Mise en œuvre de la politique de sécurité et de défense commune

2012/2138(INI)

Le Parlement européen a adopté par 442 voix pour, 92 contre et 75 abstentions une résolution sur la mise en œuvre de la politique de sécurité et de défense commune - PSDC (selon le rapport annuel du Conseil au Parlement européen sur la politique étrangère et de sécurité commune).

Nouveau cadre stratégique : le Parlement souligne que l'Union européenne a vocation à être un acteur politique global sur la scène internationale de manière à promouvoir la paix et la sécurité internationales et qu’elle doit être capable de prendre ses responsabilités face aux menaces, crises et conflits internationaux, plus particulièrement dans son voisinage. Il insiste sur la nécessité pour l'Union d'affirmer son autonomie stratégique à travers une politique étrangère, de sécurité et de défense forte et efficace lui permettant d'agir seule si nécessaire. Il rappelle que cette autonomie stratégique doit se construire dans le respect des alliances existantes, notamment à l'égard de l'OTAN, et du maintien d'un lien transatlantique fort dans le respect et le renforcement du multilatéralisme effectif en tant que principe sous-jacent de l'intervention de l'Union dans la gestion des crises internationales.

Inquiets de la perspective de déclin stratégique qui guette l'Union, les députés constatent que la stratégie européenne de sécurité élaborée en 2003 et révisée en 2008 commence à être dépassée. Ils appellent donc le Conseil européen à solliciter auprès de la haute représentante/vice-présidente un Livre blanc sur la sécurité et la défense de l'UE, qui définira les intérêts stratégiques de l'Union. Le Livre blanc devrait se fonder à la fois sur les notions introduites par les stratégies européennes de sécurité de 2003 et 2008 et sur les nouveaux concepts de sécurité qui sont apparus ces dernières années, tels que la «responsabilité de protéger», la sécurité humaine et le multilatéralisme effectif.

La PSDC au cœur d'une approche globale : la résolution salue les conclusions du Conseil du 23 juillet 2012 sur la politique de sécurité et de défense commune et la présentation annoncée d'une communication conjointe sur l'approche globale, par la Commission et la haute-représentante/vice-présidente. Il rappelle à toutes deux qu'il leur incombe de s'associer au Parlement pour cette entreprise.

Le Parlement souligne que la force de l'Union par rapport à d'autres organisations réside dans son potentiel unique pour mobiliser l'éventail complet des instruments politiques, économiques, humanitaires et de développement en appui à ses opérations et missions civiles et militaires de gestion de crise sous la houlette d'une seule autorité politique – la haute-représentante/vice-présidente – et que cette approche globale lui confère une souplesse ainsi qu'une efficacité unique et largement appréciée. Il estime cependant que la mise en œuvre de l'approche globale doit garantir que l'Union répond aux risques spécifiques par des moyens civils et/ou militaires appropriés.

Les députés rappellent que le traité de Lisbonne a apporté pour la PSDC des innovations importantes dont on attend toujours la mise en œuvre. Ils jugent regrettable, à cet égard, le peu de cas que la haute-représentante/vice-présidente fait des précédentes résolutions parlementaires préconisant une poursuite plus active et cohérente de la mise en œuvre des nouveaux instruments apportés par le traité de Lisbonne. La haute représentante est invitée à donner les impulsions nécessaires au développement des potentialités du traité de Lisbonne de façon à ce que l'Union européenne dispose de toute la gamme des possibilités d'action sur la scène internationale dans le cadre de son approche globale.

Opérations civiles et militaires : la résolution note qu'à l'heure actuelle 14 opérations sont en cours, dont 11 civiles et 3 militaires. Elle se félicite du lancement de trois nouvelles opérations civiles durant l'été 2012 dans la Corne de l'Afrique (EUCAP Nestor), au Niger (EUCAP Sahel Niger) et au Sud-Soudan (EUAVSEC South Sudan) et de la planification d'une mission civile d'appui au contrôle des frontières en Libye. Elle considère que ces missions constituent un premier signal de redynamisation de l'agenda de la PSDC et souligne l’importance d'améliorer le cadre du retour d'expérience des missions et opérations.

Le Parlement rappelle que jusqu'à présent la PSDC a contribué à la gestion de crise, au maintien de la paix et au renforcement de la sécurité internationale. Il soutient qu'à présent, la PSDC doit être en mesure d'intervenir dans tous les types de crise, y compris dans des contextes de conflits de haute intensité dans son propre voisinage, et avoir un niveau d'ambition suffisant pour avoir un véritable impact sur le terrain.

Les députés regrettent dans ce contexte que l'Union ne tire pas pleinement profit des instruments militaires de la PSDC, alors que plusieurs crises auraient pu justifier une intervention de la PSDC, notamment celles en Libye et au Mali. Ils soulignent la nécessité d'envisager d'apporter une aide à la réforme du secteur de la sécurité aux pays du printemps arabe, notamment ceux de l'Afrique du Nord et de la région du Sahel. Ils encouragent l'approfondissement de la planification en cours d'éventuelles opérations militaires et préconisent simultanément une réévaluation des missions en cours.

Capacités et structures de conduite des opérations : le Parlement constate que  les opérations militaires de l'Union souffrent encore trop souvent de problèmes de génération de forces et que la crédibilité de la PSDC est en jeu en l'absence de capacités crédibles. Il appelle donc les États membres à rester mobilisés pour fournir du personnel et des équipements de qualité.

De plus, les structures de gestion de crise au sein du SEAE restent en sous-effectifs, aussi bien du côté civil que militaire, ce qui nuit à leur réactivité et contribue à une certaine marginalisation de la PSDC. La haute représentante/vice-présidente est invitée à remédier au plus vite à cette situation.

Entre autres recommandations, le Parlement :

  • invite la Commission, le Conseil, les États membres et l'Agence européenne de défense à réfléchir à la mise en place de solutions innovantes pour accroître les capacités de projection de l'Union :  un partenariat public-privé dans le domaine du transport aérien, construit autour d'une petite flotte d'A400M, permettrait d'acheminer aussi bien de l'aide humanitaire en cas de catastrophes que du matériel et des personnels lors de missions et opérations réalisées dans le cadre de la PSDC;
  • insiste pour que le renforcement des capacités européennes se traduise également par une consolidation de la base industrielle et technologique de défense européenne ;
  • demande aux États membres d'appliquer pleinement la directive sur les marchés publics de défense (2009/81/CE) de façon à permettre une plus grande interopérabilité du matériel et à lutter contre la fragmentation du marché qui, bien souvent, profite à des pays tiers;
  • estime que le Conseil et les États membres doivent soutenir davantage les capacités de l'Union qui peuvent permettre de réaliser des économies par une mutualisation, notamment l'Agence européenne de défense, le Centre satellitaire de l'UE et le Collège européen de sécurité et de défense;
  • engage le Conseil et les États membres à doter l'Agence européenne de défense d'un budget et d'un personnel adéquats afin qu'elle soit en mesure de remplir toutes les tâches qui lui sont assignées par le traité de Lisbonne ;
  • souligne la nécessité, pour l'autonomie décisionnelle et opérationnelle de l'Union, de disposer de moyens satellitaires adéquats dans les domaines de l'imagerie spatiale, du recueil du renseignement, des communications et de la surveillance de l'espace ;
  • soutient le processus de révision des procédures de gestion de crise, qui devrait aboutir avant la fin de l'année et faciliter le déploiement plus rapide d'opérations PSDC civiles et militaires.

Le Parlement plaide à nouveau en faveur de la création d'un quartier général opérationnel (OHQ) de l'Union pour la planification opérationnelle et la conduite des missions civiles et des opérations militaires au sein du SEAE, si nécessaire à travers une coopération structurée permanente.