Objectifs du millénaire pour le développement - définir le cadre postérieur à 2015

2012/2289(INI)

La commission du développement a adopté le rapport d’initiative de Filip KACZMAREK (PPE, PL) sur les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) - définir le cadre postérieur à 2015.

Les députés rappellent qu'en 2015, un milliard de personnes, dont 70% de femmes, vivront avec moins d'1,25 dollar par jour, surtout dans certains pays africains. D’importantes mesures s’imposent donc pour relever le défi global de la pauvreté.

Les OMD et les nouveaux défis à relever : les députés affirment que les OMD définis en 2000 ont contribué à un grand nombre de réussites dans les pays en développement et à revenu intermédiaire, et qu’en 10 ans, le paysage mondial a radicalement changé, le fossé entre les inégalités s’étant largement creusé. Les députés demandent dès lors à l'Union européenne de prendre l'initiative, d'une seule et même voix ferme, pendant les débats sur le cadre pour l'après-2015 et jusqu'au sommet des Nations unies et d'adopter une position commune, efficace et ambitieuse sur les principes et les objectifs qui devraient faire partie du nouveau cadre de développement pour l'après-2015. Les questions clés qui devront être abordées en matière de développement et de durabilité devront être inscrites dans un cadre unique, complet et intégré, devront être universelles et promouvoir la prospérité, les droits de l'homme et le bien-être pour tous.

Les députés estiment que cette approche unifiée requiert une coordination adéquate entre l'Union européenne et ses États membres avant la présentation au Sommet de New York, à l'automne.

Ils préconisent également que les objectifs du cadre de développement pour l'après-2015 incluent à la fois les OMD et les objectifs du développement durable (ODD), et intègrent des objectifs spécifiques pour les femmes (qui n’ont pas vu leur situation progresser), les enfants, les personnes âgées et les personnes handicapées.

Les grands points qui devront être abordés dans ce contexte peuvent se résumer comme suit :

1)      éradication de la pauvreté : les députés insistent pour que l'éradication de la pauvreté, qui est l'objectif principal de la coopération au développement de l’Union européenne (CDP), et l'obtention d'un développement durable constituent les priorités mondiales impératives du programme de développement pour l'après-2015. Ils estiment qu'il est nécessaire de traiter les causes structurelles de la pauvreté pour permettre de changer réellement la société. Ils soulignent que l'inclusion est un concept dynamique qui va au-delà d'une stratégie "axée sur les pauvres" et implique un élargissement du champ pour inclure les populations vulnérables vivant dans la précarité. Pour les députés, il est essentiel de définir des indicateurs qualitatifs pour mesurer, à la fois, à quel point les progrès du développement sont inclusifs et durables et dans quelle mesure les besoins des groupes les plus démunis et les plus vulnérables sont pris en compte. Une définition de la pauvreté plus large que celle uniquement basée sur le produit intérieur brut (PIB) s’impose à cet égard ;

2)      la santé, la nutrition, l’éducation et la protection sociale : les députés demandent à l'Union de défendre vigoureusement le droit à atteindre le meilleur état de santé possible, y compris la santé génésique et sexuelle et l'intégration de la lutte contre le VIH/SIDA. Ils soulignent que le cadre pour l'après-2015 des OMD devrait consacrer un objectif spécifique à l'élimination de toutes les formes de violence à l'égard des femmes. Ils insistent tout particulièrement pour un accès à la couverture maladie universelle (CMU) -  associant à la fois une approche curative et une approche préventive -, l'accès universel à des aliments nutritifs en quantité suffisante et une éducation de qualité élevée à tous les niveaux en tant qu’objectifs majeurs du programme pour l'après-2015. Les députés demandent également un ciblage en matière de soins de santé de qualité, et des activités concrètes pour la prévention et le traitement des plus vulnérables. Ils demandent également des mesures en matière : i) de nutrition et de sécurité alimentaire, en tenant compte tenu du rôle des femmes dans ce domaine ; ii) de réduction de la mortalité maternelle et de la sensibilisation à la santé sexuelle et génésique ; iii) de scolarisation des femmes et des filles ; iv) de travail décent appuyé par la mise en œuvre de socles nationaux de protection sociale ; v) de lutte contre les maladies non transmissibles, comme le cancer;

3)      la bonne gouvernance : les députés déplorent le manque de cohérence entre les institutions de la gouvernance mondiale, notamment en ce qui concerne les architectures financières, environnementales et commerciales multilatérales. Ces déficits mondiaux en matière de gouvernance ont créé une fragmentation des politiques et une incohérence avec les régimes multilatéraux et les normes internationales. De manière plus générale, une action au niveau mondial est nécessaire dans ce domaine. Ils insistent pour que la communauté internationale s'attache particulièrement à créer un environnement participatif dans lequel les organisations de la société civile, le secteur privé, les fondations philanthropiques et d'autres acteurs indépendants du développement, ainsi que les parlements nationaux et les autorités locales soient en mesure d'assumer leurs responsabilités pour l'après-2015. Dans ce domaine, les députés réclament tout particulièrement une approche fondée sur les droits de l'homme, avec en ligne de mire la création d'un objectif général d'égalité, à la fois dans et entre les pays et une vision axée sur le triple objectif de défense de la paix, de la sécurité et du développement, en cherchant à renforcer les capacités des États fragiles et touchés par un conflit;

4)      la durabilité : les députés demandent que l'Union européenne contribue, de manière inclusive et transparente, au renforcement de la cohérence entre les objectifs de développement durable en matière sociale et environnementale et les objectifs de développement pour l'après 2015. Ils préconisent "un seul programme pour le développement", afin d'éviter la duplication des efforts et des ressources. Pour les députés, la durabilité constitue un défi majeur. Ils considèrent qu’il est probable qu'un échec dans ce domaine menace toutes les dimensions du développement humain, vu les liens inextricables entre l'énergie, l'eau, l'utilisation durable des sols, l'utilisation efficace des ressources naturelles, la protection et la biodiversité du milieu marin et d'autres écosystèmes, la déforestation, etc. et le bien-être humain. Les députés mettent notamment en avant l'accès universel à l'eau et à des services énergétiques durables et abordables.

Vers une position de l'UE sur le cadre de développement pour l'après-2015 : une fois encore, les députés rappellent l'engagement pris en vue d'allouer 0,7% du revenu national brut (RNB) à l'aide publique au développement (APD) d'ici à 2015 et insistent pour que ce niveau soit au moins maintenu dans le futur cadre. Ils demandent à tous les États membres de promulguer une législation contraignante à cette fin et d'adopter des calendriers budgétaires pluriannuels pour respecter cet engagement. Une fois encore, ils demandent la création de ressources propres, telles qu'une taxe sur les transactions financières, dont une part devrait figurer au titre IV du budget de l'Union européenne.

Dans ce domaine, les députés réclament des mécanismes de financement innovants avec les fournisseurs et le secteur privé pour créer de nouveaux partenariats. Ils demandent également à l'Union européenne de favoriser des marchés publics sociaux, éthiques et respectueux de l'environnement au niveau international pour la mise en œuvre du cadre pour l'après-2015.

Plus transversalement, les députés demandent que l’on augmente le revenu intérieur grâce à une fiscalité efficace et à la lutte contre la corruption. Il est urgent de mieux aider les pays en développement à mettre en place une politique budgétaire efficace et une assiette fiscale durable et de lutter efficacement contre l'évasion fiscale et les paradis fiscaux.

Les députés demandent en outre l’adoption d’urgence d'indicateurs autres que le PIB pour favoriser la prospérité et le développement comme l’inclusion d’un indice de développement humain, d’un indice numérique de pauvreté, d’un indice de l'écart de pauvreté et d’un coefficient de revenus Gini. La fixation de tels indicateurs sont en effet essentiels au suivi et à l'établissement de rapports sur les progrès accomplis en matière de lutte contre la pauvreté.

Les députés attendent par ailleurs du secteur privé qu’il contribue à sortir les habitants des pays en développement de la pauvreté. Ils demandent dès lors aux sociétés basées dans l'Union européenne qui disposent d'installations de production dans les pays en développement de respecter en toute transparence leurs obligations en ce qui concerne les droits et libertés de l'homme, les normes sociales et environnementales, l'égalité des genres, les normes fondamentales du travail. Á cet égard, ils réitèrent leur absolue opposition à toutes les formes de travail des enfants. Ils préconisent en outre le développement du commerce équitable.

Cohérence des politiques pour le développement (CPD) et coordination entre les donateurs : les députés insistent une fois encore sur le besoin de cohérence des politiques en s’orientant vers une approche plus intégrée dans ce domaine. Ils soutiennent l'idée d'instaurer un Conseil économique global dans le cadre du système des Nations unies. Ils se disent également favorables à un passage du concept d'"efficacité de l'aide" à un programme d'"efficacité du développement" associant aide au développement, aide à la fourniture de biens publics mondiaux et adaptation des structures de gouvernance mondiale. Dans ce contexte, l’UE devrait agir comme une force motrice assurant la complémentarité et la répartition des tâches au sein du processus de développement, de manière inclusive et transparente.

Orientations détaillées pour l'élaboration d'un cadre de développement pour l'après-2015 : enfin, les députés résument l’approche que le Parlement européen devrait défendre en vue d’une position cohérente de l'Union européenne dans ce domaine :

  • une architecture du programme de développement pour l'après-2015 reflétant les nouvelles difficultés et réalités mondiales, régionales, nationales et locales;
  • une définition du futur programme guidée par la pleine participation et l'appropriation des pays en développement et à revenu intermédiaire, tandis que les nouvelles responsabilités et charges créées devraient être partagées équitablement mais justement entre tous les pays;
  • un programme ambitieux, universel, de nature mondiale, pluridimensionnel et flexible, avec des objectifs adaptés à chaque pays, et un nombre limité de cibles et d'objectifs ;
  • le respect des principes de responsabilité mutuelle, de responsabilité, de transparence, de démocratie, des droits de l'homme, d'appropriation, de bonne gouvernance, d'état de droit, de paix et de sécurité, d'équité et de justice et d'égalité des genres;
  • la capacité de tous les pays en développement à sortir les personnes les plus vulnérables de la pauvreté et à lutter contre les inégalités tout en garantissant les principes des droits de l'homme;
  • l'élimination des inégalités entre les hommes et les femmes et l'autonomisation des filles et des femmes à tous les niveaux de la société;
  • le regroupement des dimensions économique, sociale et environnementale du développement durable;
  • la mobilisation de toutes les ressources financières possibles et de mécanismes de financement innovants, en accordant une attention particulière: i) à la lutte contre la corruption, les paradis fiscaux, l'évasion fiscale et les flux illicites de capitaux; ii) aux responsabilités des économies émergentes dans le programme de développement, en encourageant également la coopération Sud-Sud et triangulaire; iii) à l'amélioration des mécanismes de suivi; iv) à l'APD; et iv) à la CPD;
  • l’inclusion de partenaires extérieurs aux gouvernements nationaux afin de créer un environnement favorable à la promotion d'une véritable appropriation démocratique, ainsi qu'une association de la société civile;
  • une CPD toujours plus importante pour réussir le futur cadre;
  • des mécanismes clairs de responsabilité pour garantir que les pays respecteront leurs engagements.