Normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale. Refonte

2008/0244(COD)

Le Conseil a adopté sa position en première lecture sur la refonte de la directive du Parlement européen et du Conseil établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale.

La position en première lecture se fonde sur un compromis intervenu entre le Parlement et le Conseil. Ce compromis harmonise les normes d'accueil des demandeurs de protection internationale, notamment pour les personnes vulnérables qui ont des besoins particuliers en matière d'accueil. Il traduit en même temps la nécessité d'arrêter des règles qui permettent une mise en œuvre effective compte tenu des différents ordres juridiques internes et des règles qui permettent de contrer les abus en matière d'asile. Le compromis vise aussi à éviter aux États membres des charges administratives et financières inutiles.

Les principaux points de ce compromis peuvent se résumer comme suit :

A. Définition des "membres de la famille" et logement regroupé : le compromis assure la cohérence entre les différents instruments en matière d'asile en alignant la définition des "membres de la famille" sur celle qui a été retenue dans le cadre de la refonte de la directive relative aux conditions que doivent remplir les demandeurs d'asile. Par rapport à la définition figurant dans la directive actuellement en vigueur, qui couvre le conjoint du demandeur d'asile, ou son ou sa partenaire non marié(e), et les enfants mineurs non mariés, la définition est étendue au père, à la mère ou à l'adulte qui est responsable du demandeur, lorsque ce dernier est un mineur non marié.

La position adoptée par le Conseil en première lecture contient également de nouvelles dispositions concernant le logement regroupé. Tout d'abord, les États membres doivent veiller, dans la mesure du possible, à ce que les demandeurs adultes dépendants qui ont des besoins particuliers en matière d'accueil soient logés avec de proches parents adultes qui sont déjà présents dans le même État membre et qui sont responsables d'eux de par la loi ou la pratique en vigueur dans l'État membre concerné. Ensuite, les États membres doivent veiller à ce que les enfants mineurs des demandeurs ou les demandeurs qui sont des mineurs soient logés, pour autant que leur intérêt supérieur l'exige, avec leurs parents ou avec l'adulte qui en est responsable, ou avec leurs frères ou sœurs non mariés.

B. Placement en rétention : le compromis introduit un vaste cadre législatif régissant le placement en rétention des demandeurs de protection internationale. Ce cadre comprend des dispositions relatives aux motifs du placement en rétention, aux garanties offertes aux demandeurs d'asile placés en rétention, aux conditions de rétention et au placement en rétention de personnes vulnérables et de personnes ayant des besoins particuliers en matière d'accueil.

-          Motifs du placement en rétention : la liste des motifs de placement en rétention a été élaborée principalement pour contrer les demandes abusives tout en s’alignant sur les motifs de rétention qui figurent dans des instruments internationaux (recommandation du Conseil de l'Europe, notamment) ainsi qu’en liaison avec une procédure de retour dans le cadre de la directive "retour", pour préparer le retour et/ou poursuivre le processus d'éloignement. Dans ce cas, l'État membre doit justifier qu'il existe des motifs raisonnables de penser que le demandeur a introduit la demande de protection internationale à seule fin de retarder ou d'empêcher l'exécution de la décision de retour.

-          Garanties offertes aux demandeurs d'asile placés en rétention : une disposition a été introduite selon laquelle l'État membre concerné doit prévoir un contrôle juridictionnel accéléré de la légalité du placement en rétention ordonné par des autorités administratives qui peut avoir lieu d'office et/ou à la demande du demandeur de protection internationale, et le plus rapidement possible (les États membres doivent définir dans leur législation nationale le délai dans lequel doivent avoir lieu les contrôles). Afin de préserver le droit à un recours effectif, les demandeurs de protection internationale placés en rétention doivent être informés immédiatement par écrit des motifs de cette rétention et des procédures de recours, ainsi que de la possibilité de demander l'assistance et la représentation juridiques gratuites, dans une langue qu'ils comprennent. L'assistance et la représentation juridiques gratuites doivent être fournies par des personnes suffisamment qualifiées, reconnues ou habilitées par la législation nationale.

-          Conditions de rétention : les dispositions relatives aux conditions de rétention définissent les droits des demandeurs placés en rétention compte tenu de la pratique en matière d'asile. Dans cette optique, le placement en rétention s'effectue, en règle générale, dans des centres de rétention spécialisés. Dans la mesure du possible, ces personnes doivent être séparées des autres ressortissants de pays tiers. Si les demandeurs sont placés dans un établissement pénitentiaire, ils doivent toujours être séparés des délinquants. Indépendamment de leurs conditions de rétention, les demandeurs conservent leurs droits au respect de la vie privée dans le cadre de leurs communications avec des représentants ou des membres de la famille.

-          Placement en rétention de personnes vulnérables ou ayant des besoins particuliers : l'état de santé, y compris l'état de santé mentale, des demandeurs placés en rétention qui sont des personnes vulnérables doit être une préoccupation primordiale pour les autorités nationales. De plus, lorsque des personnes vulnérables sont placées en rétention, les États membres doivent veiller à assurer un suivi régulier de ces personnes et à leur apporter un soutien adéquat, compte tenu de leur situation particulière, y compris leur état de santé. Conformément à la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant, il est précisé que des mineurs ne peuvent être placés en rétention qu'à titre de mesure de dernier ressort et que des mineurs non accompagnés ne peuvent être placés en rétention que dans des circonstances exceptionnelles et ne doivent jamais être hébergés dans des établissements pénitentiaires.

C. Accès au marché du travail : le compromis réduit de 12 à 9 mois le délai dans lequel les demandeurs de protection internationale ont accès au marché du travail. Deux considérations qui se contrebalancent l'une l'autre motivent la décision d'avancer de trois mois le délai d'accès au marché: d'une part, l'idée que plus vite les demandeurs accèdent au marché, plus tôt ils deviennent indépendants sur le plan économique - et, partant, moins vulnérables à l'exploitation sur le marché noir et moins demandeurs d'assistance publique - et s'intègrent plus effectivement dans la société qui les accueille; et d'autre part, l'idée qu'un accès anticipé au marché est un élément qui pourrait inciter les migrants économiques qui ne remplissent pas les conditions pour pouvoir bénéficier d'une protection internationale à tenter de profiter du régime d'asile.

D. Conditions matérielles d'accueil : le compromis prévoit que, dans les cas où les États membres accordent aux demandeurs de protection internationale des conditions matérielles d'accueil sous la forme d'allocations financières ou de bons, le montant de ces derniers doit être fixé en fonction du ou des niveaux établis dans l'État membre concerné, soit par la législation, soit par la pratique, pour garantir un niveau de vie adéquat à ses ressortissants. Il est en outre précisé que les États membres peuvent accorder aux demandeurs d'asile un traitement moins favorable qu'à leurs ressortissants.

De surcroît, la position en première lecture prévoit un régime adapté pour la limitation ou le retrait du bénéfice des conditions matérielles d'accueil tout en garantissant aux demandeurs d’asile un niveau de vie digne. Ils sont aussi autorisés à limiter ou, dans des cas exceptionnels et dûment justifiés, retirer le bénéfice des conditions matérielles d'accueil lorsqu'un demandeur abandonne son lieu de résidence, ne respecte pas l'obligation de se présenter aux autorités ou lorsqu'il a introduit une demande ultérieure. En outre, un État membre peut limiter les conditions matérielles d'accueil lorsque le demandeur n'a pas introduit de demande d'asile aussitôt qu'il pouvait le faire.

E. Personnes vulnérables ayant des besoins particuliers en matière d'accueil : le compromis prévoit des dispositions pour les femmes victimes de mutilation génitale.

F. Assistance et représentation juridiques gratuites : les demandeurs de protection internationale pourront disposer d’un droit d'accès à un recours effectif pour attaquer des décisions relatives à l'octroi, au retrait ou à la limitation des avantages et des décisions portant sur le séjour et la liberté de circulation. En pareils cas, les conditions d'octroi d'une assistance et d'une représentation juridiques gratuites sont les mêmes que dans le cas du contrôle d'une décision de placement en rétention, sauf si le recours ne présente aucune probabilité réelle d'aboutir.

Sont également inclus dans le compromis, les éléments suivants :

  • les États membres ne peuvent subordonner l'octroi des conditions d'accueil à la fourniture de documents ou à d'autres formalités administratives inutiles ou disproportionnées;
  • les États membres doivent procurer aux demandeurs de protection internationale les soins médicaux nécessaires qui comportent, au minimum, les soins urgents et le traitement essentiel des maladies ou des troubles mentaux graves (surtout pour les demandeurs ayant des besoins particuliers);
  • les États membres doivent commencer à rechercher dès que possible après le dépôt d'une demande les membres de la famille du mineur non accompagné, le cas échéant avec l'aide d'organisations internationales, tout en tenant compte de l'intérêt supérieur du mineur;
  • les États membres doivent faire en sorte que les personnes qui ont subi des tortures, des viols, etc. reçoivent le traitement nécessaire, en particulier qu'elles aient accès à des traitements ou des soins médicaux et psychologiques adéquats. En outre, le personnel qui travaille avec ces personnes doit avoir eu et continuer à recevoir la formation appropriée et être tenu par les règles de confidentialité.