Situation des droits fondamentaux dans l'Union européenne (2010-2011)
La commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures a adopté le rapport dinitiative de Monika FLAÍKOVÁ BEŇOVÁ (S&D, SK) sur la situation des droits fondamentaux dans lUnion européenne (2010 - 2011).
Les députés rappellent que larticle 2 du traité UE fonde lUnion sur une communauté de valeurs indivisibles et universelles de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, dégalité de genre, de non-discrimination, de solidarité, de lÉtat de droit, ainsi que de respect des droits de lhomme et des libertés civiles, pour toutes les personnes qui sont sur son territoire, y compris celles appartenant à des minorités et les personnes qui séjournent temporairement ou illégalement sur le territoire de lUnion européenne. Toutefois, le fossé entre les droits fondamentaux et leur mise en uvre mine la crédibilité de lUnion et de ses États membres, ainsi que le respect effectif des droits de lhomme, et leur promotion, sur son territoire et dans le monde entier.
Cest pourquoi, les députés invitent la Commission, le Conseil et les États membres à assumer pleinement leurs responsabilités en ce qui concerne lapplication en bonne et due forme du mandat et des compétences de lUnion en ce qui concerne les droits fondamentaux, sur la base à la fois de la Charte et des articles des traités consacrés aux droits fondamentaux et aux droits des citoyens, en particulier les articles 2, 6 et 7 du traité UE.
Pour affronter la crise et les tensions relatives à la démocratie, à létat de droit et aux droits fondamentaux qui affectent lUnion européenne et ses États membres, les députés demandent un renforcement durgence des mécanismes européens pour garantir ces principes fondamentaux dans lUnion.
Limpact des droits fondamentaux sur la législation de lUnion européenne doit en outre être dûment évalué au moyen de mesures concrètes de sorte à savoir si :
- les propositions sont cohérentes avec la Charte des droits fondamentaux ;
- la mise en uvre de la législation par les États membres est satisfaisante de ce point de vue ;
- le Parlement européen et les parlements nationaux sont correctement associés à la surveillance des mesures prises ;
- le recours à une expertise externe, systématique et indépendante par lAgence des droits fondamentaux est nécessaire pour surveiller cet impact ;
- le rôle du Parlement est pleinement pris en compte dans le cadre de son autonomie danalyse dimpact sur les droits fondamentaux.
Les députés invitent la Commission à rédiger un rapport annuel sur la situation des droits fondamentaux dans lUnion, comportant une analyse de la situation dans les États membres, notamment à partir des préoccupations exprimées par la société civile.
Plus globalement, les députés appellent la Commission et le Conseil à reconnaître conjointement et officiellement, lexistence dobligations positives de protection et de promotion des droits de lhomme, qui font partie intégrante du droit européen. Ils appellent la Commission à revoir lacquis législatif de lUnion en tenant dûment compte des droits inscrits dans la Charte et à réviser, à la lumière de la Charte, les domaines de lancien troisième pilier (coopération policière et judiciaire dans les affaires pénales).
Transparence : les députés regrettent le manque de transparence du dialogue entre la Commission et les États membres lorsque les droits fondamentaux ou les intérêts des citoyens européens sont en jeu. Un tel manque de transparence dans la transposition du droit européen est contraire aux règles de lUnion et est extrêmement préjudiciable aux citoyens de lUnion. Ils regrettent également le manque de transparence et douverture dans les négociations internationales (ce qui a conduit le Parlement européen à rejeter des accords internationaux comme laccord commercial anti-contrefaçon lACAC). Les députés en appellent dès lors à des mesures destinées à garantir la permanence de canaux de communication permettant le partage des informations sur les droits fondamentaux dans lUnion ainsi que lorganisation, chaque année, dun forum interinstitutionnel pour évaluer la situation des droits fondamentaux dans lUnion rassemblant un large panel dinstitutions et dorganisations représentatives.
CEDH : les députés regrettent les retards dans ladhésion de lUnion européenne à la CEDH. Ils demandent au Conseil dagir afin que les procédures dadhésion de lUnion à la CEDH soient conclues. Ils rappellent à tous les États membres quils doivent se conformer à leurs obligations internationales en matière de respect de libertés et de droits fondamentaux. Ils regrettent notamment la faible réaction de la Commission en réponse à des violations spécifiques des droits fondamentaux et à laffaiblissement des contre-pouvoirs démocratiques et de létat de droit dans certains États membres.
Surveillance : les députés souhaitent que la Commission élabore, avant la fin de 2012, une proposition détaillée dun mécanisme de surveillance et dun système davertissement précoce en cas datteinte aux droits fondamentaux. Ils demandent en outre la mise en place, dans tous les États membres, dinstitutions nationales appropriées dans le domaine des droits de lhomme et ladoption de mesures facilitant la mise en réseau de ces organismes dans lensemble de lUnion. Une plus grande coopération entre les institutions de lUnion et dautres organisations internationales, notamment le Conseil de lEurope et la commission de Venise, est demandée afin dutiliser leur savoir-faire pour faire respecter les principes de démocratie, les droits de lhomme et létat de droit.
Dégradations de certains droits dans lUE : dune manière générale, les députés regrettent la dégradation de la situation concernant la liberté des médias dans divers États membres, notamment de la presse écrite. Ils condamnent les conditions dans lesquelles travaillent certains journalistes et les entraves dont ils font lobjet. Ils appellent à ladoption par le Conseil des droits de lhomme des Nations unies dune résolution reconnaissant des droits relatifs à linternet, notamment ceux concernant laccès au réseau et à la liberté dexpression. Ils plaident également pour lévaluation parlementaire des politiques liées à lespace de liberté, de sécurité et de justice.
Agence des droits fondamentaux : les députés jugent quil est inacceptable que le Parlement nait pas été autorisé à définir, en tant que co-législateur, les domaines thématiques dans le cadre pluriannuel de lAgence des droits fondamentaux et que la coopération policière et judiciaire en matière pénale, qui est devenue une politique normale de lUnion, ne soient toujours pas explicitement incluse dans le mandat de lAgence. Ils demandent plus de moyens financiers pour cette Agence et surtout un clair élargissement de ses compétences.
Pour une meilleure information des citoyens de leurs droits : les députés appellent encore la Commission à mieux informer les personnes sur les droits que leur confère la Charte et à faire respecter leurs droits auprès des juridictions appropriées. Ils invitent notamment la Commission à informer de façon détaillée les citoyens qui sadressent à elle au sujet de violations des droits fondamentaux, des possibilités supplémentaires ou plus appropriées existant, de garder une trace de ces signalements et den rendre compte de façon exhaustive dans ses rapports annuels sur les droits fondamentaux dans lUnion.
État des lieux des droits fondamentaux dans lUE : le rapport balaie ensuite lensemble des actions qui ont été menées dans le cadre de lUE en matière de droits fondamentaux :
- discrimination : les députés déplorent le blocage actuel au Conseil des négociations sur la proposition de directive horizontale étendant à tous les motifs la protection totale contre la discrimination et appellent à son adoption rapide. Ils demandent également un renforcement des mécanismes de plaintes pour les citoyens lésés ;
- protection des minorités : les députés invitent les États membres à lutter contre la discrimination raciale ou ethnique dans le travail, le logement, léducation, la santé et laccès aux biens et aux services mais aussi à lutter contre les mouvements racistes, xénophobes, islamophobes ou antisémites. Bien quil nexiste pas de solution unique pour améliorer la situation des minorités nationales dans tous les États membres, ils estiment quil est possible de fixer dans lUnion, certains objectifs minimaux communs à lintention des pouvoirs publics, en sinspirant des normes juridiques internationales et des bonnes pratiques ;
- la question des Roms : les députés regrettent tout particulièrement que des citoyens dorigine Rom fassent lobjet dexpulsions collectives de la part dÉtats membres, et déplorent le peu de réactions de la Commission dans certains cas. Ils invitent les États membres à apporter une réponse effective à lexclusion des Roms en mettant en uvre les mesures présentées dans leur stratégie nationale pour lintégration des Roms, en mettant fin à leur ségrégation spatiale et en prévoyant des moyens suffisants pour développer des actions efficaces ;
- égalité des chances : une fois encore, les députés appellent à des mesures résolues en faveur des femmes, notamment en matière déquivalence salariale. Ils rappellent au passage que la violence faite aux femmes est la forme la plus répandue de violation des droits fondamentaux, y compris dans lUnion européenne ; des mesures sont également réclamées pour les femmes migrantes et pour lutter contre lexploitation sexuelle des femmes ;
- identité de genres : les députés invitent les États membres à adopter un cadre législatif national permettant de traiter les discriminations subies par les personnes LGBT (lesbiennes, gays, bi ou trans) et les couples du même sexe en raison de leur orientation sexuelle ; ils invitent en outre les États membres à garantir une protection effective des personnes participant aux manifestations publiques LGBT, notamment aux défilés «Fierté LGBT» ;
- personnes jeunes, âgées ou handicapées : plusieurs mesures sont réclamées pour protéger ces personnes tant dans les États membres quau niveau de lUE, et pour lutter contre toutes les formes de discriminations dont elles sont victimes. Entre autre chose, les députés demandent que la dignité des personnes soit respectée à la fin de leur vie, notamment en garantissant la reconnaissance et le respect des volontés exprimées dans les dispositions testamentaires;
- migrants et réfugiés : les députés invitent les États membres à déterminer une procédure établissant des règles mieux coordonnées pour gérer les demandeurs dasile. Ils demandent au Conseil et aux États membres de sassurer que le régime dasile européen commun (RAEC) soit mis en uvre dici à la fin 2012, comme prévu. Ils condamnent en particulier le recours, répandu chez la plupart des États membres, à la détention pour faciliter le refoulement des migrants, mineurs compris ;
- droits de lenfant : globalement, les députés invitent toutes les institutions européennes à traiter efficacement les défis tels que le retrait de la garde des enfants de lun ou de leurs deux parents, les enfants perdus, lexploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie, la protection des enfants migrants non accompagnés, la situation des enfants handicapés placés ; ils soulignent quaucun mineur non accompagné ne devrait être détenu.
Des mesures sont encore réclamées pour renforcer le droit des victimes sur tout le territoire de lUnion européenne et pour sattaquer aux derniers obstacles, tels que les délais, la capacité juridique, la durée des procédures, les frais de justice et les formalités procédurières.
Enfin, les députés réclament des mesures spécifiques pour i) renforcer la citoyenneté de lUnion (en particulier, en matière de droits électoraux) ; ii) améliorer les droits des citoyens en ce qui concerne la protection de leurs données (en réclamant la mise en place dun cadre global, répondant à un degré élevé et uniforme dharmonisation et en améliorant le cadre international dans le contexte des accords PNR conclus avec plusieurs pays tiers).