Gouvernance économique: exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres. "Paquet de six"

2010/0277(NLE)

Le rapport présenté par la Commission répond à l’exigence de la directive 2011/85/UE du Conseil sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres selon laquelle, pour le 31 décembre 2012 au plus tard, la Commission doit procéder à une évaluation de l’adéquation, pour les États membres, des normes comptables internationales pour le secteur public (IPSAS). Les IPSAS constituent actuellement le seul ensemble de normes comptables pour le secteur public reconnu au niveau international.

Contexte : la crise de la dette souveraine a accentué la nécessité pour les gouvernements de démontrer clairement leur stabilité financière et de communiquer de façon plus rigoureuse et transparente leurs données budgétaires. Le présent rapport examine l’un des outils nécessaires pour bâtir la confiance dans le système financier et pour mieux évaluer et prévoir la situation budgétaire, à savoir des normes comptables harmonisées pour le secteur public, qui soient fondées sur le principe des droits constatés. La comptabilité en droits constatés est le seul système d’information qui soit en mesure de donner un aperçu complet et fiable de la situation financière et économique ainsi que des performances d’une administration publique.

Cadre juridique : la directive 2011/85/UE exige des États membres qu’ils disposent de systèmes de comptabilité publique couvrant de manière exhaustive et cohérente tous les sous-secteurs des administrations publiques et contenant les informations nécessaires à la production de données fondées sur les droits constatés en vue de la préparation de données établies sur la base des normes du SEC 95. Elle reconnaît ainsi l’incohérence fondamentale entre les comptes du secteur public, qui n’enregistrent que les flux de trésorerie, et le fait que la surveillance budgétaire de l’UE repose sur les données fondées sur les droits constatés conformément au SEC 95. Il est donc nécessaire de convertir les données sur les règlements en données sur les droits constatés au moyen d’approximations et d’ajustements, y compris d’estimations à l’échelle macroéconomique.

La comptabilité en droits constatés dans les États membres de l’UE : la plupart des États membres appliquent déjà une comptabilité en droits constatés obéissant à des normes nationales dans l’ensemble du secteur public, ou sont sur le point de la mettre en place. Onze États membres disposent de systèmes mixtes dans la mesure où ils ont mis en œuvre des pratiques comptables différentes à différents niveaux de l’administration publique. Le cadre et les systèmes comptables des institutions européennes ainsi que de plusieurs autres organisations internationales reposent eux aussi sur le principe des droits constatés et s’inspirent des IPSAS.

Bien que la nécessité d’une comptabilité en droits constatés pour les administrations publiques au sein de l’UE et de ses États membres soit de plus en plus reconnue (même si elle ne fait pas encore l’unanimité), une approche harmonisée fait encore défaut.

Le cadre macrocomptable : le SEC, qui constitue le cadre statistique au niveau macroéconomique pour la comptabilité des secteurs public et non public dans l’UE, est fondé sur le principe des droits constatés. Les données relatives au déficit public et à la dette publique établies sur la base du SEC aux fins de la procédure de déficit excessif (PDE) résultent de la consolidation des comptes individuels des entités des administrations publiques dans les États membres et sont définies par la législation de l’UE.

Pour obtenir des données de qualité sur le déficit et la dette sur la base des droits constatés au niveau macrocomptable, il faut disposer, au niveau microcomptable, de données en amont qui soient de qualité, cohérentes et comparables. La microcomptabilité dans le secteur public connaît de nombreuses variantes dans les États membres, si bien que les comparaisons à l’intérieur des États membres et entre ceux-ci s’avèrent difficiles. La démarche actuelle de réconciliation de données comptables microéconomiques du secteur public qui ne sont pas harmonisées, pour les besoins de la procédure concernant les déficits excessifs, atteint ses limites.

Une harmonisation est nécessaire : pour les besoins de l’établissement des statistiques macroéconomiques sur les administrations publiques, la Commission estime que les données statistiques requises seraient considérablement améliorées si toutes les entités publiques appliquaient des normes comptables harmonisées. L’instauration de telles normes accroîtrait la transparence, la comparabilité et l’efficacité au regard des coûts et jetterait les bases d’une meilleure gouvernance dans le secteur public. À l’échelon des entités, elle présenterait des avantages en termes de transparence et de responsabilisation et améliorerait le processus de prise de décision, car les informations disponibles refléteraient, sur des bases comparables.

Future gouvernance des politiques budgétaires dans l’UE : le rapport note que le nouveau cadre de gouvernance (le «six pack», le nouveau traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, ainsi que le «two pack» en cours de négociation) prévoit une large coordination ex ante des budgets annuels des États membres de la zone euro et renforcera la surveillance de ceux qui connaissent des difficultés financières.

La réalisation de nombre des objectifs principaux présentés dans la directive 2011/85/UE du Conseil, tels l’accroissement de la transparence et de la responsabilité du secteur public, ainsi que la fourniture de statistiques budgétaires actualisées, plus fiables et plus comparables, requiert le développement d’un outil commun permettant d’établir une comptabilité et des rapports financiers détaillés et harmonisés.

Les coûts potentiels de l’harmonisation : sur la base des informations émanant des pays qui sont déjà passés à une comptabilité en droits constatés, il n’est possible d’avancer que des estimations très approximatives des coûts qu’auront à supporter les États membres, mais ils risquent d’être élevés. La Commission note toutefois qu’il convient de mettre en regard des coûts financiers prévisibles les avantages à attendre, en particulier une diminution de la bureaucratie, une meilleure gouvernance et une responsabilisation accrue, une gestion améliorée du secteur public et la transparence nécessaire au bon fonctionnement des marchés.

Adéquation des normes comptables internationales pour le secteur public (IPSAS) : les IPSAS reposent sur l’idée selon laquelle une gestion moderne du secteur public dépend de systèmes d’information de gestion capables de fournir des informations rapides, précises et fiables sur la situation et les performances économiques et financières d’un État.

Eurostat a réalisé une consultation publique entre février et mai 2012 en vue de recueillir des avis concernant l’adéquation des IPSAS. La conclusion générale qui se dégage est double: i) il apparaît clairement que les IPSAS ne peuvent pas être aisément appliquées «en l’état» dans les États membres; ii)  les normes IPSAS constituent une référence incontournable en cas d’établissement de comptes du secteur public harmonisés au niveau européen.

En particulier, à l’heure actuelle : i) les normes IPSAS ne décrivent pas assez précisément les pratiques comptables à suivre ; ii) la suite de normes n’est pas complète du point de vue de la couverture ou de son applicabilité pratique à certains types importants de flux publics, tels que les impôts et les prestations sociales ; iii) les IPSAS ne sont pas suffisamment stables, puisque certaines devront sans doute être révisées, probablement en 2014; iv) la gouvernance des IPSAS pâtit d’une participation insuffisante des autorités comptables du secteur public de l’Union.

D’un autre côté, la plupart des parties concernées s’accordent à penser que les IPSAS constitueraient un cadre de référence approprié pour le futur développement d’un ensemble de normes comptables européennes pour le secteur public (ci-après les «EPSAS»).

Vers des normes comptables harmonisées  (EPSAS) : la Commission considère qu’un certain nombre de mesures préparatoires sont nécessaires avant de prendre une décision au sujet du projet de création des EPSAS et de le mettre en œuvre dans les États membres. Il reste plusieurs questions importantes concernant des aspects qui ne font pas l’objet du rapport, tels que l’établissement du cadre EPSAS et la spécification d’un premier ensemble de normes EPSAS de base, ainsi que la planification de la mise en œuvre. La Commission devrait par ailleurs définir les étapes nécessaires du futur projet et tenir compte des aspects relatifs aux analyses d’impact.  Par ailleurs, seul un examen ex ante des avantages et inconvénients ainsi que des coûts et bénéfices probables permettra de prendre une décision.

Le processus pourrait comporter trois phases:

  1. une phase préparatoire consacrée au recueil d’informations et de points de vue et à la définition d’une feuille de route. Cette phase débuterait en 2013 et inclurait l’organisation d’autres consultations et d’une conférence de haut niveau ainsi que la préparation de propositions plus détaillées;
  2. une phase consacrée au développement et à la mise en place des modalités pratiques, portant sur des questions telles que les aspects financiers, la gouvernance, les synergies possibles, ainsi que les inquiétudes des petites entités publiques. Cette phase pourrait aboutir à la publication d’une proposition de règlement cadre. Le règlement cadre exigerait l’application du principe des droits constatés et planifierait le développement d’autres normes comptables spécifiques par la suite; et
  3. la phase de mise en œuvre: le processus de mise en œuvre devrait être progressif et prévoir un délai supplémentaire lorsque les normes comptables d’un État membre donné diffèrent sensiblement des EPSAS, bien qu’il puisse être envisagé que la mise en œuvre soit achevée dans tous les États membres à moyen terme.

Les prochaines étapes, qui doivent être lancées en 2013, tiendront compte de considérations liées à l’impact et incluront une feuille de route spécifiant en détail les mesures à prendre, y compris les mesures législatives, en vue de l’établissement de normes comptables pour le secteur public harmonisées au niveau de l’Union.