Agences de notation de crédit: intégrité, transparence, responsabilité,  bonne gouvernance et indépendance des activités

2011/0361(COD)

La commission des affaires économiques et monétaires a adopté le rapport de Leonardo DOMENICI (S&D, IT) sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1060/2009 sur les agences de notation de crédit.

La commission parlementaire recommande que la position du Parlement européen adoptée en première lecture suivant la procédure législative ordinaire modifie la proposition de la Commission comme suit :

Objet du règlement : les députés insistent  pour que l’approche réglementaire commune renforce l'indépendance des activités de notation de crédit. Le règlement devrait s’appliquer aux notations relatives aux États membres et à leurs dettes souveraines.

Notation de crédit : celle-ci est définie comme un service d'information fourni aux investisseurs et aux consommateurs par l'application d'un système de classification bien défini et soumis à un régime de responsabilité.

Dépendance excessive des établissements financiers à l’égard des notations de crédit : les autorités compétentes pour la surveillance de ces entreprises devraient :

  • surveiller de près l'adéquation des processus d'évaluation du crédit mis en œuvre par celles-ci, en tenant compte de la nature, de l'ampleur et de la complexité de leurs activités ;
  • veiller à ce que ces entreprises n'acceptent pas de clauses contractuelles entraînant la vente automatique d'actifs en cas de rétrogradation de leur qualité de crédit par une agence de notation de crédit externe, ni de règle imposant le recours à une agence de notation de crédit spécifique.

Dépendance excessive à l'égard des notations de crédit en droit européen : les députés estiment que le droit de l'Union ne doit faire aucune référence aux notations de crédit à des fins réglementaires. Ils demandent que toutes les dispositions des actes législatifs sectoriels faisant obligation de tenir compte des notations externes avant d'effectuer des investissements ou de conseiller à des tiers d'investir soient abrogées.

La Commission devrait présenter, au plus tard un an après l’entrée en vigueur du règlement, un rapport contenant des recommandations sur le développement de capacités autonomes de notation afin de prévenir les réactions procycliques automatiques aux changements dans les notations. L'Agence européenne des marchés financiers (AEMF) devrait également formuler des recommandations sur le développement de capacités autonomes de notation.

Obligations de vigilance appropriée et gestion interne des risques : le rapport note qu’il y a dépendance excessive à l'égard des notations de crédit externes lorsque les établissements financiers et les investisseurs institutionnels s'en remettent de façon exclusive aux notes attribuées par des agences de notation de crédit et négligent dans le même temps leurs propres obligations en matière de vigilance appropriée et de gestion interne des risques.

Les députés veulent par conséquent renforcer les obligations en matière de vigilance appropriée des établissements financiers et des investisseurs institutionnels et en matière de gestion interne des risques au moment d'acquérir des produits financiers, particulièrement s'il s'agit de produits complexes ou structurés.

La réglementation financière devrait également renforcer les obligations d'information incombant aux émetteurs de produits financiers, notamment pour les produits très complexes ou structurés.

Lorsqu'un investisseur manque à ses obligations en matière de vigilance appropriée et de gestion interne des risques de manière intentionnelle ou par négligence grave, les agences de notation de crédit ne devraient pas tenues être pour responsables des préjudices ou pertes découlant de ce comportement.

Indépendance des notations et conflits d’intérêts : les agences de notation de crédit devraient établir une structure de contrôle interne régissant l'application des politiques et des procédures visant à empêcher et à contrôler les conflits d'intérêts éventuels et à garantir l'indépendance des notations, des analystes et des équipes de notateurs vis-à-vis des actionnaires, des organes administratifs et de gestion, ainsi que des activités de vente et de marketing.

Les amendements préconisent en outre : i) l'interdiction des participations croisées impliquant le contrôle ou la gestion d'au moins deux agences de notation; ii) l'interdiction des prises de participation ou autres formes de financement de l'agence de notation dans l'entité évaluée; iii) la limitation des possibilités d'acquisition ou de fusion imposée aux agences de notation qui génèrent un chiffre d'affaires supérieur à 20% du marché total annuel des notations de crédit dans l'Union européenne.

Un amendement stipule qu’un actionnaire ou un membre d'une agence de notation de crédit détenant 5% ou plus du capital ou des droits de vote de cette agence ne devrait pas être actionnaire ou membre d'une autre agence de notation de crédit ou bien détenir une participation directe ou indirecte dans cette autre agence de notation de crédit.

Garantie de concurrence sur le marché des notations de crédit : la Commission devrait élaborer chaque année un rapport sur la concurrence sur le marché des notations de crédit et publier des chiffres relatifs aux parts de marché, sur la base du chiffre d'affaires, détenues par les agences de notation de crédit enregistrées.

Risques à prendre en considération : les agences de notation de crédit devraient garantir que les notations de crédit et les perspectives de notation qu'elles émettent se fondent sur une analyse approfondie de toutes les informations concernant tous les types de risques financiers, y compris les risques environnementaux.

Notations d'une dette souveraine : les députés demandent que les notations d'une dette souveraine soient émises selon des modalités garantissant que l'État membre concerné a été analysé dans sa spécificité. Les communications annonçant la révision de la situation d'un groupe de pays, même accompagnées de rapports sur chaque pays, seraient interdites.

Recours obligatoire aux petites agences :  lorsqu'un émetteur ou un tiers lié compte faire appel à au moins deux agences de notation de crédit pour la notation de crédit de la même émission ou entité, au moins l'une de ces deux agences devrait avoir une part du marché dans l'Union inférieure à un seuil fixé par l'AEMF. Cette dernière devrait fixer ce seuil de façon à garantir le développement d'un marché qui ne soit pas exposé aux tendances oligopolistiques.

Publication des notations : les agences de notation de crédit devaient publier toute notation de crédit et toute perspective de notation sollicitée, ainsi que toute décision d'interrompre une notation de crédit, d'une manière non sélective et en temps utile.

Jusqu'à la divulgation auprès du marché des informations relatives à la notation, l'agence de notation de crédit devrait assurer la confidentialité desdites informations. 

Évaluation des performances par l'AEMF : les députés demandent que l’AEMF analyse et évalue les performances des agences en se fondant sur les données recueillies dans son registre central et qu’elle publie sur son site web un rapport annuel exposant son analyse comparative, et notamment un système de notation des performances.

L'AEMF devrait également veiller au maintien d'une certaine diversité des méthodes de notation afin d'encourager les meilleures méthodes par la concurrence entre les agences de notation et d'éviter la standardisation des méthodes. En cas d'écart détecté par l'AEMF, l'agence de notation de crédit serait tenue de l'éliminer dans un délai d'un mois.

Sanctions en cas d'exercice abusif de son mandat par une agence de notation : s’il constate qu'une agence de notation de crédit a outrepassé son mandat en portant un jugement sur les politiques économiques menées par un gouvernement ou en formulant des recommandations en la matière, le système européen de surveillance financière pourra décider par exemple : i) une interdiction temporaire à l'encontre de l'agence de notation de crédit d'émettre des notations de crédit avec effet dans l'ensemble de l'Union; ii) l'imposition d'une amende à l'agence de notation, iii) retrait de l'enregistrement de l'agence de notation de crédit.

Évaluations européennes de la solvabilité : les députés souhaitent que l'Union européenne évalue par elle-même la solvabilité de ses États membres. À cet effet, ils proposent de mettre en place un mécanisme indépendant d'évaluations publiques européennes de la solvabilité destiné à fournir aux investisseurs toutes les données pertinentes relatives à la dette souveraine. Ces évaluations seraient dans un premier temps effectuées par les institutions existantes de l'Union compétentes en la matière.

Agence européenne de notation : les députés demandent que la Commission examine la possibilité de créer une agence européenne de notation de crédit indépendante ou de définir des règles permettant aux agences européennes de notation de crédit d'effectuer une évaluation impartiale et objective de leur solvabilité. Le cas échéant, elle devrait présenter des propositions législatives appropriées.

Réseau d'agences de notation de crédit : au plus tard pour fin 2012, la Commission devrait faire rapport sur la possibilité de mettre en place un réseau regroupant des petites agences de notation de crédit afin de renforcer la concurrence sur le marché. Une agence de notation de crédit de petite taille est définie comme une agence qui compte moins de 50 salariés ou qui affiche un chiffre d'affaires annuel inférieur à 10 millions EUR au niveau du groupe.

Rapport : au plus tard le 31 décembre 2013, et compte tenu de l'évolution du cadre réglementaire et de surveillance de l'Union, la Commission devrait présenter un rapport sur les outils permettant aux investisseurs et au grand public d'évaluer eux-mêmes les risques liés au crédit des émetteurs et analysant la possibilité de mettre en place d'autres modèles de paiement. Le cas échéant, ce rapport serait accompagné de propositions.