En adoptant le
rapport de Sophia in 't VELD (ADLE, NL), la
commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures
recommande que le Parlement européen donne son approbation à la conclusion de
l'accord entre l'Union européenne et l'Australie sur le traitement et
le transfert de données des dossiers passagers (données PNR) par les
transporteurs aériens au service australien des douanes et de la protection
des frontières.
Le rapport rappelle qu’il
revient aux pays tiers, États souverains, de déterminer les exigences
relatives à l'entrée des personnes sur leur territoire. Par conséquent,
l'Union européenne ne peut interdire la collecte, le stockage et
l'utilisation des données PNR par les pays tiers. Elle peut uniquement
décider si les conditions du transfert de ces données sont conformes avec les
normes européennes de protection des données. Ainsi, le 5 mai 2010 et le 11
novembre 2010, le Parlement européen a fixé les critères nécessaires à
l'obtention de son approbation aux accords avec les pays tiers sur le
transfert des données PNR.
Ces critères étaient les
suivants:
- la nécessité de la collecte
et du stockage massifs des données PNR doit être démontrée, sur la base
d'éléments de preuve factuels, pour chacun des objectifs énoncés ;
- la proportionnalité
(c'est-à-dire le fait que le même objectif ne peut être atteint par des
moyens moins intrusifs) doit être démontrée ;
- l'objectif doit être limité
clairement et strictement sur la base de définitions juridiques claires reposant
sur les définitions de la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil
relative à la lutte contre le terrorisme et de la décision-cadre
2002/584/JAI du Conseil relative au mandat d'arrêt européen ;
- la méthode pour le transfert
des données doit exclusivement utiliser la méthode "push" (à
savoir la transmission par les compagnies aériennes de données filtrées
aux autorités des pays tiers qui ont introduit la demande) plutôt que la
méthode "pull" (accès direct des pays tiers aux bases de
données européennes) ;
- les données PNR ne seront en
aucun cas utilisées à des fins d'exploration de données ou de
profilage ;
- le transfert ultérieur de
données par le pays destinataire à des pays tiers doit s'effectuer dans
le respect des normes de l'Union européenne relatives à la protection
des données ;
- les résultats doivent être
immédiatement partagés avec les autorités compétentes de l'Union
européenne et des États membres (principe de réciprocité).
Si la plupart de ces critères
ont été inclus dans le mandat de négociation adopté par le Conseil, les
députés font observer qu'un certain nombre de critères n'ont pas été
entièrement respectés et qu'un certain nombre de préoccupations demeurent :
- problème de
proportionnalité de l’accord : la Commission n'a démontré que
partiellement et de façon insuffisante la nécessité et la
proportionnalité de la collecte et du stockage massifs des données.
En outre, aucune justification n'a été donnée au stockage à long terme
de données identifiables de tous les passagers. Il semble que la période
de 5 ans et demi fixée pour la conservation des données soit
relativement aléatoire et ne repose pas sur des éléments
spécifiques ;
- problème de base juridique
pour cet accord : la base juridique de l'accord devrait être,
en tout cas en premier lieu, l'article 16 du traité FUE (sur la
protection des données personnelles). Toutefois, cet article ne figure
pas dans la base juridique et n'est mentionné dans le préambule que sous
forme de référence générale, non contraignante. Or, le but de l'accord
est de veiller à ce que le transfert des données soit conforme aux
normes de l'Union en matière de protection des données. L'accord ne
devrait donc pas reposer sur l'article 82, paragraphe 1, point d), et
l'article 87, paragraphe 2, point a), mais sur l'article 16 du traité
FUE. Si le but de l'accord était la coopération policière et
judiciaire, l'Union pourrait théoriquement refuser la collecte des
données PNR par l'Australie. Mais il s'agit d'une décision souveraine
d'un pays tiers. Par conséquent, il ne s'agit pas d'une politique de
l'Union étant donné que la décision ne lui appartient pas. La base
juridique choisie est manifestement incorrecte.
Les députés de la commission
LIBE décident toutefois de recommander au Parlement européen d’approuver cet
accord dans la mesure où un grand nombre de critères que ce dernier avait
fixé pour son approbation ont été remplis.