Cadre de gouvernance d'entreprise pour les sociétés européennes

2011/2181(INI)

La commission des affaires juridiques a adopté un rapport d’initiative de Sebastian Valentin BODU (PPE, RO) sur un cadre de gouvernance d'entreprise pour les sociétés européennes, en réponse au Livre vert de la Commission sur ce sujet.

Tout en se félicitant de la révision du cadre de la gouvernance d'entreprise dans l'UE lancée par la Commission, les députés déplorent toutefois que le Livre vert laisse de côté d'importantes questions touchant à la gouvernance d'entreprise, telles que la prise de décisions au sein des conseils d'administration, la responsabilité et l'indépendance des administrateurs, les conflits d'intérêt ou l'implication des parties prenantes. Ils regrettent également que le livre vert privilégie la structure unitaire au détriment de la structure duale, laquelle est aussi largement présente en Europe.

Les députés souhaitent attirer l’attention sur les points suivants :

  • l'importance de la création d'un secteur des entreprises plus transparent, stable, fiable et responsable dans l'UE, avec une gouvernance améliorée ;
  • la nécessité d’un audit indépendant et des règles respectant les différentes cultures d'entreprise dans l'Union européenne, dès lors que la bonne gouvernance ne peut à elle seule prévenir la prise de risque excessive ;
  • une entreprise bien dirigée devrait faire preuve de responsabilité et de transparence envers ses salariés, ses actionnaires et, le cas échéant, les autres parties prenantes;
  • il convient de mettre en avant la définition de la gouvernance d'entreprise adoptée par l'OCDE en 2004, selon laquelle ce concept couvre un ensemble de relations entre la direction d’une entreprise, son conseil d’administration, ses actionnaires et d’autres parties prenantes ;
  • un socle de mesures de l'Union en matière de gouvernance d'entreprise devrait s'appliquer à toutes les entreprises cotées; ces mesures devraient être proportionnées à la taille, à la complexité et au type de l'entreprise considérée;
  • les initiatives en matière de gouvernance d'entreprise doivent aller de pair avec celles que suggère la Commission au sujet de la responsabilité sociale des entreprises.

La Commission est invitée à soumettre toute proposition législative qu'elle envisage en matière de gouvernance d'entreprise à une évaluation d'impact qui devrait se concentrer à la fois sur les objectifs à atteindre et sur la nécessité de maintenir la compétitivité des entreprises.

1) Conseils d'administration : le rapport souligne que, dans les structures unitaires, il convient d'assurer une séparation claire entre les fonctions du président du conseil d'administration et celles du président-directeur général; toutefois cette règle devrait être proportionnée à la taille et aux particularités de l'entreprise.

Les conseils d'administration devraient comprendre des personnes indépendantes présentant un éventail de qualifications, d'expériences et de parcours. Les entreprises devraient appliquer des méthodes transparentes et fondées sur le mérite dans le domaine des ressources humaines et développer et promouvoir les talents et compétences des hommes et des femmes.

En vue de renforcer la fréquence des réunions des conseils d'administration et d'améliorer la qualité des organes de surveillance internes, les députés soulignent que les administrateurs doivent consacrer suffisamment de temps à l'exercice de leurs fonctions mais ils ne jugent pas souhaitable d'adopter des règles uniformes.

Les députés se prononcent en faveur de politiques de rémunération durables sur le long terme, qui devraient être basées sur la performance à long terme de la personne et de son entreprise. L'augmentation des salaires des administrateurs devrait être compatible avec la viabilité à long terme de leur entreprise. Les députés sont également favorables à la publication des politiques de rémunération des entreprises et de leurs rapports annuels en matière de rémunération, qui devrait être soumise à l'approbation de l'assemblée des actionnaires.

Enfin, une surveillance renforcée et de nouvelles règles devraient être mises en place pour interdire les abus en matière de salaires, de bonus et de rémunérations des dirigeants dont les établissements, appartenant ou non au secteur financier, ont été renfloués par les autorités des États membres.

2) Actionnaires : les députés estiment qu'il faut encourager les actionnaires à s'impliquer dans l'entreprise en renforçant leur rôle, mais que cette implication devrait procéder d'un libre choix et ne jamais constituer une obligation. Ils estiment néanmoins qu'il convient d'envisager des mesures d'incitation aux investissements à long terme, ainsi qu'une obligation de transparence intégrale des votes attachés aux titres empruntés, outre les titres au porteur. Ils ajoutent qu'il faudrait revoir le comportement des investisseurs institutionnels, qui consiste à créer des liquidités et à conserver de bonnes notations, sachant que cela ne fait qu'encourager la détention à court terme d'actions par ces investisseurs

Le rapport constate que le marché manque d'une perspective à long terme et invite la Commission à passer en revue toute la législation concernée pour évaluer si certaines conditions posées ont pu contribuer par inadvertance à cette vision à court terme.

La Commission est invitée à :

  • faire des propositions équilibrées de lignes directrices européennes sur la nature des informations divulguées aux actionnaires dans les rapports annuels des entreprises; dans ce contexte, les conflits d'intérêt, y compris ceux de nature potentielle, devraient toujours être divulgués et une action appropriée s'impose en la matière au niveau de l'Union;
  • modifier la directive sur les droits des actionnaires de manière à évaluer les moyens de renforcer la participation des actionnaires ;
  • imposer aux conseillers en matière de vote (proxy advisors) des règles plus strictes, en accordant une attention particulière aux questions de transparence et de conflit d'intérêt.

Les députés estiment que les sociétés devraient être en droit de choisir entre le régime des actions nominatives et celui des actions au porteur. Si elles optent pour le régime des actions nominatives, les sociétés devraient être en droit de connaître l'identité de leurs propriétaires. De plus, des exigences d'harmonisation minimale devraient être fixées au niveau de l'Union en ce qui concerne la publication des participations significatives.

Enfin, la question des régimes de participation des salariés au capital devrait être réglée au niveau des États membres et faire l'objet de négociations entre employeurs et salariés, et que la possibilité de participer à un tel régime devrait toujours revêtir un caractère volontaire.

3) L'approche « appliquer ou expliquer » : les députés estiment que cette approche constitue un instrument utile de gouvernance d'entreprise. Ils se déclarent favorables à une adhésion obligatoire à un code national de gouvernance d'entreprise ou à un code de conduite choisi par la société. Ils estiment que tout écart par rapport au code de conduite devrait faire l'objet d'explications satisfaisantes et qu'en plus de ces explications, la solution de remplacement adoptée en matière de gouvernance d'entreprise devrait être décrite et expliquée.

Enfin, le rapport souligne qu'il faut parvenir à un meilleur fonctionnement et à un meilleur respect des règles et recommandations en vigueur en matière de gouvernance plutôt que d'imposer des règles européennes contraignantes en matière de gouvernance d'entreprise.