Distribution en ligne d'oeuvres audiovisuelles dans l'Union européenne

2011/2313(INI)

Le Parlement européen a adopté une résolution sur la distribution en ligne d'œuvres audiovisuelles dans l'Union européenne.

Le Parlement rappelle qu'il ne peut y avoir ni création durable, ni diversité culturelle sans un droit d'auteur qui protège et rémunère les créateurs, et sans un accès juridiquement incontestable des utilisateurs au patrimoine culturel. C’est pourquoi, il préconise un certain nombre de mesures pour dûment protéger la production européen, tout en libéralisant leur accès sur l’Internet.

Contenu licite, accessibilité et gestion collective des droits : le Parlement souligne la nécessité de renforcer l'attractivité du contenu licite, tant sur le plan de la quantité que sur celui de la qualité, et de l'actualiser, ainsi que d'améliorer la disponibilité en ligne des œuvres audiovisuelles, tant en version sous-titrée que dans toutes les langues officielles de l'Union. Il souligne en particulier que les services numériques, comme les services de transmission vidéo (videostreaming), devraient être accessibles à tous les citoyens européens, quel que soit l’État dans lequel ils se trouvent. Il appelle dès lors la Commission à demander aux entreprises numériques européennes de supprimer les contrôles géographiques (comme le blocage de l’adresse IP) à travers l’Union européenne et de permettre l’achat de services numériques à l’extérieur de l’État membre d’origine du consommateur. Il demande également à la Commission d’effectuer une analyse de l’application de la directive sur la distribution par câble et par satellite  à la distribution numérique.

D’une manière générale, le Parlement encourage le développement d'une offre légale riche et diversifiée, notamment par des fenêtres d'exploitation plus flexibles et souligne que les ayants droit devraient pouvoir décider librement du moment où ils souhaitent lancer leurs produits sur différentes plateformes. Il préconise la création d’un cadre légal conçu pour favoriser la numérisation et la diffusion transfrontalière des œuvres orphelines sur le marché unique numérique et suggère l'adoption d'une approche globale à l’échelle de l’Union européenne comprenant une coopération plus étroite entre les détenteurs de droit, les plateformes de distribution en ligne et les fournisseurs d’accès à l’Internet afin d’encourager un accès convivial et compétitif aux contenus audiovisuels. Á cet effet, il faut favoriser l'interopérabilité dans la distribution des œuvres audiovisuelles sur les plateformes numériques et renforcer la neutralité de l’Internet en vue de garantir l’égalité d’accès aux réseaux à grande vitesse.

Plus loin, le Parlement souligne que la fracture numérique qui sépare certains États membres ou régions de l’Union européenne constitue un obstacle important au développement du marché unique numérique. Il demande dès lors l’extension de l’accès haut débit à l’Internet dans toute l’Union européenne afin de stimuler l’accès aux services en ligne et aux nouvelles technologies. Le Parlement note en particulier que le développement des services transfrontaliers est tout à fait possible dès lors que les plateformes commerciales sont prêtes à acquérir les droits par voie contractuelle pour l'exploitation d'un ou plusieurs territoires, car il ne faut pas oublier que les systèmes territoriaux sont des marchés naturels dans le secteur audiovisuel.

En matière de gestion collective des œuvres, le Parlement demande à la Commission de présenter une initiative législative pour la gestion collective du droit d’auteur, qui viserait à améliorer la responsabilité, la transparence et la gouvernance des sociétés de gestion collective des droits, ainsi qu'à assurer des mécanismes efficaces de règlement de litiges, et à clarifier et simplifier les systèmes d’octroi de licences dans le secteur de la musique. Il souligne à cet égard la nécessité de différencier clairement les pratiques d’octroi de licences pour différents types de contenus, notamment entre les œuvres audiovisuelles/cinématographiques et les œuvres musicales. Il soutient également l'établissement de règles européennes cohérentes en matière de bonne gouvernance et de transparence des sociétés de gestion collective.

Sur la question de la convergence des médias, le Parlement en appelle à de nouvelles solutions non seulement dans le domaine des droits d'auteur, mais aussi dans celui du droit des médias et invite la Commission à vérifier dans quelle mesure les divergences de réglementation pour les services linéaires et non linéaires contenues dans la directive 2010/13/UE relative aux services de médias audiovisuels, restent encore d'actualité. Il suggère ainsi de réfléchir à de nouveaux systèmes de compensation, transcendant les différents programmes et différentes plateformes, en créant des incitations à proposer des contenus de haute qualité qui amélioreraient dans la même mesure la qualité des programmes linéaires et la diversité de l'offre en ligne.

Plus globalement, le Parlement demande à la Commission de vérifier si le principe de reconnaissance mutuelle pourrait s’appliquer aux produits numériques comme il s’applique aux produits matériels.

Usage non autorisé : sur la question essentielle de l’usage non autorisé des œuvres sur l’Internet, le Parlement appelle les États membres à promouvoir le respect des droits d'auteur et des droits voisins et à lutter contre l'offre et la distribution non autorisées des œuvres, y compris dans le cadre du streaming. Pour le Parlement, lorsque des solutions légales existent, la violation des droits d'auteur en ligne demeure un problème. La disponibilité en ligne légale de contenus culturels protégés par des droits d’auteurs doit donc s’accompagner d’une application renforcée sur l’Internet de la législation relative aux droits d’auteurs.

Rémunération : le Parlement estime qu'il est essentiel de garantir aux auteurs et aux interprètes une rémunération équitable et proportionnelle au volume de l'ensemble des formes d'exploitation, et notamment d'exploitation en ligne de leurs œuvres. Il invite par conséquent les États membres à interdire les contrats d'acquisition forfaitaire de tous les droits, qui sont contraires à ces principes. Il appelle la Commission à présenter d'urgence une étude examinant les disparités existantes au niveau national dans les différents mécanismes de rémunération des auteurs et interprètes, afin de dresser la liste des bonnes pratiques. Il invite en outre à un rééquilibrage de la position de négociation des auteurs et des interprètes vis-à-vis des producteurs, en accordant aux auteurs et aux interprètes un droit inaliénable à être rémunérés pour toutes les formes d'exploitation de leurs œuvres, y compris une rémunération continue dans les cas où ils ont cédé leur droit exclusif de "mise à disposition" à un producteur.

Le Parlement demande encore que des mesures soient également prises pour garantir aux titulaires de droits une rémunération équitable pour la diffusion, la retransmission et la rediffusion des œuvres audiovisuelles. Á cet effet, le meilleur moyen de garantir une rémunération correcte aux ayants droit est d'offrir un choix, selon la préférence, entre des conventions collectives (y compris, des contrats standard définis d'un commun accord), des licences collectives étendues et des organisations de gestion collective des droits.

Concession de licences : le Parlement souligne que les mécanismes multiterritoriaux ou paneuropéens de concession des licences devraient rester facultatifs, et que les différences linguistiques et culturelles entre États membres, ainsi que les variations des règles nationales non liées au droit de la propriété intellectuelle, lancent des défis spécifiques. Par conséquent, une approche flexible de la concession de licences paneuropéennes devrait être adoptée, tout en protégeant les ayants droit et en progressant vers l'espace numérique unique. Il estime que l’encouragement et la promotion de l’octroi durable de licences couvrant plusieurs territoires sur le marché unique numérique pour les œuvres audiovisuelles devraient faciliter les initiatives orientées vers le marché.

Des recommandations sont également faites sur la question des archives publiques qui gagneraient à tirer pleinement parti des possibilités offertes par les technologies numériques pour les œuvres du patrimoine.

Interopérabilité : le Parlement invite les États membres à veiller à ce que les sociétés de gestion collective s'appuient sur des systèmes efficaces, fonctionnels et interopérables. Á noter que contrairement à sa position au fond, la Plénière n’appelle pas la Commission à réfléchir aux moyens d'inciter les opérateurs de réseaux à la standardisation de leurs outils techniques.

Sur la question de la TVA, le Parlement souligne l'urgence d’une plus grande coordination des politiques dans ce domaine. Il suggère en particulier, l'application d'un taux de TVA réduit pour la distribution numérique des biens et services culturels afin de résoudre les distorsions entre les services en ligne et hors ligne. De même, il appelle à l’application de taux de TVA réduits aux contenus culturels en ligne vendus par un fournisseur établi dans l’UE à un consommateur résidant dans l’UE, ce qui rendrait les plateformes numériques plus attrayantes. Cette proposition avait déjà été évoquée par le Parlement dans une résolution du Parlement européen du 17 novembre 2011 sur la modernisation de la législation sur la TVA dans le but de stimuler le marché unique du numérique et du 13 octobre 2011 sur le futur de la TVA.

Protection et promotion des œuvres audiovisuelles : dans ce domaine, le Parlement appelle la Commission à :

  • élaborer des mécanismes visant à encourager l’accès à du matériel audiovisuel archivé dans les institutions de sauvegarde du patrimoine cinématographique européen;
  • promouvoir des solutions pour soutenir la numérisation, la préservation et la disponibilité éducative de ces œuvres, y compris au-delà des frontières.

Il considère en effet que la numérisation et la préservation des ressources culturelles, ainsi qu’un meilleur accès à celles-ci, offrent de grandes perspectives économiques et sociales et représentent une condition essentielle au développement futur des capacités culturelles et créatives de l’Europe.

Enseignement : globalement, le Parlement insiste sur l'importance cruciale de l'intégration des nouvelles technologies dans les cursus nationaux et l'importance particulière de l'éducation de tous les citoyens européens, de tous les âges, aux médias et au numérique, afin de leur permettre de développer leurs compétences dans ces domaines et d'en tirer parti. Il insiste sur la nécessité de mener des campagnes d’éducation nationales et européennes pour sensibiliser la population à l’importance des droits de propriété intellectuelle, ainsi qu’aux voies légales de distribution des œuvres audiovisuelles en ligne. Les consommateurs devraient également être correctement informés des problèmes liés aux droits de propriété intellectuelle pouvant découler de l’utilisation d’un site de partage de fichiers dans le contexte des services d’informatique en nuage (cloud-computing services).

MEDIA 2014-2020 : enfin, le Parlement rappelle que le programme MEDIA a maintenant acquis le statut de marque à part entière, et qu'il est fondamental de poursuivre un programme MEDIA ambitieux pour la période 2014-2020, dans l'esprit du programme actuel.