Europe efficace dans l'utilisation des ressources

2011/2068(INI)

Le Parlement européen a adopté par 479 voix pour, 66 voix contre et 63 abstentions, une résolution sur une Europe efficace dans l'utilisation des ressources, en réponse à la communication de la Commission sur ce sujet.

La crise économique, financière et environnementale actuelle montre que l'Europe a un besoin urgent de nouvelles sources de croissance économique durable. L'Eurobaromètre de mars 2011 montre que l'utilisation efficace des ressources, ainsi que leur production et leur consommation durables figurent au cœur des préoccupations des citoyens de l'Union.

1) Actions prioritaires : le Parlement invite la Commission et les États membres à :

  • créer des groupes de travail conjoints dans les trois domaines clés, à savoir l'alimentation, le logement et la mobilité, pour développer, dès que possible, des plans d'actions européens pour l'efficacité des ressources ;
  • supprimer tout obstacle au bon fonctionnement du marché européen en matière de recyclage et de réutilisation, et encourager ce marché en renforçant la demande et la disponibilité de matériaux recyclés et de sous-produits, à travers des mesures comprenant par exemple l'élaboration de critères stricts de fin de vie des déchets ainsi que des mesures d'incitation économique, telles que la réduction des taux de TVA pour les matières premières secondaires ;
  • renforcer la recherche et l'innovation technologique afin d'accélérer le passage à une économie efficace dans l'utilisation des ressources. La Commission est invitée à créer une base de données en ligne sur les bonnes pratiques dans le domaine de l’efficacité des ressources;
  • parvenir à un accord, d'ici 2013, sur des indicateurs d'activité économique clairs et mesurables - empreinte sur la terre, sur l'eau, sur les matières premières et empreinte carbone - qui tiennent compte du changement climatique, de la biodiversité et de l'efficacité des ressources eu égard au cycle de vie, et utiliser ces indicateurs comme base pour les initiatives législatives et les objectifs concrets en matière de réduction des émissions ;
  • proposer d'élargir le champ d'application de la directive sur l'éco-conception aux produits non liés à l'énergie, et présenter des exigences d'éco-conception supplémentaires concernant l'efficacité globale des ressources et la performance globale des produits, afin d'améliorer leur impact sur l'environnement et d'encourager l'activité de recyclage;
  • intégrer, aussi complètement que possible, l'action en matière d'efficacité dans l'utilisation des ressources dans toutes les autres politiques, y compris dans les politiques économiques globales de gouvernance telles que la stratégie Europe 2020, et la mettre en œuvre aux niveaux local, régional, national et au niveau de l'Union.

2) Planifier de la croissance future : les députés approuvent l'initiative phare sur une Europe efficace dans l'utilisation des ressources, ainsi que la Feuille de route pour 2050. Ils demandent à la Commission de présenter rapidement toutes les initiatives législatives ou autres nécessaires pour respecter les échéances fixées, et de veiller à ce que toutes les politiques de l'Union soient alignées sur le projet global de l'Union de créer une économie à faibles émissions de carbone d'ici 2050, notamment en réduisant les émissions de gaz à effet de serre de 80 à 95% par rapport aux niveaux de 1990.

Le Parlement rappelle qu'un découplage de la croissance et de la consommation des ressources est essentiel pour améliorer la compétitivité de l'Europe et réduire sa dépendance en matière de ressources. La Commission est invitée à proposer, avant fin 2012, un nouveau cadre d'action relatif à une consommation et une production durables (CPD), créant un processus destiné à recenser les produits ou services prioritaires qui contribuent le plus à la consommation des principales ressources mondiales, à savoir l'eau, le sol, les matières et le carbone.

Les députés soulignent également la nécessité urgente d'adopter des mesures immédiates afin de soutenir l'innovation et les investissements dans les nouvelles techniques et les nouveaux modèles d'entreprise, y compris des stratégies industrielles sectorielles et des modèles d'entreprise durables, tels que les sociétés de crédit-bail, et de créer des incitations bénéfiques pour l'économie.

3) Transformer l’économie : le Parlement rappelle qu'il faut d'urgence diminuer l'utilisation des ressources pour éviter de futurs problèmes tels que la rareté des ressources et l'augmentation de leurs prix. Il estime que le passage à une économie efficace dans l'utilisation des ressources ne pourra avoir lieu que si les prix du marché reflètent pleinement le degré de rareté des ressources ainsi que tous les coûts de production. Les députés prient la Commission d'étudier la mise en place d'un modèle hiérarchique afin de garantir la valeur ajoutée la plus élevée de l'exploitation des ressources sans compromettre l'environnement.

La Commission et les États membres sont invités à :

  • développer des incitations qui encouragent les entreprises et les organismes publics à mesurer, à étalonner et à améliorer de façon continue leur empreinte sur l'eau, sur les terres et sur les matières de même que leur empreinte carbone ;
  • prendre des mesures en vue d'élargir le principe de responsabilité du producteur, et de supprimer les barrières qui entravent l'efficacité des ressources;
  • adopter, sans délais et d'ici 2014, des mesures concrètes basées sur une définition claire en vue de supprimer progressivement toutes les subventions dommageables à l'environnement avant 2020 ;
  • soutenir, en collaboration avec le secteur industriel et le monde universitaire, l'efficacité des ressources grâce à des programmes et des bourses universitaires spécifiques.

Le Parlement demande aux États membres de s'orienter vers une fiscalité environnementale tout en soulignant que cela permettra de réduire d'autres impôts tels que l'impôt sur le travail, d'accroître la compétitivité, de mettre en place des conditions équitables et de développer les technologies. Il demande à la Commission et aux États membres de contrôler et de comparer les effets de cet instrument.

La résolution insiste sur la nécessité :

  • de mettre en place des stratégies de sensibilisation et des stratégies destinées à modifier le comportement des consommateurs ;
  • de garantir un approvisionnement européen durable des matières premières suffisant pour satisfaire les besoins d'un secteur du recyclage en expansion;
  • de renforcer les exigences concernant les marchés publics écologiques (MPE) pour les produits et services ayant des incidences significatives sur l'environnement ;
  • d'étendre l'information environnementale aux produits de consommation conventionnels de masse.

Les députés demandent aux États membres de veiller à la mise en œuvre intégrale de l'acquis de l'Union en matière de déchets, et notamment de fixer des objectifs minimaux dans leurs stratégies et leurs plans nationaux de prévention et de gestion des déchets. Ils réaffirment que les objectifs existants concernant la collecte et la séparation doivent être précisés davantage et permettre d'assurer le niveau et la qualité de récupération des matières les plus élevés à chaque étape du recyclage.

La Commission est invitée à présenter des propositions, d'ici 2014, visant à introduire une interdiction générale de mise en décharge dans toute l'Union, ainsi qu'une interdiction, avant la fin de cette décennie, de l'incinération des déchets recyclables et compostables. Les députés estiment qu'une taxe de mise en décharge, déjà introduite dans certains États membres, permettrait également d'atteindre cet objectif.

Le Parlement demande également à la Commission et aux États membres de lutter plus efficacement contre le transport illégal des déchets, notamment des déchets dangereux, dans les pays tiers. Il appelle dans ce contexte à la création d'une «politique extérieure européenne en matière de déchets» visant à étendre l'application des normes européennes les plus élevées en matière de traitement des déchets en dehors de l'Union européenne.

La résolution souligne l'importance de la recherche, du développement et de l'innovation pour accélérer la mutation vers une Europe efficace dans l'utilisation des ressources. Elle invite la Commission à examiner comment améliorer l'efficacité des ressources dans le domaine de l'exploitation minière et demande aux États membres d'envisager l'établissement de centres dédiés aux technologies innovantes, conçus pour soutenir l'extraction, le recyclage et la réutilisation des composants utiles issus de produits de déchets miniers.

La Commission est en outre invitée à examiner les effets d'une taxe sur les ressources et les matières premières vierges, et notamment sur tout effet indésirable, tel que la substitution non durable, l'évasion fiscale ou un transfert d'activités économiques vers des pays tiers.

4) Capital naturel et services écosystémiques : le Parlement considère que la biodiversité est essentielle, à travers les services écosystémiques qu’elle fournit, à l’existence de la vie humaine et au bien-être des sociétés. Il souligne l'importance de l'eau en tant que ressource naturelle vitale à la fois pour l'homme et pour les écosystèmes.

Les députés sont d'avis que les ressources européennes doivent être gérées de façon plus stratégique et plus favorable à l'environnement. Ils estiment qu'un effort accru devrait être consenti pour gérer les ressources existantes en Europe, et notamment les ressources minérales, métalliques et en bois, ainsi que les ressources énergétiques, comme les combustibles fossiles. Ils soulignent l'importance de l'agriculture durable, qui conduit à réduire l'utilisation de sols importés et l'empreinte carbone de l'Europe.

Les députés insistent en outre sur la nécessité de renforcer la protection des forêts de l’Union européenne et les moyens de prévention des risques à cet effet. La Commission est invitée à examiner avec la filière industrielle du bois les possibilités de la mise en place d'actions concrètes visant l'exploitation durable des ressources forestières, notamment à travers des projets pilotes. Elle est également invitée à évaluer et de rendre public le coût des dommages environnementaux engendrés par la politique agricole et la politique de la pêche de l'Union.

5) Gouvernance et suivi : le Parlement rappelle l'importance de l'établissement d'objectifs sectoriels cohérents, mesurables, clairs et vérifiables, y compris d'un objectif global, afin de mettre en œuvre la vision et les étapes de la Feuille de route. En s’appuyant sur une base scientifique solide, la Commission est invitée à présenter une proposition concrète concernant ces objectifs pour l'Union et pour les États membres, au plus tard un an après l'adoption des indicateurs pertinents et à s'assurer que les politiques de l'Union sont compatibles avec les objectifs fixés.

Les députés estiment que les étapes prévues par la Feuille de route doivent être considérées comme objectifs, dans l'attente d'objectifs plus détaillés. Ils demandent aux États membres d'inclure les objectifs correspondants dans leurs propres stratégies relatives à l'efficacité de l'utilisation des ressources.

6) Dimension internationale : les députés soulignent que l'efficacité dans l'utilisation des ressources est un élément-clé de la politique industrielle de l'Union européenne qui devrait également, dès à présent, s'appliquer à ses relations extérieures. Ils estiment qu'un système commercial multilatéral, loyal, ouvert et non discriminatoire, et la protection de l'environnement peuvent s'épauler mutuellement.

La résolution réaffirme la nécessité d'inclure dans tous les accords commerciaux européens bilatéraux et régionaux en vigueur un chapitre ambitieux sur le développement durable. La Commission est invitée à intégrer les questions ayant trait aux matières premières aux négociations commerciales actuelles ou prochaines qu'elle mène au nom de l'Union dans un cadre bilatéral ou multilatéral.

Les députés sont d'avis que l'inclusion de préférences tarifaires pour les produits et services environnementaux produits de manière socialement responsable dans le cadre du système des préférences généralisées, pourrait produire une valeur ajoutée dans les échanges commerciaux de l'Union avec les pays en développement.

Le Parlement souligne enfin que le prochain sommet de la Terre «Rio + 20» pourrait constituer un forum important pour discuter de l'utilisation efficace des ressources et du développement durable. Les députés conjurent l'Union européenne et ses États membres de jouer un rôle décisif et positif lors de cette conférence afin de répondre aux défis posés par la création d'une économie inclusive et «verte» à l'échelle mondiale.