Emploi et questions sociales dans l'examen annuel de la croissance pour 2012

2011/2320(INI)

La commission de l'emploi et des affaires sociales a adopté le rapport de Marije CORNELISSEN (Verts/ALE, NL) sur l'emploi et les aspects sociaux dans le cadre de l'examen annuel de la croissance 2012.

Les députés rappellent que le chômage a considérablement augmenté depuis 2008 et que le nombre de personnes sans emploi s'élève aujourd'hui à 23 millions de personnes pour l'ensemble de l'Union, soit 10% de la population en âge de travailler. Or, pour réaliser ses objectifs, l'Union devrait créer 17,6 millions d'emplois supplémentaires d'ici 2020.

Les députés rappellent également qu'une seule des cinq actions prioritaires recommandées au titre de l'examen annuel de la croissance aborde l'emploi et les aspects sociaux alors qu'ils figurent dans trois des cinq objectifs de la stratégie Europe 2020. C’est la raison pour laquelle ils envoient au Conseil des messages clés dans la perspective du Conseil européen de printemps. Ces messages sont appelés à être insérés dans les orientations politiques des États membres pour le semestre européen 2012 et le Président du Parlement est appelé à défendre cette position lors du Conseil européen de printemps des 1er et 2 mars prochain.

Messages clés :

1) assurer la cohérence et montrer davantage d'ambition pour atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020 : les députés invitent le Conseil européen à :

  • s'assurer que les orientations politiques définies chaque année au titre de l'examen annuel de la croissance soient pleinement consacrées à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020 ;
  • coordonner les diverses priorités de ses orientations politiques afin que l'orientation relative à l'assainissement budgétaire soit basée sur la justice sociale, et qu'elle n'ait pas pour effet d'augmenter la pauvreté ou d'entraver la lutte contre le chômage ;
  • faire en sorte que des fonds européens soient affectés à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020;
  • s'assurer que les États membres assortissent la mise en œuvre de leurs objectifs nationaux de feuilles de route concrètes et réalistes avec des indicateurs clairs et cohérents destinés à en évaluer l’impact.

2) soutenir la création d'emplois durables par l'investissement et la réforme fiscale : en cette matière, le Conseil européen est appelé à :

  • promouvoir l'investissement dans la création d'emplois durables et décents dans un large éventail de secteurs ;
  • investir dans la formation des travailleurs et des chômeurs et dégager pour ce faire les marges budgétaires nécessaires;
  • stimuler, dans les États membres, la demande intérieure;
  • adopter l'orientation politique visant à supprimer la charge fiscale que représentent les coûts non salariaux pesant sur le travail tout en encourageant les entreprises bénéficiant de ces exemptions ou réductions à offrir des salaires permettant de vivre décemment;
  • adopter l'orientation politique visant à augmenter les recettes par une fiscalité équitable, progressive, redistributive et efficace et prévoir une coordination fiscale permettant de lutter contre l'évasion fiscale.

3) améliorer la qualité de l'emploi et les conditions d'un taux d'activité accru : le Conseil européen est appelé à :

  • adopter une orientation sur le travail décent et sur les démarches permettant de concilier vie professionnelle, vie familiale et vie privée grâce à des structures de soins et de garde d'enfants à des prix abordables ;
  • prévoir des mesures d'austérité et de réduction des formalités administratives qui ne compromettent pas la protection sociale et les normes sanitaires.

4) lutter contre le chômage des jeunes : le Conseil européen est invité à inscrire la lutte contre le chômage des jeunes au rang des priorités. Á cet effet, les États membres sont appelés à :

  • élaborer des stratégies globales à destination des jeunes chômeurs sans formation intégrant des mesures d'emploi actives et ciblées, des mesures de lutte contre l'inadéquation des compétences sur le marché du travail, la promotion de l'esprit d'entreprise chez les jeunes ou des mécanismes assurant le passage de l'éducation à la vie active ;
  • mettre en place une "garantie pour les jeunes" assurant à chaque jeune européen la possibilité d’obtenir un emploi, un stage d'apprentissage, une formation complémentaire ou une formule associant travail et formation après une période maximale de 4 mois de chômage.

5) lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale en mettant l'accent sur les groupes dont les liens avec le marché du travail sont limités ou inexistants : le Conseil européen est également appelé à inscrire la lutte contre la pauvreté au rang de ses priorités via des mesures d'insertion sur le marché du travail et d'intégration active des groupes les plus vulnérables.

6) renforcer la légitimité démocratique, la responsabilité et la participation : les députés insistent sur la nécessité de renforcer la légitimité démocratique et de la responsabilité vis-à-vis du Parlement européen et des parlements nationaux de l’européanisation des politiques économiques des États membres. En effet, en l'absence de base juridique permettant de recourir à la procédure législative ordinaire dans le cadre de l'examen annuel de la croissance, le Conseil européen se doit tout particulièrement de prendre en compte les observations du Parlement. La Commission est également appelée à convertir, en 2013, l'examen annuel de la croissance en lignes directrices annuelles pour la croissance durable, sous une forme permettant au Parlement d'y déposer des amendements.

Poursuivre et intensifier les efforts dans les domaines de l'emploi et des affaires sociales : les députés proposent une série de mesures pour renforcer les politiques de l’emploi. Ils suggèrent notamment de :

1) améliorer le taux d'emploi et la qualité de l'emploi : les députés invitent les États membres à soutenir les initiatives qui facilitent le développement des secteurs au potentiel d'emploi le plus élevé, notamment ceux qui relèvent du passage à une économie durable (emplois verts), des services sociaux et de santé (emplois blancs) et de l'économie numérique. Il convient également d’améliorer l'environnement pour les entreprises, en particulier les PME.

Les États membres sont notamment appelés à :

  • renforcer la couverture et l'efficacité des services publics de placement et à élaborer des politiques volontaristes et efficaces dans le domaine de l'emploi au moyen de mesures d'activation telles que les programmes de transition de l'aide sociale au travail ;
  • mettre en place les conditions nécessaires à des relations de travail plus flexibles pour les jeunes et les travailleurs âgés ;
  • faire pleinement usage des fonds structurels pour améliorer l'employabilité et lutter efficacement contre le chômage structurel et de longue durée ;
  • renforcer le taux d'emploi des femmes, notamment par la mise en place de structures de soins et de garde d'enfants à des prix abordables ;
  • lutter contre le phénomène des travailleurs pauvres ;
  • reconnaître la valeur ajoutée réelle que les travailleurs âgés apportent à leur entreprise et mettre en place des conditions de travail adaptées pour eux ;
  • s'assurer que le personnel temporaire et les personnes travaillant à temps partiel bénéficient de l'égalité de traitement ;
  • supprimer tous les obstacles juridiques et administratifs qui entravent actuellement la libre circulation des travailleurs au sein de l'Union européenne;
  • créer une taxe européenne sur les transactions financières afin d'accroître la création d'emplois durables;
  • intégrer la dimension de genre dans la définition des programmes nationaux de réforme.

2) investir dans l'éducation et la formation : les États membres sont invités à adapter et à accroître les investissements dans l'éducation, la formation, la promotion des compétences entrepreneuriales et l'apprentissage tout au long de la vie de chacun, via également le développement de l'apprentissage non formel et de l'apprentissage informel. Parmi les mesures les plus emblématiques proposées à cet égard, on compte:

  • l’adaptation des systèmes d'éducation et de formation aux besoins du marché du travail en dotant les travailleurs de nouvelles compétences répondant mieux au passage à une économie intelligente, durable et inclusive ;
  • la mise en place par la Commission d’un cadre de qualité pour les stages, au titre de son initiative phare "Jeunesse en mouvement" ;
  • la mise en œuvre résolue de cadres nationaux de qualifications en tant qu'outils promouvant le développement de l'apprentissage tout au long de la vie ;
  • la création de perspectives sérieuses pour les travailleuses dans les secteurs des nouvelles technologies.

3) lutter contre la pauvreté, promouvoir l'intégration sociale et la qualité des services publics : rappelant que selon l'Eurobaromètre de novembre 2011, 49% des citoyens européens ont indiqué que la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale était la priorité politique qu'ils souhaitaient voir encouragée par le Parlement européen, les députés invitent les États membres à :

  • adapter leurs systèmes de protection sociale et à en renforcer l'efficacité, notamment en ce qui concerne les régimes de retraite ;
  • mettre en œuvre des stratégies d'intégration actives permettant d’offrir des services aux personnes à des prix abordables et de qualité ;
  • garantir un revenu minimal adéquat ;
  • proposer des approches intégrées d'accès à des emplois de qualité afin d'éviter la marginalisation des groupes vulnérables et à faible revenu ;
  • faire appliquer des mesures efficaces de lutte contre les discriminations ;
  • faire en sorte que toute réforme des systèmes de santé soit axée sur l'amélioration de la qualité, l'adéquation des services, leur caractère abordable et leur accès universel ;
  • évaluer les effets des mesures d'austérité sur l'égalité entre les genres et sur l'emploi des femmes (y compris sur leurs pensions, leurs régimes de sécurité sociale et la fiscalité).

4) consentir des efforts supplémentaires pour améliorer la gouvernance, l'engagement et la légitimité démocratique : préoccupé par le fait que le rôle du Parlement européen et des parlements nationaux dans le semestre européen restait somme toute limité, les députés regrettent le manque de participation parlementaire, et donc de légitimité démocratique, des orientations politiques proposées par la Commission au titre de l'examen annuel de la croissance et adoptées par le Conseil européen. Ils invitent encore le Conseil européen à donner aux États membres les moyens d'encourager l'investissement dans la création d'emplois durables, l'éducation et la formation ainsi que la réduction de la pauvreté. Ils invitent enfin les États membres, face à la crise économique la plus grave que l'Union européenne ait connue, à mettre en œuvre sans retard les programmes nationaux de réforme nécessaires.