Impact de la crise financière puis économique sur les droits de l'homme

2012/2136(INI)

La commission des affaires étrangères a adopté le rapport d’initiative d’Inese VAIDERE (ADLE, LV) sur l'impact de la crise financière puis économique sur les droits de l'homme.

Les députés rappellent que la crise a eu des répercussions non seulement sur les droits économiques et sociaux mais également sur les droits politiques des individus, comme l'ont notamment mis en lumière les protestations populaires telles que celles qui ont secoué l'Afrique du Nord et le Proche-Orient en 2011. Ainsi, si les effets de la crise sur les droits civils et politiques doivent encore être pleinement évalués, la crise a clairement amplifié l'agitation sociale, entraînant parfois une violente répression.

La crise a également eu des répercussions sur l’aide au développement : l'APD collective de l'Union est passée de 53,5 milliards EUR en 2010 à 53,1 milliards EUR en 2011, amenant le niveau de l'APD européenne à 0,42% du RNB, contre 0,44% en 2010.

Dans ce contexte, les députés rappellent leur détermination à défendre et à promouvoir les droits de l'homme et les libertés fondamentales. Ces droits englobent les droits à l'alimentation, à l'eau, à l'éducation, à un logement adéquat, à la terre, à un emploi décent, à la santé et à la sécurité sociale. Ils réaffirment en outre que rien ne justifie que les États, quel que soit leur niveau de revenu, manquent à leur obligation de respecter les droits fondamentaux de l'homme. Dans cette perspective, une attention particulière devrait être accordée aux groupes les plus vulnérables de la population, en particulier aux plus pauvres, aux femmes et aux enfants.

Renforcer l’aide européenne : compte tenu de la crise, les députés estiment qu’il faut offrir un soutien stable aux projets financés par l'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme (IEDDH) en faveur des défenseurs des droits de l'homme. Ils demandent expressément à l'Union et à ses États membres de respecter leurs engagements bilatéraux et multilatéraux en matière d'APD et de poursuivre les objectifs, notamment en ciblant les domaines pour lesquels les progrès sont actuellement insuffisants (notamment en matière de services de base par exemple). Ils prient également la Commission, le SEAE et les États membres d'articuler les réponses à la crise et la politique de développement autour d'une approche en faveur des droits de l'homme, comme indiqué dans la résolution du Parlement européen sur la communication de la Commission intitulée "Un programme pour le changement: l'avenir de la politique de développement de l'UE".

Réaffirmant le principe de cohérence en matière d’aide au développement, les députés soulignent que le soutien budgétaire apporté aux pays partenaires et tous les accords commerciaux devraient être subordonnés au respect des droits de l'homme et de la gouvernance dans ces pays. Ils estiment en particulier que les donateurs et les prêteurs devraient réagir de façon coordonnée aux cas de fraude et de corruption. Pour leur part, les pays en développement devraient recourir aux préférences commerciales offertes par l'Union dans le cadre du système de préférences généralisées (SPG), en vue de dynamiser leur économie, de diversifier leurs exportations et d'améliorer leur compétitivité.

Se recentrer sur les pays les plus pauvres : les députés se réjouissent de ce que l'Union ait recentré son aide vers les pays les moins avancés. Ils appellent notamment la communauté internationale à apporter une aide aux gouvernements d'Afrique subsaharienne pour empêcher que la crise financière n'aggrave la crise humanitaire dans certains pays de la région.

Ils demandent également aux gouvernements de :

  • prendre toutes les mesures nécessaires pour réduire les écarts salariaux ;
  • concevoir des programmes de protection sociale, tels que la bolsa familia au Brésil ou les programmes d'intérêt public stimulés par la demande, à l'instar du Programme national de garantie de l'emploi dans les zones rurales (NREGS) en Inde.

Lutter contre l’insécurité alimentaire : les députés rappellent que 868 millions de personnes souffrent de malnutrition chronique, l'immense majorité d'entre elles (850 millions) vivant dans des pays en développement. Ils demandent dès lors des mesures de lutte contre l'insécurité alimentaire et invitent les gouvernements à soutenir les petits producteurs alimentaires, principalement les femmes et les coopératives agricoles qui contribuent le plus efficacement à la réduction de l'extrême pauvreté. De même, ils invitent les gouvernements à empêcher les spéculateurs financiers nationaux et internationaux qui investissent dans des terres, de porter préjudice aux petits exploitants agricoles et aux producteurs locaux en provoquant des déplacements et des problèmes environnementaux. Parallèlement, ils rappellent l’importance de respecter les titres de propriété informels et traditionnels, ainsi que les droits d'utilisation du sol, sachant que les terres sont souvent la seule ressource de subsistance.

Plus globalement, les députés appellent les gouvernements à ne pas supprimer ou limiter les subventions alimentaires sachant qu'elles peuvent circonscrire la prévalence de la faim et améliorer la situation nutritive des ménages bénéficiaires. Ils plaident également pour plus de transparence sur les marchés des produits de base pour éviter la volatilité des prix des matières premières agricoles.

Lutter contre le chômage : les députés indiquent que le chômage a augmenté de 27 millions de personnes depuis le début de la crise en 2008 et que les jeunes en paient le prix le plus élevé. Une fois de plus, ils se disent favorables à l'introduction mondiale d'une taxe sur les transactions financières, qui pourrait constituer un mécanisme innovant de financement du développement, contribuant en fin de compte à la réalisation universelle des droits économiques et sociaux. Ils encouragent donc tous les États membres à soutenir la proposition budgétaire de l'Union relative à une taxe sur les transactions financières.

Par ailleurs, les députés en appellent à :

  • une meilleure compétitivité des entreprises dans les pays en développement ;
  • l'amélioration de l’accès à l’école et la réduction des frais scolaires ;
  • des mesures de protection de l’enfance.

Lutter contre les discriminations : d’une manière générale, les députés appellent à la mise en œuvre urgente de politiques et de pratiques garantissant l'accès accru des femmes au marché du travail. Ils soulignent que l'éducation des filles et des femmes ainsi que l'autonomisation des femmes sont essentielles pour renforcer leurs droits. Des mesures sont également réclamées pour les personnes âgées et leur accès aux soins de santé et de lutte contre le trafic des êtres humains.

Après-2015 : les députés rappellent que 2015 est la date à laquelle les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) devraient être atteints, ce qui ne sera probablement pas le cas. Ils estiment que dans le cadre de l'après-2015, la priorité devrait être accordée à l'application universelle des droits de l'homme, en se focalisant sur les incidences de la crise financière et économique sur les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables. Ils demandent que de nouvelles recherches et analyses au sujet de l'impact de la crise financière et économique soient initiées sur différentes régions, y compris l'Union et ses relations avec les pays tiers afin d'améliorer la planification politique de l’aide. Ils appellent enfin la Commission et les États membres à apporter leur soutien financier au laboratoire d'innovation "Global Pulse" des Nations unies qui œuvre dans ce contexte particulier.