et sociaux qu’entraînent la déforestation et la dégradation des forêts, les députés considèrent que Rio+20 devrait avoir pour objectif de garantir une gouvernance participative des forêts, un partage juste et équitable des bénéfices et la préservation et l'utilisation durable des forêts au niveau mondial. Ils appellent à fermer les marchés au bois récolté de manière illégale ou non durable au moyen de partenariats avec les gouvernements, les communautés locales et les groupes autochtones, la société civile et le secteur privé.

Le Parlement demande au Brésil de s'engager clairement à protéger la forêt amazonienne et à mettre fin au harcèlement criminel que subissent les représentants de la société civile qui œuvrent pour la protection de l'environnement. La Commission est invitée à fournir, à temps pour le sommet, une étude évaluant l'effet de la consommation européenne de produits alimentaires et non alimentaires sur la déforestation.

Subventions ayant une incidence négative sur l'environnement : le Parlement souligne l’urgence de s'attaquer à ces subventions et de mettre en œuvre des incitations positives pour les bénéficiaires et la conservation de la biodiversité. Il invite les participants au sommet à lancer une série d'actions coordonnées au niveau des États visant à identifier et à éliminer progressivement toutes les subventions ayant un impact négatif sur l'environnement d'ici 2020, conformément aux engagements pris lors du sommet de Nagoya.

Instruments réglementaires et fondés sur le marché : le Parlement estime qu'un cadre réglementaire complet, clair et fiable est nécessaire pour permettre aux acteurs de réorienter les arguments économiques vers une économie efficace, responsable et écologique. Dans ce contexte, il souligne l’urgence de réduire l'effet de la navigation et de l'aviation internationale sur le climat. Il demande la création d'un impôt international sur les transactions financières et souligne que les réformes fiscales destinées à transférer la charge fiscale du travail à l'utilisation des ressources et à la pollution peuvent favoriser l'émergence d'un rapport gagnant-gagnant tant dans le domaine de l'emploi que dans celui de l'environnement.

Financement : le Parlement souligne que les fonds publics ne pourront à eux seuls assurer les investissements nécessaires à la transition vers une économie verte mondialisée. Il invite les participants au sommet à formuler des recommandations allant dans le sens d'une réforme des stratégies de financement existantes et à établir, si besoin est, de nouveaux partenariats et mécanismes de financement public-privé. Il considère que les pays en développement doivent bénéficier d'un cadre de soutien financier stable et à long terme, d'un renforcement de leurs capacités et de transferts de technologie, afin d'encourager le développement durable. Il relève la nécessité d'encourager l'innovation et les nouvelles technologies en améliorant également l'accès au financement.

Implication des citoyens : le Parlement juge important de continuer à donner aux citoyens les moyens de prendre part à la gouvernance environnementale. Il demande que les dispositions de la Convention d'Aarhus soient étendues au-delà de l'UN ECE, par l'intermédiaire d'une convention mondiale ou en ouvrant la Convention d'Aarhus à des parties extérieures à l'UN ECE.

Technologies: tout en reconnaissant que l'innovation, l'évaluation et le transfert technologiques sont essentiels pour répondre aux défis environnementaux, le Parlement souligne que le développement technologique ne permet pas, à lui seul, de régler les problèmes environnementaux ni de supprimer la pauvreté. Il se prononce en faveur du Plan stratégique de Bali pour l'appui technologique et le renforcement des capacités en matière de technologies de l'environnement et demande la création de nouvelles capacités au sein du système des Nations unies chargées de surveiller, d'évaluer et de faire connaître les nouvelles technologies propices à l'intégration d'un concept plus général de durabilité et à l'action en faveur du développement durable de produits et de procédés dans tous les domaines.

Mesurer les progrès accomplis : les députés demandent que des études soient réalisées dans le but de développer un nouvel ensemble de critères de mesure destiné à évaluer les progrès accomplis sur la voie de l'équité et du développement durable. Le sommet Rio+20 devrait offrir un modèle alternatif de mesure de la croissance et du bien-être qui aille au-delà de l'évaluation sur la base du PIB, en permettant de mesurer les progrès dans une perspective élargie, englobant les dimensions économique, environnementale et sociale.

Améliorer la gouvernance : soulignant l’urgence d'améliorer la gouvernance en matière de développement durable, le Parlement renouvelle sa proposition d'instaurer un tribunal international sur l'environnement qui permettrait de rendre la législation environnementale mondiale plus contraignante et exécutoire, ou au moins une autorité internationale, telle qu'un médiateur investi de pouvoirs en la matière.